GLMFMM Bulletin : Khalam 03/2004

Le Langage des Oiseaux

L'oiseau est un symbole, celui de la liberté, celui de l'évasion vers des contrées lointaines dont nous avons rêvé, celui de la migration, mot magique de déplacement que nous fait revivre le merveilleux film de Jacques Perrin " Le Peuple Migrateur ".

Notre vie ne peut pas être en perma­nence conduite par le matériel, le biolo­gique ou le rationnel, elle doit garder son sens grâce à la beauté qui demeure malgré tout, tout autour de nous, et à cette part de rêve qui nous habite tous, et parfois nous conduit au delà de nous mêmes.

Regardons de plus prés ce jardin secret, l'oiseau peut nous y aider.

Si l'on essaie de suivre la piste des civi­lisations disparues, l'on peut remarquer la fréquence de certains signes et sym­boles associés aux oiseaux, et particu­lièrement sur les hauts lieux de la Connaissance. Les initiés qui nous ont précédés depuis des millénaires ont tou­jours tenté de nous faire parvenir des messages secrets, soit peints ou gravés dans la pierre, depuis les plus sombres cavernes de la préhistoire jusqu'aux temples pharaoniques des plus brillan­tes civilisations, et ce, très souvent par l'intermédiaire des oiseaux . Ces mes­sages révèlent entre autres que dès la première période, c'est à dire environ 20.000 ans avant notre ère, le prodi­gieux savoir de nos lointains ancêtres, que nous jugions n'être que de simples brutes tout juste capables de tailler des cailloux, mais qui, paradoxalement, nous ont laissé des peintures rupestres si admirables, que même les experts de la préhistoire refusèrent longtemps d'admettre leur authenticité.

Il est pour le moins curieux de constater que les grottes initialement destinées à devenir des sanctuaires étaient choisies selon une véritable connaissance des courants telluriques et cosmiques. C'est ainsi qu'ils en sont même arrivés à transformer la topographie et le plan des lieux afin d'en renforcer l'atmosphè­re magico-religieuse. Les grottes de LASCAUX, par exemple: le plan des grottes représente deux oiseaux, l'un figure un gigantesque échassier et l'aut­re ressemble à un oiseau sur un per­choir, vu de dos avec le bec levé.

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Quand on sait l'importance du message de l'oiseau, on ne s'étonnera pas de le retrouver dans la topo­graphie même de ces lieux qui sont pra­tiquement tous orientés d'Est en Ouest, axe de la manifestation divine, axe d'où s'accomplit également le cycle initia­tique de la Vie et de la Mort.

Les oiseaux ont eu un rôle prépondérant dans toutes les légendes mythologiques et religieuses, symbole universel de la création avec " l'Oeuf -Cosmique ". Dans la Bible, un passage de la Genèse en fait aussi mention: " L'Esprit de Dieu planait au dessus des eaux primordiales tel un oiseau ".

Tous les peuples furent frappés par la naissance de l'oiseau issu du germe de l’œuf à l'intérieur d'une coquille protec­trice qui devait évoquer pour eux abri et sécurité, dans la chaleur, l'ombre et le secret de la matrice, mais avec le désir insensé de briser cette coquille qui fai­sait office de prison , pour s'envoler vers la Vie, la Lumière et la liberté.

Cet " Oeuf Primordial " a été à l'origine de multiples croyances. Mais comment expliquer alors que les peuples répartis sur l'ensemble de la planète aient choisi ce même symbole de l'oiseau pour transmettre leurs messages ?

Et pourquoi la majorité d'entre eux ont- ils pris pour définir la création du monde le même symbole de " l'OEUF-COS­MIQUE "?

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Robert Fludd, médecin et alchimiste spagyriste Rosicrusien

Plusieurs réponses semblent plausibles. La naissance de l'oiseau sortant de son oeuf devait présenter aux temps les plus reculés un sujet magique et d'étonne­ment pour ces hommes primitifs.

Ils en firent donc le symbole de toute Vie, accréditant jusqu'à nos jours le mythe d'un " Oeuf-Primordial ".

Or, ce qui semble incroyable, c'est que cette idée de la création du Monde issue d'un " Oeuf-Cosmique " à l'iden­tique de l'oiseau est universelle.

Dès l'origine, les yeux de nos ancêtres ne pouvaient que se lever vers les cieux d'où venait la Lumière et la chaleur du soleil source de Vie, la nuit étoilée, la clarté lunaire, la pluie fécondante, mais aussi les terribles orages ponctués d'é­clairs et de coups de tonnerre qui fai­saient naître en eux le respect et la crainte de tout ce qui venait de la voûte céleste .

