La chambre du milieu
Avant
de tenter de donner une définition, forcément
subjective et incomplète de cette notion qu’est
« la Chambre du Milieu », j’ai
l’habitude à chaque fois, et pour toutes mes Pl\ de
consulter le
dictionnaire, le Littré, afin de voir qu’elle est
le sens des mots employés
aussi bien dans le vocabulaire profane, que dans le vocabulaire
maçonnique,
afin de vérifier si le sens est le même dans les
deux vocabulaires, ou s’il est
radicalement différent.
Donc
dans mon Littré, pour le mot chambre comme pour le mot
milieu, il y a
trois pages de définitions pour chaque mot, toutes aussi
intéressantes les unes
que les autres. J’ai donc arbitrairement fait un choix, car
si je vous avais
imposé la lecture des six pages de définitions,
j’aurais triché et je n’aurais
pas répondu ni donné une définition de
la « chambre du Milieu ».
Voici
donc quelques définitions qui vont m’aider
à donner mon avis sur la
Chambre du Milieu.
La chambre noire, pièce non éclairée,
pièce sombre pour mettre en pénitence ou
pour se recueillir dans la retraite, en usage dans les
monastères
Pièce où les juges se retirent pour
délibérer,
Chambre de justice ou chambre ardente, deux tribunaux qui
prononçaient la peine
du feu l’un dans les cas
d’hérésie, l’autre dans les
crimes,
Chambre d’accusation, chambre correctionnelle
En
terme d’optique, chambre noire, obscure
l’étymologie entre autre, et en
grec, la chambre signifie toit vouté et voûte,
Dans ces trois pages, je n’ai retenu, que la chambre ardente,
que la chambre
d’accusation, que la chambre funéraire et que la
chambre parlementaire, car il
me semble que dans ce choix, il y a des correspondances avec notre
« chambre du
milieu ».
Pour le mot « milieu », c’est le lieu qui
est également distant des extrémités,
en général, tout endroit qui est
éloigné de la circonférence et des
extrémités.
Le
Seigneur vous parla du milieu de cette flamme (Deutéronome,
Bible)
Milieu se dit aussi de la place d’honneur entre plusieurs
personnes (La
Bruyère)
Poétiquement : le soleil était au milieu de son
cours, la nuit était au milieu
de sa course, il était à peu près
midi, à peu près minuit,
Juste milieu, juste mesure entre les choses, les Hommes
s’accommodent mieux des
milieux que des extrémités (Montesquieu)
Le lieu idéal où se passe la vie des hommes. Nous
voguons sur un milieu vaste,
toujours incertain et flottant poussés d’un bout
à l’autre (Pascal, les
Pensées).
Après la recherche de tout ce matériel, il me
faut passer du profane à la
Maçonnerie.
De l’App qui pendant, un certain temps va mettre en place son
raisonnement,
faire taire tous ses sentiments profanes, tenter de faire le point sur
le
pourquoi de son entrée, en Loge, et qui va occuper la
Colonne B, Mishpat en
hébreu ou le pouvoir royal, pouvoir devant
s’exercer sur lui-même, mais comme
app, il sera infirme parce que privé de la parole, et ne
marchant que sur un
pied.
Plus tard, il deviendra comp passant du pouvoir royal à la
colonne J, ou Tsedek
, le pouvoir sacerdotal, mais le comp, ne travaillera encore que sur
des
surfaces rugueuses, comme les arêtes du Cube, bien
qu’en possession des deux
pouvoirs, royal et sacerdotal, sa démarche ne sera pas
encore la ligne droite,
car les outils en sa possession, ne sont faits et utilisés,
aussi pour la ligne
brisée, l’horizontale comme la verticale,
l’angle droit n’étant qu’une
aspérité
comme une autre.
Enfin,
un jour le comp, sera admis dans la Chambre du Milieu, et dans cette
endroit, là seulement il pourra, comme Maître
réunir les deux pouvoirs, royal
et sacerdotal, ou la Raison et la Spiritualité. Sachant
à ce moment précis,
utiliser et maintenir en égale importance ces deux pouvoirs
que l’initiation
lui aura conférés.
