GLFM Bulletin : Bulim Misraïm 04/2009

La Symbolique de l’Arbre

L’arbre, un végétal que tout le monde connaît, un végétal dont la tige, appelée fût ou tronc, ne se garnit de branches et de feuilles que jusqu’à une certaine hauteur. La partie constituée par les branches et les feuilles s’appelle le houppier.
L’arbre qui existe depuis des millions d’années (environ 380 selon les scientifiques) est très rapidement devenu un repère pour l’homme.

Déjà pour l’enfant, l’arbre, en même temps que « l’homme têtard » fait partie des premiers dessins qu’il produit, et donc déjà l’on peut s’apercevoir que l’arbre marque le conscient et l’inconscient de l’être humain. Les arbres peuvent être également source d’énergie, d’énergie subtile, d’illumination ou même de guérison. Ils sont aussi un symbole ancestral de Beauté et de Liberté.


Mais à propos de symbole, l’arbre est sûrement le vivant autour duquel s’est développé l’un des symbolismes les plus riches, les plus anciens et les plus utilisés. De par ses formes l’arbre a une dimension universelle. Par ses racines qui plongent dans le sol, ses branches qui montent vers le ciel, il est universellement considéré comme le symbole des rapports qui s’établissent entre le ciel et la terre. Il met en communication les trois niveaux du cosmos ; le souterrain par ses racines plongeant dans les profondeurs de la terre, la surface de la terre par son tronc et ses premières branches, le ciel par ses branches supérieures qui s’élèvent vers les hauteurs attirées par la lumière céleste.


Il relie ainsi le monde souterrain au monde céleste par l’intermédiaire de son tronc. Les quatre éléments de l’alchimie se trouvent en lui ; la terre s’intègre à son corps par ses racines, l’eau circule dans sa sève, l’air nourrit ses feuilles et le feu en jaillit lorsqu’on le frotte énergiquement. Il est également porteur d’un cinquième élément cher à la médecine traditionnelle chinoise, le métal, par les minéraux captés dans la terre et transportés par la sève pour nourrir l’ensemble de ce qu’il est. Cette image du lien entre le ciel et la terre a souvent été reprise par la philosophie et la méditation spirituelle : l’arbre est alors le symbole de la création toute entière, du macrocosme ou grand univers, jusqu’au microcosme ou univers miniature, il est donc aussi le symbole de l’homme. Il possède de ce fait un caractère central à un point que lorsque l’on parle de l’Arbre du monde, il est synonyme d’Axe du monde. Donc de par sa verticalité l’arbre a, dans de nombreuses civilisations, été assimilé à l’axe du monde, celui autour duquel se réunit l’ensemble du Cosmos. En Chine par exemple, l’Arbre Kien Mou, est dressé au Centre du Monde. A son pied il n’y a ni ombre ni écho disent les textes. Il a neuf branches et neuf racines, par lesquelles il touche aux neuf cieux et aux neuf sources, séjours des morts. Cette image de l’Univers est née avec la correspondance faite avec les neuf régions de la Chine de l’époque des Royaumes combattants du 5éme au 3éme siècle av JC. chez les Mayas au centre du Cosmos se dresse l’Arbre de Vie Cosmique... Son nom est « Ciel Relevé » car les Dieux, après avoir relevé le ciel, utilisèrent un Arbre pour le soutenir. La Terre est elle-même soutenu par 4 piliers placés aux 4 coins du Monde Souterrain. Les côtés du carré sont orientés vers les 4 points cardinaux et le cosmos tout entier tourne autour de l’Axe formé par l’Arbre central.


Cet Arbre ne sert pas seulement de pilier, il est aussi le canal cosmique qu’emprunte les âmes. Il plonge ses racines dans le monde souterrain, pays des morts, dresse son tronc dans le monde terrestre et lance ses branches vers le royaume des cieux.

L’Arbre est la matérialisation de la vie, la perpétuelle régénération, la victoire sur la mort, le témoin des cycles, l’Arbre est nourricier, l’Arbre est à la fois fécondateur et fécond. Nous retrouvons ceci dans les sociétés Tatars de l’Altaï où l’on raconte : « Qu’au cœur du nombril de la Terre, centre de tout, pousse le plus grand des arbres terrestres ; un arbre florissant dont le sommet touche la demeure du Grand Dieu. La couronne de l’Arbre répand un liquide divin d’un jaune écumant. Quand les passants en boivent, leur fatigue se dissipe et leur faim disparaît... quand le premier homme, à son apparition dans le monde, désira savoir pourquoi il était là, il se rendit près de cet arbre gigantesque dont la cime atteint le ciel... il vit alors, dans le tronc de l’arbre merveilleux une cavité où se montra jusqu’à la ceinture une femme qui lui fit savoir qu’il était venu au monde pour être l’ancêtre du genre humain. »

En Iran, l’arbre Hom, est à la fois arbre et source. Ses pieds s’enfoncent au sein de la terre, sa cime est baignée de vapeurs d’eau qui retombe en rosée dans la vallée. Dans la Genèse on retrouve plusieurs passages traitant de ce point de vue :

« Dieu fit pousser sur le sol toutes sortes d’arbres à l’aspect agréable et aux fruits délicieux. Il mit au centre du jardin l’arbre de la vie, et l’arbre qui donne la connaissance de ce qui est bon et mauvais. » (Genèse 2.9). On retrouve également dans l’arbre la symbolique de l’ambivalence, l’arbre est masculin et féminin, dans la Genèse, Dieu dit :
« Que la Terre produise de la verdure, des herbes portant semences, des arbres fruitiers donnant sur la terre, selon leur espèce, du fruit contenant sa semence et il en fut ainsi. » (Genèse 11).