Ces phénomènes qui nous semblent naturels, ils les confondirent très vite avec les Dieux dont ils voulurent s'attirer les bonnes grâces.

Seul l'oiseau était capable de s'élever dans les airs à la rencontre de ces divi­nités. Il fut donc tout naturellement dési­gné pour servir d'intermédiaire, de Messager en quelque sorte, entre les dieux et les hommes.

Selon PLATON, les âmes sont ailées, seules capables de quitter le corps. Celles qui atteignent la perfection s'élè­vent dans les cieux sans difficulté, leur pureté fortifiant leurs ailes, les autres se bousculent, se heurtent dans leur tenta­tive d'ascension et leurs ailes se brisent.

L'âme qui a perdu ses ailes tombe et s'incarne dans la matière, c'est -à -dire un corps terrestre où elfe reste enfer­mée avant de se libérer à nouveau , par la Mort qui est la destruction physique du corps qui l'emprisonne . Elle peut alors retourner à l'Orient qui est la patrie originelle de toutes les âmes.

Quel que soit le Pays, de tout temps il a été admis que les âmes des morts s'en­volaient comme des oiseaux. Le Thème primordial des divinités ailées, de l'Esprit Saint, demeure toujours vivant dans la religion.

Souvenir des anciens mythes, on retrouve le symbole de l'oiseau qui figure sur les bijoux, les pièces de monnaie, les étendards, les blasons et armoiries. L'Aigle, par exemple, est considéré comme le Roi des oiseaux, il est le symbole de la puissance, il conduit les armées à la victoire. Il est l'emblème de nombreux Pays ou règne en maître la dictature.

On le retrouve également bicéphale sous le saint empire Romain germa­nique. Il semble bien malgré tout que les victoires auxquelles il présidait ne furent que passagères et n'empêchèrent pas les grands empires dont il était le sym­bole de s'écrouler lamentablement dans le feu, dans le sang et le malheur.

Je voudrais terminer ce paragraphe par une note plus gaie mais malgré tout énigmatique et vous conter l'histoire de cette communauté qui existait jusqu'au 18° siècle et qui se situait dans le Sud Ouest de la France et le Nord Ouest de l'Espagne, c'est à dire le pays Basque.

C'étaient une caste d'intouchables ana­logue à celle des parias Indiens. Tous ses membres faisaient l'objet d'une rigoureuse ségrégation. Ils étaient confi­nés dans des ghettos, astreints à porter un signe distinctif : " Une patte palmée de couleur rouge, cousue sur la manche droite de leur vêtement ".

Ils n'avaient pas le droit d'entrer dans les églises par la grande porte, ni de trem­per leurs doigts dans le bénitier com­mun, le prêtre ne leur tendait l'hostie qu'au bout d'un bâton, ils ne se mariaient donc qu'entre eux, et à leur mort, ils n'avaient pas droit non plus à une sépulture décente dans le cimetière.

On les enterrait dans les fossés, ou sur le rivage de la mer. Ces parias se nom­maient " LES CAGOTS ". Le sort révol­tant qui leur était fait est très surprenant. Pour expliquer cette ségrégation, l'on se bornait à affirmer que les CAGOTS étaient en fait des GAVOTS et l'on pré­tendait même que " Gavot " signifiait Lépreux.

Etymologiquernent, Cagot est la contraction du mot " Canis-Goth ", c'est à dire " Chien de Goth ", qui pouvait se traduire par serviteur fidèle des Goths, exactement comme l'on appelait les pères Dominicains " DOMINI-CANIS " c'est à dire " Chiens de Dieu ", en raison de leur fidélité exemplaire à l'église catholique et romaine.

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Il semblerait que les CAGOTS n'au­raient pas été les descendants des Goths, mais ceux d'une corporation que les Goths envahisseurs auraient emme­nées avec eux pour accomplir certains travaux. Ainsi on pourrait mieux com­prendre la ségrégation de ces Cagots. Toujours étymologiquement, le mot " Ségrégation " est synonyme de sacra­lisation.

Le mot sacré vient du mot SACER qui signifie : " séparer " ; de là vient égale­ment le mot " SACERDOCE ", car à l'o­rigine c'est l'exercice de métiers tenus pour magiques qui fait de certains hom­mes des gens à part vis à vis de la com­munauté. Or, il se trouve que ces

" CAGOTS " exerçaient bien une activi­té définie qui présentait justement le caractère magique sacerdotal. Ils étaient tous exclusivement : Maçons, Charpentiers, Tailleurs de pierre, Forgerons, et se consacraient spéciale­ment à la construction des édifices reli­gieux. Nos constructeurs des cathédra­les, en quelque sorte.

