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La Règle

J’ai choisi de vous présenter un travail sur la Règle …
Pourquoi ce choix ?    C’est la question que je me suis posée après avoir cherché un thème, puis finalement je ne me suis dit pourquoi pas. D’autant qu’il y a quelques mois un de mes Frère dans ce respectable atelier nous disait la Règle, c’est la loi, et la loi est dure mais c’est la loi. Autrement dit il faut l’accepter et surtout on ne  discute car c’est la loi.
Pourquoi pas mon Frère …Sans doute as-tu raison.
Mais je vous l’avoue franchement mes Frères …
La Règle est un outil qui m’intrigue par son exigence et sa droiture, et j’irai même un peu plus loin  en disant, que la Règle est un outil qui me dérange. Et pourtant… malgré cela, sur cette route que me trace cette règle, j’essais de rectifier ma conduite, en la dépassant, et en me dépassant.

Traiter de la Règle, est-ce traiter de l’objet, ou de l’attitude face à l’objet ?...
Mon discours sur la Règle, est celui d’un être, en tension perpétuelle vers son idéal.

Alors dans ma quête d’un certain idéal, je vais m’attacher à :
     - évoquer la Règle,
     - dire pourquoi je m’en méfie,
     - dire pourquoi je l’accepte.

Mes FF\ je ne vais qu’effleurer le sujet, car frustré de devoir abandonner, des pans de ma recherche, par un trop de matériau.

La Règle
Du latin régula ou Norma, norme, précepte
Du Grec Déon (déontologie)
La Règle est née avec le Monde après le chaos. Ordo ab chao.
Elle est action qui ordonne, principe de vie, principe d’harmonie, art de la mesure.

Au sens premier
C’est l’instrument qui, selon les différents métier qui l’utilisent, s’est complexifié, pour passer de la simple planchette servant à guider le crayon, puis à mesurer une longueur grâce à des graduations, pour passer à des instruments, formés de plusieurs règles mobiles entre elles et même, avec des ajouts de visée.

C’est l’Alidade du géomètre, la règle à calcul, la sauterelle qui mesure l’angle, le vernier circulaire qui mesure les arcs.
Dans la tradition, la Règle c’est l’outil de la construction du Temple, l’héritière de la coudée (la plus connue est la coudée sacrée, ou coudée pyramide, elle servit à la construction des pyramides et du Temple de Salomon). Elle présente les rapports qui ouvrent un chemin de réalisation. Elle est elle-même, un chef d’œuvre qui permet de construire tous les chefs d’œuvres, tous les monuments.

Les bâtisseurs de cathédrale utilisaient la « Virgula géometrica «, la Règle graduée pour mesurer les pierres. »
L’unité de mesure était le «  pied »  employé pendant plus d’un siècle par la même loge de bâtisseurs.  
Chaque maître portait sa propre mesure gravée sur une équerre métallique, qui ne le quittait jamais.
Cette mesure, ce «  pied », règle des bâtisseurs, transmise de Maître d’œuvre en Maître d’œuvre, constituait le trésor de la Loge.

Fondée sur cette mesure, la canne du Maître d’œuvre, comportait un nombre déterminé de pieds, adaptés au nombre symbolique, du bâtiment à construire.
Cette canne  a pris le nom de « Pige », d’où l’expression « avoir bien pigé », « bien mesuré ».
Le Maître faisait la pige, c’est à dire, coupait la règle pour les membres de sa loge en fonction de l’œuvre à accomplir.
Aujourd’hui la Règle est brodée sur le sautoir du grand expert avec l’œil et l’épée.

Au sens Figuré
La Règle c’est ce qui est imposé ou que l’on adopte comme guide, comme ligne directrice de sa conduite. D’où la distinction entre ce qui est imposé, et ce que l’on s’impose !... La Règle est loin d’être innocente, en particulier pour nous FM\

D’une part :
Il est question d’hétéronomie, avec l’assujettissement à des règles imposées par une contrainte extérieure - un dogme, par exemple, par conformité, ou espoir d’un salut, et de ses corollaires, le manquement, la dérogation, le péché même ! En hébreu le terme  « péché » signifie se perdre, quitter la voie droite, se dévoyer.

D’autres part 
:
Il est question d’autonomie : Chacun se détermine selon des règles librement acceptées, en accord avec un code, une discipline, une méthode…, en découlent les concepts de responsabilité, de libertés de morale, d’éthique, et de devoir. Ce devoir que Paul Ricœur figure ainsi : » La perception de l’honneur, l’acceptation de l’autre et de ses différences, dans le respect réciproque, le progrès partagé, le sens de la justice et de l’équité, celui de la responsabilité d’homme libre et de bonnes mœurs. »

Alors me diriez vous mes FF\ Pourquoi je m’en méfie ?

Pourquoi se méfier de la Règle

 De tous les outils en notre possession c’est celui qui immédiatement fait référence :
Ordre, Loi, Justice, Autorité, Pouvoir, Vérité.

Il s’agit de l’outil le plus rigide, et en même temps le plus virtuel, le plus droit, le plus directif , mais aussi le plus allusif, susceptible d’interprétations.

