GLDF Revue : Points de Vue Initiatiques 3T/1989

Les chemins de la Fraternité

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Suite :  6éme orateur

Michel Barat

Je remercie le Grand Maître de la Grande Loge du Pérou ; je rappelle que dans la Maçonnerie contemporaine les outils sont symboliques. Cela dit, je crois que Ricardo Noriega Salaverry a eu parfaitement raison de nous rappeler quelque chose de tout simple, que les sociétés quand elles deviennent réellement duelles, font en sorte que la fraternité se tourne en vio­lence. M. Babinet nous l'a rappelé tout à l'heure, quand il parlait de la Révolution française et comment l'idée généreuse de fraternité finissait par se pervertir.

Ainsi, ce à quoi nous appelle Ricardo, c'est une fraternité qui soit authen­tiquement universelle et cette universalité se fonde sans doute sur une spi­ritualité commune, sur des idées, mais aussi sur des réalités et des réalités quotidiennes, des réalités que nos pays, plus ou moins riches, ont peut- être oubliées ; simplement le fait d'avoir de l'eau.

Le Grand Maître de la Grande Loge d'Argentine, Alejo Neyeloff, va nous montrer que le problème de l'eau est un problème concret, immédiat, dans des pays que nous n'imaginons pas en souffrir et en particulier pour les populations des villages ruraux. Je donne donc la parole au Grand Maître de la Grande Loge d'Argentine qui va exposer le plan argentin qui, tout comme le plan péruvien, ne se centre pas simplement sur son pays mais a une vocation régionale et, par delà la région, c'est-à-dire l'Améri­que latine, une vocation mondiale.

Alejo Neyeloff

Madame l'ancien Président du Parlement Européen qui avez été Ministre de la Santé de la République Française,

Madame Simone Veil, Monsieur le Grand Maître de la Grande Loge de France, Mesdames et Messieurs, Mes Frères,

Ici, dans cette belle ville de France, il est 16 h 15. Dans mon pays, à plus de 10 000 kms de distance, il est à peine midi et quart. La matinée se ter­mine et les gens s'apprêtent, après le déjeuner, à faire la sieste.

Peu d'heures de différence, mais tant de kilomètres et tant de distance dans les formes, dans les habitudes, dans les nécessités face à la vie qui nous incombent...

Certes, on ne fait pas la sieste à Buenos-Aires, notre tumultueuse capitale, où le rythme de vie est identique à celui de toute métropole, mais la majeure partie des habitants de mon pays la font, spécialement et précisé­ment dans les petits villages où l'intermède de l'après-midi permet d'oublier, pour quelques instants, les carences qui, jour après jour, font disparaître la joie de vivre.

Et, où se trouve mon pays, la République Argentine ? Qu'est-elle ? Com­ment est-elle ? En une rapide synthèse : un peu plus de 31 millions d'habi­tants sur un territoire de 2,8 millions de kilomètres carrés, dans sa majeure partie inhabité du fait que 81 % de la population vivent en zones urbaines, spécialement dans les grandes villes. Seulement 6 millions de personnes couvrent le reste du territoire, oubliées dans l'espace et le temps. Ce territoire est constitué de terres propres à l'agriculture et à l'éle­vage. L'Argentine a une étendue plus importante que les douze pays qui constituent le Marché Commun Européen. Sa superficie est supérieure de 23 % à celle des douze pays réunis.

Malgré ces chiffres considérables, l'Argentine est un pays pauvre, appau­vri, sur un riche territoire.

Pour essayer de donner une explication à ce phénomène, rappelons-nous que les longues luttes du siècle passé pour l'indépendance et pour obtenir une Constitution Nationale permettant l'édification d'une nation, ensan­glantèrent le pays durant des décennies.

Ensuite, durant les années qui suivirent et à partir de 1862, les hommes qui construisirent l'Argentine accomplirent une oeuvre de titans. Ils acceptèrent tous les hommes du monde qui voulaient vivre sur le sol argentin. Ils respectèrent leurs cultes et leurs coutumes, leur offrirent la nationalité et les incorporèrent au moyen de l'éducation populaire à tra­vers l'école gratuite, obligatoire et laïque.

Ainsi furent accueillis ceux qui émigraient de leur pays en conflit, la plu­part européens, à la recherche de nouveaux horizons. Et ma patrie les accueillit, ils purent fonder leur famille, constituer un patrimoine. Aujourd'hui, leurs descendants sont tous argentins, bien qu'ils portent des noms, en un mélange exotique, qui nous rappellent les terres de cette Europe qui nous reçoit aujourd'hui.