La légende ferait des CAGOTS les des­cendants des constructeurs du Temple de Salomon. Cette légende est celle du compagnonnage médiéval, lui-même Père de la Franc-Maçonnerie spéculati­ve.

Mais, vous allez me dire : " quel rapport peut il y avoir avec cette planche sur les oiseaux ?

Je vous ai dit tout à l'heure que les Cagots ou Gavots, nous les trouvions dans les Pyrénées, en pays Basque. Les Gavots, ce sont en effet les hom­mes des gaves, des torrents monta­gnards de ce pays. Mais les gaves, parce que leurs eaux sont chantantes, tirent eux mêmes leur nom du Ove, c'est à dire du gosier des oiseaux.

Les Gavots seraient donc aussi ceux qui parlent cette langue mystérieuse des initiés appelée " Langue des Oiseaux ". Cette langue dont Rabelais, Cyrano de Bergerac et Fulcanelli n'ont parlé qu'à mots couverts, ce qui a fait s'interroger beaucoup de curieux sur ce sujet.

A ceux qui se demandent ce qu'était à l'origine la Langue des oiseaux, préci­sons que la clé de l'énigme se trouve précisément en plein pays de la GAGO­TER1E, dans un village que peuplèrent jadis les Cagots, et qui porte le nom des anciens dieux Goths. Le village se nomme : " Aast " (64460) Pyrénées Atlantiques.

C'est là que l'on peut rencontrer et entendre les derniers " SILURS ". Les Silurs sont des bergers montagnards qui pratiquent encore la langue des oiseaux dans sa forme originelle. Ils communi­quent entre eux au moyen de siffle­ments modulés; chaque modulation du sifflement est une syllabe et l'ensemble de ces syllabes forment les phrases d'une langue complète.

Cette langue qui n'existe plus que dans le village de Aast, depuis des temps immémoriaux, est pour ceux qui la pra­tique un moyen d'expression tout à fait naturel.

Le sifflet est beaucoup plus difficile que l'Anglais, nous disent-ils d'une façon humoristique.

D'abord c'est une langue que l'on peut employer sans risque d'être compris par des indiscrets et c'est aussi la seule lan­gue téléphonique du monde car elle per­met de communiquer jusqu'à une dis­tance de 2,5 Km en plaine et à 14 Km en montagne.

L'étrangeté et la rareté de la langue sif­flée a amené des anthropologues à lui consacrer un colloque international dans les années 1959.

Ce colloque a mis en évidence un fait assez troublant. Les sonagrammes des Silius sont identiques à ceux réalisés sur les dauphins. De là à conclure qu'a­vec le chant des oiseaux et les manifes­tations acoustiques des dauphins, les sifflements humains sont peut être les rameaux divergents d'un tronc commun qui pourrait être la langue originelle, une sorte d'Espéranto primitif et universel.

ll est quand même curieux de constater que les conclusions scientifiques rejoi­gnent le vieux thème, si cher aux her­métistes, d'une langue primitive commu­ne à l'homme et aux animaux et tout particulièrement à l'homme et au dau­phin, animal qui joue un rôle éminem­ment symbolique dans la mythologie antique et aussi en Alchimie.

La langue des oiseaux ne peut ni se lire, ni s'écrire, c'est une langue pure­ment phonétique, immédiatement accessible aux illettrés, mais en même temps inaccessible au commun des mortels. C'est bien pourquoi les hermé­tistes ont baptise la Langue des oiseaux " Cabale Phonétique ".

J'ouvre ici une parenthèse car il est bon de préciser que la Kabbale Hébraïque avec un " K " ne s'occupe que de la Bible , tandis que la Cabale avec un " C " c'est la Cabale Hermétique qui s'ap­plique aux livres, textes et documents des sciences ésotériques de l'antiquité, du moyen-age jusqu'à nos jours.

Je ferme la parenthèse. C'est une véritable langue sans écriture reposant uniquement sur la lecture phonétique de rébus et sur la connaissance de l'Argot. C'est celte qui per­met de déchiffrer les figures symboliques

sculptées sur les cathédrales Gothiques. Les symboles ont un sens, voire plusieurs sens, car certains sont très riches, et la compréhension du langage des symboles (langage alchi­mique par excellence) implique un long apprentissage par la réflexion ou par l'expé­rience sur le terrain (visites de site ou de cathédrale), et surtout il est pratiquement impossible de transmettre ce que l'on ressent, si ce n'est par d'autres symboles.

