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La tolérance est-elle un vecteur d’amour ?

Jean JAURES tenait à ne pas confondre respect et tolérance. Il pensait que le mot tolérance était dangereux, en tous cas condescendant, voire injurieux « on vous tolère ! » …dit-on

Est-ce en ce sens que le F\M\ emploie ce mot ?

Bien sur que non, mais il se doit toutefois de ne pas le galvauder et le mettre à toutes les sauces……..comme il en est parfois coutume car il faut tout de même admettre qu’au nom de la tolérance, on ne peut accepter tout et n’importe quoi.

La tolérance est une attitude ambiguë : Tolérer c’est se croire en position de domination, de jugement, c’est s’estimer bon d’accepter l’autre malgré ses erreurs. Ses dites erreurs étant soumises à notre propre jugement.

Tentons d’aller plus loin.

Notre monde nous montre dans quelle intolérance nous vivons.

Guénon le dénonçait en 1946 en parlant de « la crise du monde moderne » Marie-Madeleine DAVY le relayait en 1980 « aujourd’hui, dans un monde matériel (…) la pollution venue du cœur de l’homme s’étend à l’eau à l’air et s’étale sur la terre, s’exprimant aussi en confusion et en violence ». L’actualité nous montre tous les jours les débordements de ce manque de tolérance et de ce manque d’Amour. Et c’est plus vrai aujourd’hui qu’hier…jusqu’où ? nous ne pouvons qu’être en phase avec Aragon quand il disait « il est temps d’instaurer la religion de l’Amour ».

Car Amour et Tolérance sont quasi indissociables, qui ne peut aimer ne peut tolérer, qui ne peut tolérer ne peut aimer. Et pour tolérer son prochain, il faut commencer par soi, le cabinet de réflexion nous invite à se travail d’introspection, n’oublions jamais la formule alchimique V.I.T.R.I.O.L. une fois que l’on s’est découvert, on se tolère, on s’accepte et là le terreau est prêt pour accueillir l’autre, à l’égal de soi-même.

Il faut savoir vaincre ses passions et soumettre sa volonté, l’obscurcissement de la raison doit faire place à une belle journée ensoleillée. Il faut admettre que l’autre a le droit d’être et de penser autrement (jusqu’aux limites fixées par la morale) Seulement alors, si nous ouvrons notre cœur, nous disposerons de cette tolérance acquise par l’Amour et il pourra régner une harmonie certaine en ce monde.

L’aptitude à la tolérance est différente pour chacun d’entre nous, ce n’est pas forcément inné, mais dans la démarche qui est notre, cela s’acquiert. La vie n’est qu’un voyage, un bref voyage, comme ceux de notre initiation où nous avons ressenti cette métamorphose autour des éléments pour sortir purifié et ainsi « apte » à transformer notre vie en actes d’amour.

Nous sommes tous « en route » pour l’Eternel Orient, cet espace temporel que nous traversons doit nous permettre, fidèle à la devise des chevaliers « de combattre tout mal, de défendre tout bien »

La rigueur comportementale et la droiture morale apportée par les outils de la Franc-Maçonnerie doivent  nous aider sur ce chemin.

L’amour passe par la compassion, et la Foi Maçonnique est ici l’outil adapté pour vivre cette compassion.

Il va sans dire qu’un certaine discipline intérieur doit naître de notre raisonnement, que c’est au quotidien qu’il nous faut remettre l’ouvrage sur le métier, ordonner nos pensées pour qu’elles se transforment en actes et ne restent pas de belles résolutions sans suite.

Avec en tête cette fabuleuse phrase de notre rituel : «  Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qui te fût fait
Fais aux autres le bien que tu voudrais qu’il te fissent »
Franc-maçonnerie est souvent synonyme d’humanisme, mais encore faut-il le construire et cela commence par une étape de construction intérieure, propre à chaque individu, à chaque F\M\ tout au long de sa vie, sinon, il ne reste qu’un vain mot vide de sens.

Nous ne pouvons agir en ce sens qu’ici et maintenant. Dans le tohu-bohu de la vie actuelle, écoutons cette voix intérieure qui nous murmure souvent, pour ne pas dire toujours,  les bons conseils.

Il ne faut pas tricher, ni avec la vie, ni avec les autres…ni avec…soi-même…la facture se paye cache ! Tricher avec soi-même, triste constat…et en principe, le retour du bâton ne se fait jamais trop attendre.

Nous avons la chance de plus avoir d’œillères, (qu’on lui enlève le bandeau, qu’il voit et qu’il médite) si nous avons bien assimilé notre initiation.

Alors ouvrons grand les yeux, regardons et méditons, sans bêtement filer droit derrière un quelconque leader en mal d’ego.

Nous avons le devoir de responsabilité et de jugement.

Ne regardons pas le monde par le petit bout de la lorgnette et soyons des acteurs de notre temps, pour cela il faut s’ouvrir aux autres, ils s’ouvriront à nous et l’Amour occupera la place qui lui est due.

