GLDF Revue : Points de Vue Initiatiques 1T/1972

La Franc-Maçonnerie : Ses Bases Spirituelles

Tout au long des millénaires les hommes ont gardé et gardent encore la prescience et la nostalgie d'un Empire spirituel qui consacre à leurs yeux la primauté de l'Origine.

Aux époques les plus lointaines on retrouve l'emprise, sur l'es­prit des hommes, de cette Révélation qui s'est prolongée, même affaiblie, dans la Tradition.

Trois mille ans déjà avant notre ère, l'unité de cette règle, conservée par les collèges initiatiques, avait déjà subi des atteintes, mais quelques initiés, qui en avaient une connaissance à peu près complète, transmirent ces vérités qui ne furent ainsi jamais per­dues.

Les Francs-Maçons essayent d'atteindre ces transcendantes splendeurs, sachant bien, dans leur humilité profonde, qu'ils ne les approcheront jamais tant sont faibles les moyens de recherche, d'étude, de compréhension, de méditation.

Société initiatique, la Franc-Maçonnerie se réfugie dans les traditions qui lui sont particulières pour remonter à cette source impérissable de la Tradition.

Cette Tradition, nous le savons, fut longtemps tenue cachée. Les initiés se la transmettaient de bouche à oreille, mais cette doc­trine unique, révélée à de rares êtres doués de qualités exception­nelles, fut enfin fixée en texte ésotérique en des livres fondamen­taux.

Pour la Franc-Maçonnerie, la Tradition représente la primauté de l'esprit, qui guide et émeut les hommes.

La Franc-Maçonnerie croit que l'on peut restaurer un idéal humain par le retour intégral au spiritualisme des Origines, au res­pect de la Tradition.

La Franc-Maçonnerie, ordre initiatique, se situe au-dessus de toutes les religions, car celles-ci se rejoignent toutes à des hauteurs qu'elles ne peuvent atteindre que par la métaphysique où plongèrent leurs premières racines.

Mais aux dogmes sans fondements nous opposons l'aveu d'une ignorance totale alors que nous acceptons volontiers la conception spiritualiste de l'univers.

La raison humaine a toujours protesté contre les affirmations arbitraires et contre les prétendues révélations des religions offi­cielles.

La Franc-Maçonnerie professe une métaphysique, une morale, une mystique qu'elle situe sur un plan pur, élevé, désintéressé.

La Franc-Maçonnerie a deux idées maîtresses : l'universalité et l'évolution.

Ses doctrines initiatiques ont toujours porté cette marque de l'universalisme et de l'évolution. Aussi, la Franc-Maçonnerie, société initiatique, infuse à ses adeptes cet esprit universaliste et évolutif par une suite continue d'efforts.

Elle ne le fait pourtant pas sur l'un seul des plans : religion, philosophie, morale ou science, mais sur l'ensemble de tous ces plans, mettant ainsi le Franc-Maçon au service de la cause la plus haute qui soit.

Le spiritualisme profond de la Maçonnerie de Rite Ecossais est l'élément primordial qui la différencie de toute société profane.

Son enseignement repose sur son symbolisme strictement éso­térique car le symbole est image, le symbole est pensée.

C'est une espèce de révélation dont il faut patiemment péné­trer la signification.

Le symbolisme, véritable science ayant ses règles précises, renferme l'art de bâtir le Temple idéal qui est l'Homme d'abord, la Société ensuite au sein d'un Univers de splendeurs et de bonté.

La Franc-Maçonnerie constitue un refuge, un temple d'univer­salisme, un lieu de liberté spirituelle.

Mû constamment par sa même volonté de recherche, par son même besoin d'effort, le Franc-Maçon accepte passionnément le mouvement, il a cette espérance vers un état supérieur de l'homme, vers une fraternité qui engloberait l'univers dans une perpétuelle ascension.

Cet effort est considérable, il n'est pas à la portée de tous les hommes, mais, suivis en cela par l'effort initiatique, les Francs-Maçons le poursuivent sans trêve.

Ils fouillent profondément en eux-mêmes pour y chercher la source de vie qu'ils trouvent dans la spiritualité.

Les hommes sont des êtres spirituels engagés dans une lutte spirituelle.

Subissant cet instinct qui ne s'occupe pas de fins égoïstes, complètement libéré par son initiation, le Franc-Maçon ne cesse jamais de percevoir le sentiment d'une solidarité humaine qui tient toujours en éveil son esprit et son cœur.

