GLMFMM Bulletin : Khalam 10/2008

Les trois lumières de la Loge


À la Gloire du Grand Architecte de l’Univers, Vénérable Maître, vous tous nos sœurs et frères en vos rangs, grades et qualités.

Introduction
Les Trois Lumières de la Loge: com­ment faire une planche sur un sujet aussi vaste et aussi important ? Le Vénérable Maître et les deux Surveillants ont un rôle essentiel pour l’avenir d’une Loge : trans­mettre aux nouveaux venus dans chaque grade quelques clés pour comprendre les symboles auxquels nous sommes tous confrontés lors des tenues.
Tout l’avenir d’une loge repose sur leurs épaules. La formation est extrême­ment importante, car c’est celle-ci qui per­met aux jeunes maçons de devenir de bons maçons et des Hommes libres.

Pascal disait: « Il y a en Dieu assez de lumière pour ceux qui ne désirent que de voir et assez d’obscurité pour ceux qui ont une disposition contraire ». Nous pou­vons retranscrire cette phrase aux Trois Lumières de la Loge. En effet, ces Trois Lumières nous guident. Chacune d’entre elles a un rôle important et est reconnais­sable par le sautoir qu’elle porte autour du cou : le niveau pour le Premier Surveillant, la perpendiculaire pour le Second Surveillant et l’équerre pour le Vénérable Maître.

I – Les Surveillants
Quel est le rôle d’un Surveillant?
Son rôle est la mission qui lui est confiée: celle concernant la formation maçonnique. Par formation, il faut plutôt entendre forme, celle qui constitue l’indi­vidu, celle qu’il a à modeler. Il ne s’agit pas de former une sœur ou un frère, il s’agit de lui communiquer ce qu’il faut pour que lui il se forme. Donner forme à quelque chose, c’est donner du sens. Or, ce « sens », c’est la première chose à communiquer à la nouvelle sœur ou au nouveau frère.

Une fois ce sens intégré, l’axe se déter­mine de lui-même et s’offre comme l’ossa­ture d’une nouvelle construction à réaliser. La nouvelle sœur ou le nouveau frère est ainsi amené à s’engager dans la voie ini­tiatique, à s’engager dans une « pratique ». Une praxis, comme le disaient les grecs, c’est-à-dire une mise en mouvement.
Le Surveillant, vis-à-vis de la nouvelle sœur ou du nouveau frère, va agir pour qu’il entre dans cette communion. Là aussi en n’imposant pas, mais en suscitant. C’est affaire de ressentir, et c’est là le rôle « d’éveilleur » du Surveillant: éveiller la sœur ou le frère à sa propre réalité, en le tenant par la main si il le faut.
Nous sommes en effet dans une pra­tique et non dans un exercice intellectuel. Tout l’enjeu est là, et l’ensemble des outils et symboles existe pour baliser cette voie.

Le Second Surveillant
Tout d’abord, il faut préciser que l’of­fice du Second Surveillant est l’un des plus lourds de la Loge, car il assure l’ave­nir de l’Ordre tout entier. En effet, l’instruc­tion des apprentis (prélude à l’instruction des compagnons) est cette transmission du Thésaurus maçonnique qui parvient aux jeunes Maîtres afin de leur permettre un approfondissement continu pour qu’ils puissent, à leur tour, transmettre ce qu’ils ont reçu aussi bien qu’ils le peuvent. Tout cela pour dire à quel point le Second Surveillant doit être un Maître confirmé, expérimenté, dévoué, disponible, ayant la pleine confiance de ses sœurs et frères. S’il en était autrement, les apprentis deviendraient vite de mauvais compa­gnons, ce qui aurait pour conséquence de perturber la Loge à plus ou moins brève échéance.

