GLFM Bulletin : Bulim Misraïm 10/2009

Horus – Fils de Ré

La vénération du faucon a ses racines dans les plus anciennes conceptions des dieux en Égypte. Déjà les premiers rois étaient liés à son aspect. Cependant, comme du sud de la Haute Égypte jusqu'au Delta plusieurs divinités faucons étaient adorées et comme leur fusion en Horus restait incomplète, ce dieu aussi présente une image peu uniforme qui s'oppose de façon tenace à tout classement, surtout mythique et généalogique. En tant que maître des airs qui parcourt le ciel, on l'associe au soleil. Horakhty est ainsi l'« Horus de l'horizon », la forme journalière du soleil. Harmakhis, l'« Horus dans l'horizon », est devenu le nom du grand sphinx de Giza.

Haroéris, « Horus l'ancien », était considéré comme le fils de Rê. L'apparition du culte d'Osiris ainsi que l'identification d'Horus avec le roi créait cependant une nouvelle conception. Si le roi défunt était Osiris, son fils et successeur devait être Horus, donc le fils d'Osiris et d'Isis. En cette qualité, il était appelé Harsiésis, fils d'Isis. Son aspect de dieu-enfant, Harpocrate, devint à la Basse Epoque presque indépendant. Horus, en tant que faucon ou anthropomorphe à tête de faucon, peut porter comme emblème aussi bien les couronnes des Deux Pays que le soleil cerné d'un uraeus. Ses yeux symbolisent le soleil et la lune et, comme disque solaire ailé, il symbolise le ciel en général. Dans beaucoup de sanctuaires, on entretenait des faucons sacrés, par exemple à Philae, à Edfou ou à Hermopolis.

Le prêtre Djedhor d'Athribis, dans le 10e nome de Basse Egypte, nous en a laissé un rapport détaillé vers la fin du 4 e siècle avant J.-C. En cette ville était adoré Horus Khentekhtaï qui habitait apparemment une salle hypostyle respectable dans le domaine du temple. Pour l'entretien du faucon, il fallait un puits avec de l'eau fraîche et pure, un parc avec des arbres et un colombier. Dans le cimetière des faucons, non seulement on ensevelissait les faucons sacrés qu'on avait trouvé morts. En tant que roi divin et fils d'Osiris, Horus venge son père *(Harendotes) et se bat pour son héritage ; sous l'aspect solaire, il vainc les ennemis de Rê. Dans les mythes, les deux idées s'entremêlent dans un différend étrangement mouvant entre Horus et Seth. Ce dieu curieux, à la tête fine et allongée de l'« animal séthien » qu'on ne peut identifier zoologiquement, n'est devenu un personnage négatif que par le mythe osirien, tout en gardant ses traits positifs originels. Lui aussi compte parmi les rois divins ; avec Horus, il réalise « l'unification des pays » et combat l'ennemi originel de Rê, le serpent Apopis.

D'autre part, sous les traits d'un hippopotame ou d'un crocodile, il peut devenir aussi l'adversaire de Rê et, harponné par Horus, il perd son pouvoir. Étant le « rouge », il est refoulé dans le désert, stérile, grossier et méchant, amenant la tempête et les nuées d'orage, ennemi de la vie et du pouvoir royal. Après l'assassinat d'Osiris et la persécution du petit Harpocrate, le mythe dépeint en détail la dispute entre Horus et Seth pour la succession. Depuis 80 ans déjà, les adversaires s'affrontaient devant le tribunal divin de l'Ennéade, quand le Conseil se réunit à nouveau pour prendre une décision. Comme tous les dieux plaidaient pour Horus, Rê se sentit ignoré et fut vexé. On consulta Ba, le taureau de Mendès, qui de son côté demanda l'expertise de Neith. Comme elle aussi défendait les intérêts d'Horus, Rê devint agressif. Traitant Horus de « faiblard qui suce son pouce », il fut de son côté très offensé quand on lui dit que son naos était vide (ce qui est exact, puis qu'il était vénéré à ciel ouvert). Seth fit valoir qu'il était le plus grand et le plus fort et que tous les jours il tuait Apopis, l'adversaire de Rê. Et les dieux l'approuvèrent.

Lorsque Isis se défendit avec fureur, Seth menaça d'assommer les dieux et il obtint par force qu'Isis soit exclue de la procédure. Alors, le Conseil se transporta sur l' « île du milieu » et le nautonnier reçut l'ordre strict de ne faire passer Isis en aucun cas. Mais, sous les traits d'une petite vieille, elle le dupa et le soudoya avec une bague en or. Arrivée sur l'île elle se transforma en une belle femme, séduisant Seth pour lui faire croire qu'un étranger tentait de déposséder de ses biens le fils de son mari défunt. En s'indignant d'une telle injustice, Seth prit parti contre lui-même et l'Ennéade confirma ce fait. Puis vinrent des duels qu'Horus remporta de justesse avec ruse et avec le soutien de sa mère. Mais le tribunal ne tranchait toujours pas.

Il fallut qu'Osiris intervienne en faveur de la justice et de son fils en prenant une attitude menaçante, pour que Seth soit arrêté et pour qu'Horus puisse recueillir son héritage. Seth fut néanmoins indemnisé et accepté dans la « barque de millions d'années » comme fils du dieu Soleil. Pourtant, la réputation de Seth ne s'améliora pas. En combinant les idées de la vengeance du père et de l'anéantissement des ennemis de Rê, on célébrait, sous l'aspect d'un spectacle de culte, le rituel des « dix harpons » dans le lac sacré du temple d'Horus à Edfou. De sa barque, Horus Behedety harponnait Seth, représenté par un hippopotame ou par un crocodile. Le roi y assistait de la rive, en portant la parure du dieu de la chasse Onouris. A la fin de la cérémonie, l'hippopotame était dépecé et distribué à neuf dieux.

Depuis la Basse Époque, la légende d'Isis et de l'enfant Horus fut parmi les sujets les plus appréciés de la croyance populaire. Avec des éléments tendres ou parfois même sentimentaux, on enjolivait le récit de la poursuite par Seth, l'oncle méchant : Comment il envoyait toutes sortes d'animaux redoutables et comment Isis réussissait néanmoins à protéger l'enfant et à le guérir des morsures de serpents et des piqûres de scorpions. Ceci ne se faisait guère sans sorcellerie et magie, et Harpocrate devint progressivement un être secourable contre tous les animaux et les pouvoirs méchants qui sont en même temps les adversaires de Rê. Pour la pratique magique, on se servait de petites stèles sur lesquelles l'enfant Horus étrangle des serpents et des scorpions, dompte des lions et des gazelles et piétine des crocodiles. Ces reliefs étaient portés en amulettes ; on les déposait dans l'eau ou on les arrosait d'une eau qui devenait ainsi curative. Un syncrétisme tardif a assimilé l'enfant Horus au dieu du lotus Néfertem. On l'associait au dieu protecteur Bès et les Grecs y voyaient une réminiscence d'Hercule enfant étranglant les serpents.


Publié dans le Bulim - Bulletin N° 11
- 30 Octobre 2009  -  Abonnez-vous

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