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Palingenesie
 
ESSAI 1
 
 
I - INTRODUCTION :
 
La palingénésie est le terme employé par les philosophes stoïciens pour désigner la reconstitution ou apocatastase du monde après que le feu l'a détruit, cela dans un éternel retour.
Le mot employé, en grec (palingenesía), signifie « naissance à nouveau », « régénération » ou palingénésie cosmique.
De façon plus générale, la palingénésie est plus simplement le « retour à la vie » des divers éléments de la nature. Les plantes se nourrissent de minéraux, les animaux se nourrissent de plantes, les hommes se nourrissent des animaux ou de leurs produits ; en respirant, tout vivant assimile germes et poussières...
Dans ce cycle toujours recommencé, les composants de la vie s'échangent, se redistribuent après la mort. C'est ce qu’on appelle la palingénésie universelle.
PROCLOS (vème siècle) est le premier à attribuer à Orphée la « doctrine d'un cycle de réincarnations », ou orphisme, lequel croit en la palingénésie, au « retour à la vie ».
Toutes les âmes reprennent d'autres formes d'existence, par exemple de père à fils, d'humain à plante et animal. Les naissances viennent des morts.
Les âmes, dans les demeures, deviennent les uns des pères et pères et fils et épouses aux beaux atours et mères et filles, par des générations qui se succèdent l'une l'autre…
 
Pour PLATON : « Il existe une antique tradition, dont nous gardons mémoire, selon laquelle les âmes arrivées d'ici existent là-bas [dans l'Hadès, l'Au-delà], puis à nouveau font retour ici même et naissent à partir des morts ».
L'idée d'une « renaissance ou régénération » du cosmos, est déjà présente chez HERACLITE et les premiers stoïciens, sous forme « d'Éternel Retour ».
 
Dans la Bible :
Dans l’Ancien Testament : les prophètes annoncent une palingénésie qui consiste dans le retour des exilés et la reconstruction de la ville sainte (Jérusalem).
 
Dans le Nouveau Testament, la « palingénésie » désigne la situation qui se produira avec l'avènement du Règne de Dieu ; le mot « régénération » est mis sur les lèvres de Jésus lui-même : « Oui je vous le dis, à vous qui m'avez suivi : lors de la régénération, quand le Fils de l'homme s'assoira sur son trône de gloire, vous vous assoirez vous aussi sur douze trônes... »
SAINT PAUL affirme que la palingénésie du chrétien est donnée par le baptême : « il nous a sauvés... par un bain de régénération et de renouvellement... ».
Depuis la préhistoire, sur tous les continents, toutes les civilisations ont laissé des traces de croyances en une existence après la mort, chacune avec ses propres notions : âme, esprit, énergie, conscience, transmigration, sens de la vie, …
Ainsi, la croyance en la survie de l’âme est à l’origine de divers rites funéraires, autant que l’est le respect des défunts.
 
PYTHAGORE, qui allait plus loin que la réincarnation, pensait "que l'âme est immortelle, qu’il y a transmigration de l'âme parce que, par nature, elle est immortelle et mouvante, et ainsi, qu’elle peut entrer dans n'importe quel corps !
 
II - LEGENDE d’HIRAM :
 
La Légende d’HIRAM, est comme une nouvelle naissance, un « état passé » vers un « état futur ». Elle confirme le principe même de l’Initiation : un changement d’état, même si au Grade d’Apprenti, la mort est moins présente, et que le Cabinet de Réflexion peut suggérer seulement un état antérieur à la naissance.
 
La mort d’Hiram n’est pas une fin, mais bien plutôt une espérance en un « revenir » différent, et donc un devenir meilleur, pour les Compagnons que l’âme d’Hiram a pu pénétrer, et qui lui succèderont car il ne doit pas y avoir rupture de la transmission par le pourrissement du cadavre.
 
