GLMFMM Bulletin : Khalam 10/1999

Aux Origines des Rites Egyptiens

Tel le fleuve qui tente remonter sa source, nous nous interrogeons et comme Janus, puissions nous dévisager le passé pour nous élancer vers l'avenir

Des siècles, des années, nous ont fait parfois oublier ce que d'autres ont initié et construit à l'abri des regards indiscrets. Mais il nous faut aussi savoir démêler le faux du vrai, la légende de la réalité pour réunir ce qui est épars.

L'historien peul aussi, à sa façon y participer. Sa discipline exige méthode et rigueur. Sa matera prima, ce sont des textes, des documents, qui permettent de confirmer ou d'infirmer telle ou telle information.

Je vous convie donc à dénouer les fils mystérieux qui tissèrent l'histoire de la Maçonnerie Egyptienne. A l'identique d'une investigation policière, nous disposons de témoignages, de mobiles et de faisceaux de présomptions.

L'histoire de la Maçonnerie présente en outre une difficulté supplémentaire: l'absence de documents fiables, peut parfaitement s'expliquer et ne justifie jamais qu'on en tire des conclusions trop hâtives.

Ils ont pu être volontairement soustraits simplement détruits.

Alors il nous faudra réinventer les divers courants de pensée qui ont pu générer l'éclosion des Rites Egyptiens. L'influence d'un homme tel que Cagliostro, semble avoir été déterminante dans cette entreprise.

Je m'appuierai sur des recherches que je mène actuellement dans le cadre d'une thèse à l' E.P.H.E ou sous la direction de l'éminent Antoine FAIVRE.

Pour ce qui nous concerne, j'ai pris comme axe de travail les quatre mentions portées sur tous les documents de l'Ordre International du Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm :
          Rite Primitif 1721
          Rite Primitif des Philadèlphes 1779
          Rite de Misraïm Venise 1788
          Rite de Memphis Montauban 1815

Tout d'abord, évoquons rapidement le contexte historique :

On assiste durant tout le 18e siècle et dans toute l'Europe à une véritable mode égyptienne ou égyptomanie, dont voici quelques exemples: 1751: Rameau écrit un ballet-opéra «La naissance d'Osiris», 1791; Création de la Flûte Enchantée de Mozart : 1795 : l'écrivain mystique Eckartahaussen fait paraître son roman «le Voyage de Kosti » dans lequel le héros, fils d'un prince indien suit un fabuleux voyage initiatique jusqu'à la Grande Pyramide d'Egypte. Ect. ect      la liste est longue et m'arrêterai là.

Dans le Monde Maçonnique, qu'en est-il ?

Le manuscrit Regins réglant la Franc-Maçonnerie opérative au XV éme siècle, met en scène le clerc Euclide « qui a fondé cet art de la géométrie dans les pays d'Egypte et enseigna à Alexandrie».

Les constitutions d'Anderson, en 1723, scellent la naissance de la Franc-Maçonnerie spéculative . il y est dit que « l'Art Royal fut apporté en Egypte par Misraïm, second fils de Cham ». l'inondation régulière des rivages du Nil a suscité un progrès en géométrie, qui, en conséquence, mit la maçonnerie fort à contribution.

Remarquons que pour Anderson l'Egypte n'apparaît pas comme le vecteur d'une quelconque pensée ésotérique.

Et pourtant... Tout au long du 18e siècle, une idée se développe; l'Egypte serait la véritable source de l'initiation.

Depuis le 15eme siècle, l'occident a renoué avec la pensée hermétique. Le Corpus Hermeticum est traduit en 1471 par Macil Ficin. Son auteur — mystique - est Hermès Trisemégiste, , -2J derrière lequel, selon Antoine FAIVRE, se f l'image de Thot, le dieu de la sagesse pharaonique. Dans sa thèse, Gerard GALTIER défend l'idée que le Corpus Hermeticum constituerait le fonds doctrinal des Rites Maçonniques Egyptiens. En 1654, le très savant jésuite Athanase KIRCHER publie un monumental ouvrage « Oedipus Aegyptianicus » où il évoque l'Egypte des faits, des légendes, des symboles et des sciences, voire même des sciences occultes.

