GODF Loge :  Aurore Sociale - Orient de Beaucaire Date : NC


Quelques reflexions irreverencieuses sur notre tribu du vendredi soir en Loge

Il n’est que le résultat de réflexions, après avoir souvent observé nos Tenues, afin de nous permettre de nous rappeler certaines évidences maçonniques que nous perdons souvent de vue à notre insu.

Le Franc Maçon vit en Loge un monde spécifique, celui, entre autre de la tradition par la transmission.
De ce fait, je vais essayer de faire quelques parallèles, en faisant appel à votre mémoire et à certains de nos vieux clichés.
Rappelons nous l’image habituelle du Chef de Tribu entouré par ses conseillers qui se retrouvent pour travailler.

Replaçons-nous dans notre rituel, au début de notre Tenue, au moment de l’entrée des Officiers en Loge.
Tout d’abord se présente le Maître des Cérémonies.
Il a existé de tout temps dans toutes les sociétés en tant qu’héraut proclamant l’arrivée des participants à la cérémonie.
Il met en scène l’entrée du Chef en commençant par l’annonce de l’arrivée de celui qui détient les pouvoirs.
Il est suivi par le Grand Expert, armé de son glaive, première manifestation du pouvoir.
Grand Maître de la Gestuelle de notre Rituel, mais qui est souvent très mal compris.

Au XVIIIe siècle, celui-ci était souvent appelé « le Frère Terrible », car restant toujours armé il est le seul à pouvoir reprendre directement notre assemblée.
Il a perdu au fil des temps ses pouvoirs de Grand Sorcier au profit de ceux qui détiennent la parole ou l’écrit.
Ils sont suivis par les proches Conseillers du Vénérable Maître, notre Chef de Tribu.
Le Secrétaire, grâce à sa maîtrise de l’écriture, sert de mémoire à nos assemblées.
Il est la mémoire du Temple, et pourra, en se plongeant dans les archives, être un précieux conseillé.
En son temps, nous le nommions « le Maître des Dépêches », titre bien choisi par tous les courriers qu’il nous dépêche au fil de notre année de travail.

Puis, l’Orateur, qui détient la puissance de la parole, il est capable de recadrer le débat, au moment où il s’enlise dans les fausses considérations inutiles et superficielles.

C’est le nouveau sorcier, qui avec l’évolution des habitudes, a pris en partie la place du Grand Expert, Maître de la Gestuelle signifiante.
Les membres de l’Assemblée en ont, pour la plupart, oublié la signification profonde et n’en saisissent plus l’utilité.
Ceci au profit de l’Oral plus facilement compréhensible directement.

Enfin, les deux gardes du corps rapprochés, nos surveillants.

Ils ne sont plus armés de « fer », car nous avons laissé nos métaux à la porte du Temple, et remplacés par des maillets en bois.
Ils rythment nos tenues.
Ils sont les proches confidents du Chef, et surveilleront les membres de l’Assemblée pour en assurer la police pendant les débats.

Et enfin, entre le Chef détenteur du pouvoir, notre Vénérable Maître.
Toujours armé, de son maillet en bois, grâce auquel il impose l’harmonie par le rythme qu’il réglera.
Il prend la place la plus élevée, afin de montrer son ascendant sur le groupe, et le surveiller sans en avoir l’air.

Les Dirigeants majeurs ayant pris leurs places, des formules essentielles pour la mise en commun de l’esprit de l’Assemblée, seront prononcées pour ouvrir les travaux dans une mise en phase unitaire.

Cette petite analyse, de la mise en scène de notre Temple, nous permets de nous apercevoir, qu’au fil des temps, la psychologie des groupes n’a pas énormément changé.

Toutes les Assemblées, se prétendant traditionnelles, ont conservé ou copié ces formes d’organisations plus anciennes.
Nous pouvons alors, nous poser la question :
Est ce vraiment de la transmission, ou par ce conservatisme est-ce de la tradition ?
Ne devons-nous pas chercher la véritable transmission par le lien entre la gestuelle et la parole ?
Ne pourrions-nous pas chercher où est vraiment le lien entre la gestuelle du rituel et la parole ?
Quels sont les signifiants de notre gestuelle, qui se sont transposés dans certains termes oraux.
Nous pourrions découvrir les liens dont certains se sont perdus, la parole ne pouvant pas se substituer à tous nos signifiants.

