Obédience : NC | Loge : NC | 29/11/2012 |
Les Cinq Points Parfaits de la Maîtrise Lors de l'exaltation au grade de Maître, moment essentiel de l'initiation, un rite surprenant est pratiqué : « les cinq points parfaits de la maîtrise ». Le grade de Maître représente une rupture par rapport aux 1er et 2ème degrés dédiés au travail de la pierre, initiation structurée autour de l'outillage symbolique des ouvriers. L'exaltation au grade de
Maître, elle, est d'un genre allégorique dans
lequel la légende d'Hiram est
théâtralisée ; une dramatisation
servant de support à la cérémonie de
réception. Au sein de la Franc-maçonnerie
spéculative, les 5PPM sont indissociables de la
légende d'Hiram. Cette légende est fondée sur un symbolisme traditionnel fondamental : celui d'une mort suivie d'une résurrection ou plus précisément d'une re-naissance. A vrai dire, ce symbolisme se trouvait déjà dans la cérémonie au 1er degré : le passage dans le cabinet de réflexion qui illustrait déjà la nécessité d'une mort symbolique à la vie profane, d'une descente dans les ténèbres pour accéder à une vie nouvelle. L'initiation aux 1er et 3ème degrés place le récipiendaire aux deux extrémités de la vie : la naissance au grade d'Apprenti, la mort au grade de Maître. A une mort symbolique, il y a en réponse une résurrection toute aussi symbolique. Le principe de cette résurrection implique d'être précédée de la dissolution des corps comme pour confirmer que la mort a bien achevé son œuvre. La putréfaction ou la décomposition qui commence dès que la vie s'est arrêtée. Bien avant le christianisme, l'idée de résurrection existait déjà dans l’Égypte ancienne avec le mythe d'Osiris. Dans nos sociétés, ce mot relève du vocabulaire chrétien. Il signifie que s'effectue, après la mort, une forme de retour soit à la vie terrestre (sous un aspect charnel comme Lazare), soit à la vie céleste (à l'image du Christ). Pour la Franc-maçonnerie, cette résurrection correspond au relèvement et au redressement du corps du nouveau Maître obtenus par la réunion des forces humaines représentées par le T\V\M\, les 2 Surveillants et l'ensemble des F\F\ de la Loge. Constatant sa disparition, les Maîtres partent à la recherche de l'Architecte et découvrent son corps par un rameau d'acacia planté sur la terre fraîchement remuée. Déjà un symbolisme de résurrection s'allie étroitement à celui de mort et de putréfaction. Après avoir reconnu sa dépouille, le T\V\M\ décide de la transporter dans l'enceinte du Temple. Le Second Surveillant, à qui le T\V\M\ a demandé de soulever le corps par l'attouchement d'Apprenti, constate : « la chair quitte les os ». Le 1er Surveillant, en tentant l'attouchement de Compagnon, rapporte : « tout se désunit ». Hiram est en état de décomposition. Pour le futur Maître, identifié à Hiram gisant dans son cercueil, c'est l'épreuve de la terre où, mort à lui-même, il incarne la dépouille inerte du Maître assassiné. Le Compagnon est introduit dans la légende d'Hiram en ignorant tout de son rôle dans la dramaturgie qui va se jouer et c'est à reculons et dans la pénombre que va s'opérer le changement. La particularité de cette légende est de comporter un jeu complexe de substitutions successives entre les différents personnages de ce drame symbolique. Le Compagnon subit deux substitutions : la première, dans son introduction dans la légende en devenant Maître Hiram, et la seconde, après la découverte de la tombe où il est redressé par les 5PPM, en revenant à lui-même investi du statut de Maître. « Mes Frères Surveillants, souvenons-nous que l'union fait la force et que sans le secours des autres nous ne pouvons rien. Puisque vous n'avez pas réussi dans vos tentatives, il nous reste à essayer un troisième moyen en soulevant le corps par les Cinq Points Parfaits de la Maîtrise et je vais y procéder avec votre aide ». Après avoir prononcé ces paroles, le TVM, s'approchant du cadavre et aidé des 2 Surveillants, relève le gisant à la verticale pour lui communiquer les mots substitués qui lui permettront de poursuivre son chemin en attendant que la Parole perdue soit retrouvée. Lors du relèvement, le TVM « rassemble ce qui est épars », le corps décomposé, à l'instar d'Isis qui reconstitua celui d'Osiris. Mais quels sont donc ces 5PPM pour exalter un Maître qui aura 7 ans et plus ? 1°-Se prendre mutuellement le poignet droit en formant la griffe : Le TVM saisit fermement le poignet du futur Maître avec sa main droite en formant la griffe ou patte de lion afin de relever le corps sans vie du récipiendaire. Un bas-relief du temple de Denderah, en Égypte, montre un lion tenant la croix de Ankh -croix de vie- dans sa patte droite et, de sa patte gauche, tirant Osiris allongé sur le sol. Cette première phase est le relèvement, mouvement de levier qui permet le passage de l'horizontalité -mort spirituelle- à la verticalité -renaissance spirituelle. Ce premier point marque en lui l'aide et l'assistance que nous jurons à tous nos F\F\, le transfert des énergies vitales pour ramener le mort à la lumière. Ce geste préfigure le premier élan vers celui qui est en péril et que l'on accueille pour le ramener à soi. 2°-S'approcher réciproquement du pied droit par le côté intérieur : C'est de cette façon que s'opère le redressement du Maître. Le pied droit (primauté de la raison) est le point d'appui ; il donne l'assise, assure l'équilibre, consolide la verticalité en le mettant « debout », posture qui le caractérise. Elle témoigne de la vie réelle de l'homme. A l'inverse, l'homme à l'horizontale représente une vie en sommeil, une vie au ralenti ou la mort. 3°-Se toucher réciproquement le genou droit : Le genou est signe d'humilité par le fait qu'il nous conduit, par son fléchissement, à marquer notre soumission et notre respect envers les engagements que nous prenons, les travaux d'Apprenti et de Compagnon que nous avons effectués genoux à terre. Le T\V\M\ prolonge ainsi, par ce 3ème point, la transmission du processus énergétique qui trouve sa source avec le pied droit. 