De plus, une idée force traverse l'Europe depuis Michel Maîer (1568-1622): l'Egypte serait considérée comme l'ancêtre mythique de la Rose + Croix.

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Dès 1731 un ouvrage réédité en 1794 et en 1818, va fortement marquer la Franc-Maçonnerie de l'époque et influencer la création de la plupart des Rites Egyptiens:

« Séthos ou une vie tirée des monuments et anecdotes de l'ancienne Egypte», ouvrage qui décrit les épreuves initiatiques dans la Grande Pyramide et les Temples de Memphis. Mais aussi, dans la décennie qui suivait la naissance de la franc-maçonnerie spéculative, certains collèges hermétiques s'alarment et tentent de ramener le courant maçonnique sur son axe initial, à savoir, perpétuer la science d'Hermès.

Rite Primitif 1721 :

Ainsi, en 1721 le Rite Primitif est créé par 7 Chapitres fondateurs dont les patentes exposent un but explicitement rosicrucien : une réforme générale et globalisante de la science et de la religion.

Rite Primitif des Philadelphes - 1779 : En 1779, le vicomte François Anne de CHEFDEBIEN réveille le Rite Primitif et crée, avec ses 6 fils, tous Officiers et Chevaliers de Malte, le Rite Primitif de Narbonne ou des Philalèthes. Même si le fait n'est pas clairement attesté, nous en revendiquons la filiation.

Nous en reparlerons plus tard avec la naissance du Rite de Memphis.

Le Rite des Philadelphes ne fait pas de référence particulière à l'Egypte.
Néanmoins, il s'attribuait une origine orientale et pratiquait la théurgie.

Très succinctement, analysons, en cette seconde moitié du 18° siècle, les différents Rites Maçonniques qui se réfèrent explicitement à la tradition Egyptienne :

1767 : Création à Berlin par Friedrich VON KOPPEN, membre éminent de la Stricte Observance Templière du Rite des Architectes Africains et des Parfaits Initiés d'Egypte. VON KOPPEN était aussi l'auteur du « Crata Repoa» ou Initiation aux Anciens Mystères des prêtres d'Egypte, en 7 grades. Traduit en français par le F.•. BAILLEUL, en 1821, Marconis de NEGRE s'en inspira probablement pour fonder Memphis. il en avait bien eu connaissance puisqu'il publia une adaptation de cette traduction dans son livre « Le Rameau d'Eleusis » sans toutefois en préciser la source.

1750 : Rite Hermétique et Alchimique dit aussi « Etoile Flamboyante», fondé par le baron TSHOUDY. Son catéchisme destiné aux apprentis, compagnons et profès est en fait une description du Grand Œuvre avec en parallèle l'explication alchimique des principaux symboles Maçonniques. Selon Michel MONNEREAU, « nous retrouvons sans équivoque la voie alchimique interne qui s'exprime notamment dans les Arcana Arcanorum ou Régime de Naples». Très curieusement, le Baron TSHOUDY a bénéficié de la haute protection du prince Raimondo di SAN SEVERO, Grand Maître de la Maçonnerie Napolitaine vers 1750 et très ferré d'alchimie.

Nous retrouverons Naples à la croisée de beaucoup de nos chemins.

Le théâtre est maintenant en place. Les 3 coups de la Maçonnerie Egyptienne vont pouvoir retentir ; reste à distribuer le rôle principal. Il reviendra à Joseph BALSAMO (1743-1795) d'en assurer la postérité.

