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Construire le Temple

De l'obligation de soumission à la nature, de l'observance de celle ci et de ces phénomènes sont apparus les premiers lieus ou temples, consacrés au soleil, à la lune, aux premiers dieux et déesses, aux représentations animales ou humaines.

Sur tous les continents, les hommes, comme le disait JJ Rousseau : « ont enfermé les dieux dans les temples, ont inventé des rituels de toutes sortes et de toutes natures afin d'obtenir leur clémence, leurs grâces, leurs soutiens, leur pardon. Car au fond l'homme porte en lui la honte de sa nudité: il s'est matérialisé, soumis aux lois de la nature et est devenu mortel ».

Lorsque nous regardons les Temples, au sens le plus large du terme, qui parsèment notre planète, et qui n'ont pas subi les outrages du temps et des hommes, on ne peut que se rende compte qu'ils sont la résultante entre le"construire et le connaître", qu'il existe donc une architecture de la pensée, tout comme il en existe une u monde et de l'univers, car celui-ci n'est pas un chaos, mais un cosmos, c'est à dire, selon la définition de Pythagore, créé et ordonné harmonieusement.

LA CREATION

Et ce n'est pas par hasard si nous invoquons "Le Grand Architecte De L'Univers" à l'ouverture de nos travaux, l'explication nous en est donner par l'origine du mot Architecte.

En effet, architecture et architecte viennent du Grec: Arché, qui veut dire le commencement, le commandement, le principe, et du mot Tektonicos, qui veut dire le charpentier, le bâtisseur. De ce fait, l'Arché fait de la tecture bien plus qu'une simple battisse. L'Arché est le supplément indispensable, comme le dit Denis Rollier : ce par quoi une construction échappe à l'espace purement utilitaire, ce qu'il y aurait en elle d'esthétique".
Une architecture sans Arché, c'est à dire sans commencement, échappant au pouvoir, rebelle au principe, devient: An‑archique. Donc l'Ârché se veut ordre.

L'architecture, telle que le décrit Platon : « conduit à l'éclosion de ce qui se manifeste, elle suppose que l'on sache quelque chose de l'ordre et, que ce savoir est immanent de l'action ».

Et pour Plotin, le savoir qui permet la construction architecturale, doit mêler connaissance divine et sensible; l'architecte est alors la "métaphore" de ce qui ré­assemble", non en supprimant toute distance, mais en reproduisant l'ordre.
De l'édifice, il est le médiateur, il « élève l'âme en présentant dans l'évidence l'image de l'Invisible, c'est à dire l'unité d'une harmonie que le maçon ne voit pas, mais que l'architecte voit par l’œil intérieur ».

Saint Augustin, de son coté, explicitera l'opposition entre l'architecte, l'Arché­Tektonicos, comme bâtisseur ayant rapport avec le principe initial, et le simple "technicien", le tektonicos, qui est incapable de remonter la hiérarchie des causes.

L'ORDONNANCEMENT

Le temple nous apparaît donc comme un ensemble structuré et ordonné, définissant un espace sacré.

La construction une fois terminée présente en elle-même des fonctions afin que l'esprit averti puisse sans cesse y faire référence. Sa forme carrée ou rectangulaire, surmonté par une coupole, montre la relation entre le ciel et la terre.

La symbolique de l'élément terrestre est représenté ici par les murs qui soutiennent l'édifice. La terre d'où est tiré Adam est par elle-même le symbole de toute la création. Elle apparaît comme une synthèse des différentes polarités symboliques terre diurne et terre nocturne.

La terre nocturne est l'espace des rêves, de la descente souterraine, c'est à. dire de l'involution mystique dans l'« intimité matérielle », Pour le F... M:. du cabinet de réflexion aux divers mythes de passage dans la terre, communs aussi à la mythologie et aux autres enseignements initiatiques.