C'est l'exemple du E=MC2 que tout le monde connaît mais dont peu de gens peuvent pénétrer les arcanes mathéma­tiques de cette formule. Mais tout le monde en connaît les applications rela­tives à l'énergie atomique.

Le langage des oiseaux est une jolie musique, elle attire même si on ne la comprend pas. C'est ainsi que nomb­reux sont ceux qui se sont lancés dans leur quête personnelle du GRAAL sans raison exprimable, seulement à cause de telle cathédrale visitée ou telle belle légende lue. Ils sentent qu'ils ont soule­vé un coin du voile, et ne peuvent plus l'oublier, car telle pourrait être la quête du Saint Graal, une simple quête du Saint- Bol.

Le langage des oiseaux est le plus sou-. vent l'utilisation de rébus ou de jeux de mots qui ont pour but de coder des oeu­vres ou des livres à des fins soit poli­tiques ou ésotériques.

C'est là l'essence même du vrai secret initiatique, transmis par des rituels sym­boliques. Il est inexprimable, car il est de l'ordre du ressenti. Ce langage symbolique fait prendre des raccourcis de pensée, c'est le même principe que l'u­tilisation de signes en mathématique ou en physique, qui par le langage symbo­lique, permet à des gens de transmettre des concepts énormes sans se parler, par simple signe.

C'est ainsi que la LANGUE DES OISEAUX a été utilisée dans de nombreux ouvrages tels que : Rabelais. Cyrano, Don quichotte, les contes de ma mère l'oie, les voyages de Gulliver de SWIFT; d'ailleurs, Swift Jhonatan avait déjà publié à son époque, un livre sur le " PUN " où l'art de faire des jeux de mots.

Actuellement, nous parlons souvent de l'Art Gothique, mais savez vous que c'est tout simplement une déformation du mot " ARGOTIQUE ". La cathédrale est une oeuvre D'ART GOTH ou d'ARGOT.

Mais qu'est ce donc que ce mot Argot? On le définit comme étant un langage particulier à tous les individus qui ont intérêt à communiquer leur pen­sée sans être compris par ceux qui les entourent.

Tous les initiés s'exprimaient en Argot, aussi bien les truands de la cour des miracles que les poètes, les FRIMA- SONS du moyen âge (Les Logeurs du Bon -Dieu), les Francs- Maçons, qui édifièrent les chefs-d’œuvre Argotiques que nous admirons aujourd'hui.

La fameuse phrase ; « Il pleut »  que l'on se dit lorsque nous ne sommes pas à couvert, est un bel exemple d'argot maçonnique.

Mais ce terme argot désigne avant tout un peuple avant de désigner son langa­ge. De quel peuple s'agit il? C'est le peuple des gueux, mais qui pouvaient bien être ces gueux ou Argot ? Eh bien tout simplement les GOTHS, car ARGOT est formé du mot Germain " ARG ", qui signifie malin, et " GOTE " c'est à dire " GOTH ", mais aussi Goth­malin ,tout comme le Français désigne à la fois l'homme français et la langue française.

L'argot désigna jadis à la fois l'ARG­GOTE, le GOTH-Malin, et sa langue incompréhensible pour l'étranger.

L'argot désigna par la suite par exten­sion la langue incompréhensible des constructeurs de cathédrales , qui avaient recueilli la tradition des Goths- malins, celle de la Cagotterie, puis celle de la Coterie, c'est à dire des compa­gnons secrètement réunis dans leur Loge, langue pour initiés et donc langue verte puisque le vert est la couleur de l'i­nitiation.

Tout comme les " DEVOIRANTS " étaient des " DEVORANTS ", la Coterie devint par calembour la " Gotherie ". Voilà pourquoi l'on a pu dire que l'Art Gothique était Argotique...

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Voilà pourquoi l'on pourra retenir qu'une caste privilégiée devait être à l'origine parti­culièrement proche des oiseaux pour que ces Initiés les choisissent pour transmettre leur langage secret.

Ils en firent même le symbole du lien éternel entre la Terre et le Ciel, et le Ciel avec le Cosmos.

Albert DEBANNE

Nous ne retiendrons que ces Liens, qui nous permettront, à nous tous, de s'élever au dessus de la matière, des haines, des rivalités de classes, de races, ou de pays.

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 Que le G.A.D.L.U. fasse que ce symbole de tolérance, de paix et de fraternité reste toujours présent en nos cœurs.

Publié dans le Khalam - Bulletin N° 12 - Mars 2004

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