Obédience : NC Loge : NC 10/04/2010


Rassembler ce qui est épars

Quel travail ! La tâche du maçon est de chercher ce qui a été perdu, « rassembler ce qui est épars » et répandre partout la lumière.

On comprend mieux pourquoi le travail d’un maçon ne s’arrête jamais. Dans l’immédiat, tentons de rassembler ce qui est épars.

Si l’on s’en tient au mot, il s’agit de collationner ce qui se trouve dispersé, ce qui est en fait un message d’espoir dans la mesure où cela n’a pas disparu. Cela signifie également que l’objet final est le retour à l’unité ce qui indique trois choses :

  • L’unité a déjà existé.
  • Elle n’existe plus pour le moment.
  • Elle existera probablement à nouveau.

Dans le fait de rassembler, ne s’agit-il pas tout simplement de se retrouver grâce aux autres, une sorte de mutualisation. C’est ensemble que nous y arriverons. Lors de la cérémonie d’élévation au troisième degré, le premier surveillant qui tente de relever le corps dit « Tout se désuni », cela devient épars. Il fait état de son impuissance, seul il ne peut y arriver. Mais c’est grâce à l’union et aux cinq points parfaits de la maîtrise que nous pouvons à nouveau aller de l’avant. La Maçonnerie ne s’est pas créée seule, il a fallu être plusieurs donc, déjà se rassembler. De même, en loge, il y a plusieurs officiers, ce qui permet une unité. Rassembler ce qui est épars c’est recréer l’unité où elle semble avoir disparu. Rappelons-nous lors de l’initiation au troisième degré, on rentre à reculons, on est plongé dans le noir, il n’y a plus d’officiers, tout semble désuni. Il faut donc réorganiser, reconstruire.

N’est-ce pas non plus un message pour essayer de comprendre et de rassembler ce que l’on a appris et d’en faire une synthèse :

  • L’apprenti écoute et observe. Il a un rôle passif.
  • Le compagnon cherche, voyage, s’instruit. Il a un rôle actif.
  • Le maître réalise des plans, il construit, il met en place, il rassemble les expériences et les connaissances de l’apprenti et du compagnon. Cependant, il n’est ni actif, ni passif : il pense.

Mais qu’est-ce qui est épars ? La connaissance ? Mais quelle connaissance ? Elle évolue sans cesse. Ce n’est pas un puzzle classique où il suffit d’emboîter les pièces que l’on trouve, encore faudrait-il toutes les trouver. Les pièces évoluent, on s’en approche puis on s’en éloigne car ce qui semble être trouvé se transforme et amène à se poser une autre question. C’est une quête sans fin.

Dans les divers degrés d’instruction, le maçon découvre de nouveaux symboles, donc de nouvelles pièces mais il se rend compte également que chaque symbole peut avoir plusieurs sens. Ainsi, son regard d’apprenti, de compagnon ou de maître n’est pas le même. Dans la vie profane, il en est de même : les diverses expériences et connaissances acquises nous font jeter un regard différent sur la vie.

Mais ne serait-ce pas plutôt l’être humain qui est épars car en prenant la main du corps qu’il tente de relever, le 1er surveillant s’écrie « Tout se désuni ».

Mais faut-il se rassembler soi-même ou rassembler les autres ? Cela ne serait-il pas un désir constant de créer une chaîne d’union universelle ? Ou est-ce soi-même qu’il faut rassembler car il me semble aller dans tous les sens, je m’éparpille. Il s’agit donc de s’améliorer tant intellectuellement que physiquement. N’est-ce pas prendre un nouveau départ, se recréer, un peu comme une nouvelle naissance ou plutôt comme une renaissance ? Ne faut-il pas rapprocher cela du mythe d’Osiris. En effet, Seth découpa le corps d’Osiris en quatorze morceaux qu’il répandit à travers la terre d’Egypte. Isis, son épouse, retrouva les morceaux épars du corps divin et les recueillit. Le corps fut reconstitué par les Dieux et Osiris fut ainsi reconstruit, réanimé et revivifié.

Il faut arriver à rassembler les éléments pour avoir une vue d’ensemble, pour comprendre autre chose, quelque chose qui n’est pas au-dedans, ni au-dehors mais au-dessus.

Il s’agit de trouver un moyen de relier l’intelligence à l’esprit. La connaissance est importante, encore faut-il savoir l’interpréter. Avec de l’uranium, on peut produire de l’énergie, pour nous éclairer ou nous détruire. Face à une création artistique, nous avons des approches différentes selon nos différentes connaissances mais également selon notre sensibilité. Notre esprit n’est-il pas un mélange de rationnel et d’irrationnel ?

« Rassembler ce qui est épars », je dois confesser que je n’y suis pas arrivé mais cela m’a ouvert d’autres voies, d’autres pistes. J’ai l’impression de toucher, d’approcher des idées sans pouvoir totalement les définir, ce qui est assez difficile à appréhender pour un esprit cartésien. De plus, j’ai le sentiment de ne pouvoir jamais y parvenir ou de ne pas vouloir y parvenir car cela serait synonyme de fin, or le monde ne s’arrête jamais et cette quête me donne l’envie de découvrir, de rechercher et n’est-ce pas là le plus important ? Comme nous le rappelle Sénèque dans les « lettres à Lucilius » : « Celui qui cherche la sagesse est un sage, celui qui croit l’avoir trouvée est un fou ».

Le maître que je suis dans la vie professionnelle apprend chaque jour, que ce soit dans le domaine artistique, technique ou humain. Je suis donc toujours dans l’apprentissage.

Le maître que je suis dans la vie maçonnique me fait trouver régulièrement en loge de nouveaux messages. Je suis également toujours dans l’apprentissage et essaie de rassembler ce qui est épars.

Cette quête n’est-elle pas à rapprocher de la définition de l’idéal proposée par un Frère que je cite « L’idéal est une conception de l’esprit mais qui part d’un réel vrai pour arriver à un réel en puissance ».

J’ai dit Très Vénérable Maître

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