Cette conquête spirituelle rend à l'homme sa dignité. Elle apporte au Franc-Maçon une paix bienfaisante qui lui donne l'intel­ligence des mystères.

Ce dynamisme spirituel permet à l'Ordre maçonnique d'être, parmi bien d'autres, l'un de ces centres d'union de l'Elite, d'où rayonnent une haute culture, une grande sagesse.

Ce choc spirituel conduit le Franc-Maçon jusqu'aux certitudes qui lui apportent le calme de l'esprit et la paix du cœur.

La Franc-Maçonnerie ne recherche pas le nombre, car cette force ne convient pas à la forme de son institution.

Aussi, la Franc-Maçonnerie opère-t-elle une sélection rigoureuse parmi les hommes qui aspirent à être dans son sein.

Cette sélection se poursuit tout au long de la vie maçonnique et l'initié Franc-Maçon s'impose constamment un travail qui l'élève chaque jour davantage.

Certes, cette sélection réduit le nombre, mais le monde est mené par l'Idée qui n'a jamais été le fait dominant de la masse.

Le grand nombre n'a que l'influence matérielle de son poids, le petit nombre a l'influence toute spirituelle du choix.

Certes, des profanes viennent constamment à la Maçonnerie, qui accueille ainsi des hommes bons et sincères, à qui elle s'est révélée par ses concepts de tolérance absolue à l'égard de toutes les opinions et de toutes les croyances.

Toutes les classes de la société, toutes les directions de la jeu­nesse fournissent à la Franc-Maçonnerie des êtres doués, épris de vérité.

L'émulation d'esprit entre tous les Francs-Maçons développe la vraie valeur de la Franc-Maçonnerie par un brassage des idées, par un mélange des conceptions dont la synthèse provoque ensuite ce sentiment réconfortant qu'acquiert l'homme parti à la recherche pure et désintéressée de la Vérité.

Le profane qui vient à la Franc-Maçonnerie y trouve des guides, des conseillers qui respectent ses convictions personnelles tout en lui donnant une formation lui permettant d'accomplir lui-même la tâche qu'il pressent et qu'il porte déjà en lui.

Le nouvel initié sait libérer son esprit de l'indolence naturelle de caractère qu'ont certains hommes qui se contentent d'accepter les affirmations définitives édictées par les religions autoritaires.

Ceux-là acceptent une apparente Vérité qu'on leur affirme absolue et totale.

Le Franc-Maçon, au contraire, part de lui-même à la recherche de la Vérité dont il veut conserver le sens philosophique.

Dans cette recherche, le Franc-Maçon apporte toute la probité qu'il pratique comme une vertu morale et non comme une approxi­mation intellectuelle.

Cette probité le Franc-Maçon la trouve dans la conscience humaine, force vivante que les dirigeants, même les plus violem­ment autoritaires, ne sont jamais parvenus à réduire et devant laquelle ils ont toujours été obligés de céder.

La conscience demeure une part indestructible de l'être, elle demeure une donnée politique profonde.

Cette conscience humaine est simplement la conscience de l'homme libéré par de rarissimes compagnes : la loyauté, la vérité, la rigueur.

Les Francs-Maçons affirment à l'intérieur de leurs Temples, comme ils le professent à l'extérieur, qu'il ne peut y avoir de rigueur et de loyauté s'il n'y a pas de vérité.

Cette vérité a sa source dans la recherche sincère et cons­tante.

Sans imposer celle qu'ils croient être la vérité du moment, les Francs-Maçons la recherchent sous ses divers aspects, avec leurs propres visions.

Les Francs-Maçons puisent leur inspiration dans le désintéres­sement qui guide leur esprit, dans la sage discipline de la connais­sance et de l'émerveillement.

Dans les divers aspects que leur présente cette recherche, ils font s'évanouir toutes les discordances par le contact étroit de la Sagesse et de la Beauté.

Les esprits libres, chez les peuples libres, ont une vive cons­cience de la diversité des propositions et des solutions.

Il est important d'habituer les esprits à la libre discussion, de les orienter vers une conception plus large des problèmes humains.

La Franc-Maçonnerie s'y emploie en permettant à chacun d'ex­primer sa libre opinion. Dans ses Temples, la controverse, large et généreuse, demeure constamment un échange d'idées, un dialogue intelligent.

