Obédience : NC Loge : NC 27/05/2013

Nous sommes des bâtisseurs de Cathédrales

Introduction

« Le sens de la vie est la plus pressante des questions de l’homme », cette citation d’Albert CAMUS rappel que chacun de nous est appelé à construire pas à pas le sens de sa vie. Ce sens, unique pour chacun de nous, ne peut être imposé à quiconque.

Une chose est sûre, et je pense que cela est valable pour chacun de nous, le chantier a été, est, et restera semé de difficultés, de doutes, mais aussi de véritables joies. D’une pierre brute, le chemin est long pour parvenir à une pierre taillée. C’est ce chemin, ce voyage initiatique qu’il faut vivre accompagné de frères et de sœurs, unis dans la fraternité et l’ouverture d’esprit si nécessaires sur le chemin de la connaissance.

Autant d’épreuves, quotidiennement rencontrées sur les chantiers des bâtisseurs de cathédrales qui utilisaient eux aussi la pierre comme matière première brute, dégrossie et façonnée par des générations de bâtisseurs pour donner naissance à des édifices grandioses. Un travail qui exigeait savoir et adresse, solidarité et esprit fraternel. Eléments et valeurs mutuels qui nous rassemblent dans notre parcours maçonnique, pour élever notre édifice et nous conduire sur notre chemin initiatique.

Il faut comprendre l’esprit opératif avec lequel ont été construits ces magnifiques édifices, l’utilité de tels ouvrages (ce que je vous propose d’aborder en première partie de ma planche pierre 1) pour comprendre qu’effectivement il existe un lien, très fort entre nos activités spéculatives et celui de ces bâtisseurs (ceci fera partie de la seconde partie de mon travail pierre 2). Les recherches que j’ai effectuées pour livrer ce travail, m’ont conduites à une réflexion maçonnique personnel et surprenante « Nous sommes des bâtisseurs de Cathédrales », mais, « ne sommes-nous pas les cathédrales de la Franc Maçonnerie ? », je développerai cette réflexion en dernière partie (pierre 3).

Pierre 1 : Approche opératif : Qu’est-ce qu’une cathédrales au XIIème siècle ?

Dans son livre « Quand les cathédrales étaient blanches », Le Corbusier décrit cette atmosphère, je cite : « Quand les cathédrales étaient blanches, la participation était en tout unanime. Ce n'était pas les cénacles qui pontifiaient, c’était le peuple, le pays qui marchait. Le théâtre était dans les cathédrales ».Fin de citation.

Cette phrase résume l’ambiance et l’atmosphère que nous pouvons retrouver dans ces édifices religieux. Au 12ème siècle, la cathédrale est le miroir de la vie citadine, elle n'est pas seulement une église dédiée au service du culte, elle conserve le caractère d'un tribunal sacré, analogue à celui de la basilique antique. Ainsi les cathédrales demeurent jusqu'au 14ème siècle, des édifices à la fois religieux et civils. Lieu de rencontre, de vie et d’échange intellectuel, social et culturel, toutes les préoccupations sociales de l’époque y sont discutées, comme notre travail en tenue transforme notre temple en un lieu consacré au travail des idées, où l’individu s’enrichi individuellement en communauté.

La cathédrale, est une reproduction intime et mathématique de la structure de l’univers à dimension humaine, reproduisant une image réduite de la création : soit les trois niveaux qui composent l’univers « le ciel, la terre et le monde souterrain », de la même manière que l’homme est aussi un univers miniature, un microcosme, composé de l’esprit, de l’âme et du corps. La cathédrale représente le monde et l’homme à la fois, reliant l’homme à son créateur.

Pierre 2 : Approche spéculative : en quoi notre travail est le miroir de celui des bâtisseurs :

Comme nous venons de le voir, la cathédrale est le médiateur entre l’homme et son créateur. Le bâtisseur opératif avait la lourde tâche d’élever cet édifice qui avait, finalement, par analogie les mêmes fonctions que nos temples maçonniques actuels, lieu où l’homme doit s’élever vers la lumière, où il s’instruit, et recherche la Vérité, travail à la solidarité et la fraternité entre les hommes. Dans ces cathédrales, les hommes partageaient et murissaient leurs connaissances permettant de les rendre libre intellectuellement, cette richesse inestimable qu’est la liberté de comprendre, de pouvoir apporter son cheminement et sa pierre aux sujets sociétaux, s’exprimer sans aucun préjugé ni idées prêt à penser.