- La Règle gouverne nos vies, mais « est-ce un bon gouvernement « ?
Le pouvoir de la Règle n’est pas un pouvoir nuancé, c’est celui qui nous oblige à plier, devant la Règle,… « Parce que c’est la Règle. », comme disait mon F\ 1er surveillant.
La Règle c’est un substitut des lois naturelles, mais de celles qui demeurent les plus oppressives.
La Règle c’est cette phrase de Goethe : «  Mieux vaut une injustice qu’un désordre »
à Cette phrase je réponds,…Quelle injustice n’est pas fondamentalement un désordre !
C’est le refus d’apprécier ce qui est particulier, au profit de la norme, car la Règle couvre avec indifférence le bon comme le mal.
Elle est symbole d’exclusions et de rejets.

Au nom de la Règle…On tue, on exclut, on déporte…
L’histoire de la Règle est souvent sanglante,…. mais on continue à la respecter…
Le mal commis au nom de la Règle a sans doute coûté plus, en vies humaines, que le désordre.
C’est toujours au nom de l’Ordre, de la Loi, et de là Règle, que l’on fait le mal.
« Faire les choses librement et en conscience » écrit Kant.
Dans certaines situations, le choix se révèle ardu, et l’obéissance avec une direction imposée, nous  apparaît bien reposante.
Ils n’étaient pas tous Nazis, ceux qui leur obéissaient, ils acceptaient de s’incliner devant les ordres,…. alors que les insoumis nous ont permis de retrouver la Lumière.

Mes FF
\, je vous ledemande «  les bienfaiteurs de l’humanité n’étaient-ils pas des insoumis à la Règle « ?
Quel groupe humain ne nous demande pas ouvertement ou insidieusement de démissionner, de renoncer à notre propre jugement, pour en adopter un autre ?
En ce sens, toute l’aventure humaine, avec son inévitable dressage est une aventure désespérée.
Le désespoir est au cœur de notre destin,….Nous ne pouvons vivre seul avec l’impuissance de la solitude, et en groupe sans se compromettre.

La Règle est donc bien pour nous Francs-Maçons, un outil difficile à manier.
Avant de l’accepter, elle réclame beaucoup de réflexion.

Mais alors pourquoi l’accepter !

Mais parce qu’elle est à l’image de l’Echelle de Jacob, de l’Arbre de la connaissance de Descartes qui disparaissent dans les nuages  comme l’horizon qui ne s’atteint jamais.
La Vérité inconnaissable se devine, et si elle est la fin à viser, elle est bien sûr, sans cesse à reconquérir. «  Parce que nous serons heureux, nous aurons la morale » comme le dit si bien  Spinoza.
« Que la joie soit dans nos cœur « proclame le Frère second surveillant.
La Règle, rigoureuse, redresse nos hésitations quand il s’agit de choisir, en toute liberté « la Morale et le Devoir. »
La Règle n’est donc pas l’absence de volonté, ou l’abandon devant une puissance Tutélaire…..
Tout  au contraire, elle est obligation morale.
Pour se construire soi-même, il y faut :
La volonté, la connaissance, et la liberté associée à la responsabilité.
Cette Règle armure morale, est bien le compagnon indispensable. Elle nous protège des égarements lors de la descente en nous-mêmes, elle se dresse lorsque nous mettons en pratique le «  Retournement « nécessaire à la connaissance de soi, ce que Socrate et Michel Foucault nomment le «  Souci de Soi. « 

La Règle est la liberté qui transforme l’obligation extérieure en obligation intérieure.
Elle structure notre pensée, lors des différents voyages de nos élévations, et jalonne ce qui autrement, serait une errance sans fin. Cette Règle nous permets de faire la différence entre le Bien, et le Mal. 
En somme, la Règle nous aiguillonne pour que l’Agir, en toute connaissance, en toute conscience se situe sans cesse dans la dynamique du travail sur Soi et avec l’Autre.
Apprendre à réfléchir, à mesurer sa réflexion tout au long des 24 divisions.

La Règle mesure le temps, de midi à minuit, elle mesure une vie d’homme.

Elle est symbole de toutes les hésitations, mais aussi des avances de l’esprit :
    -                     24 arrêts de jugement face à l’erreur,
    -                     24 retours sur soi-même,
    -                     24 fois, pouvoir se reprendre lorsqu’on a échoué,
    -                     24 poses pour la conscience du Franc-Maçon qui réfléchit au bien et au mal, qui hésite, dans la recherche de la Lumière.
    -                     Sénèque disait à son disciple «  Même si tu recule, ne recule que lentement, et les mains en avant. »
Même dans l’échec et la détresse, mes Frères Reculons lentement, mesurons nos pas en arrière, avant de repartir en avant.
La Règle nous est confiée pour mesurer les efforts et les étapes successives de notre propre évolution. De midi à minuit nous sommes invités à travailler.

Ces 24 heures de la vie d’un Maçon sont aussi les manifestations de la Vie.

C’est l’œuvre alchimique, le Grand œuvre que symbolisent ces deux fois douze heures, ou 3 fois 8 heures.
C’est le plomb de la manifestation terrestre, que nous devons travailler sans relâche, et grâce à la montée progressive du levain, transformé en OR.

Mais alors comment trouver « la Règle d’OR » ?

Peut être en m’inspirant de ces deux paroles qui font écho en moi :
L’une est de Saint Jean qui dit, 
« Si vous m’aimez, vous observerez mes  commandements « 
L’autre est de Saint Augustin
«  Aime et fais ce que tu veux « 

Vénérable Maître
J’ai dit.

J\ M\


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