Les Francs-Maçons savent que la vérité absolue n'existe pas puisque aussi bien elle suit l'évolution générale, mais elle apparaît par bribes qu'il faut bien se garder de triturer dans une intention partisane.

La Franc-Maçonnerie, c'est précisément l'apprentissage de la liberté, l'usage de la liberté dans cette quête constante de la Vérité qui nous attire et nous retient.

En recherchant cette Vérité, l'homme se crée une vie person­nelle impérissable qui l'affranchit des vicissitudes de la vie et des inquiétudes de la mort.

Le Franc-Maçon s'astreint lui-même à des disciplines : disci­pline de la pensée et de la parole, discipline mentale et morale.

Les règles qui plient l'homme trop souvent par une volonté exté­rieure ne relèvent en Maçonnerie que de la propre volonté du Franc- Maçon.

Ayant appris à se connaître, le Franc-Maçon sait s'imposer lui- même les règles qui corrigeront ses tendances désordonnées.

Si les Rituels de nos cérémonies indiquent ces disciplines, celles-ci ne sont pas seulement pratiquées au cours de nos Tenues maçonniques. Parvenu à la maîtrise de soi, le Franc-Maçon les trans­pose dans la vie quotidienne et les adapte à son usage personnel.

Dans la vie profane, le Franc-Maçon ne renonce pas à une exis­tence normale, mais il apporte dans son travail, dans ses études, dans ses relations, dans ses réflexions, des disciplines analogues à celles qu'il pratique en Loge.

Trop souvent violenté par le tumulte de la vie profane, l'esprit des hommes quête constamment un lieu de grâce qui le reposera des soucis qui l'assaillent.

Ce tumulte s'arrête heureusement au seuil des Temples : à l'in­térieur, un travail serein, un plan dégagé des contingences immédia­tes, permettent une orientation précise de l'esprit du Maçon.

Celui-ci apporte ensuite dans le monde profane une vision de la vérité qu'il a perçue, de cette vérité qu'il recherche avec opiniâ­treté dans le calme de la Loge, dans ce lieu hors de toute communi­cation avec les inquiétudes quotidiennes.

Sage et pondéré, le Franc-Maçon a son esprit toujours en éveil. Il sait aimer les idées pour elles-mêmes d'abord et aussi pour leur réalisation. Il ne prête pas aux illusions une réalité qui escompte le bonheur. Il sait que l'imagination, cette maîtresse d'erreur, doit être jugulée et ramenée aux proportions de la pure recherche.

Le travail en Loge permet aux Francs-Maçons de connaître cette influence modératrice et intelligente qui a pour objectif l'efficacité, le renouvellement, l'unité.

Certes, tous les hommes désirent progresser, évoluer, mais trop nombreux sont ceux qui ne font pas l'effort nécessaire pour libérer leur esprit des croyances qui leur ont été imposées. Leur erreur est de croire qu'ils peuvent rester ce qu'ils sont et revenir ce qu'ils voudraient être.

Il faut choisir. Le Franc-Maçon sait faire son choix et il reste optimiste, car il sait que le monde gardera ses chances de salut aussi longtemps qu'il y aura sur la terre des hommes de bonne volonté pratiquant les vertus les plus simples, partant, les plus hautes.

Dans leurs Temples, et au dehors de leurs Temples, les Francs- Maçons déploient ces qualités qui font l'honnête homme : la bonté, la loyauté, la tolérance.

Les Francs-Maçons ont aussi la Foi et l'Espérance, qui impli­quent et développent la Charité en son sens exact qui est l'Amour : amour de tous nos Frères, amour de tous nos semblables.

Guidés par l'Amour, la Fraternité, la Loyauté, la Vérité, les Francs-Maçons pratiquent naturellement les qualités maîtresses qui assurent le rayonnement maçonnique.

Aucun pessimisme, aucune critique ne peuvent les détourner de leur but.

De toute leur volonté, de tout leur coeur, les Francs-Maçons veulent aller plus loin et plus haut.

Ils poursuivent avec opiniâtreté ce besoin qu'ont les hommes de communier tous ensemble dans un même idéal.

Les Francs-Maçons de la Grande Loge de France, qui pratique le Rite Ecossais Ancien et Accepté, apportent à la recherche de cet idéal leurs qualités qui sont filles de l'Effort, de la Modestie, de l'Espérance et de l'Amour.


Publié dans le PVI N° 5 - 1éme trimestre 1972  -  Abonnez-vous : PVI c’est 8 numéros sur 2 ans

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