La tolérance, l’amour…des mots …ce n’est certes pas une ascèse, c’est une manière d’être, en laissant tomber le verbe avoir qui nous rattache trop souvent à des vanités et à des valeurs bassement matérielles. La tolérance, l’amour …ne sont pas syncrétisme…mais un mode de vie et de pensée personnel.

Souvenez vous de votre initiation, j’y reviens toujours, souvenez vous des paroles du V\M\

« L’homme qui aspire à être libre doit apprendre à se détacher des choses futiles
 et se souvenir que la cupidité est la source de tous les vices »

pour cela il y a, si je puis dire, perpétuelle remise en cause pour en arriver, et c’est toujours dans le rituel à un « perfectionnement graduel de soi-même » , notre Rite se décline en 33 degrés et à chaque étape le F\ trouve un chemin lumineux pour lui indiquer là où il doit se rendre.

La réalisation du maçon passe par ses étapes. La réalisation de l’homme qu’il est également.

Alors ? la tolérance est-elle un vecteur d’amour ? bien entendu, comment pouvoir aimer sans tolérance, dans le sens de l’amour de l’autre, de l’agapè bien entendu.

« Combattre tout mal, de défendre tout bien » disais-je il y a peu, car ce mal est en nous comme en les autres, où se situe-t-il ? pensons à la phrase de Malraux «  je cherche la région cruciale de l’âme ou le mal absolu s’oppose à la fraternité » …et nous mes FF\, avons-nous été capables de trouver cette région de l’âme ? Avons-nous réellement supplanté ce mal par une débordante fraternité, au-delà de la Loge, au-delà des mots…au delà de nos pensées et de nos concepts ? on a tendance à opposer le bien au mal, mais le bien pour l’un sera-t-il le bien pour l’autre ? le dernier travail présenté en ce lieu nous a éclairé sur l’aide à l’autre et nous a montré que parfois en voulant faire son bien, nous lui faisions du mal… Alors ?

Alors ! et bien l’Amour mes FF\, arrêtons de porter des regards sur les autres et transmettons leur cet Amour fraternel qui nous unit, afin d’achever au-dehors l’œuvre commencée dans le Temple, afin que cette phrase du rituel ne serve pas qu’à clôturer nos travaux et à nous retirer dans la paix et l’harmonie, mais bien à nous retirer vers les autres avec un sens du devoir aigu vers cette religion de l’Amour dont je parlait tout à l’heure en citant Aragon.

Certes nous avons le choix, puisque nous avons ce que l’on nomme «  le libre arbitre », il est facile de dire que le rituel est beau et que les mots sont pesés et choisis et rentrer chez soi, reprendre ses habitudes égoïstes et repartir dans le tumulte de la vie sans se préoccuper d’autrui pour revenir à la tenue suivante en courant et en arrivant à la dernière minute en craint à son frère voisin « c’est quoi la tenue aujourd’hui, j’ai pas lu la convoque » ! une phrase que nous ne devrions pas entendre ici mes FF et pourtant…mais nous sommes libres…Hans Jonas après Auschwitz se demandait si Dieu n’avait pas « pris un risque » en laissant l’homme libre…vaste débat…mais nous, maçons, n’est-ce pas de « notre libre volonté » que nous sommes entré en loge ? afin de « parfaire l’humanité » et bien si nous avons cette prétention, commençons par appliquer à nous-mêmes ce que nous aimerions voir chez les autres et nous pourrons construire cette société utopique qui nous anime tant et dont nous rêvons. C’est du reste assez paradoxale de penser utopie quand on ne pense qu’à une société où l’Amour serait roi, car cela entend admettre que c’est impossible, donc antinomique à notre démarche de maçon…amusant non ? l’utopie pour d’aucuns serait de faire descendre la paradis sur terre, je n’irai pas jusqu’à cautionner ce propos, mais il est aisé d’admettre que plus d’Amour apporte plus de joie et de bonheur, mieux ça ira … encore faut-il en avoir la volonté et quand on voit ce qui se passe ici bas, même à l’intérieur des Loges, même à l’intérieur de la notre mes FF, on voit qu’il reste un long chemin à parcourir, et personne n’échappe à cette critique, ni vous, ni moi. Et la « solution » ? Elle est où ? me direz-vous, et bien en nous mes FF ! en commençant par des choses simples.

Pour exemple, passons au crible pythagoricien nos actes journaliers :
« En quoi ai-je manqué ?
Qu’ai-je fait ?
Quel est celui des mes devoirs que je n’ai pas accompli ? »
C’est un début… 

J’ose insisté, ce n’est que par une remise en cause de nous-mêmes que nous aborderons un état de tolérance, pour une transformation de la société telle que nous pouvons l’imaginer, ou règne la paix, l’harmonie, et surtout où règne la tolérance vecteur de cet Amour qui unira les hommes, car notre chaîne d’union doit dépasser les murs de nos loges…la FM est universelle parce qu’elle unit tous les maçons du monde, mais aussi parce qu’elle est capable d’unir tous les hommes.

Il n’y a pas de grande vérité pour ce faire, mais si déjà nous abandonnons le monde du paraître pour le monde de l’être…un grand pas aura été fait.

J’ai dit

B\ G\

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