La
Franc-Maçonnerie ? Maison de Tolérance
ou Ecole d’Amour ?
Est volontairement ambiguë dans son
énoncé, afin de marquer l’esprit de nos
Frères de ces deux
qualités Maçonniques que sont la
Tolérance et l’Amour avec un Grand
« A ». Vertus
théologales et cardinales.
Commençons par la Tolérance :
Pour tolérer, il faut implicitement qu’il y ait
choix. Sans alternative nous sommes en présence de
l’intégrisme ou de la dictature.
Le mot vient du latin « tolo »
et de la racine sanscrite « tla »
qui toutes deux ont le sens de porter, supporter. (Exemple :
« Atlas »
qui supporte la Voûte Céleste).
Il existe plusieurs acceptations du terme
Tolérance :
Respect et reconnaissance des choix de l’autre.
Ex : J’accepte que l’autre choisisse de
mourir en fumant.
Renoncement à ses droits par esprit de Tolérance.
Ex : J’accepte que l’autre fume et
m’intoxique.
Latitude admise par rapport à une règle, une loi
Ex : J’accepte qu’il fume mais
à partir du dessert.
Maison de Tolérance
Ex : L’autre peut y fumer ce qu’il veut.
Où encore, celle qui nous intéresse en
Franc-Maçonnerie :
Laisser l’autre exprimer des opinions que l’on ne
partage pas ou faire des choses que nous ne ferions certainement pas.
Dans la vie Profane les pensées
d’une personne qui ne m’est rien, pourraient
m’être totalement indifférentes, me
conduisant à l’ignorer et donc à faire
preuve d’une sorte
« tolérance » qui de
fait serait de l’intolérance
déguisée.
Si maintenant, cette personne je la nomme mon Frère car elle
ne m’est pas indifférente, il ne me sera plus
possible de l’ignorer. De plus je serai obligé de
tout faire pour tolérer ses idées.
La Fraternité peut conduire à une sorte de
fanatisme et au gourou si l’on y prend pas garde.
Entendons-nous bien, il ne s’agit pas pour autant de renoncer
à nos règles, nos idées et nos
croyances et ainsi de renier toute une vie de réflexion,
mais d’écouter l’autre et ce
qu’il a à dire afin de comparer le
résultat de sa quête à la
nôtre et ainsi s’enrichir de nos mutuelles
différences, de nos expériences, de nos savoirs.
Le mot « mutuelles »
n’est pas gratuit. Il implique une ouverture, un
échange, un partage.
Accepter ses faiblesses, conduit à Tolérer
l’autre. Je préfère cette citation de
Raymond Lulle :
« L’Ami se regardait lui-même
afin d’être un miroir dans lequel il vit son
aimé ».
Tout cela s’apprend, ce n’est pas inné.
C’est le résultat d’une approche,
d’une compréhension progressive.
La somme de tous nos « savoirs »
ne nous permettra, cependant pas d’approcher de la
« Connaissance ».
Nous pourrions dire que nous accordons toujours le
bénéfice du doute à un
Frère avant qu’il s’exprime, ce que
notre Rituel traduit par :
- Qu’apportez-vous en Loge ?
- Bienveillance à mes Frères.
Ou
- Serriez-vous disposé à leur tendre la main et
à oublier le passé ?
Ou
- Sur quoi travaillent les Apprentis ?
- A dégrossir la Pierre Brute afin de la
dépouiller de ses aspérités et
à la rapprocher d’une forme en rapport avec sa
destination.
Première des Tolérances, celle
vis-à-vis de soi.
Mais notre Tolérance est-elle sans
limite ? Sommes-nous donc laxistes ?
La réponse est différente pour chacun
d’entre nous.
Nous avons tous nos règles du « jeu »,
celles que nous nous sommes données :
- En qui mettez-vous votre confiance ?
- En Dieu.
et celles que nous avons librement acceptées, faute de ne
pouvoir faire autrement.
- Nul n’est censé ignorer la Loi.
Est-il laxiste celui qui accepte tout, même ce
qui heurte ses convictions les plus profondes ?
A l’inverse, est-il intégriste celui qui rejette
tout ce qui n’est pas en accord avec ce qu’il
croît ?
Entre le noir et le blanc du Pavé Mosaïque, il y a
ce boulevard sur lequel, lors de l’épreuve du Feu,
vous avez marché droit, purifiés.
Là, il n’y avait ni laxisme, ni
intégrisme, car la plume de Maat au nom du G\A\D\L\U\, avait
équilibré les extrêmes afin de vous
donner une seconde chance et l’accès à
cette nouvelle vie, faisant ainsi preuve de tolérance, car
c’est à ce moment qu’elle a lue les
règles qui régissent la vie,
vérifiée que vous étiez bien en
conformité avec elles et acceptée vos
écarts par rapport à la Loi Unique.
Avec la complémentarité du blanc
et du noir, vous avez vécu le troisième terme qui
permet de passer du binaire au ternaire.
Nos limites sont : La Loi Unique.
Lorsque nous disons que le G\A\D\L\U\ a créé
l’homme à l’image de Dieu, je pense que
l’ensemble des hommes est à peine
équivalent à cette image et que donc les milles
facettes différentes en sont toutes acceptables.