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Rite de Misraïm - Venise 1788

BALSAMO est beaucoup plus connu sous le titre de Comte Alexandre de CAGLIOSTRO, sorte de nomen mysticum qui lui avait été conféré lors de son premier voyage à Malte en 1766. il travaille alors l'alchimie avec le Grand Maître de l'Ordre de Malte, Manuel PINTO DA FOUSECA. Il y retourne en 1775 et y retrouve son ami, le Chevalier d'AQUINO, Grand Maître de la Maçonnerie Napolitaine et cousin du Prince di SAN SEVERO dont nous venons de parler. Toute une légende s'est développée autour de CAGLIOSTRO.

Sa vie est en soi une fiction et en parler éclipserait notre propos. Quelques mots tout de même pour camper le personnage :
Il est issu d'une famille modeste de noble ascendance. Elevé dans la chrétienté, il se fera pourtant connaître au début de sa vie par quelques forfaitures sans grande ampleur. Puis rupture brutale: On le retrouve 10 ans plus tard voyageant dans toute l'Europe, reçu avec beaucoup d'égards par les par les Princes de l'époque. Ses dons de guérisseur lui valent les foudres de l'académie de médecine.

Combien d'anecdotes relatent son plus grand dévouement pour les indigents et sa générosité sans limite.

On ne lui connaît aucune espèce de ressources. Lui et sa femme Lorenza vivent pourtant dans la plus grande aisance.

Il séduira le Prince Cardinal de ROHAN et sera compromis, comme ce dernier, dans la sombre affaire du collier de la Reine. Cet épisode marque un terme à sa vie mondaine mais accroît paradoxalement sa popularité : embastillé, jugé devant le Parlement, acquitté, puis libéré le 1er juin 1786, une lettre de cachet l'expulse.

Il prédit la fin de la monarchie, des lettres de cachets et la convocation des Etats Généraux. Il évoque même le temps où chacun pourra librement fouler le sol d'une bastille oubliée.

De 1786 à 1795, sa vie est succession d'exils: Londres, Bâle, Turin, Rovoreto et en 1789 le couple échoue à Rome.

Sa femme contre toute attente témoigne contre lui : il sera inculpé d'hérésie, de magie et de Franc-Maçonnerie. Emprisonné au château Saint Ange, il est condamné à mort le 7 avril 1791, peine aussitôt commuée en perpétuité. Sa femme est enfermée dans un couvent où elle meurt en 1794. Il purge sa peine à la forteresse San Léo. Après nombre de sévices, il succombe le 26 Août 1795.

Les bataillons Français lors de la campagne d'Italie de BONAPARTE arriveront aux portes de Rome fin 1797. Aussitôt les officiers s'enquièrent de CAGLIOSTRO. On leur apprit qu'il était mort. En guise de représailles, le général DUBROWSKI fit sauter la forteresse.

Revenons à sa vie d'initié. Selon G. VENTURA, ancien Grand Maître du Souverain Sanctuaire Adriatique, qui en l'occurrence ne cite aucune source, CAGLIOSTRO aurait ramené de Malte à Naples en 1767 des rituels auxquels il aurait ajouté, sur les conseils d' ALTHOTAS son maître mythique, les Arcana Arcanorum.

Michel MONNEREAU, détenteur de ces degrés ainsi que Robert AMADOU, disciple de Robert AMBELAIN, des historiens, comme Serge CAILLET ou Denis LABOURE défendent la même thèse, Aucun élément tangible néanmoins nous est présenté.

Mais s'il manque la lettre, tentons de saisir l'esprit exotérique de ces Arcana Arcanorum puisque nous nous, plaçons sur le plan de la recherche historique.

CAGLIOSTRO fonde en 1780, à Strasbourg la première loge où le Prince Cardinal de ROHAN sera initié. Il vient de créer son rite de haute Maçonnerie Egyptienne. Son originalité nous dit Serge CAILLET est telle qu'il tient une place à part parmi les Rites Hermétiques car ce rite là est vraiment initiatique.