D’aucuns diront que c’est une résurrection dont il s’agit, comme l’indique son étymologie latine « resurgere » qui signifie « rejaillir » et par extension, « se relever, se rétablir », alors que renaître (du latin renascere) veut dire « naître à nouveau » et se réfère souvent au concept de la réincarnation.
Mais, ce terme ne peut être employé en Franc Maçonnerie, car il évoque la résurrection du Christ dans les religions chrétiennes ; or la Maçonnerie ne peut être assimilée aux religions. Le seul lien que j’y vois, pourrait être l’énergie primitive retrouvée, et la valeur rédemptrice…
 
A mon sens, dans la Légende, cette métamorphose, a surtout pu s’opérer grâce à certains Symboles et gestuelle :
 
Tout d’abord, lors de la Cérémonie, le Temple est dans l’ombre et ne doit être éclairé que par 3 étoiles nécessaires au T.°.R.°.M.°. et aux deux Surveillants, réduisant le ternaire à la seule Sagesse, signifiant peut-être que l’Initiation qui n’est toujours pas achevée, cède la place à une autre Initiation qui sera plus spirituelle.
 
Le Delta reste allumé mais n’est plus visible ; L’étoile flamboyante (dans laquelle s’inscrit l’homme et qui est son guide), allumée à l’Orient, est faiblement éclairée, comme pour annoncer qu’une étape de l’existence disparaît pour qu’une autre apparaisse. Mais en réalité, elle n’a pas bougé, car c’est le Compagnon qui s’est déplacé. Il n’est plus dans la Loge, il en sort pour entrer à reculons où brille toujours l’Etoile, car s’il est désorienté, si l’Etoile est voilée à l’extérieur, c’est pour qu’il la dévoile à l’intérieur de lui. Mais il ne le sait pas encore !
Sur l’Autel, encore, le Compas domine totalement l’Equerre, ce qui veut dire que la prééminence de l’Esprit sur la Matière, y est fortement affirmée. Cependant, le cheminement qui mènera à l’objectif spirituel, n’est que tout juste esquissé.
L’Acacia :
 
Hiram n’est découvert que grâce au rameau d’Acacia.
La Branche d’Acacia placé sur la tombe représente la vie indestructible, éternelle, qui se perpétue à travers les cycles de pourrissement, transformation, régénération, et immortalité de l’âme.
Elle est toujours verte, indiquant que par-delà la mort, la vie est toujours présente, qu’il y a de la sève, « de la moelle dans les os », laquelle évoque la Connaissance qui se transmet par la tradition.
Elle a de grandes grappes de fleurs blanches, couleur de la pureté, et légèrement rosées en leur centre, comme teintées de sang.
Qui plus est, ses branches sont couvertes d’épines acérées.
C’est avec ce bois imputrescible, que l’Arche sainte des Hébreux a été construite, et que fut tressée la Couronne du Christ.
 
C’est une belle représentation pour un arbre qui est le Symbole de l’immortalité !
Ainsi, Hiram devient « Arbre de Vie » - ce que la branche d'acacia suggère aussi -.
 
Mais il est bien plus encore : chacune des positions de son corps : couché, relevé, debout, évoque la quête de la Connaissance, l'ascension vers la Lumière, la régénération, l'immortalité, la « renaissance ».
 
Lorsque le M.°. dit : « l’Acacia m’est connu », cela veut dire que toutes les formes du « devenir » lui ont été dévoilées, lui sont connues.
L’acacia marque le tombeau du Maitre passé, mais également le berceau du Maitre à venir.
Si la chair d'Hiram a quitté ses os, les os sont la partie la plus dure, donc la plus durable du corps. Ainsi, la moelle invisible continue à vivre au-dedans, ce qui signifie que l’esprit de vie survit en elle. De même, l’Acacia reste.
Sa dépouille en putréfaction, devient alors symboliquement « l’humus », le terreau fertile sur lequel la jeune pousse va germer, tout comme le grain de blé qui doit mourir pour renaître.
Elle va se régénérer, transformer le Comp.°., par le biais de la conscience à un état supérieur, un changement de direction, d’éclairage, l’esprit de l’un ayant élu domicile dans l’enveloppe physique de l’autre.
 