La terre diurne, cultivée, on pourrait dire virilisée par le soc comme par la bêche, suscite toute la généalogie de l'outillage, des instruments aratoires, au marteau du forgeron, en passant par le ciseau du sculpteur et se prolonge dans le glaive du défenseur. Pour nous F\M\ c'est toute la symbolique du travail autours des outils des bâtisseurs, la réflexion au plan horizontal, au plan du monde, immanent de la technique.

Le symbolisme du ciel est représenté par la toiture qui recouvre le Temple, sous forme le plus souvent de coupole. ( représentation du cercle).

Le symbolisme de la verticalité est suggéré par la voûte, qu'elle soit étoilée ou pas, au‑dessus de nos têtes. L'anthropologie paléontologique a définitivement montré que la libération de la main et l'ajustement neurologique qui l'accompagne, si capital pour l'espèce humaine, se faisaient en même temps que le redressement de la station corporelle du primate humain. « Le ciel et son symbolisme, est comme l'asymptote imaginaire de ce redressement humain ».
C'est le domaine de l'Arché, de l'esprit ; de la connaissance en relation avec le principe, ce que R. Guenon nomme « Le non manifesté ».

Le ciel contrasté en symbolismes diurne et nocturne, en lune ascendante et descendante, et enfin en quadrature équinoxiale et solsticiale, devient le modèle de l'ordre de l'univers, du cosmos, où se rangent les contraires. L'on pourrait dire que la voûte céleste, quadraturée par les points cardinaux ou astraux est le premier mandala, figure idéale où s'épouse le cercle et le carré), ainsi ordonnée elle devient en quelque sorte le modèle parfait de toute destinée terrestre.

Passer du chaos à l'harmonie, des ténèbres à la lumière, de l'extérieur du Temple à l'intérieur du cœur, c'est bien là, la quête de l'homme, depuis l'aube de l'humanité, de l'homme à la recherche de son histoire, de sa présence sur terre et de son inexplicable devenir.

QUE NOUS EN RESTE‑IL. POUR NOUS FRANC MACONS ?

Nos sociétés modernes ont changé sous bien des aspects, mais elles sont encore la proie de la violence, de la barbarie et de la guerre. L'homme du XXI ° siècle ressemble à l'homme de tous les temps, prisonnier de la caverne que Platon évoque dans son célèbre mythe, tournant le dos à la lumière et ne pouvant pas, ne sachant pas ou ne sachant plus se retourner vers elle.

Comment, des lors, retrouver notre demeure, retrouver le sens caché de notre matérialité?

En abandonnant, d'une part, notre esprit sélectif et dualiste, en retrouvant à travers la Connaissance et l'Amour, le véritable sens de la Vérité, de la Beauté et du Bien, qui est pour nous Franc‑maçon contenu dans le temple maçonnique matériel, image voilée et déformée du Temple idéal.

Ainsi la Franc Maçonnerie apparaît‑elle, à travers l'image symbolique du Temple, comme une vision et une affirmation d'un monde ordonné et orienté.

Le Temple maçonnique est un lieu consacré et sacré, à l'inverse de ce qui ce passe dans les édifices religieux, on n'y célèbre aucun culte: ni prières, ni action de grâces, ni adoration, mais il est consacré à des travaux de méditations et de réflexion dans des but de l'élévation de l'homme, à travers les symboles de la terre, du ciel et du centre.
L'initiation à pour but de faire naître un homme nouveau, libre et responsable, dépouillé de ses prétentions et de ses préjugés, et de lui permettre, par une sorte de conversion de son intelligence, de son âme toute entière, de considérer autrement le monde, de changer la nature de son regard sur le monde, sur les autres, sur lui‑même.

Le rituel initiatique doit nous faire comprendre que la réalité toute entière n'est pas absolument présente dans la réalité visible et sensible, dans ce que l'on nomme le " monde des apparences", et qu'il s'agit bien comme l'écrit notre Frère J.Verdun, « d'aller du manifesté au non manifesté, du visible à l'invisible, du crée à l'incréé, au‑delà des ombres de la caverne, au‑delà des reflets du miroir, comme l'Alice de Lewis Carroll ». c'est à dire le véritable sens du Symbole.