Notre devoir maçonnique est aussi d’entretenir et d’élever cet édifice, et en ceci la Franc Maçonnerie va nous permettre de nous couper du monde profane pour aller vers la vraie lumière. L’article 1 de notre constitution procure une analogie parfaite avec le chapitre précédent (et vous verrez le suivant également) sur le rôle social assuré par les cathédrales : « La Franc-maçonnerie, institution essentiellement philanthropique, philosophique et progressive, a pour objet la recherche de la vérité, l'étude de la morale et la pratique de la solidarité ; elle travaille à l'amélioration matérielle et morale, au perfectionnement intellectuel et social de l'humanité ».

Nous retrouvons les premiers tracés d’organisations ouvrières au temps de la construction du Temple de Salomon et la légende d’HIRAM l’architecte des architectes. Une hiérarchie y est reconnue en trois degrés qui ne sont pas ceux donnés par la bible, mais ceux des grades maçonniques : apprentis, compagnons et maîtres. Le passage d’un degré à l’autre se fait par une cérémonie d’initiation, un mot de passe est transmis permettant ainsi d’être reconnu au degré supérieur.

Le lien est très fort entre ce système d’organisation et la Franc Maçonnerie : notre temple devient même une reproduction du temple de Salomon. Mais il n’y a pas que notre temple qui est une représentation de l’œuvre d’HIRAM, notre initiation sera en soit une reproduction de la vie d’HIRAM qui ayant accompli l’édifice spirituel a ensuite été tué par trois compagnons qui souhaitaient soutirer les secrets acquis sans en en passer par le passage de l’apprentissage. L’assassinat d’Hiram met en relief l’objectif que nous propose notre obédience de par son système initiatique : chercher ce qui a été perdu en soit, rassembler ce qui est épars et répandre partout la lumière sur tous cela. La mort d’HIRAM, permet à la Franc-Maçonnerie de faire naître en chaque maître un nouvel HIRAM. Mourir à soi-même pour renaitre à la pure lumière apportée par l’initiation à ce degré.

La règle et le levier en main, lors de notre initiation au grade de compagnon, nous découvrons les sept arts libéraux. Le travail de reconnaissance des arts libéraux comme outils pour servir notre conscience et loi éthique pour lesquelles nous sommes vigilants et attentifs nous aide à nous conformer aux « règles » dictées par notre conscience, aux lois morales à conserver et à nous écarter de tout fanatisme et de toute foi aveugle. Les arts libéraux seraient ils le poids à mettre sur le levier pour nous permettre de nous séparer de nos métaux, de nos dogmes, de trouver le chemin qui nous élèvera en tant qu’homme et franc maçon pour construire notre temple intérieur. Agir avec la règle et le levier c’est donc agir avec loi et devoir. Les arts libéraux sont les outils dans lequel notre engagement maçonnique se réalisera.

Depuis maintenant des siècles, des générations de francs-maçons se succèdent sur ce chantier pharaonique, pour un perfectionnement intellectuel, social et matériel de l’humanité. Nous avons emprunté aux bâtisseurs opératifs les outils (compas, équerre, truelle, géométrie, mathématiques…) et les valeurs morales (initiation, transmissions du savoir, fraternité, respect et écoute) que nous utilisons aujourd’hui avec force et vigueur. L’art du travail symbolique comme outils de communication et d’introspection nous permet d’élever et de sceller les pierres de notre construction interne, le symbolisme est un vecteur d’échange universel et reconnu permettant l’ouverture d’esprit de tous les F\ F\ sans aucune limite.