Par exemple, lorsque nous émettons nos opinions sur les colonnes, que nous énonçons les manières de faire, transmises par les générations précédentes, pour la gestuelle de notre rituel des cérémonies de tous grades.

Analysons le fonctionnement de notre Groupe, tout retourne toujours à l’Orient, par exemple, le participant, qui a obtenu la possibilité de s’exprimer, doit s’adresser obligatoirement dans cette direction.
C’est en ce lieu, d’où vient la Lumière, où réside le pouvoir, celui du Maître de la Loge qui dirige notre assemblée.
Il possède le pouvoir discrétionnaire, avec celui du Sorcier, notre Grand Expert, qui seul peut reprendre le Maître.
Les Surveillants sont l’écho du Vénérable Maître.
Remarquons que grâce à eux qui partagent les maillets avec le Vénérable Maître apparaît le nombre trois.

Trois l’éclairent.
D’une importance capitale en Loge, constatons également qu’en aucun cas, le pouvoir, même en écho, ne peut être confié à un membre du Groupe qui n’a pas été reconnu.
Ce qui signifie « avoir été installé » en tant que Maître de la Loge.
Poursuivons le déroulement de notre cérémonie, les paroles fondamentales ont été prononcées, le cadre rituellique installé.
Nous retrouvons l’apparition du nombre trois.
Remarquons, que quatre triangles ont été constitués.
Le premier : par le Vénérable Maître et ses deux gardes, nos surveillants, avec les trois maillets.
Le second : par le Vénérable Maître et ses deux conseillers, la mémoire et la loi, notre Secrétaire et notre Orateur.
Le Troisième : avec le Vénérable Maître, et ses deux assistants à la Gestuelle, le Maître des cérémonies, avec sa canne, émet le premier rythme de la Tenue, et le Grand Expert, avec son épée, fait place nette, pour mettre en place nos décors.
Et, le Quatrième : entre le Vénérable Maître, et ses deux assistants à la Fraternité et au Trésor, l’Hospitalier qui nous permet de rester en relation avec nos Frères absents et le Trésorier, notre ministre des Finances, qui gère les aspects Terriens de notre assemblée.
Cela permet une parabole avec nos quatre éléments : la Terre, l’Eau, l’Air et le Feu.
Quatre triangles, quatre éléments.

De plus, nous pouvons observer la mise en place d’un miroir symbolique entre le Vénérable Maître et le Couvreur.
Nous retrouvons le Couvreur, celui qui connaît la Loge dans tous ses détails, du fait de sa descente de charge, et son ancienne expérience.
Et, notre Vénérable Maître en chaire, qui vit la charge actuelle dans son quotidien.

Sur ordre du Vénérable Maître, le Grand Expert, notre Sorcier, se déplacera afin d’allumer les feux, et dévoiler le tableau de Loge.

Cette phase du rituel serait inutile dans un Temple installé matériellement, le Tableau de Loge ayant pour objet de permettre au Temple d’exister dans un milieu profane.

Les feux doivent êtres allumés avec la flamme éternelle, celle de l’esprit, qui brille au pied de l’Orient.
Cela me fait me poser la question, dans les temps où la fée électricité n’existait pas, les différents lumignons étaient-ils, seulement utile pour permettre une lecture facile. Ou nos anciens y voyaient-ils un symbole sublimant la flamme éternelle ?

Tout est maintenant en place, les maillets peuvent retentir et les travaux commencer.

Des paroles importantes seront prononcées, toutes à des degrés différents.

Des travaux seront présentés, et ceux-ci auront une résonance dans chaque esprit, et pourront déclencher des lumières, des remarques d’approfondissement, que tous supposent utiles.

Jamais la polémique stérile ne doit trouver de place au sein de nos débats, ayant laissé nos métaux à l’entrée du Temple, nous ne devons pas nous laisser dominer par des instincts profanes.

Les travaux s’achèvent, les conférenciers concluent, et sur ordre du Vénérable Maître, ils sont raccompagnés sur les colonnes par le Maître des Cérémonies.

Un nouveau moment, important, s’annonce.
Les maillets résonnent, des paroles sont dites et les participants se préparent à faire la Chaîne d’Union, en s’enchaînant par les mains nues, bras croisés.
Des paroles majeures sont prononcées par le Vénérable Maître, destinées à souder indéfectiblement les membres présents dans ce Temple.
Cette Chaîne d’Union, grâce à laquelle nous reconstituons le monde, en fusionnant l’horizontalité et la verticalité.
Puis, chacun supposé lié reprend sa place sur les colonnes.
Par cela, nous reconstituons la chaîne qui encercle notre Temple, pour nous rappeler nos devoirs, et nous protéger.