Et que s'est-il passé avec eux ? Que s'est-il passé avec ce pays tant promet­teur dans les premières années du XXème siècle ? Que s'est-il passé avec cette nation où l'on ne connaissait pas les haines raciales, les persécutions, qui donnait asile à l'émigrant qui frappait à sa porte ?

Peu à peu, avec la politique et les caprices des politiciens, la nation argen­tine s'est convertie en un pays de violence, comme disait Shakespeare « plein de bruit et de fureur, ne signifiant rien », comme les pensées d'un idiot qui essaie de réciter un conte. De la même manière, furent lentement perdues les valeurs les plus importantes qui avaient permis de construire un pays clair comme son nom : Argentine.

L'intolérance a surgi comme un drapeau des groupes minoritaires qui se considéraient désignés pour exercer le pouvoir. Et, fondamentalement, les profonds sentiments de fraternité se sont perdus le jour où explosa la première bombe déposée par la main inconsciente du terrorisme. C'est de cette manière que la guérilla, que l'Europe et le monde entier ont égale­ment connue, a commencé à tourmenter nos vies, nos pensées, nos cœurs.

Le pire acte signifiant la négation de la fraternité, c'est de tuer son frère. Ainsi nous le dit toute l'histoire, en commençant par la légende biblique de Caïn et Abel. Et, en Argentine, nous nous sommes tués, entre frères, tournant le dos aux principes fondamentaux de fraternité dont nous avions donné l'exemple au monde durant des décennies, quand nous avions ouvert nos portes fraternelles à tous les hommes de bonne volonté qui désiraient demeurer sur le sol argentin.

C'est le grand drame que les Argentins ont vécu, en ce XXème siècle, plein de bruit et de fureur, sans rien obtenir. Ce n'est pas le moment de chercher des coupables, mais c'est le moment et le lieu pour dire la vérité, pour parler sincèrement en ce colloque international qui cherche à rani­mer un des éléments de base de la célèbre triade que la Révolution Fran­çaise mit en avant : Liberté - Egalité - Fraternité.

L'histoire nous apprend qu'à la fin du XVIIIème siècle et durant le XIXème, le monde commença à sillonner fermement les chemins de la liberté. Les pays commencèrent à en connaître les bienfaits mais égale­ment les durs efforts nécessaires pour la conserver. Ayant atteint ce but, le principe de l'égalité fut une suite logique, certes pas facile, pour per­mettre que l'homme, quels que soient sa nationalité, sa race, sa religion et son niveau économique, trouve l'égalité devant la justice, le travail et la vie. Mais la fraternité fut oubliée en tant qu'élément pouvant fortifier l'avenir historique des peuples. Guerres civiles, guerres mondiales, guer­res entre nations voisines furent lamentablement la constante de ce siècle qui se termine. La pacifisme fut bafoué quand les haines et les passions portèrent beaucoup de pays à user de l'extermination comme d'une forme diabolique de dialogues entre les hommes.

Et mon pays ne fut pas une exception. Devant l'agression d'une guérilla importée, la peur, les passions, tous les extrémismes, portèrent un pays pacifique, qui méritait à ce moment le prix Nobel de la Paix en la personne de Carlos Saavedra Lamas, à s'affronter, frère contre frère, à dis­poser de la suppression de la vie, à disposer de la torture et de la sottise. Durant cette période de sang et de fureur, nous nous regardions les uns les autres, avec la honte de ceux qui ne tuaient pas mais qui laissaient tuer. Frère, où es-tu ? Où est la fraternité ?

Et ainsi, nous arrivons aujourd'hui ici, à cette invitation de Strasbourg. Conscients de notre passé et de nos responsabilités et certains du chemin à suivre, nous avons fortifié la fraternité afin d'obtenir à nouveau que notre patrie argentine soit la terre de paix et de générosité que nous léguè­rent nos prédécesseurs.

Nous avons essayé de faire beaucoup de choses ces dernières années. Nous sommes sur le point d'obtenir, pour la première fois en soixante ans, qu'un civil, librement élu par le peuple, remette le gouvernement à un autre civil, également librement élu par le peuple. Nous sommes ainsi, en Argentine, poursuivant le chemin jusqu'à la totale concrétisation des droits de l'homme pour vivre en paix et liberté.

