GLDF Journal de la Grande Loge de France 10/2010

Vivre ensemble
Par Alain-Noël Dubart Grand Maître de la Grande Loge de France

Au terme d’une première année d’exercice comme Grand Maître de la Grande Loge de France, je souhaiterais, à l’intention des Frères qui reçoivent le Journal, dégager les lignes directrices des actions entreprises depuis le Convent 6009 et brosser les perspectives qui
s’annoncent pour les années qui viennent.


Un bilan partiel et un certain nombre de propositions ont été
détaillés dans l’allocution que j’ai été amené à prononcer en ouverture des Travaux du Convent 6010. Dans ces colonnes, je me contenterai d’évoquer brièvement les points principaux qui intéressent l’ensemble des Frères de la Grande Loge de France, ainsi que les décisions importantes prises par notre dernier Convent (1).

Un rayonnement intérieur et extérieur qui se poursuit
La place manque ici pour retracer les ambitions et les étapes du chantier initiatique qui a été mis en œuvre depuis quelques années et dont té­moignent notamment les journées consacrées aux Apprentis et aux Compagnons, les journées d’études réservées aux Maîtres de la Grande Loge de France, les journées spécifiques dédiées aux Frères Experts, aux Maîtres des Cérémonies ou aux Hospitaliers, ainsi que le Séminaire des Vénérables Maîtres destiné aux Frères qui accèdent, pour la première fois, à la présidence de leur Atelier.

Par ailleurs, nous avons sensiblement remanié le site Internetpour en accroître le contenu dynamique et renforcer nos liens avec les Obédiences amies qui com­posent le paysage maçonnique français. La cohésion de la Grande Loge de France – et, singulièrement, celle qui relie les « Loges hexagonales » et les Loges ultramarines – s’est consolidée grâce à de nombreux déplacements au cours desquels se sont tenues confé­rences publiques, tenues anniversaires ou fêtes de l’Ordre.
Les Frères s’intéressent de près au sort de leur Obédience – de notre Obédience – et ils formulent des pro­positions sur beaucoup de sujets. Celles- ci émanent aussi bien des Loges de la fédération que du Congrès ou encore du Conseil Fédéral dont c’est naturelle­ment une des missions permanentes. Parmi les idées-forces qui ont été adop­tées, je voudrais en relever certaines qui confirment ou inscrivent, pour l’avenir, des tendances lourdes.

Une unité renforcée de notre fédération
À titre préliminaire, il peut paraître ba­nal d’avoir réaffirmé que la Grande Loge de France est bel et bien une fédération de Loges et non une association de ré­gions. Ce principe, pour simple qu’il soit, n’est pas dénué de conséquence à un moment où des idées diverses pouvaient poindre ici ou là: il a pour corollaire que chaque Conseiller Fédéral continue d’être élu par le Convent, c’est-à-dire par l’ensemble des Frères Députés et ce, au scrutin uninominal; aussi bien, tous les Conseillers Fédéraux sont Conseillers Fédéraux de la Grande Loge de France et doivent, à la fois, se consi­dérer comme tels et agir comme tels.

Une plus nette distinction des compétences matérielles et des orientations spirituelles
Ensuite, on a enregistré le vœu de distinguer encore plus nettement, dans l’agenda de la Grande Loge de France, ce qui relève de sa dimension initiatique et culturelle – et qui évidemment consti­tue son caractère fondamental, – des compétences matérielles qui sont du strict ressort de l’association Grande Loge de France; aussi bien, il est, désormais, prévu de modifier l’exer­cice comptable, afin de pouvoir réunir, en une seule assemblée générale, au Convent de juin, l’ensemble des ques­tions relatives à la gestion financière, à l’administration du patrimoine et aux procédures électorales – ce qui permet­tra, à moyen terme, à mesure que cette expérience se consolidera, de consacrer pleinement la Tenue de Grande Loge, naturellement maintenue au Solstice d’hiver, à l’examen des questions à l’étude des Loges, aux comptes rendus d’activité des commissions obédien­tielles (Droits de l’Homme, Éthique, Histoire) et à la présentation des travaux des Loges de Recherche de l’Obédience.

La création d’une « Loge nationale de Recherche »
Soulignons, à cet égard, que, le moment venu, y sera aussi suivi l’avancement des travaux de la « Loge nationale de Recherche » de la Grande Loge de France, qui vient d’être créée par le Convent et qui va devoir, au cours de cette année, s’organiser et lancer son programme. À mon avis, la vocation majeure d’une Loge nationale de Recherche – au sein d’une Obédience aussi ancienne que la Grande Loge de France – tourne autour de deux axes principaux qui visent à mettre en lu­mière, d’une part, l’histoire même de l’Obédience, son histoire événementielle et humaine, si je puis dire, en liaison avec les sociétés de son temps, histoire que nous ne nous sommes pas suffi­samment appropriée et qui doit trouver pleinement sa place dans les connais­sances que nous avons des grands mouvements sociaux et culturels, et, d’autre part, en vue d’apports cette fois-ci plus « internes », l’histoire du Rite, des rituels et du processus Initiatique dans son ensemble.