Cela étant, on ne peut pas parler du Second Surveillant sans parler de son outil : le fil à plomb ou la perpendiculaire. Ce bijou, que représente-t-il ? Dans le rituel d’installation des officiers dans les Loges de Memphis-Misraïm, le Vénérable Maître dit au Second Surveillant: « C’est de tout cœur et avec une grande joie que je vous nomme Second Surveillant et que je vous remets les insignes de votre charge. La Perpendiculaire étant le symbole de la profondeur dans l’observation, signifie que vous devez soigneusement observer les apprentis afin de les mieux guider dans la voie de l’Art Royal ».

Pourtant, une perpendiculaire, si la direction n’est pas précisée, est une droite orthogonale à une autre tout en lui étant sécante et peut donc être tracée dans une infinité de directions. Entre les deux, il peut y avoir une infinité de perpendicu­laires.

À l’apprenti qui travaille sa Pierre Brute, la verticalité axiale de la perpendiculaire montre le chemin rectiligne de l’Initiation, les Maîtres lui disent: « Visite l’intérieur de la Terre et en rectifiant tu trouveras la Pierre Cachée ». C’est l’introspection, la descente aux enfers, la plongée à l’intérieur de soi pour découvrir notre être véritable, avec ses qualités et ses défauts. Voltaire disait: « à quoi nous servent nos lumières si nous conservons nos abus ? » En éliminant ceux-ci, nous polissons notre Pierre afin qu’elle devienne un véritable diamant. Nous pouvons ensuite remonter vers la Lumière et faire étinceler ce bijou de mille éclats pour le Bonheur de tous les êtres.

Le Premier Surveillant
Le Premier Surveillant s’occupe des compagnons.
Le compagnon passe de la perpendicu­laire au niveau, de la verticale à l’horizon­tale, et rompt avec le Silence. En rompant avec le Silence, l’apprenti est supposé s’être refondé et réorienté, et il est demandé à présent d’élargir cette harmonie intérieure à ses actes, de tendre à une harmonie glo­bale entre conscience et actes.
Le premier acte de cette mise en mou­vement est la prise de parole du compa­gnon en Loge. À ce moment précis, le compagnon s’articule avec la Loge. C’est la première impulsion sans laquelle le reste ne pourrait suivre. Tant que ce moment majeur n’a pas eu lieu, l’apprenti n’est pas devenu compagnon car, symbo­liquement, en se livrant à la Loge, il se livre au monde.

Le niveau, symbole du Premier Surveillant, symbolise le passage du com­pagnon de la verticale à l’horizontale.
Le niveau, en effet, est formé d’une équerre dite «juste », c’est-à-dire ouverte à 90°, au sommet de laquelle est fixé un fil à plomb, la perpendiculaire, qui passe au droit d’une barrette graduée, et dont la position du fil sur le 0 permet de détermi­ner l’horizontalité des jambages de l’équerre. Ainsi, le 0 détermine la verticale et la ver­ticale détermine l’horizontale. On ne peut donc passer à l’horizontale qu’après être passé par la verticale, c’est-à-dire après s’être recentré. C’est uniquement dans cet enchaînement que se réalise notre démarche.

En intervenant au début de ce chemin pour mettre la nouvelle soeur ou le nou­veau frère sur la voie, les Surveillants ont un rôle crucial et délicat. Crucial, car si ces deux premiers degrés ne sont pas com­pris, il faudra dix ans à la soeur ou au frère pour se remettre en selle. Délicat, car cette transmission du sens et de la pers­pective pour la soeur ou le frère sur le che­min demande de l’engagement, demande de la part des Surveillants une connais­sance approfondie du Rite avec le risque de se tromper de voie.

II - Le Vénérable Maître
Il convient de préciser ici que si le Vénérable Maître est plus particulièrement chargé de parfaire la formation des Maîtres, il peut intervenir quand il le sou­haite pour former les apprentis et les com­pagnons. Ce n’est pas parce qu’il délègue la mission de formation aux Second et Premier Surveillants qu’il doit se désinté­resser du devenir des jeunes soeurs et frères. Il devra même intervenir souvent si les formateurs manquent de connais­sances et d’expérience dans le domaine du symbolisme et de l’initiation.
Comme le Premier et le Second Surveillant, le Vénérable Maître possède un outil qui est l’équerre.