Et sur ce chemin, l'institution argentine que j'ai l'honneur de représenter travaille activement à la concrétisation d'un projet qui a comme essence l'assistance solidaire au profit des habitants de ces petits villages dont nous avons parlé, ceux qui, en ce moment, dorment durant la sieste. Même si les conditions géographiques de la République Argentine font qu'il existe de grandes variations de climats et des héritages culturels dis­tincts, les localités de population inférieure à 1 000 habitants présentent certaines similitudes. A chaque village correspond une portion de terre cultivée, les maisons s'alignent le long d'une ou deux rues et sont conti­guës à de petits commerces. Certaines parcelles sont destinées au bétail.

Les constructions sont généralement faites en briques de tourbe, les sols en terre battue et les toits en branches, bambous ou tôles galvanisées, selon l'endroit. Ces petites communautés n'ont généralement pas l'électri­cité et l'eau est procurée par des rigoles, puits ou cours d'eau superficiels. Les maisons ne possèdent pas d'installations sanitaires mais quelques unes ont des latrines à l'extérieur. On cuisine sur un fourneau de terre cuite. L'activité productive se limite presque exclusivement à l'agricul­ture, à un maigre bétail et rarement à une exploitation de bois et de mines. Une bonne partie de l'économie s'effectue «en circuit fermé» ; chaque famille produit une partie de l'alimentation qu'elle consomme ; les pro­duits du potager, les volailles, les fruits, le bois sont consommés par la famille et ne passent pas par le marché.

La propriété de la terre présente des situations différentes selon les pro­vinces et, en général, les titres ne sont pas parfaits. Dans certains endroits, l'eau pour arroser est adjugée et distribuée selon «usages et coutumes », les propriétaires étant assujettis à un horaire d'arrosage d'une à deux heu­res. Presque tous ces villages ont une école et une place symbolique d'un hectare de terre sèche. L'école est une institution importante. L'institu­teur est un membre dépendant de la communauté et un de ses leaders. Parfois il y a une église ou une chapelle sans toutefois un prêtre en perma­nence dans la plupart des cas.

La population infantile est la plus importante, tout comme celle des adul­tes d'âge mûr ou des vieillards ; peu de jeunes. Le rythme de vie dépend des endroits et du climat. La santé de la population est en général défi­ciente en raison des problèmes consécutifs à la sous-alimentation et aux maladies endémiques. Les habitants recourent le plus souvent aux guéris­seurs locaux et voyagent jusqu'aux villes les plus proches à la recherche d'une assistance médicale.

La société tolère sans réaction qu'une immense quantité de ses membres contractent des maladies et meurent prématurément.

On peut affirmer qu'il y a peu de projets de développement qui ont un meilleur impact sur la santé et le bien-être de la population que les services d'approvisionnement en eau potable. Les maladies d'origine hydrique constituent une des principales causes des maladies infantiles et empê­chent très souvent l'accès du reste de la population au travail et à l'éduca­tion, et diminuent les perspectives de vie. Cette situation est l'indicateur d'un très bas niveau de vie. Le manque d'eau et les conséquences qui en découlent, ainsi que les mauvaises conditions des installations sanitaires, sont en étroite relation avec les maladies telles que gastro-entérites, diar­rhées, fièvre typhoïde, parasites intestinaux, malaria, fièvre jaune, etc... dûes à l'ingestion de l'eau qui se révèle être un facteur de transmission de ces maladies.

Face à toute cette réalité, nous devons faire quelques constatations sur ce qu'est la santé publique et les obligations des dirigeants de toutes les villes vis-à-vis de ce problème.

La santé publique est la somme de la santé des individus qui composent une communauté, définissant la santé comme un état de complet bien-être physique, mental et social et non simplement comme une absence de maladies, selon une déclaration de l'O.M.S. De la même manière, l'Asso­ciation Américaine de Santé Publique résume son interprétation en ces termes et en trois moyens d'action :

  Entretenir la santé de l'individu et de la collectivité.
  Conserver une atmosphère saine.
—  Attaquer fermement la maladie et l'invalidité.

De toutes les définitions, il ressort que la santé publique est une condition du bien-être physique, mental et social de la communauté, une science et un art dont l'objectif est de promouvoir et procurer ce bien-être au plus haut niveau, une activité multiprofessionnelle, un programme rationnel destiné à convertir en réalités les objectifs tracés selon une logique de priorités et selon le principe d'une juste distribution, un ensemble de structures et conditions matérielles, administratives, légales et financières qui assurerait la mise en oeuvre et la continuité des actions, une évaluation permanente des résultats et des méthodes employées, avec une ouverture pour l'investigation de tous les phénomènes qui touchent à la vie de l'homme et de la communauté pour lui assurer une pleine jouissance de ses droits à la santé et au bien-être physique, social et économique.