Le corps était dans la tombe, il ne ressuscite pas le troisième jour, mais son âme s’est élevée, en triomphant de la mort, en le rapprochant de la Lumière annonciatrice de l’avenir, de la Spiritualité, du « Divin ».
Avec elle, le Maître poursuit son but, quelles que soient les embûches, et l’Acacia devient alors, un « pont entre l’humain et le spirituel ».

Le relèvement par les 5 Points Parfaits de la Maîtrise :


Les 5 points Parfaits de la Maîtrise transmettent la vie ; il faut toute l’énergie pour maintenir l’unité : la jonction des pieds, l’inflexion des genoux, la jonction des mains, le serrement de la main gauche sur l’épaule droite et finalement le Baiser de Paix, infusent dans le Compagnon, toutes les vertus de son nouvel état de conscience : l’amour fraternel, le dévouement sincère, la collaboration éclairée unissant à la fois les cœurs, les pensées, les volontés, dans un idéal partagé.
Le Maître Maçon se tient dans cet équilibre, entre l’unité qui lui a été transmise et la conscience de sa difficulté à la maintenir.
 
Pratiquer les cinq points parfaits est la seule solution pour éviter que « la chair quitte les os », et que tout se désunisse, mais c’est le seul moyen pour le T.°.R.°.M.°., aidé des deux surveillants, de relever le nouveau Maître qui passe alors du plan horizontal, à l’état vertical, se « spiritualise », se situe au Centre d’un axe assimilé au pilier du monde, « l’axis mundi », devenant ainsi le trait d’union entre le ciel et la terre, excluant tout égarement.
 
Ainsi, corps, âme et esprit renaissent. Le nouvel Initié s’élève sur la verticale comme le compas s’est élevé pour passer au-dessus de l’équerre.
 
Ce qui est épars est rassemblé, et la transmission de l’esprit de Maître Hiram dans le nouvel initié, a été effectuée par la communication de bouche à oreilles (donc par le souffle qui transmet la Connaissance Divine), en syllabes successives échangées, du mot substitué, formant un « tout », intitulé le « relèvement ». Cette gestuelle illustre en même temps, la création d’un égrégore et la recherche d’une reconstruction de sens.
                                                                                          
Ce relèvement montre qu’il est en en capacité de déterrer le Maçon de l’ignorance, et de le sortir des ténèbres où il a pénétré mais en est sorti, pour lui redonner vie.

Le « nombre 5 » évoque l’homme accompli ; ainsi, l’on peut dire que les cinq points sont « parfaits » puisqu’ils « rassemblent ce qui était épars », unissent la nature humaine et la nature spirituelle du nouveau Maître.
Le nouveau Maître se souviendra de ces cinq points d’union qui ont permis sa renaissance, car il les aura lui-même perçus, éprouvés.
 
Hiram ne pouvait pas transmettre son Être profond, mais il était en mesure de donner des pistes importantes aux Compagnons, afin qu’ils puissent acquérir l’expérience et la Connaissance, leur permettant de tailler leur Pierre sur l’Edifice.
Cependant, ces dernières ne faisaient pas partie de leur ambition.
 
Albert Einstein a dit : « la principale source de connaissance est l’expérience ».
 
Hiram n’est pas un Dieu sauveur qui meurt pour sauver l’Humanité, comme Jésus.
Il a été tué car il était porteur d’une Parole et d’un secret qui lui valent la mort, comme un simple mortel.
Il est le Symbole de la l’homme idéal, vertueux, de la destinée réservée au Maçon qui respecte ses Obligations et qui remplit ses devoirs, en triomphant de la corruption.
 
Gerard De Nerval évoque la mort d’HIRAM dans son livre « Voyage en Orient », avec ces mots : « Il faut savoir mourir pour naitre à l’immortalité ».
 
Ce n’est qu’au moment de son Elévation que le Compagnon, non seulement est nommé Maitre, mais qu’il devient à la fois, dès cet instant « fils et successeur d’Hiram ».
Le mot sacré substitué « Moabon », qui signifie « fils du père » (ou selon d’autres traductions, « il vit dans le fils »), en est la confirmation.
Hiram est donc l’expression du « Père » qui donne la vie et constitue le modèle éternel, immortel, de Sagesse, de Force et de Beauté pour ses fils spirituels que sont les Francs-Maçons.
 
