Obédience : NC | Loge : NC | Date : NC |
Les trois mauvais compagnons Les trois mauvais compagnons sont des personnages essentiels de la légende d’Hiram qui par sa richesse en symbole est devenu le mythe fondateur du grade de maître. Quel est ce mythe ? Les travaux du temple de Jérusalem s’achevaient, mais les compagnons d’Hiram n’avaient pas tous été initiés aux secrets du grade de maitre. Trois d’entre eux décidèrent de les lui arracher. Postés chacun à une porte différente du temple, ils sommèrent tour à tour Hiram de leur livrer ses secrets. Le maître répondit successivement à chacun d’entre eux, en fuyant d’une porte à l’autre, qu’on n’obtiendrait pas sa parole par des menaces et qu’il fallait attendre le temps voulu. Alors ils le frappèrent, l’un d’un coup de règle sut l’épaule, l’autre d’un coup de pince sur la nuque, et le troisième d’un coup de maillet sur le front. Ils cachèrent le corps dans la nuit et plantèrent sur sa tombe une branche d’acacia. Salomon qui apprit la disparition d’Hiram, envoya neuf maitres à la recherche du corps. Ils découvrirent celui-ci grâce à la branche d’acacia planté dans la terre, mais il était déjà en état de putréfaction. Deux des frères tentèrent de le relever par les attouchements d’apprenti et de compagnon, mais le cadavre se disloqua ; Le troisième le saisissant par les cinq points parfaits de la maitrise réussit à le relever. Un nouveau maitre renaît. Relaté simplement, en dehors du contexte de l’élévation à la maitrise, la légende d’Hiram ne semble pas pouvoir prêter de grands développements. En revanche, lorsqu’elle est mise en scène dans le cadre du rite, elle se superpose au parcours du compagnon en train de vivre la dernière phase de son initiation et acquiert par là une très grande richesse. Le mythe décrit une vérité essentielle ; elle n’est pas seulement une traduction didactique et intellectuelle, elle doit être vécue dans un passage progressif de la symbolique mythique à la symbolique spirituelle et doit nécessairement s’incarner. Dans le meurtre d’Hiram, il y a substitution des rôles : les deux éléments opposés Hiram et les mauvais compagnons se rejoignent. Ainsi Osiris a besoin de son frère Set qui le découpe. Comme le christ a besoin de Judas qui le trahit. Le personnage de judas qui avait toute la confiance de jésus parait aux exégètes plus comme le complice de l’achèvement de la dramaturgie christique que comme le traitre vénal universellement stigmatisé ; Le suicide de judas effaçant toute preuve démontre que le traitre ou l’assassin nécessaire au drame est lui-même victime. On comprend alors que les mauvais compagnons font partis de nous même. Rappelez vous l’épisode du miroir lors de l’initiation, il illustre bien la duplicité de soi même. Hiram, en cette tradition ésotérique, représente la connaissance signifiée par la lettre G révélée lors de la réception au grade de compagnon, c’est à dire la Gnose comme instrument essentiel du statut de L’homme. La lecture allégorique du mythe montre qu’Hiram perd son corps lors du premier coup avec la règle qui pourrait symboliser la loi que le mauvais compagnon a transgressé, son âme par le deuxième coup sur la nuque lieu de la transmission de la pensée, et son esprit par le troisième coup fatal avec le maillet sur le front, siège de l’intellect. L’ignorance, l’hypocrisie (ou le fanatisme) et l’envie (ou l’ambition) sont à l’origine du comportement assassin des trois compagnons. Mais il renaitra grâce à ses qualités antithétiques : le savoir, la tolérance et la générosité. Les trois compagnons symbolisent évidemment les poisons que sont l’ignorance, la colère, l’orgueil, la convoitise et la jalousie. Tout ceci correspond à des traits et à des pulsions de tout homme obstiné par des objectifs de puissance et de gloire, ou simplement imbu de satisfaction personnelle. Attitudes que nous cherchons à dominer pour vaincre notre propre nature et avancer sur le chemin de la vérité, ceci faisant référence à un passage du rituel : « que venons nous faire ? Vaincre nos passions… » L’image de devoir se délester de ses vices afin de permettre l’élévation spirituel se retrouve dans certaines religions telle que le bouddhisme. La maîtrise de ces trois poisons (ainsi nommés dans le bouddhisme), l’ignorance, la jalousie, la haine, est l’un des premiers enseignements que doit acquérir le jeune moine prétendant au nirvana avant la prise de conscience de l’impermanence de la vie. Sans le renoncement à ses trois poisons, il n’est pas possible au bouddhiste d’acquérir leur maitrise il s’agit la d’une étape fondamentale indispensable, incontournable pour pouvoir progresser. Remarquons aussi que les mauvais compagnons frappent Hiram à l’aide d’un outil, ce qui révèle le double aspect de nos symboles ; chaque instrument peut construire à la perdition, tout dépend de notre intention. On peut souligner le manque de précision dans l’utilisation des outils qui révèlent le manque de maitrise et ainsi prouve que les 3 compagnons n’étaient pas encore prêts pour être élevé à la maitrise. Remarquons aussi que la mort du maitre Hiram est totale : corps, âme, esprit. Le récipiendaire doit s’emparer de cette symbolique pour tuer ces vices intérieurs qui peuvent l’empêcher de renaitre en un nouvel homme, c’est donc lui qui tout à tour représente chacun des trois compagnons : il