L’équerre est un outil. Elle est un sym­bole également et peut-être le plus pré­sent des symboles dans le Temple maçonnique.
Elle est doublement présente à l’Orient, d’une part comme désignant la fonction du Vénérable Maître et, d’autre part, comme reposant sur son plateau. Elle est également présente au centre du Naos en tant que l’un des trois Joyaux de la Loge.

Les trois colonnettes qui encadrent le pavé mosaïque sont disposées en équerre.
L’entrecroisement formé à l’ouverture et à la clôture des travaux par la canne du Maître des Cérémonies et l’épée de l’Expert adopte également cette forme.
Après l’ouverture des travaux, nous devons nous déplacer en Loge en mar­quant l’équerre aux angles du pavé mosaïque.

Du point de vue matériel, l’équerre est un objet qui, dans notre tradition, indique l’angle droit de 90° et dont se servent les architectes et les travailleurs du bois et de la pierre.
L’équerre, dans son principe, est pré­sente en tout et partout, même si elle n’est visible nulle part dans la nature car, si la nature et toute vie obéissent à la loi repré­sentée par l’équerre, l’angle droit n’est présent que de façon fortuite dans les formes naturelles.
Associant une ligne verticale et une ligne horizontale, l’équerre vient du ciel et de la terre.

Chez les bâtisseurs, l’union du niveau et du fil à plomb forme l’équerre, et on peut dire que l’équerre du Vénérable Maître se dédouble en Loge dans les attri­buts des deux surveillants.
Les attributs des « trois qui dirigent » à travers les fonctions du Vénérable Maître et des Premier et Second Surveillants sont en rapport avec leur rôle auprès des œuvrants.
L’équerre du Vénérable Maître marque sa fonction de responsabilité dans la direction de la Loge. Le Vénérable Maître dirige par l’équerre, c’est-à-dire que son devoir est de rendre la Loge en conformité avec la Règle qui, n’étant pas d’essence humaine, ne saurait devenir son bijou.

Ceux des deux surveillants sont d’une autre nature. Ils s’adressent directement au travail de l’être qui se construit en par­ticipant à la construction du Temple.
L’équerre du Vénérable Maître vérifie la rectitude du plan d’oeuvre tout comme, dans l’imagerie médiévale la fonction de Maître d’oeuvre est généralement identi­fiable au fait qu’il tient une règle, un com­pas, ou encore, le plus souvent, une équerre.

Le symbole est là pour révéler la nature de l’Orient. Il fait prendre conscience de ce qu’est la vie de l’Orient: la vie, la loi de création placée à l’Orient par le Grand Architecte de l’Univers, c’est l’équerre, et ce qui est inscrit dans l’équerre, c’est le chemin de rectitude.
En siégeant à l’Orient, le Vénérable Maître, porteur de l’équerre, donne le sens de la démarche initiatique, plus rigoureuse que toute forme de morale.

Conclusion
Les Trois Lumières de la Loge ont donc un rôle essentiel : assurer l’avenir d’une Loge en particulier et, par exten­sion, de l’Ordre tout entier. Elles sont les guides des trois premiers degrés maçon­niques.
Dans une Loge, tout est symbole. Son avenir repose sur la bonne compréhension de ces symboles. Chaque loge maçon­nique possède ses propres symboles même si certains sont communs à toute la franc-maçonnerie. Il est donc capital que des Maîtres expérimentés transmettent leur savoir, leur héritage aux «jeunes» maçons pour que les différentes traditions se perpétuent.

On trouve dans le rituel du premier degré que « Trois la dirigent, cinq l’éclai­rent et la rendent juste, sept la rendent parfaite ».

Nous avons dit, Vénérable Maître.

Planche collective des apprentis de la Respectable Loge Sothis, Orient de Nîmes.

Publié dans le Khalam - Bulletin N° 26 - Octobre 2008

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