Les références explicites à l'Egypte sont rares. Son système maçonnique fonctionne à 3 degrés ; Apprenti, Compagnon, Maître mais n'est accessible qu'aux seuls maîtres maçons «ordinaires». Les grades : d'Apprenti et de Compagnon ne diffèrent pas radicalement des grades d'autres systèmes. Le nouveau Maçon n'y est accepté qu'en accord avec les saints anges de Dieu interrogés pour la circonstance par un enfant, nommé pupille ou colombe. L'alchimie, la recherche de l'immortalité et la théurgie angélique tiennent une place centrale. Dans les 40 degrés spirituels de Haute Maçonnerie Egyptienne, CAGLIOSTRO précise que « chacun recevra en propre le pentagramme, c'est à dire cette feuille vierge sur laquelle les anges primitifs ont imprimé leurs chiffres et Leurs sceaux, muni de laquelle il se verra maître et chef d'exercice ».

A la clé; régénérer l'homme dégénéré, c'est à dire celui d'après la chute. Reconquérir l'immortalité permettant la vie physique et s'identifier avec Dieu et pouvoir dire avec lui « Ego sum qui sum ».

Selon G. FINDEL il existait une continuité entre la Maçonnerie Egyptienne et les rites théurgiques : la première n'était qu'une préparation et une représentation symbolique des seconds.

Son enseignement n'évoquait pas les Arcana Arcanorum mais le « Secreto Secretum» ce qui est similaire . Il faut remonter à Michel MAIER, médecin et alchimiste pour retrouver une trace aussi lisible. Ce dernier en 1614, intitulait son premier livre « Arcana Arcanissima». Au 18° siècle, l'expression « Arcana Arcanorum» se rencontre dans la littérature rosicrucienne, par exemple dans les symboles secrets d'Altona publiés en 1785 et 1788.

CAGLIOSTRO se trouva fort probablement à la conjonction de deux cercles d'adeptes :
L'ordre Allemand de la Rose + Croix d 'or d 'Ancien Système dont l'égrégore Rosicrucien fut repris en charge par l'ordre des FF initiés d'Asie, au fond nettement cabalistique. Selon )001, alors que CAGLIOSTRO était en Allemagne, en 1779, il reçut de Von Schrôder des leçons de théosophie et de sciences occultes. Ce dernier l'aurai initié à la Rose + Croix d'Or et aux Architectes Africains.

Signalons enfin que certains auteurs déclarent que lors de ce voyage CAGLIOSTRO aurait rencontré le Comte de SAINT GERMAIN. C'est possible mais non prouvé.

L'école de Naples , ville où séjourne CAGLIOSTRO en 1783, héritière des courants chaldéens, Egyptiens et pythagoriciens, ville déjà évoquée tout à l'heure et que l'on retrouvera encore pour Misraïm.

Donc à première vue, rien d'égyptien dans la maçonnerie égyptienne de CAGLIOSTRO.

Pourtant, en préambule de ses rituels, il est dit « Toute lumière vient le l'orient, toute initiation de l'Egypte» A par le nom de grand Cophte ou copte et l'épithète de la dite maçonnerie, on cherche à comprendre, car CAGLIOSTRO nous parle beaucoup d'hébraïsme et de christianisme.

Mais son rite présente comme l'Eglise Copte, de la gnose et comme chez les Coptes, de la magie !.

Alors la prétention égyptienne est à prendre au sérieux. Alexandrie concentre toutes les Egyptes ; Ptolémée, le prêtre Egyptien Manéthon et le Grec Thimothée qui entérina l'interprétation graeca déjà ancienne d'Isis. De ce culte, le Corpus Hermeticum fut le livre sacré. CAGLIOSTRO ne se prénommait-il pas Alessandra ?. Alexandrie, au début du christianisme, c'est le gnosticisme dit chrétien . Il intègre le gnosticisme anté-chrétien d'Hermès sans écarter l'influence des cercles juifs d'Egypte . L'Egypte Pharaonique enseignait la mort et la résurrection, la renaissance, le devenir, la filiation divine et la Rédemption de l'homme, la divinisation et l'immortalité. Le physicien biologiste Etienne GUILLE ayant étudié l'ADN parle de « pyramides vibratoires de l'être vivant ». L'ADN, nous dit-il, « permet de retrouver en chaque individu, la grandeur et la beauté de l'Egypte, le sentiment de l'Eternel et de l'Immuable et l'idée que l'homme est à construire car le processus astral serait une succession de portes à franchir ».