est lui-même le meurtrier d’Hiram. Il tue et ainsi se libère de trois de ses défauts pour renaitre aussi radieux que jamais. Hiram est la personnification de toutes les qualités que doit posséder un maitre maçon : la domination de ses pulsions, la connaissance de soi même, la maîtrise, la volonté inflexible de respecter les valeurs morales, de rester fidèle à son devoir même au prix de sa vie, enfin de travailler toute au long de son existence à une amélioration personnelle, à son perfectionnement. Le premier message du rituel d’élévation nous dit qu’aveuglés par nos désirs, nous pouvons choisir de devenir un mauvais compagnon et notre fragilité est soulignée par le fait que ce sont les trois lumières de la loge, celles en qui nous avons le plus confiance (premier, second surveillant et le vénérable maître), qui occupent les rôles d’assassins. Le futur maitre a découvert des hôtes en lui dont il ignorait l’existence ou peut être, dont il préférait ignorer l’existence. Il s’est aperçu que les mauvais compagnons tapis en lui, n’attendaient que l’occasion de le frapper, paralysant son action, stérilisant ses sentiments, inhibant son esprit et risquant au total de tuer dans l’œuf ce nouvel homme qui allait naître. La lumière de l’étoile lui a révélé les dangers qui le guettent et qui le frapperont sûrement, car personne n’est épargné. L’autre message nous apprend que la transgression est ontologique. En tuant le maitre, les trois mauvais compagnons perpétuent le crime rituel, présent dans toutes les traditions. Ils nous soulignent ce qui est immuable et intrinsèque à toutes vies : la rupture de la transmission ; l’élève doit assassiner son maitre et se réapproprier son savoir. Cette rupture nécessaire constitue l’essence de la démarche initiatique et annonce sa méthode : il faut qu’Hiram meure et que son corps soit découvert en état de décomposition pour que s’accomplisse le cycle mort-renaissance, pourrissement-régénération. La rupture de la transmission peut être vécue comme un drame à un premier niveau de lecture. C’est la perte des repères, le chaos. A un autre niveau, elle signifie le changement de cap ou un changement d’état. Ce changement est nécessaire pour l’élévation vers l’esprit. Par son sacrifice, le compagnon provoque une irruption du sacré dans le profane qui le transcende. Cette prise de conscience d’un passage à quelque chose de supérieur, permet de vaincre toute forme d’angoisse face à la mort. Ainsi « la vie est dans la mort, la mort est dans la vie ». Cette mort nous permet la maitrise des contraires : vie et mort, victime et tortionnaire, les trois lumières et les trois compagnons. Ainsi, les trois mauvais compagnons permettent la transgression primordiale qui fonde le mythe et rassemble les hommes dans la mémoire de la tradition dans le processus de filiation. Le fils renaît de son père et c’est ainsi que tous les maitres reprennent vie nouvelle en revivant le sacrifice d’Hiram. Hiram, l’homme fidèle au devoir qui préfère mourir plutôt que de faillir à sa tâche. Les trois compagnons symbolisent également une triple mise en garde contre les dangers que court l’initié, parti à la recherche de son idéal et de la vérité. Ils doivent nous inciter à la plus grande vigilance, envers nous même, tout autant qu’à l’égard de la foule ignorante. Cette première partie de l’initiation à la maitrise est le rappel du symbolisme du cabinet de réflexion. Pour arriver à la maîtrise absolue, il faut que tout ce qui pourrait rester de profane en nous meure définitivement, pour renaître à une vie nouvelle, faite d’abnégation et de dévouement. Pour acquérir le grade de maître, une transformation profonde a du s’opérer. L’apprenti était voué au travail matériel de dégrossissement de la pierre brute (lui-même), le compagnon au travail intellectuel de la réalisation de la pierre cubique. Au maître sera dévolu le travail spirituel consistant à répandre la lumière et a rassembler ce qui est épars. Mais cette maitrise n’est pas un don, c’est une conquête de tous les instants, une victoire toujours précaire de l’homme sur lui-même. La cérémonie initiatique se réfèrent à la légende du maitre qui tombant sous les coups de l’ignorance, du fanatisme, et de la jalousie, ressuscitera grâce à l’union des frères, seule union capable de faire survivre l’œuvre à l’individu. La morale est très forte, apprenant aux hommes à avoir la foi, à vivre conformément aux idéaux de morale et de vertu, et à tenir leurs promesses. Aussi, j’ai la conviction que les trois mauvais compagnons, c'est-à-dire nous même sur le chemin initiatique, nous entrainant vers la rupture, nous font entrer aussi dans la profondeur, dans la compréhension plus large du sens de la vie. La quête de la parole perdue est la recherche, l’attention à nous même, qui à force de travail nous fera transformer nos travers en connaissance et amour et devenir ainsi un maitre radieux. Le franc-maçon doit d’abord travailler pour son propre perfectionnement. Il doit également persister sans relâche dans la recherche de la vérité, en étant toujours plus exigeant vis-à-vis de lui-même et de ses frères. Il doit travailler à la taille de la pierre pour en ôter inlassablement les aspérités, l’équarrir pour la rendre parfaite en vue de sa destination finale. A\ A\ |
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