4°-Rapprocher les poitrines du côté droit : Ce rapprochement exprime l'union étroite des cœurs dans la joie comme dans la peine que peuvent connaître tous nos FF. Cette position, témoignage de l'affectivité existante, signe de proximité et d'échanges, donne tout son sens à cette union, dans toute l'acception du mot « épauler », au sens maçonnique du terme. Elle rappelle qu'à tout moment de notre parcours, nous ferons face à de nouvelles épreuves, ferons de nouvelles chutes nous prouvant, s'il en est besoin, que nous avons le devoir de nous épauler. 5°-Poser réciproquement la main gauche sur l'épaule droite dans le dos pour se tenir plus étroitement et s'attirer l'un à l'autre. C'est à ce moment-là que le TVM donne au futur Maître le baiser fraternel et lui communique à voix basse les syllabes composant le Mot Sacré, échange d'un secret lié à l'amour fraternel, reflet de l'entraide pour avancer sur le chemin de la connaissance. La main passée sur l'épaule nous ramène à notre devoir de prévenir la chute d'un Frère et de ne pas attendre qu'il soit tombé pour lui venir en aide. Au cours de l'étreinte mutuelle des 5PPM, les points d'appui et les forces mécaniques exercées assurent la transmission des énergies vitales du vivant vers le mort, obtenant ainsi la résurrection d'Hiram. Mais ce dernier n'est pas ressuscité à proprement parler : il s'est réincarné en la personne du nouveau Maître qui, en acceptant de sa propre et libre volonté de s'identifier à lui, permet de faire vivre la légende. La mort d'Hiram nous montre que l'étape de la mort est nécessaire à la vie ; la nature doit mourir en hiver pour renaître au printemps. La mort est l'ultime et inséparable objet de la vie et non une damnation. La victoire de la vie sur la mort, de la lumière sur les ténèbres se trouve sublimée par ce conte légendaire. « Il faut savoir mourir pour naître à l'immortalité » résumait Gérard de Nerval dans Le Voyage en Orient, évoquant la mort d'Hiram. Transfiguré par la lumière de l'initiation, le Maître renaît, purifié des passions grossières des mauvais compagnons que sont l'Ignorance, le Fanatisme et l'Ambition. « Le Maître est retrouvé et il reparaît aussi radieux que jamais ». Mais pourquoi 5 points et en quoi sont-ils parfaits ? L'expression Cinq Points Parfaits de la Maîtrise serait une transcription française tardive du XVIII°siècle de l'appellation anglaise Five Points of Fellowship apparue en 1696 dans le manuscrit d’Édimbourg. Le temps aidant, l'usage en aurait fait un signe de reconnaissance des Compagnons en lui donnant un sens moral significatif avec les devoirs de solidarité et d'entre-aide que chacun est en droit d'attendre de l'autre. La traduction de cette expression anglaise en Cinq Points Parfaits de la Maîtrise tient à l'esprit de la Franc-Maçonnerie française qui a su, en renommant ce symbole, lui donner tout son sens. Cinq points par référence au nombre 5 dont la valeur symbolique nous éclaire, nombre omniprésent dans la Loge : •cinq comme les cinq
pointes de l’Étoile flamboyante placée
cette fois à l'Occident avant la descente du Compagnon dans
le monde des ténèbres. C'est en cela que ces cinq points doivent être parfaits comme doit être parfait le temple à édifier. Parfaits parce qu'ils unissent la nature humaine à la nature spirituelle du nouveau Maître : poursuivre le travail de recherche de la Parole perdue, transmettre, nous perfectionner et acquérir, à notre rythme, d'autres connaissances. Les 5 PPM remplissent donc cinq fonctions symboliques : -le maintien du redressement du
corps dans la posture verticale D'aucuns pourraient s'interroger sur l'application de 5 points et non 7, le nombre du Maître. Je ne m'avancerai que très prudemment sur cette notion en évoquant les 2 attouchements supplémentaires des 2 Surveillants. 5+2 = 7 (?). Mais ces deux derniers points ne sauraient être parfaits, me semble-t'il, puisqu'ils ont échoué lors de la tentative de relèvement de la dépouille du Maître. Nous pouvons percevoir dans les 5PPM des notions de mouvements tels que passage, rassemblement, transmission : -la notion de passage : sur le
plan matériel, du plan horizontal au plan vertical. Sur le
plan spirituel, le passage d'un état de conscience
à un autre état de conscience. Car seule mort du
vieil homme permet la renaissance de son être
intérieur. L'exaltation est un nouveau départ, non un aboutissement. Elle vient compléter l'initiation du Maçon. Ce n'est qu'après avoir été reçu au grade de Maître que le Maçon pourra entreprendre la poursuite de son cheminement initiatique. Le nouveau Maître n'a encore rien construit, le rituel est là pour le lui rappeler (7 ans et plus) ; il n'y aura donc aucune limite à sa démarche initiatique. Elle est le début d'une longue quête qui va lui permettre, dans les tréfonds de sa conscience, d'entamer son voyage individuel, mais également collectif, à la recherche de la Parole perdue qui l'aidera à trouver son propre chemin, à exalter sa personnalité et à accéder à sa propre spiritualité. J'ai dit, T\V\M\ A\ R\ |
7337-B | L'EDIFICE - contact@ledifice.net | \ |