Construire le Temple c'est construire l'Homme

DE L'HORIZONTALE

Le temple maçonnique est un univers peuplé d'outils, que l'on traces au cours de l'ouverture de nos travaux. Nécessaires au travail au plan horizontal, ils correspondent au plan du monde, au chemin du monde qui est celui de la morale, de l'éthique et de l'obéissance aux lois. Il s'agit de s'y améliorer, de se purifier, de transformer nos soucis égoïstes en préoccupation amoureuse pour tous les êtres : C'est pour nous la construction du Temple, de notre Temple au plan technique.
Mais ce peut être aussi le chemin de l'aliénation lorsque l'obéissance et le faire prennent le pas sur la conscience, le libre arbitre et la liberté, lorsque , par exemple le F\ M\ ne reste qu'un bon technocrate de la connaissance des outils, et de leurs applications.

A LA VERTICALE.

Pour éviter la dispersion du faire au plan matériel, terrien et dualiste, au plan du tectonikos, qui est la nature fondamentale de la pensée; ,nous devons y adjoindre une réflexion au plan vertical ou chemin du ciel, véritable voie ascendante, transcendante, on la dit aussi mystique, symbolisé au sein du temple maçonnique par les trois grandes Lumières ( Bible, Equerre, Compas ) et visualisé par le rd à plomb.
Cette voie nous permet de procéder à l'éveil de notre conscience personnelle, de prendre conscience d'autres dimensions de notre être, c'est ce que l'on nomme spiritualité.
Ce travail sur 1a voie ascendante autant que descendante est indispensable à tout F\M\ qui à l'objectif et l'ambition de bâtir son Temple, au sens le plus large du terme. n'y a donc pas de véritable construction du temple sans Architecte au sens étymologique du terme.
Cette voie comporte elle aussi ces zones d'ombres : Schizophrénie, hystérie apocalyptique, d élire mystique, rêveries et discours spéculatifs stériles et bien d'autres encore...

L'idée de l'outil, de l'instrument, de l'arché et du tektonicos, débouche sur l'idée de travail, qui permet de former l'objet travaillé et, en même temps, le sujet travaillant, tel l'architecte, Eupalinos, cher à Paul Valérie, qui dit « qu'à force de construire, il s'est construit lui‑même ».
Ce travail valorisé, au centre de l’œuvre de tout Franc Maçon, doit être un instrument de maîtrise, de conquête de soi, de régulation et d'ordre et en même temps, de libération et de liberté : on y cherche à se parfaire, et réunir la matière et l'esprit, longtemps décrié par le discours scientiste.

De la destruction du Temple de Salomon, il ne reste qu'un souvenir dans la mémoire des hommes, un Temple imaginaire, un Temple à reconstruire, un Homme à reconstruire.

Le travail à cette entreprise, cette avancée sur ce chemin, sur ce que nous appelons la Voie royale, s'effectue au sein d'une communauté traditionnelle dont l'objectif est de tenter de bâtir et de rebâtir sans cesse une Fraternité, toujours espérée pour le monde de demain, mais toujours cimentée entre nous, Franc-maçon, par la Chaîne d'Union.

CONCLUSION
Construire le Temple c'est construire l'Homme, accompagné par la Force, soutenue par la Sagesse et illuminé par la Beauté.
Et si j'avais à résumer l'ensemble de mon propos.. je prononcerais au ciel ces belles paroles de Pic de la Mirandole :
« Je ne t'ai donné ni visage, ni place qui te soit propre, ni aucun don qui te soit particulier, Adam, afin que ton visage, ta place et tes dons, tu les veuilles, les conquières et possèdes par toi‑même. »

J'ai dit Vénérable Maître

J
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