L'Étoile Flamboyante

C'est en accomplissant le cinquième voyage, les mains entièrement libres, que j'ai dû m'appliquer à me mettre dans un état de réceptivité par rapport à certaines lumières ambiantes, invisiblement diffuses dans l'espace. Tandis que je m’efforçais de sonder les ténèbres, un point lumineux, à peine perceptible, y apparaît soudain. Lueur d'abord infime, c'est bientôt une étoile qui grandit rapidement, pour resplendir enfin d'un tel éclat que l'obscurité s'en trouve dissipée. A ce moment, l'Astre mystérieux prend l'aspect d'un Pentagramme flamboyant, au centre duquel se distingue un idéogramme que l'on a traduit par la lettre G.

L'étoile me guide et elle est l'ultime partie de l'enseignement au grade de Compagnon. Si le marin se repère aux larmes du ciel, le Compagnon doit suivre une étoile et elle est son seul guide. Repère céleste qui ne m'est pas tout à fait inconnu, puisque cet astre s'est toujours trouvé au dessus de moi, éteinte mais présente, comme latente. Je suis maintenant en plein midi, à l'heure ou, entre ciel et terre, l'ombre est la plus courte et la chaleur la plus forte. Il me faut une vision aiguë, une lucide voyance, pour qu'entre ces deux éléments, si bien partagés et à la fois si unis, je puisse me situer. L'ombre est sous moi et le guide unique qu'en aveugle je dois suivre, brille dans l'autre ciel, celui de mon ancien état.

Ou vais-je en ma nouvelle qualité de Compagnon ? Alors que l'étoile est seule capable de me mener jusqu'à mon inviolé et secret sanctuaire…et l'ombre qui est sous moi comme pour m'indiquer l'ouverture d'une espèce d'antre. Je dois suivre mon étoile, confiante et crédule, c'est à dire comme un aveugle. Sur l'autre colonne j'étais muet et voilà qu'au moment où j’acquiers la parole je deviens aveugle. Me trouverais-je en pleine obscurité alors qu'on m'affirme que je suis en plein midi ? Les discours reçus me donnent à penser qu'il est sage de me méfier de mes sens, comme de mes yeux puisque, tout autour, la lumière les blessent, mais qu'importe, je dois faire avec. J'ai déjà appris à écouter et il ne me reste plus qu'à bien regarder, mais seulement avec mes oreilles…et les deux.

Dans ce désert, où tout vibre en chaleur, le mirage est roi. Il faut donc que je me méfie de mes yeux, comme de ceux des autres aveugles. Que reste-t-il donc ? Déjà les voyants s'entendent à berner et lorsqu'ils parlent, c'est en cécité. Il en est donc qui tiennent résolument fermés les yeux de l'entendement. Ainsi forcés, ils en arrivent à nier ce qu'ils sont incapables de voir. Mais je vais peut être trop vite, reprenons donc et considérons notre étoile. Sa place est au Nord, c'est donc une étoile polaire, si elle reste grise et éteinte au premier grade, elle brille pour le Compagnon. Cet artifice nous permet donc de passer de l'ombre à la lumière. La lumière de cette étoile m'aurait été accordée pour me mener vers la sagesse. Dans un premier temps presque invisible, elle se manifeste ensuite par sa propre luminosité.

Pauvre est l'imagination que les étoiles ne mettent pas en éveil ! Elles ne disent rien, mais elles font rêver et nos rêves deviennent lucides quand l'harmonie est en nous, quand nous sommes enfin rendus réfractaires à ce qui est faux. Veillons à ce que rien ne trouble notre miroir mental, puis rêvons, recueillons les images qui se présentent devant notre objectif intellectuel et tâchons de comprendre ce qu'elles signifient. L'initié ne les prend pas à la lettre ; mais en s'attachant à elles avec le désir de démêler leur sens, il parvient à s'instruire de ce qu'aucune école n'enseigne.
Les étoiles sont les yeux d'un argus qui a tout vu. Si elles pouvaient parler, que n'auraient-elles à dire ? Muettes, elles fixent sur nous un regard suggestif, qui nous incite à deviner les connaissances précieuses qu'ont pu posséder les âges disparus. La discrète lumière qui tombe des étoiles n'éblouit ni ne trompe personne. Elle s'adresse au sage qui sait écouter en lui la voie du silence.

Il n'est pas donné à chacun de voir ce foyer lumineux inconnu des astronomes. Quand le Compagnon peut dire ; j'ai vu l'étoile flamboyante, il a pénétré le grand mystère du deuxième degré de l'initiation. Ce symbole n'est pas menteur et se rapporte très correctement à ce qu'un initié véritable, instruit par le rituel, doit savoir deviner, car la divination véritable s'impose à celui qui ne veut pas rester profane. L'étoile mystérieuse s'allume au centre de la Loge, laquelle figure l'Univers. En elle peut s'inscrire une figure humaine aux quatre membres écartés, dominés par la tête, aussi devient-elle l'emblème de l'hominalité, que distingue le discernement et l'exercice d'une volonté dominatrice du quaternaire des membres destinés à obéir.

Le rayonnement de cet Astre n'est autre que celui de la vie, envisagée comme unique et non essence : elle rayonne au centre de tout être vivant, foyer microcosmique du Grand Ensemble. En l'étoile nous sommes UN, l'homme est DIEU. L'étoile flamboyante trônant dans la partie supérieure du tableau de Loge indique à tous les Maçons, en leurs grades et qualités, que chacun se trouve assujetti à ses choix comme à leurs effets de dépendance. Ce tout demeurant soumis aux lois de la déité figurée par la lettre G incluse au « point »central du Pentagramme.

J'ai dit.