Donc le Maçon est maintenant admis dans la Chambre du Milieu
que va –t-il y
faire, que doit-il y faire ? Mais dans quelle Chambre est il ? Dans la
Chambre
d’accusation, dans la Chambre funéraire, dans la
Chambre ardente ou dans la
Chambre parlementaire ? Je pense qu’il est dans les quatre
à la fois. Parvenu
dans la dite chambre, le nouveau Maître devra abandonner les
outils comme la
règle, l’équerre, et prendre en main le
compas, pour arrondir les angles de sa
pierre cubique. La Chambre du Milieu marque la fin de
l’Initiation en deux
partie de la Franc-maçonnerie (apprenti/compagnon et
Maître), mais elle n’est
pas le terme de l’Initiation, bien au contraire, en
rassemblant ce qui était
épars en nous, elle permet de continuer notre chemin
initiatique.
Chambre
d’accusation elle l’est ; car dans cet endroit
c’est tout nos défauts
qui sont montrés du doigt, tout comme nos
qualités, car l’un comme l’autre sont
négatifs à la démarche initiatique,
trop de défauts sont nuisibles et trop de
qualités, peuvent nous laisser croire à la
perfection. IL faut donc prendre le
juste milieu de notre personnalité, afin de pouvoir
prétendre à la Sagesse. Les
trois mauvais compagnons sont en quelques sortes les figures
emblématiques de
ce qu’il ne faut pas faire pour atteindre la Sagesse. Leur
précipitation à
vouloir brûler les étapes en obéissant
à leurs défauts (orgueil, vanité,
suffisance etc) démontre que toute construction faite, sans
prendre le temps
qu’il faut, est vouée à
l’échec. Pour accéder à la
Chambre du Milieu, il y a eu
crime contre Hiram, chose anormale pour accéder à
la Connaissance.
Chambre
ardente elle l’est, même si dans le monde profane,
elle punissait les
malversations des deniers publics, en Maçonnerie, elle est
là pour punir
justement les mauvais compagnons, et même les
maîtres, qui à tord,
dilapideraient l’enseignement symbolique, sans raison
valable. Mais c’est aussi
l’Athanor des Alchimistes, dans laquelle nos passions doivent
être réduites en
cendre, pour en dégager, comme dirait Rabelais la
subtentifique Moelle, mais
aussi pour redonner à la petite flamme de
spiritualité, que nous avons tous en
nous, la force et la vigueur de briller à
l’extérieur de la Chambre du Milieu,
tout d’abord auprès des comp et des app, et
ensuite dans le monde profane. Elle
nous rappelle la parabole des deniers dans les Evangiles, et de la
bonne
utilisation que nous devons faire de notre INITIATION. Elle nous
apprend la loi
de Causalité, et surtout à ne pas prendre les
effets pour la cause, afin
d’avoir un jugement le plus Sage possible.
Chambre
funéraire, puisque nos réunions au grade de MM,
se font après un deuil,
mais par delà ce deuil, il y a des enseignements
à tirer, comme par exemple sur
la loi des cycles, en nous apprenant que toute forme de vie est soumise
à une
naissance, à un apogée, à un
périgée et pour finir à une mort. Mais
chaque MM
sait que pour renaître à la vie
maçonnique, il faut d’abord mourir à la
vie
profane, c’est une loi universelle que nous ne pouvons pas
ignorer et qu’il
serait vain de repousser loin de nos pensées.
Maître Hiram est mort, mais tous
les mythes fondateurs, doivent pour perdurer, obéirent
à cette loi universelle,
et les FM ne dérogent pas à la Règle.
Ce mythe, que certains disent SOLAIRE,
nous rappelle que nous sommes soumis aux lois de fonctionnement de
l’Univers,
et s’il fallait une preuve pour nous en convaincre, il nous
suffirait de lever
les yeux vers le ciel pour apercevoir que la Chambre du Milieu est sous
le
regard des Etoiles. La Mort faisant partie intégrante de la
vie, il est bon que
les MM s’en souviennent, et n’oublient surtout pas
que toutes œuvres humaines,
même les plus nobles, les plus justes, sont
condamnées à plus ou moins long
terme à leur disparition ; que
l’éphémère est notre
salaire, que nous devons
relativiser nos actes, et surtout que la modestie doit accompagner
notre
travail maçonnique et qu’il n’y a nulle
gloire à retirer du devoir accompli.
La
Chambre du Milieu est bien évidemment, aussi une chambre
parlementaire,
puisque le MM, se doit de participer au travail de la Loge tant dans le
domaine
des activités matérielles utiles à la
vie de la Loge, que dans le domaine de
l’instruction des App et des Comp, étant au centre
du cercle le M, a réuni le
binaire des deux angles du triangle au ternaire. De ce fait, son
jugement est
équilibré, pour assurer la
pérennité de la Loge, ainsi que
l’Egrègore des FF de
la Loge.