Un processus décisionnel redéployé
Revenons sur la modification de notre exercice comptable et sur la concentra­tion des problèmes d’ordre administra­tif, financier ou juridique, lors du seul Convent du Solstice d’été: cette pers­pective va nous conduire à redéfinir un certain nombre de processus, notam­ment en déployant, grâce à des rendez- vous plus réguliers et sur des échéanciers plus longs, des réunions déconcentrées entre le Conseil Fédéral et les Congrès régionaux, et entre les Grands Officiers du Conseil Fédéral chargés des différents dossiers et les commissions ad hoc créées au sein des Congrès régionaux. Dans ces conditions, le travail de préparation du Convent, qui est spécifiquement dévolu à ces Congrès régionaux, s’effectuera d’une manière plus harmonieuse, plus ouverte, dans un dialogue plus approfondi, si bien que les décisions à prendre lors du Convent par l’ensemble des Députés seront mieux instruites en amont, ce qui de­vrait nous épargner un certain nombre de discussions inutiles qui limitent, dans un délai imparti, nos échanges les plus intéressants, mais aussi nous aider à ali­menter de façon toujours plus construc­tive nos débats sur les questions les plus sérieuses et nous permettre de pren­dre, en connaissance de cause et en toute sérénité, des décisions plus éclai­rées et plus satisfaisantes pour tous.

Une meilleure implication dans la vie culturelle de nos contemporains
Pour continuer mon propos dans ce chassé-croisé des questions matérielles et spirituelles, je souhaiterais revenir, pour finir, sur un impératif absolu, pour les Frères de la Grande Loge de France, pour les Loges de la Grande Loge de France et pour la Grande Loge elle- même, qui consiste à relever le défi de l’implication culturelle de la Franc- maçonnerie dans le monde moderne.

Il existe, bien entendu, une dimension initiatique qui est, pour l’essentiel, du domaine de la Loge et qui doit être cultivée et approfondie en permanence, en son sein: c’est une évidence pour chacun d’entre nous. Mais, il existe aussi une dimension culturelle, philo­sophique, sociologique, de la Franc- maçonnerie qui, par nature, est plutôt du ressort de la Grande Loge de France et qui relève donc de la mission confiée, par les Loges, aux Députés et, par les Députés, aux représentants élus qui ont en charge, non seulement, l’adminis­tration de l’association Grande Loge de France, mais aussi l’expression publique de nos valeurs, dans le monde profane.

Une révision des textes pour des ajustements collectifs plus exigeants

Telles sont les grandes orientations qui ont émergé au cours de l’année passée et qui sont appelées à se développer, dans les années qui viennent. Il s’agit d’un processus de réformes pro­gressives qui s’est mis en place et les évolutions en cause se poursuivront à un rythme soutenu, grâce à la bonne volonté et à l’effort de tous car nous avons tous à y gagner, aussi bien au plan de notre organisation qu’à celui de nos finalités les plus élevées. D’un mot, signalons quelques autres chantiers qui sont en cours, qu’il s’agisse, par exemple, de la clarification de nos textes concernant la justice maçonnique ou de la création éven­tuelle d’une Fondation de la Grande Loge de France. Tout dernière­ment, lors du Conseil Fédéral du
10 septembre, j’ai proposé que s’engage une réflexion sur les textes qui régissent les activités patrimoniales de la Grande Loge de France. Il convient également de se pencher
sur le rôle et le fonctionnement des commissions obédientielles qui, à mes yeux, devront non seulement accroître leurs missions de contrôle des activités financières et patrimoniales de la maison, mais éga­lement contribuer à la préparation des actions nouvelles, en renforçant leurs liens avec le Conseil Fédéral.

L’enrichissement de nos ressources communes
Voilà, à grands traits, dans quel sens nous avons travaillé, l’année passée, et vers quelles perspectives nous tendrons, dans l’année qui vient. C’est dans cet esprit que j’appelle les Frères à bien vouloir apporter leur contribution à l’Obédience, c’est-à-dire à notre avenir commun ou plutôt à la meilleure ga­rantie de cet avenir, car notre avenir commun appartient, bien entendu, à notre engagement initiatique et à la capacité de rayonnement qu’il nous aide à cultiver. Pour ce faire, il y a un certain nombre de conditions et, je dirai même, de ressources, sur lesquelles j’attire l’attention de tous. Plus nous en aurons conscience, plus notre œuvre quoti­dienne et notre harmonie collective en tireront profit. Profit et joie, Mes Frères. Bonne année maçonnique à tous !

(1) voir pp. 4-5 du journal 
Publié dans le Journal de la Grande Loge de France - N° 98 - Septembre Octobre 2010

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