L’Acacia

Il y a eu au cours de cette cérémonie plusieurs symboles qui ont tous leur importance. Tu auras l’occasion, bien des fois, de repenser à ce rituel, et de saisir chaque événement, chaque étape de ton élévation. Si au premier degré tes frères et tes sœurs t’ont reconnu comme tel, au grade de compagnon, tu as vu l’étoile flamboyante. Ce soir, l’acacia t’est connu.

Avant d’analyser le sens de cette phrase, je vais te parler de l’histoire de ce symbole.

Depuis la nuit des temps, toutes les religions ont toujours choisi un arbre ou un arbuste comme emblème du caractère sacré de la vie. Pour nous francs maçons, il s’agit de l’acacia. Par apport aux autres arbres, l’acacia est présent tout au long de l’histoire de l’humanité. En Chine, il est l’arbre du nord et de l’hiver, en Inde, la louche destinée à Brahmâ est faite en acacia. Dans l’antiquité, l’acacia est un symbole solaire, car ses fleurs s’ouvrent au rayon du soleil levant, et se ferment lorsque le soleil disparaît à l’horizon. Comme tu commences à le ressentir, l’acacia est l’incarnation de la vie, voir de la vie éternelle représentée par son bois dur, imputrescible.

C’est pour cela que les anciens égyptiens s’en servaient pour l’embaumement. Ses fleurs fanées signifient la mort et la renaissance. Pour les chrétiens, au-delà du symbole de l’immortalité, il représente aussi la morale, et tu le trouveras très souvent représenté sur les tombes de nos cimetières. Ce symbole vient probablement des hébreux qui mettaient toujours un rameau vert dans la terre avant d’ensevelir un défunt. Ceci venait du caractère impur attaché au mort, il fallait signaler au passant éventuel l’endroit de la tombe afin qu’il ne marche pas sur la terre devenue également impure. L’acacia est considéré par les hébreux comme le bois sacré. L’arche de Noé était construite en acacia, et Moise reçu l’ordre de confectionner l’arche d’alliance avec ce bois indestructible. La couronne d’épines du Christ était une branche d’acacia, et le bois de la croix aurait été lui-même de l’acacia. Comme tu le vois mon frère, l’acacia est le symbole de la mort, du deuil et de l’immortalité.

En cherchant l’origine de ce symbole en franc maçonnerie, j’ai trouvé qu’au début de la maçonnerie spéculative, les loges se nommaient : « Lieu très éclairé, asile de vertu où règne la paix, l’innocence et l’égalité » innocence que les grecs nommaient akakia, et que William Hutchinson mort en 1814, utilisait pour désigner les francs maçon du nom d’acaciens.

Pour revenir à la cérémonie de ce soir, tu as répondu : l’acacia m’est connu, c’est donc qu’il y a un enseignement lié à ce symbole, et tu verras, que ce symbole est ambivalent.

Une branche d’acacia est placée sur le drap te recouvrant, et cela pour nous rappeler celle qui fut plantée sur la tombe d’Hiram.

En effet, dans la légende sur la mort d’Hiram, l’assassin va planter une branche d’acacia à l’endroit où il a enseveli le corps du Maître afin de dissimuler le lieu de la sépulture. Il faut remarquer que par ce geste, il va faciliter les recherches à venir.

En préparant cette planche, J’ai appris que l’acacia devenait alors un objet transitionnel.

Pendant la cérémonie de ce soir, tu en entendu des maîtres tourner autour de toi. Nous avons incarné les maîtres partis à la recherche d’Hiram. C’est l’un d’entres eux qui s’accrocha à la branche d’acacia laissée par les assassins. Dans cette légende, l’acacia passe de la main d’un coupable à celle d’un innocent. Entre les deux, la branche accompagne Hiram dans son dernier voyage. J’ai cherché le sens de ce symbole, et je vais te donner ce qui m’a le plus touché : Le rameau planté est comme un point de repère, il devient le signe de ralliement, de reconnaissance des Maîtres et peut traduire la perpétuation de la tradition maçonnique. Ayant pris racine, il montre, que la vie prend sa source dans la mort. Comme tu le découvres, la cérémonie de ce soir devait faire intervenir un symbole végétal pour définir la mort, la transformation et la renaissance du maître. C’est le triomphe de la vie sur les ténèbres.

L’acacia représente la vie éternelle et incarne le cycle immuable de toute vie sur terre.

Je vais essayer d’aller un peu plus loin dans l’analyse de ce symbole, même si notre vénérable maître ne m’a laissé que peu de temps pour t’en parler. L’acacia est un épineux, il pique et peut donc faire couler le sang, qui par définition tombe du haut vers le bas, du ciel vers la terre qui l’absorbe et s’en nourrit. Nous retrouvons là l’échange entre ciel et terre, entre notre travail matériel et celui de notre quête de connaissance métaphysique. D’une manière générale, il y a une relation entre la branche d’acacia et le nouveau maître que tu es ce soir. Au cours de ton élévation, tu t’enracines et tu dois devenir de plus en plus solide, tu représentes l’axe du monde, le lien entre le ciel et la terre, ou comme le disait il y a peu de temps notre sœur Joana, un arbre de vie et de connaissance. C’est pour cela qu’à la question « étés vous maître ? » Tu réponds, « l’acacia m’est connu ».

Tu deviens toi-même ce symbole, c’est à dire que la connaissance acquise te donne la force de prendre ton propre destin en main. Tu as déjà découvert une forme d’assurance en tant que compagnon, mais lorsque que tu prononces « l’acacia m’est connu », tu fais preuve d’une grande confiance en toi-même. Mais crois moi, tu n’es pas au bout du chemin. Ta connaissance acquise te permet de décider seul de la direction à suivre, et l’acacia, plus qu’une étoile, te montrera le chemin à suivre. Celui qui t’amènera à l’endroit où est enterré le maître Hiram. C'est-à-dire que tu trouveras la connaissance, enfouie, et tu lui donneras vie.

Pour la franc maçonnerie, le symbole de l’acacia permet à ses membres de prendre conscience du caractère sacré de ce symbole qui devient un matériau. Si l’acacia relie la terre et le ciel, il relie aussi le franc maçon à l’histoire. Ce soir, l’épreuve de la mort s’achevant par la victoire de la vie te montre le sens de l’éternité. Les épines de l’acacia sont là pour te rappeler les épreuves passées et à venir.

Pour conclure, seul les maîtres sont initiés à la légende d’Hiram et la l’affirmation « l’acacia m’est connu » sera la preuve de tes connaissances.

Si tu donnes cette réponse correctement, tu te feras reconnaître comme maître, en tout cas d’un point de vue ritualiste. J’aimerai me placer sur un plan moral : Il ne te suffira pas de connaître les mots, les signes et attouchements, il faut que ton esprit, tes actes confirment que tu es un maître aux yeux des apprentis, des compagnons et des autres maîtres. Ce sont tes connaissances et ton activité maçonnique, ton évolution et tout ce que tu auras à transmettre qui feront de toi un exemple, et qui confirmeront ainsi ta valeur en tant que maître.

P\ M\