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Ainsi l'Egypte qui passe pour la mère de l'Alchimie serait bien, selon Etienne GUILLE, la marraine des voies internes chères aux maçonneries Egyptiennes, celle de » CAGLIOSTRO en tête.

Dans son livre « Magie et Coutumes populaires chez les Coptes d'Egypte », le Père VIAUD écrit en 1973 que « leur magie comporte et leur religion incluent des anges envahissants. Mais aussi des nombres et le symbolisme actif des carrés magiques, des talismans et des sceaux des esprits tutélaires... les incantations et les rites secondent la théurgie ». Les Coptes nous dit-il « sont les héritiers des antiques magiciens d'Egypte. Les noms des dieux ont seulement été remplacés par ceux du Christ, de la Vierge et de Saints ».

Selon Robert AMBELAIN, CAGLIOSTRO aurait été initié au culte d'Horus dans les milieux coptes du Caire. La même initiation aurait été conférée à 2 de nos contemporains aujourd'hui décédés mais après avoir transmis le dépôt.

Je ne peux clore mon propos sur CAGLIOSTRO sans dire quelques mots sur la place qu'il réservait à la femme. La première loge mixte fut crée par CAGLIOSTRO en 1778 à Mitau. La même année à la Haye, fondation d'une loge d'adoption. Lorenza son épouse, Grande Maîtresse deviendra Seraphina, par allusion aux Séraphins. Il créera un rituel féminin tout en accordant un statut à part entière aux SS... ce qui était totalement novateur, développant pour elles un symbolisme fondé sur la puissance fécondante et matricielle de l'Univers. Ainsi, selon Antoine FAIVRE, CAGLIOSTRO se détache des autres Rites par la place qu'il fait aux femmes et par coloration égyptophilique. Son Rite Egyptien met en scène une mythologie inspirée de la tenue des pharaons telle que l'imagine une égyptomanie occidentale dont la campagne d'Egypte sera la concrétisation non plus esthétique mais politique. Selon Daniel LIGOU « il ne faut pas s'étonner que les véritables rituels égyptiens qui affirment que l'Egypte est le berceau de l'ordre, ceux de Misraïm et Memphis, soient postérieurs à l'expédition d'Egypte (1798)». Pourtant, nous revendiquons la fondation de Misraïm en 1788 à Venise et par là même une filiation avec CAGLIOSTRO.

Gérard GALTIER fait état d'archives du Souverain Sanctuaire Adriatique jamais publiées. Documents signalés aussi par G. VENTURA et repris par Robert AMBELAIN. Il est dît que «Il existait dans la République de Venise un Rite ou une Loge dite Misraïm qui pratiquait une série de hauts grades se réclamant d'une origine Egyptienne ». Le Rite de Misraïm serait né sous la forme d'une loge fondée par un groupe de Sociniens auxquels CAGLIOSTRO aurait délivré une patente de constitution. Nous savons avec certitude grâce à Reghelli de SCHIO que CAGLIOSTRO se rendit en 1788 à Rovoreto, non loin de Venise et qu'il rencontra deux dignitaires maçonniques ( Francesco BATTAGIA, conseiller d'état et son Excellence ZULIAN ).

Reste que la coïncidence est troublante.

De même G. VENTURA atteste qu'une loge de Misraïm existait à Venise en 1796 mise en sommeil en 1797 sous l'occupation Autrichienne et reconstituée plus tard en 1801 par le F.. TASSONI qui assura de nombreuses charges dans le royaume Italo-Napoléonnien.