Si
l’on accepte du F Oswald Wirth, sa version, notre Chambre du
Milieu est
aussi une chambre de culpabilité, puisque comme MM\ ,
nous n’avons pas su
prévoir l’assassinat de notre Maître
Hiram, et que les assassins font partie de
la cohorte des comp qui travaille sur le chantier, ce qui peut vouloir
signifier que le jugement humain est faillible et que notre prudence
doit être
notre règle, et que pour ce faire, nous devons nous placer
au centre du cercle
que nous savons tracer . Plus simplement cela peut vouloir dire que
tous les
comp ne sont pas tous dignes d’accéder
à la Maîtrise, que les MM\
réunis en
Chambre du Milieu, ont une lourde responsabilité,
lorsqu’ils accordent la
Maîtrise à un comp. A chaque fois les MM\ se
retrouvent dans la caverne de
Platon face à leurs insuffisances, face à eux
même. Mais Jules Boucher dit,
avec pertinence, c’est une opinion que je partage, que la
Chambre du Milieu est
un immense laboratoire où s’opèrent des
transformations infinies. Car comme le
profane entre dans le cabinet de réflexion, le MM lui aussi
en chambre du
Milieu meurt une seconde fois, pour devenir un Adepte,
débarrassé des
illusions, où il apprend la Connaissance directe, celle du
Cœur.
Arrivé
à ce moment de ma planche, j’ai
l’impression de relire des livres traitant
du BOUDDHISME, puisque on me demande de me mettre fin à
toutes mes illusions,
comme les bouddhistes le recommandent par une simple phrase : le monde
n’est
qu’une ILLUSION, et que pour accéder à
la Connaissance ultime, il faut être
sans illusion, d’abord sur soi même et ensuite sur
le Monde. C’est certainement
l’effort, le travail, et pourquoi pas
l’ascèse, que le MM\,
doit accepter, pour
devenir un Adepte. Tout comme dans l’Alchimie, où
l’on peut rester un simple
souffleur, et fabriquer de l’or, ou devenir un Adepte et
purifier son Ame.
Puisque
j’ai fait référence aux philosophies
orientales, et puisque j’ai parlé
de Chambre du Milieu, il y a en Chine un maître
incontesté de la Voie du
Milieu, LAO TSEU, dont certains écrits pourraient fort bien
faire partie de nos
rituels ; avec votre permission, je vais vous en lire ce que je
considère comme
un exemple significatif :
Le sage ne se montre pas, il brille Il ne s’impose pas, on le
remarque Il ne se
vante pas, on lui trouve des mérites IL ne se pousse pas, il
progresse Le sage
est méthodique mais pas tranchant Intègre mais
pas blessant Droit mais pas
absolu Lumineux mais pas éblouissant Le sage
s’instruit sans étudier En
observant les fautes des autres. Le sage sans jamais faire de grandes
actions
accomplit de grandes choses, Se connaître soi même,
c’est la Sagesse supérieure
Connaître les autres c’est la Sagesse Le sage
respecte tout. Avant tout, il se
respecte lui-même Le sage voit l’ensemble, non le
détail, le vulgaire compare
et ne généralise pas.
Si
l’on remplace le mot sage par le mot Maître, je
pense ce texte de Lao Tseu,
convient parfaitement à la Chambre du Milieu et aux MM, qui
la composent, et
puis la Chine, n’était elle pas appeler
l’Empire du Milieu.
Donc être en Chambre du Milieu, est pour le MM\ une
garantie d’équité dans ses
jugements et d’efficacité pour continuer son
parcours initiatique, puisqu’il
devient en participant aux travaux de la Maîtrise, le centre
de toute son
activité, à égale distance de tout ce
qui peut être nuisible, il n’est ni
négatif,
ni positif, il devient neutre, et débarrassé des
illusions de la vie profane.
La
Chambre du Milieu est le point parfait où le MM, prend
conscience des
différentes lois qui agissent dans l’univers, la
loi de causalité, la loi des
cycles, la loi des équivalences entre les choses, la loi
d’équilibre, faisant
comprendre qu’une action entraîne une
réaction, la loi de la relativité de
l’action humaine ; et certainement d’autres que
j’ignore. La Chambre du Milieu
pourrait tout aussi bien s’appeler la Chambre de Sagesse.
J’ai
dit !
Documents
utilisés :
Internet
pour Lao TSEU - OSWALD WIRTH - Jules BOUCHER, et
Le LITTRE
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