D’autres paroles essentielles sont énoncées, qui nous permettrons de revenir au monde profane, car nous ne pouvons pas rester en permanence avec l’esprit ouvert.

Nous pourrons alors communier fraternellement autour des agapes, qui nous réunirons avant notre retour dans ce monde, où nous avons pris l’engagement de répandre la lumière.
D’apporter du bon sens et de la justice dans nos relations profanes, et nos actes quotidiens.
Quelles leçons pouvons-nous tenter de tirer de ces moments forts que nous venons de vivre ?
Quelles interrogations devons-nous nous poser ?
Peut-être : « qui sommes-nous ? », ou bien « que faisons-nous ? », sinon « quelle est notre mission ? ».
Nous ne trouverons pas toujours de réponse à ces interrogations, mais n’oublions pas que nous n’enseignons pas des certitudes, mais une recherche de la Lumière.

Nous devons tenter l’impossible pour mettre en place notre réflexion commune, et qu’elle se perpétue dans le temps.
Nous sommes en tant que Francs Maçons, en perpétuel questionnement, assaillis de questions extérieures, bousculés par des pressions externes.
Mais tout cela ne doit pas nous faire oublier nos racines, ainsi que les débats qui sont développés au sein de notre Temple, de notre Obédience.
Ces derniers sont révélateurs d’un certain nombre d’évolutions profondes s’articulant autour de la notion de Doute, de la recherche de la Vérité et de la Lumière.
Tout en gardant à l’esprit les notions de Fraternité et de Tolérance.

Cette dernière notion apporte une question.
Doit-elle être conçue comme une vertu politique, permettant de garantir la liberté de conscience et d’expression au sein des sociétés modernes ?
Mais, suffit-il d’être tolérant ?
Si la tolérance est une vertu, elle ne doit pas être une éthique qui nous est interne.
Le dialogue, dans le cadre du respect de chacun, devient alors possible si l’autre y est disposé.
La méthode est alors d’ouvrir le débat sur les idées de l’autre, sans mettre ses convictions dans sa poche.
Et, admettre que l’autre possède aussi une part de la Vérité.

Notre mission, ne serait-elle pas d’essayer de transformer la tolérance en vertu éthique dans notre société menacée par l’individualisme, l’indifférence, l’intransigeance, et le retour du dogmatisme ?
Nous avons parfois, pour ne pas dire souvent, l’impression que notre Ordre est à la dérive, sans projet précis, sans directive dynamique.
Par ailleurs, nous avons aussi l’impression que le plus grand nombre d’entre nous se désintéresse de notre passé, de nos Traditions.
Souvent, il nous semble de rester seul après avoir participé à nos tenues.
Souvent, nous retournons à notre vie profane sans prendre la peine d’utiliser quelques instants de notre vie pour nous souvenir de nos Frères absents, et de s’inquiéter de ceux-ci.
Nous oublions notre serment maçonnique, et nos promesses de porter la Lumière à l’extérieur de notre Temple.
Nous devons préserver notre devoir de Fraternité, et ne pas succomber aux facilités de notre quotidien qui nous tire vers l’individualisme, l’oublie des autres et de nos idéaux.

Revenons à nos fondamentaux, et rejetons la facilité de vivre nos tenues comme dans un cercle relationnel.
Nous avons collectivement besoin d’un grand objectif, d’un grand élan.
Dans notre passé, nous avons offert à la République une magnifique devise :
« LIBERTE, EGALITE, FRATERNITE »,
et nous nous devons de respecter ces grands principes.
Dans ce cadre, restons constructifs et volontaires, tout reste à faire.

Nous pourrions être tentés de rester simplement ce que nous sommes, mais il faut que nous évitions ce piège tendu par nous-mêmes.
Ressaisissons-nous, mes Frères afin de maîtriser notre quotidien, la Vérité ne viendra que par nous.
Ne faisons pas que la Fraternité qui s’établit entre nous ne soit qu’un épanchement jovial, réconfortant mais plat, et sans réalité.
Mais, restons à l’écoute de nos Frères, et essayons d’aider l’Humanité à constituer un nouveau monde qui reprendrait notre devise.
En n’oubliant jamais que tout cela se fait mes Frères dans l’allégresse et dans la joie.

J’ai dit Vénérable Maître.

R\ V\


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