Il semble donc que la source de Misraïm se situe dans la République de Venise et qu'il y ait connu son premier épanouissement dans les loges franco italiennes du Royaume de Naples de Joachim MURAT.

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Rappelons que Naples, encore Naples, était vassale sous l'occupation Napoléonienne et fut placée sous l'autorité Joseph BONAPARTE de 1806 à 1808 puis celle de Joachim MURAT de 1808 à 1814.

Les principaux promoteurs du rite de Misraïm, rapatriés, furent les frères PARENTI, Charles LECHANGEUR, Pierre de LASSALLE et enfin Armand BEDARRIDE avec ses 2 fils Marc et Michel, auteurs de l'ouvrage « de l'Ordre de Misraim ». La famille BEDARRIDE était issue de la communauté juive de Cavaillon, très versée dans les études cabalistiques. Armand BEDARRIDE reçut la lumière en 1771. Puis il aurait été reçu au Rite de Misraïm en 1782 par le « savant Patriarche Ananiali », Grand Conservateur Egyptien, que G. VENTURA suggère d'identifier à CAGLIOSTRO présent dans la région au même moment. Selon leurs propres déclarations, c'est en 1805 que Marc et Michel furent initiés au Rite de Misraïm et c'est cette même année que le rite aurait été officiellement établi en France pour la première fois.

Mais la première loge bleue attestée fut fondée en 1814 à Paris par les frères BEDARRIDE.

La gigantesque nomenclature des grades de Misraïm aurait commencée à être compilée au plus tôt en 1801.

Concernant les Arcana, seul JOLY qui avait reçu les pouvoirs suprêmes de LASSALLE et de LECHANGEUR à Naples en 1813, en était détenteur .Les Frères BEDDARIDE eux, n'étaient possesseurs du 87° au 90° degré que de grades administratifs sans aucune valeur initiatique. Le 8 Octobre 1816, furent remis au Grand Orient un abrégé des quatre derniers grades du Rite de Misraïm à une commission d'examen. Rédigés en Italien, ils auraient pour titre Arcana Arcanorum. A partir de là, elles furent introduites dans le Rite de Misraïm. Incontestablement, la découverte scientifique de l'Egypte ancienne débute avec l'expédition Bonapartienne de 1798, suivie d'études, de récits, d'explications et surtout la lecture en 1828 de la pierre de Rosette. Tous les Grands Mythes se trouvaient réunis dans cette épopée. Le grand monarque pacificateur recréant l'Empire Universel, la rencontre entre les sages d'Orient et les savants d'Occident.

Au-delà de la géopolitique de l'époque, on s'interroge; Quels étaient les véritables buts ce cette expédition ? Qu'allait-on chercher en Egypte ?. L'affaire devient troublante lorsqu'on songe aux troupes cherchant en vain CAGLIOSTRO et plus tard l'emprise de l'entourage impérial sur Naples...

Memphis- Montauban 1815  :

Etienne MARCONIS de NEGRE, fonda non en 1815 mais en 1839 ; le' Rite de Memphis date de la publication des statuts et règlements. Selon son fondateur, la véritable science maçonnique aurait été plus achevée par les Templiers et le Rite de Memphis en serait le vecteur le plus actif. Pour MARCONIS de NEGRE, les Templiers détenaient cette science des FF.:. d'Orient dont le fondateur était un sage d'Egypte du nom d'ORMUS, converti au christianisme par Saint Marc. Les disciples d'ORMUS, jusqu'en 1118, restèrent les seuls dépositaires de l'ancienne sagesse Eyptienne purifiée par le Christianisme et la science Salomonique. Cette doctrine, ils la communiquèrent aux Templiers. Ils étaient alors connus sous le nom de Chevaliers de Palestine ou Frères Rose + Croix d'Orient.