Les limites ne nous en sont pas connues et jamais ne le serons.
« Tout ce que je sais, c’est que
je ne sais rien. » (Socrate)
En conséquence, il nous faut toujours
écouter l’autre, car il nous fait
découvrir une facette de Dieu, G\A\D\L\U\ que nous aurions
ignorée sans lui et qui pourtant était en nous
puisque nous sommes tous à Son image…
En ce sens, la Tolérance est infinie et
évolutive, totalement libre, et donc, n’est pas un
droit figé dans une règle.
A la limite, être Tolérant c’est vivre
une ascèse.
Dois-je tendre la joue gauche au nom de la
Tolérance ?
Oui, et si je veux aller au bout de l’échange, je
tends la joue droite, car je suis en position de Force par rapport
à celui qui est commandé par ses muscles alors
que je suis commandé par l’Esprit.
Rien ne m’empêche ensuite de conclure
l’échange avec une droite sur le nez, pour lui
apprendre que l’on « ne fait pas
à autrui ce que l’on ne voudrait pas
qu’il nous fut fait ».
Etre ni faible, ni servile.
Etre compréhensif mais pas aveugle, car malheureusement nous
ne roulons pas tous pour la même écurie et il
arrive que sous l’apparence de l’ange, attend le
plus terrible des démons, prêt à nous
sauter dessus dès que nous abattons nos
défenses…
Aux cours de nos libres conversations avec les
Apprentis, je leur ai posé cette question :
Christ ayant quasiment tout pardonné, était-il
laxiste ?
Je vous laisse y réfléchir.
Cette question me servira de lien avec l’autre composante de
ma planche qui porte sur l’Amour.
Car au centre de la Croix, se rencontrent la Connaissance et
l’Amour en une seule et même
Réalité.
Elles se fondent en l’Un, comme nous devons le faire avec
l’autre, en Amour, abolissant la dualité pour
n’en retenir que la complémentarité.
La base de notre approche tolérante, ne peut
se faire que grâce à la Loi d’Amour.
Sans elle il est impossible d’approcher l’autre.
L’Amour a cette particularité
d’être totalement incontrôlable. Il
« est ».
Celui qui aborde l’autre en état
d’Amour, n’a aucun a priori, aucune
défense.
Il est totalement ouvert et réceptif.
A noter que là encore il faut être deux pour
qu’il y ait Amour.
Les termes utilisés pour la Tolérance sont
également valables pour l’Amour.
Par exemple, et sans grivoiserie, le langage amoureux nous parle de se
fondre en l’autre afin de ne plus faire qu’un.
Instant magique de l’Union ! !
L’homme ne peut pas se passer d’Amour.
Une des particularités de l’Amour,
c’est que c’est inépuisable. Plus on le
donne, plus il grandi.
Un dicton dit que « l’Amour est
aveugle » et nous savons tous que
c’est vrai, car l’Amoureux ne voit pas les
défauts de l’autre, mais n’en voit que
les qualités.
Au delà du banal quotidien, il est bon de remarquer que
c’est exactement la démarche attendue de nous pour
appréhender l’autre. Condition
nécessaire et sans a priori de l’ouverture totale.
Il est intéressant de remarquer
qu’il est impossible de raisonner une personne amoureuse.
La Raison et l’Amour sont antinomiques. La
première est le fruit d’une analyse froide par
l’intellect, résultat de choix, donc
intolérante quelque part, alors que le second est
spontané, total et échappe à tout
contrôle.
Il est intéressant de noter que
l’intolérance combat par la Force et que la Force
de l’Amour est celle qui lui répond.
Est-ce pour cela que notre Rituel, à la clôture
des Travaux fait dire à notre Frère Premier
Surveillant gardien du Pilier Force : « Que
l’Amour règne parmi les Hommes » ?
Le premier est par définition finie, alors que le second est
infini. Infini, car plus on Aime et plus on se rapproche de la
Connaissance.
L’Oeil du Cœur est le catalyseur qui
fait prendre conscience des liens qui unissent nos sens, nos
observations et réflexions. L’Amour nous
bouleverse intérieurement et il ne nous est pas possible
d’ignorer cet état extraordinaire
résultat à l’intérieur
d’un événement extérieur.
La réflexion qui s’en suit conduit au
fameux :
« Connais-toi toi-même et tu
connaîtras l’Univers et les Dieux ».
Je ne peux m’empêcher de citer cette
chanson de Jean Férat « Aimer
à perdre la raison » qui nous
invite à écouter les poètes, ces
êtres qui comme nous sont des artistes, des adeptes
d’un art, dans notre cas l'Art Royal. Tous, nous avons en
commun l’intuition qui nous vient du Divin, cette intuition
qui régit nos pensées et se traduit parfois en
Paroles extraordinaires.
Dans cet Atelier où l’Amour des Frères
est chose normale, j’espère que l’esprit
de Tolérance qui y règne, vous rendra
cléments et que vous m’aurez pardonné
mes erreurs et lacunes.
Pour conclure, j’attire votre attention sur le fait que dans
notre Loge, il n’est pas possible de se parler directement et
que nous devons toujours passer par le Vénérable
Maître, le médiateur, le souteneur (de la racine
tla) de cette Maison de Tolérance.
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