Le droit à la santé est un droit naturel car il correspond aux lois universel­les de la nature, tout d'abord parce qu'il répond aux lois de solidarité sociale. C'est un droit typiquement coutumier car ces droits et obligations corrélatifs ont évolué parallèlement aux conceptions de l'époque.

La Déclaration Américaine des Droits et Devoirs, dans son premier chapi­tre, se réfère ainsi à la vie et à la santé :

Art. I - Tout être humain a le droit à la vie, à la liberté.

Art. VII - Toute femme enceinte ou en période d'allaitement, ainsi que tout enfant, ont le droit à la protection, attentions et aides sociales.

Art. XI - Toute personne a le droit à ce que sa santé soit préservée par des moyens sanitaires et sociaux concernant l'alimentation, l'habillement, le logement et l'assistance médicale correspondant au niveau permis par les ressources publiques et celles de la communauté.

La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme précise :

Art. III - Tout individu a le droit à un niveau de vie permettant de lui assurer, ainsi qu'à sa famille, la santé et le bien-être et spécialement l'ali­mentation, l'habillement, le logement, l'assistance médicale et les services sociaux nécessaires. Il a également le droit aux assurances en cas de chô­mage, de maladie, d'invalidité, vieillesse et autres cas de perte de ses moyens de subsistance par des circonstances indépendantes de sa volonté.

La maternité et l'enfance ont droit aux attentions et assistance spéciales. Tous les enfants nés d'un mariage ou hors mariage ont droit à la même protection sociale.

Nous pouvons schématiser deux positions et deux lignes évolutives dis­tinctes concernant la santé publique : la conception anglo-saxonne se réfère fondamentalement à l'assainissement du milieu, à la prévention des infections transmissibles et à la connaissance statistique des phénomènes vitaux, à la mobilisation de la communauté et à une conception implicite que la maladie doit s'éliminer car elle freine, en grande partie, les possibi­lités de travailler de la population. Les problèmes d'assistance restent pra­tiquement hors de cette analyse et sont livrés au libre jeu de l'offre et de la demande. La position européenne continentale tend à accroître le capital humain par des moyens d'assistance.

Par cette obligation que nous avons tous face à la santé publique, notre projet argentin «Plus d'eau pour plus d'Argentins - Maçonnerie argen­tine» a été conçu par nos Frères dans le cadre du Plan Maçonnique Régio­nal qui fut approuvé par la XIIIème Assemblée Générale de la Confédéra­tion Maçonnique Interaméricaine, réunie à Montevidéo (Uruguay), sur proposition de la Grande Loge du Pérou.

Nous avons entendu les résultats obtenus, dans une première étape, par la Grande Loge du Pérou. Ce fut à Rio-de-Janeiro, lors de la réunion de la XIVème Assemblée Générale de la Confédération Maçonnique Interaméri­caine, que l'Argentine, avec une unanime approbation, a présenté son pro­jet. Postérieurement, l'intérêt démontré par la Grande Loge de France, à travers son Grand Maître de l'époque, Jean Verdun, nous a permis de continuer à chercher la concrétisation des premières étapes du projet pour arriver, aujourd'hui, dans cette prestigieuse réunion, à le présenter dans une synthèse qui fait l'objet du fascicule que nous avons distribué.

Quelles sont les intentions du projet argentin ? Jusqu'où vont et quels sont ses objectifs ?

a) Obtenir que les habitants de ces petits villages dispersés dans les cam­pagnes ou dans les vallées des hautes montagnes reçoivent le souffle chaud de la fraternité.

b) Essayer que les visages de vieillards que nous montrent les enfants malades soient éclairés par le sourire de l'espérance vers la santé.

c) Solliciter l'aide fraternelle de ceux qui possèdent le plus pour la canali­ser vers ceux qui la nécessitent le plus.

Comme l'indiquent les statistiques publiées dans notre fascicule, 2 543 vil­lages de mon pays, dispersés sur la vaste superficie du territoire, avec une population qui n'excède pas les 1 000 habitants, manquent d'eau potable, d'une source pure qui leur permettrait de vivre sainement. Pour cette rai­son, nos indices de mortalité et morbidité infantiles sont beaucoup plus élevés que ceux d'autres pays plus développés.