C’est à l’Orient, lorsque l’on rallume les étoiles, de manière à rendre le Temple très lumineux, que le Maitre « réapparaît plus radieux que jamais » renaissant à la vie éternelle qu’est la vie de l’Esprit.
Il est debout, devenant « feu vivifiant » puisqu’il en faisant réapparaître la Lumière.
Le feu est l’agent primordial de transformation pour le forgeron-métallurgiste qui transforme la matière, et fabrique des Outils qui accroissent les possibilités de cette transformation.
Ce n’est pas un hasard si le Mot de Passe de ce Grade, est « Tubalcaïn », artisan mythique qui travaille les métaux, en tant que forgeron, mais aussi en tant qu’alchimiste, et dont le vocable signifie « possession du monde ».
C’est encore cette parcelle de feu divin dérobé par Prométhée…
 
Si je devais conclure :

L’Etoile Flamboyante faisait partie du Compagnon ; il lui fallait la retrouver et l’éclairer car elle le conduit vers son perfectionnement ; désormais, elle va rayonner dans le nouveau Maître, et le Temple. Elle est la vraie Lumière qui illumine ceux qui ont exalté leur voie et leur vie par l’Esprit.
 
La métamorphose par l’Esprit, du Compagnon devenu Maître, est une totale transformation de l’être, une source d’évolution et de perfectionnement, une
« metanoïa », une mutation ontologique, ou autrement dit, une palingénésie.
 
Hiram devait mourir et renaître au travers des Maîtres, pour que nous poursuivions son œuvre.
En effet, un Maître qui n’aurait pas de disciples, ne transmet rien, et quand il meurt, ce qu’il avait acquis, disparaît avec lui. Le disciple doit s’efforcer au moins d’égaler le Maître.
 
De la même manière les « trois mauvais Compagnons » devaient exister pour que la légende puisse s’accomplir. 
La mort d’Hiram laisse le chantier « inachevé » car seuls deux étages ont été édifiés, ce qui signifie qu’avec l’acquisition de la Maîtrise, le Franc Maçon n’a pas terminé sa construction personnelle.
 
L’étage le plus élevé, celui de sa Spiritualité, reste en effet à bâtir, ainsi que le Saint des Saints, l’endroit où, dans le Temple de Salomon, était placée l’Arche d’Alliance, c’est-à-dire l’objet sacré qui permettait la communication avec le « Principe ». Ce n’est que libéré du « matériel » que le Maître pourra y accéder.
 
Cependant, nous ne devons pas attendre que nous soit donnée la clé de la construction du Temple. Nous devons trouver les moyens de poursuivre le chantier, et pour cela nous disposons d’Outils, et avons besoin de discipline, de persévérance et d’union.
Les mauvais compagnons sont en nous, et si le meurtre du « père » permet de grandir, de se transformer, de se perfectionner, nous devrons éliminer nos erreurs et nos défauts, ne pouvant plus les attribuer aux autres, car notre responsabilité reste entière dans notre propre construction.
Notre devoir va dès lors, consister à agir en conformité avec notre conscience, qui nous indiquera où se trouvent le bien et le mal, la justice et l’injustice.
 
Le message de la Légende d’Hiram, qui représente la vie, ne nous dit rien d’autre que de rechercher en nous ce qui git dans notre Temple intérieur à l’état de cadavre à qui on doit redonner vie, tel le grain de blé qui doit germer, afin que sa Lumière, comme l’Etoile Flamboyante, illumine le monde autour de nous et en nous, pour l’éternité.
 
Poursuivons sans cesse l’œuvre d’Hiram, en recherchant la Parole Perdue, afin qu’il n’y ait pas extinction de la Tradition, ce qui implique que notre Ordre ait à sa tête des Maîtres spirituels, car ils élèveront alors le niveau général de la Conscience.
 
J’ai dit
V/ S/

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