Pierre 3 : Réflexion maçonnique : Nous sommes des cathédrales de la F\M\

Bâtir…initier, c’est commencer quelque chose de nouveau, commencer un chemin vers une autre façon de penser la société, soi-même et l'humanité. Le travail de descente en soi même le fameux VITRIOL, va nous permettre de travailler sur nous et de nous améliorer et bâtir notre liberté de penser : juste, d'équerre et de niveau.

Il y a quelques instants nous venons de parler de l’analogie dans le travail entre la maçonnerie opérative des bâtisseurs et notre maçonnerie spéculative, sur le fait que le but est l’acheminement de l’homme vers la liberté, la connaissance et la lumière au service de l’amélioration de l’humanité. Le soi n’est plus seul, la pensée n’est plus personnelle. Platon disait que « l’homme est un aveugle qui va dans le droit chemin », l’aveugle ignora la nature de la sensation visuelle, il s’en fait des idées en pensant d’après le modèle géométrique apporté par ses sensations tactiles. L’initiation nous apporte la lumière qui va nous permettre de travailler sur nous pour nous apprendre à appréhender et bâtir notre liberté de pensée directement par les sens de notre intellect et de ne pas se faire de fausses idées, servis par je ne sais quel dogme prêtes à consommer.

L’homme seul enfermé dans sa vérité ne vaincra jamais rien, il est prince, seigneur et roi de lui-même et de son temple, jamais rien ne poussera en lui, il est alors dans un processus de stérilité sociale. Il est nécessaire de nous confronter aux idées de masses, et c’est cela le défi, préparer, favoriser l’idée d’introspection personnel sur l’avenir avec la prise en compte que sa propre vérité, connue de toujours, qui n’est pas celle de demain, d’après-demain, la vérité d’hier est différente de celle d’aujourd’hui, pour être viable, nos idées doivent se confronter.

Cette transformation de la pierre brute en cathédrale est pour nous maçon, la reproduction de notre propre initiation maçonnique, une aventure qui commence par une introspection en soi, à travers soi pour un futur rayonnement sur l’humanité. Je cite Socrate : « Un des préceptes les plus important de la sagesse est de se connaître soi-même » fin de citation. Vouloir faire le bien de l’humanité passe avant tout par un travail de connaissance de soi même, visiter son « moi » profond pour y découvrir la lumière nous permettant d’accomplir l’œuvre maçonnique, c’est ce travail que nous propose la F\ M\. Elle n’a pas pour but de transformer l’humanité mais de construire, elle aussi, des temples pour améliorer l’humanité en diffusant les connaissances, une démarche pour se connaitre et découvrir ainsi des modes différents de penser. La Franc-maçonnerie n’a pas fait la révolution française, elle y a introduit des notions de tolérance et d’égalité politique. La Franc-Maçonnerie n’a pas élaborée une conception du capitaliste où du socialisme dans l’économie du 19ème siècle mais elle y a introduit une notion de justice sociale au cœur de la société de l’époque.

La Franc-Maçonnerie n’améliore pas l’humanité en ayant une influence directe sur celle-ci, elle y construit des cathédrales qui auront une influence positive beaucoup plus lumineuse sur l’amélioration matérielle et morale de l’humanité. Ne sommes-nous pas des cathédrales de la franc maçonnerie ? et l’initiation maçonnique en serait le processus de transformation vers le vrai, le juste le bon pour l’humanité.

L’initiation, processus complexe permettant la création d’éléments uniques, maillons de la Franc Maçonnerie, l’homme étant au centre de l’œuvre et l’univers. La maçonnerie construit donc des hommes comme le bâtisseur élevait la cathédrale, l’objectif de perfectionnement sur l’humanité est le même, nous sommes surement dans un processus plus moderne, plus industriel mais toujours dans le même but : changer l’homme, qui en s’améliorant améliore la société.