Devant la prospérité des grandes métropoles, ces enfants pensent que nous n'obtiendrons pas d'améliorations, mais si, nous les obtiendrons, leur état sanitaire les rétablira pour une vie pleine de félicité. Dans ces vil­lages, un total de l'ordre de 600 000 habitants n'ont pas d'eau potable et n'en auront pas dans l'immédiat car ils se heurtent à l'indifférence des gouvernements qui savent que ces populations n'ont pas de réelle signifi­cation politique ni électorale. Le désintérêt des grandes banques interna­tionales, qui ne canalisent leurs actions qu'au profit de populations plus importantes dont ils peuvent espérer le retour de leur inversion, et en général le propre désintérêt du reste des Argentins qui ne savent ou ne veulent pas connaître leurs souffrances, font tomber cette situation dans l'oubli.

Quand en 1977, se réunirent à Mar del Plata, Argentine, les représentants du monde entier lors de la Conférence des Nations Unies pour l'Eau, de beaux projets s'élaborèrent, établissant des buts audacieux qui assuraient qu'à la fin de la décennie, l'approvisionnement en eau serait total. Mal­heureusement, rien de tout cela ne s'est produit, encore moins dans notre pays et dans beaucoup de cas, la situation est pire qu'en 1977.

Ainsi que le déterminent les statistiques officielles, généralement généreu­ses, il est indiqué que seulement 60% de la population bénéficient d'une eau potable, et ce pourcentage correspond aux habitants des grandes vil­les. C'est pour cette raison que le projet argentin d'un Plan Maçonnique Régional de la Confédération Maçonnique Interaméricaine a attiré l'attention sur ces petits villages dont nous parlent les statistiques que nous présentons aujourd'hui.

Avec l'aide fraternelle que nous sollicitons auprès des pays dont les éco­nomies sont prospères, nous commençons notre tâche, nous nous rappro­chons de ces petits villages, cherchant leurs leaders naturels, leur deman­dant de prendre conscience de l'entreprise, requérant du reste de la popu­lation son propre travail pour construire l’œuvre afin qu'elle leur appar­tienne en propre, apportant à ces villages nos meilleurs techniciens dont l'expérience a été prouvée dans beaucoup de pays, prenant l'eau non potable des ruisseaux ou torrents voisins et l'amenant jusqu'au village, rendue potable pour la distribuer dans chaque maison, aussi misérable qu'elle soit. Ainsi, jour après jour, nous inculquerons la nécessité de l'usage de cette eau potable comme moyen pour avoir un meilleur poten­tiel de vie.

Où il ne sera pas possible d'employer l'électricité ou les combustibles tra­ditionnels, nous nous servirons des chutes d'eau, de la force du vent et jusqu'au sol ; nous pourrons ainsi compter sur une énergie électrique abondante et bon marché. Ainsi se formeront, peu à peu, des villageois utiles qui pourront, dans l'avenir, former des familles heureuses; qui sau­ront qu'un acte de solidarité fraternelle les a non seulement sauvés d'une mort prématurée mais aussi leur a permis de se développer, vivant avec santé et bonheur.

Combien sont ceux qui, publiquement, dans tous les pays du monde, lut­tent contre l'avortement alors qu'ils restent indifférents devant une situa­tion comme celle que nous avons exposée, dont nous pouvons dire que c'est une espèce d'avortement différé car si l'enfant n'est pas éliminé avant de naître, il l'est peu de temps après, victime de l'indifférence de ceux qui se préoccupent des formes et non du fond d'une question relative à la réelle survie de l'être engendré.

Mesdames et Messieurs, l'Argentine n'est pas venue à ce colloque pour présenter une demande de crédits, elle est venue pour partager avec vous tous, avec vos familles, la possibilité de répandre l'amour et la fraternité sur des milliers et des milliers d'enfants du monde.

L'expérience qui a lieu dans mon pays pourra être appliquée de façon identique dans d'autres pays d'Amérique Latine, dans d'autres pays du monde, où la souffrance est constante, où la douleur est l'élément quoti­dien du malheur.

Que notre action, pure et féconde, soit la réponse à ceux qui, avec la vio­lence, les bombes et les armes, prétendent, en Amérique et dans le monde, nous renvoyer au temps où la haine et l'incompréhension dévastaient les horizons du monde.

Publié dans le PVI N° 74 - 3éme trimestre 1989  -  Abonner-vous à PVI : Cliquez ici

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