Toujours selon Marconis de NEGRE, ce sont eux que le Rite de Memphis reconnaît pour fondateurs. Que nous enseignent ces faits dûment attestés ? En 1838, Marconis de NEGRE est expulsé de Misraïm. Il tente alors de faire admettre sa loge «La Bienveillance» par le Grand Orient. Mais celui ci qui ne reconnaissait pas le Rite de Misraïm refusa tout en proposant d'intégrer à titre individuel les membres de la loge. Marconis refusa et se résolut à suivre une voie indépendante. Il réussit rapidement à créer deux loges : « La Bienfaisance» à Bruxelles et « Osiris» à Paris. En 1839, il réveille à Paris la loge «les Disciples de Memphis» (nom de la loge de Marconis père à Montauban). Il est tout à fait plausible que Marconis de NEGRE père ait fondé cette loge. Tout laisse pourtant croire qu'elle pratiquait le Rite des Amis du Désert créé par Alexandre DUMEGE à Toulouse dont le premier degré s'intitulait justement « Initié de Memphis » . Pour mémoire, signalons qu'Alexandre DUMEGE eut un rôle considérable dans les recherches archéologiques et initiatiques de son temps. De Toulouse, ce Rite peut parfaitement avoir essaimé à Montauban.

Cependant Jacques Etienne MARCONIS le fils, n'expliquait pas comment, le Rite de Memphis s'était transmis jusqu'à lui ni pourquoi il n'avait commencé à se manifester qu'en 1838 Marconis dut faire face à des accusations selon lesquelles il n'aurait fait que plagier le Rite de Misraïm. C'est ainsi qu'il dut se justifier par la filiation maçonnique et spirituelle de son père. Celui ci aurait fondé avec le Frère HONIS la première loge du rite de Memphis à Montauban en 1815, HONIS l'ayant rapporté d'Egypte. Installée le 15 Avili 1815 la loge aurait été mise en sommeil le 7 mars 1816 au tout début de la Restauration.

Selon Robert AMBELAIN , le Rite de Memphis serait né à Montauban en 1815, d'où notre sceau. Il résulterait de la fusion entre divers rites d'origine occitane (Rite des Philadèlphes, Rite des Philalèthes, Rite Primitif, Rite Hermétique d'Avignon) et d'autre part un Rite gnostique d'origine égyptienne. Cependant dans les écrits et la correspondance de Marconis de NEGRE (père), il n'est jamais fait état d'une filiation unissant ces anciens rites initiatiques au Rite de Memphis. Pourtant, on est en droit de s'interroger: Je vous ai évoqué les racines légendaires du rite, le faisant remonter aux Templiers. Le rite des Philalèthes dont l'objectif au Convent de 1784 fut de fédérer l'ensemble des rites ésotériques de toute origine, était organisé en 12 degrés.

Le 9' degré, Chevalier du Temple, est repris au 28° degré de Memphis Misraïm.

Nous constatons aussi que le 36° degré de Memphis s'intitule « Chevalier Philalète ».

Gardons en mémoire que les Philalèthes étaient pour beaucoup des spécialistes de l'hermétisme et qu'ils s'étaient donné pour objectif de recueillir les traces des sciences secrètes afin des les mettre en œuvre.

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Quant aux Philadelphes auxquels nous nous rapportons explicitement MONNEREAU fait état ( là encore sans citer ses sources ), de l'appartenance du Père de Marconis au chapitre des Rose+Croix du Grand Rosaire, dernier degré du rite qui pratiquait la théurgie.

Alors que le rite de Misraïm connaissait au même moment nombre de difficultés, lui-même héritier d'un puissant courant magico-théurgique... S'agissait-il avec la création de Memphis de réactiver durablement la voie hermétique au sein de la maçonnerie ?.

Arrières, arrières, arrières petits enfants de cette inestimable filiation, puissions nous en prendre la mesure pour ainsi la pouvoir transmettre...

J’ai dit, ...

C\L\. F\ 

Publié dans le Khalam - Bulletin N° 1 - Octobre 1999

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