Révéler la lumière aux hommes où élever des tonnes de pierres passe curieusement par le même processus : un rite composé en 3 degrés d’élévation : Le premier degré d’élévation constitue le choix du site de la construction. La détermination du cercle primitif étape opérative permettant de déterminer l’espace de la construction où les premières figures géométrique organiseront l’emplacement de la construction. Pour nous maçons, cela représente la prise de conscience de vouloir travailler pour élever notre édifice personnel, c’est le choix de l’obédience maçonnique et de l’engagement personnel que nous voulons y porter. C’est aussi le choix de notre loge, le cœur de notre édifice, l’espace de travail où nous allons apprendre, recevoir et plus tard donner les outils nous permettant de parcourir le chemin de la lumière : choix de notre loge mère, de ces symboles et de son rite. Afin d’établir l’équilibre de la construction sur ce nouveau terrain l’apprenti utilise le niveau et le fils à plomb afin d’assurer une stabilité à sa construction. Comme ce jour unique, ou la pierre est posée pour la première fois sur la terre sans savoir si celle-ci deviendra une cathédrale, je ressens la même sensation et surtout la même émotion que lorsque ce que j’ai effectué ce premier pas dans le temple, pied nu, vulnérable.

La première pierre qui embrasse la terre, le pied de l’initié qui effectue son premier pas dans le temple.

Le second degré d’élévation est le tracé du carré du ciel permettant l’orientation de la cathédrale et le tracé du carré de la terre qui fixe par ces angles la position ou seront édifiés les grand piliers de la croisée du transept. Ces carrés, déterminent l’espace matériel de la cathédrale. C’est le travail de l’apprenti, la délimitation du carré par l’équerre et le travail de la matière pour dégrossir la pierre brute au septentrion sur la colonne du Nord. L’esprit de l’apprenti est dirigé vers l’orient, vers la lumière. Cette étape est silencieuse comme l’est le tracé effectué par les bâtisseurs opératif. Le jeune maçon, dans son silence, abandonne ses métaux pour orienter son esprit en direction de la lumière qui lui est montrée.

Le troisième et dernier degré d’élévation est celui de la construction : il symbolise le travail et l’utilisation des 3 sciences qui ordonnent le monde : le nombre, la géométrie et l’architecture. Nous retrouvons une nouvelle fois dans cette étape les arts libéraux, fondement de notre travail de compagnon. Le nombre, la géométrie et l’architecture sont les instruments communs de la construction du travail maçonnique : la condition qui permettra une communication meilleure et universelle sur la colonne du midi pour atteindre la consécration de l’édifice mettant un terme final à sa création. A partir de ce moment-là, la cathédrale vie, respire, la magie opère. C’est le passage à la maitrise, qui n’est pas une finalité mais le début du chemin initiatique, le début d’une renaissance offrant à l’homme l’aptitude de se penser perfectible et que cette démarche est possible et existe. Le travail du maître maçon commence ici : rendre l'homme meilleur pour que celui-ci améliore la société.

Conclusion

Notre parcourt sur le chemin initiatique et le travail sur soi - que celui-ci implique, permettent de nous élever vers la vraie lumière pour l'amélioration de l'humanité et l’éclairer ainsi de la plus pure lumière.

Le vrai pouvoir de la Franc-Maçonnerie est de diffuser ses idées de fraternité, de tolérance et d’amélioration de l’humanité. Pour cela, elle ne doit compter que sur le travail incessant des frères dans l’accomplissement de cette tâche. Les devoirs et les engagements que nous avons acceptés lors de notre initiation devant nos pairs et tout au long de notre parcourt maçonnique nous obligent à faire œuvre de fraternité et de solidarité. La connaissance de soi nous permet d’aller dans ce sens en nous ouvrant aux autres.

Je ne sais ce que je découvrirai au bout de ce chemin qui me fait prendre conscience que beaucoup d’étoiles flamboyante sont enfuient au plus profond de moi et que je souhaite travailler avec ardeur, joie et liberté : est-ce que ma vie peut se suffire de ce que je sais de moi-même ? Qui est le moi encore resté vierge de ma propre conscience ?

En ayant conscience de nos forces et de nos faiblesses nous pouvons utilement porter notre idéal maçonnique et tenter de rendre notre monde meilleur et nos congénères plus éclairés.

J’ai dit vénérable maître.

S\ R\


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