L’arbre a également valeur symbolique d’axe du monde mêlé à la spiritualité. Dans le bouddhisme, l’arbre de la Boddhi a pour racine Brahma, (le créateur de tout ce qui existe), pour tronc Shiva (la destruction et la
méditation) et pour branches Vishnou (l’organisateur du monde).
C’est sous son ombre qu’eut lieu l’illumination du Bouddha alors que celui-ci était adossé à l’arbre nourricier.
Mais au-delà de la symbolique de l’Arbre de Vie ou de l’Arbre Cosmique, il y a aussi l’image de l’Arbre renversé. La symbolique de l’Arbre renversé, se retrouve dans plusieurs cultures. C’est un Arbre dont les racines puisent leur énergie dans le ciel pour la répandre sur la terre.
Dans la culture hébraïque : « L’Arbre de Vie s’étend du haut vers le bas et le soleil l’éclaire entièrement » (Zohar : recueil de commentaire de la Torah).

Dans la culture indienne on trouve un texte dans les Rig Véda qui dit : « C’est vers le bas que se dirige ses branches, c’est en haut que se trouve sa racine. Que ses rayons descendent sur nous ! ».


Dans les textes védiques, l’Açvattha représente l’Univers issu de Brahman, l’Energie Absolue. « Cet Açvattha éternel, dont les racines vont vers le haut et les branches en bas, c’est le pur, c’est Brahman ; le Brahman, c’est ce qu’on nomme la non- mort. Tous les mondes reposent en lui. » (Khata-Upanishad)

Cet Arbre Cosmique présente de nombreux points communs avec l’homme.
D’ailleurs, en yoga une posture renversée existe, posture où le yogi se met lui-même dans la situation de l’Arbre renversé comme pour plonger au plus profond de la terre et puiser en elle, la vie et l’énergie. Ce symbolisme insolite, où le sens de la verticalité ascendante est inversé, est bien le signe du schéma de la réciprocité cyclique, l’Homme se nourrit de la terre et va à la recherche de la spiritualité vers les cieux ou bien l’Homme se nourrit de spiritualité et va répandre son enseignement sur la terre. Ce ne sont pas des thèmes opposés mais bien complémentaires et cycliques.
Et puis l’arbre a aussi un symbolisme proche de l’homme.

La légende raconte que le dieu Thot inscrivait le temps des cycles de vie et le devenir des hommes et de tout être vivant, sur les feuilles de sycomore. C’est d’ailleurs le premier arbre cité pour être considéré comme « un temple de méditation».

Le figuier est devenu l’arbre des personnes qui méditent depuis que Gautama, après avoir médité 7 jours eut l’illumination et devint Bouddha.
Le Chêne ; C'est auprès d'un Chêne qu’Abraham reçut les révélations de Yahvé. Son rôle est axial en faisait un instrument de communication entre le Ciel et la Terre. Entendant la voix de Dieu dans un chêne, Abraham leva la tête et aperçut trois visages : la trinité divine venait de naître.
Plus récemment, sous l’époque révolutionnaire, le chêne ainsi que le peuplier ont connu la représentation symbolique de la Liberté, de l’espoir et de la continuité. Le sapin rejoint l’interprétation du symbolisme des arbres à feuilles persistant figurant la vitalité, la prospérité, ce qui dure par opposition à ce qui est condamné à mourir ou à changer. Les druides ont développé une culture magique autour des arbres. Ils créèrent un calendrier druidique se basant sur le cycle des arbres. Un horoscope des arbres fut également créé pour appréhender les différents types de personnalités. Les druides pratiquaient leurs cultes dans des forêts denses car elles représentaient pour eux leurs temples naturels.
L’Arbre on le voit donc, est depuis la nuit des temps un symbole utilisé par l’ensemble des civilisations.

Il est à la fois :
   * axe du monde autour duquel s’organise le cosmos.
   * régénération : la poussée de la Vie, la victoire de la vie sur la mort, le témoin des cycles.
   * les quatre éléments : l’arbre vit d’eau, d’air et de terre, il donne son bois pour le feu.
   * ambivalent : il est à la fois féminin (il est fécond et nourricier) et masculin (il se dresse vers le ciel, c’est un symbole phallique) ;
   * spiritualité : l’arbre est présent dans la genèse de toutes les religions, il est élévation de l’âme.
Pour nous R\ Ni\ il est ce symbole fort et puissant de la Vie terrestre passée, présente et à venir, mais en même temps il représente par ces racines qui plongent dans la terre, les sources inépuisables de nos origines, par son tronc il représente la verticalité qui doit nous guider sans cesse à élever l’état des individus de la société et par ses branches il nous guide dans notre recherche pour nous élever au-delà de notre condition d’humain vers notreréalisation spirituelle.

AP\ - Un F\ App\de la R\ L\ Maât
Publié dans le Bulim - Bulletin N° 7 - 30 Avril 2009  -  Abonnez-vous

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