La glorification du travail

Une des phrases de notre rituel ne dit-elle pas « de la recréation au travail » ! L’ensemble de nos activités dans le Temple n’est il pas tourné vers l’accomplissement d’un travail immatériel, un travail sur soi, qui vise à notre amélioration en tant que maçon. Mais la maçonnerie s’inspire de la maçonnerie opérative et en ce sens le compagnon se doit de poursuivre le travail entamé lors de l’apprentissage, dégrossir la pierre brute, travail que poursuivons depuis notre élévation sur la pierre cubique, aidés des outils du compagnon, maillet et ciseau, règle et compas, levier et équerre. Ce travail assidu nous conduira à la réalisation de notre chef d’œuvre, chef d’œuvre qui nous ouvrira la porte du grade supérieur, le grade de Maître.

Le cinquième voyage représente la synthèse des quatre autres afin d’aboutir à la glorification du travail, la réalisation du chef d’œuvre avant le passage à une autre forme de spiritualité. A la fin du cinquième voyage le compagnon lit la pancarte « Glorification du travail ». Ce dernier voyage, accompli les mains vides est en quelque sorte l’aboutissement des voyages du compagnon ; l’attention est attirée sur la main, sur la nécessité du travail manuel. Lors de la cérémonie de passage, le Vénérable Maître termine son allocution en déclarant que la F\ M\ est une véritable religion du travail. Ce cinquième voyage laisse entrevoir les forges de Vulcain, le passage au grade supérieur. Le cinquième voyage est consacré à l’exaltation du travail humain, au sens opératif comme au sens spéculatif du terme.

Après le premier degré, grade de l’introspection, de l’observation, du silence, du Nord, (Perpendiculaire, 2e surveillant) le compagnon s’ouvrira au monde, se mettra au travail, pour y puiser un certain nombre de savoirs, afin de tendre vers la sagesse (Niveau, 1e surveillant). Le travail du compagnon sur la pierre cubique est un travail d’ajustement, de précision. Le grade de compagnon est un grade d’action, de construction, de construction intérieure. Ce travail n’est ni un labeur, ni une peine, ni une tâche, mais le libre exercice d’un pouvoir d’action en vue d’un objectif précis d’achèvement et de perfection.

L’épi de blé est bien ce lien qui relie les apprentis et les compagnons. Les apprentis sont à l’intérieur d’eux même, ils déposent la graine qui se transformera ou pas. Au grade de compagnon, la graine est devenue blé, mythe de Demeter, Déesse de la fertilté, de la Terre-Mère. Déméter confia à Triptolême, fils du roi d’Eleusis, un épi de blé. Triptolême parcourut le monde pour enseigner aux hommes l’agriculture et les mettre en garde contre ses aléas. L’étape du cinquième voyage, c’est l’ouverture vers un autre mythe : les forges de Vulcain. Vulcain (Héphaïstos), maître des arts du feu gouverne le monde des forgerons et des métaux. Son art, l’alchimie permet la transformation des métaux en or, ou d’un point de vue symbolique l’Homme en pur esprit.

De la même manière que shiboulet est le mot de passe entre apprenti et compagnon, le chef d’œuvre est aussi un de ces points de passage pour accéder au grade supérieur.

Les maçons du Moyen-Age, bâtisseurs de cathédrales formaient une corporation indépendante mais coordonnée avec les autres corporations, charpentiers, menuisiers etc. L’architecte étant la synthèse des arts et des métiers ; le sens collectif et universel devant l’emporter sur le travail. Le compagnon est porté par un sens du devoir et un idéal de perfection obtenu grâce à une ascèse, une discipline et le respect des règles.

Selon la légende d’une des sociétés compagnonniques, le fondateur serait Salomon, roi d’Israël, qui aurait institué le rite du Devoir ; on sait que les sémites étaient nomades, aussi Salomon a-t-il du faire appel à des architectes étrangers, des ouvriers spécialisés. Hiram qui fut l’un d’entre eux, lui fut envoyé de Tyr en vue de la construction du Temple. Les qualités techniques et morales des candidats durent être reconnues par une initiation, qui comprenait un renoncement, une purification et un serment.

K\ S\