Obédience : NC Loge : NC 17/10/2010

Les outils du meurtre d’Hiram

Que nous indique le rituel ?

« Le temple avait trois portes : l’une à l’orient, l’autre au midi, la troisième à l’occident. »

Trois complices se placèrent à chacune de ces portes, afin que, si le Maître échappait à l’un, il ne put éviter les autres.

Ayant terminé son inspection des travaux du jour, Hiram allait se retirer par la porte du midi. Mais il aperçoit l’un des conjurés muni d’une règle qui tente de le frapper à la gorge. Hiram réussit à dévier le coup qui le frappe sur l’épaule droite. Il tombe sur le genou droit. Hiram gagne ensuite la porte de l’occident. Le deuxième conjuré, armé d’un levier, tente de le frapper à la nuque, mais Hiram dévie le coup qui lui blesse l’épaule gauche. Il tombe sur le genou gauche. Hiram, chancelant, gagne la porte de l’orient où l’infâme le frappe au front d’un violent coup de maillet qui le renverse sur le pavé du temple.

Ainsi périt l’homme juste :
- victime de trois outils: règle, levier, maillet
- brandis par trois mauvais compagnons
- blessé en trois points stratégiques: épaule gauche, épaule droite, front
- aux trois portes du temple.

A quoi les trois outils correspondent-ils ?

La règle est à la base de toute mesure. Elle est un guide au sens de perfectionnement moral. Elle permet de tracer des plans, donne la ligne, indique la droite, le sens de l’infini, à la fois mémoire et capacité de projection, infini cosmique et moral.

C’est à la fois l’outil de l’apprentie (elle figure au tableau de L. ) et de la compagnonne. Elle est alors graduée et toujours associée à d’autres outils. Elle fait référence, toujours posée sur l’épaule gauche de la récipiendaire, lors de son augmentation de salaire. Elle est statique, à la fois un signe de contrôle et un but. C’est l’exigence de la droiture qu’on ne saurait ignorer sous peine de la dévoyer en se dévoyant soi même…Démesure de l’être qui n’a plus, ni limites, ni orientation, ni références, ni exigences.

Au cinquième voyage de la compagnonne, le seul où elle a les mains libres, la règle est posée au midi, à côté du tapis de L. Elle est alors associée au levier.

Le puissant levier est l’outil par excellence de la compagnonne, permettant à celle-ci le transport et la pose de sa pierre cubique. Pour ce faire, elle doit contrôler son énergie, maîtriser sa force, surmonter l’adversité, se montrer déterminée et prudente.

Lors du troisième voyage de la compagnonne, lorsqu’elle reçoit le levier en main droite, règle toujours sur l’épaule gauche, et découvre le cartouche des arts libéraux, en même temps que les sphères terrestre et céleste, la VM. la met en garde , par le biais du rituel: « Vous devez vous efforcer d’acquérir les connaissances nécessaires , pour en

prendre la mesure, en procédant toutefois, avec la prudence qui s’impose à nos faibles moyens. »Voilà une mise en garde bien vite oubliée, le levier provoquant un tel sentiment de puissance, compte tenu de son point d’appui, orgueil et vanité n’étant pas loin, qu’il devient à son tour un outil de mort.

La règle et le levier, indissociables dès le deuxième degré, seront à nouveau réunis autour du drap mortuaire(septentrion et midi), désignant ainsi la classe d’ouvriers ayant procédé au meurtre d’Hiram.

Le maillet est associé dès l’initiation indifféremment à la VM. dans l’exercice de son commandement, ou à l’apprentie pour le taillage de sa pierre brute. Qu’on lui adjoigne l’épée flamboyante ou le ciseau, il reste l’emblème de la force en mouvement, du pouvoir en action, de la puissance, du contrôle de soi, de la fermeté, mais aussi de la persévérance. Lors de son augmentation de salaire, la compagnonne le recevra en main droite(avec le ciseau, la règle étant toujours sur l’épaule gauche)lors de son premier voyage.

Dans de mauvaises mains qu’anime un esprit haineux et rageur, son usage est perverti et il devient lui aussi une arme de mort. Il est alors utilisé seul, n’est plus limité par l’épée flamboyante ou le ciseau, encore moins par l’intelligence.

Il devient un marteau, image de la force brutale, de la pesanteur, de la mort, de l’impétuosité instinctive et dominatrice au service de l’ambition.

Ce qui caractérise ces trois outils est leur ambivalence. Nul doute que les trois mauvais compagnons en font le plus mauvais usage qui soit.

Le complot ourdi par les trois mauvais compagnons ne laisse aucune chance à Hiram.

Lors de la cérémonie d’élévation à la maîtrise, la récipiendaire, en position d’assassin, est alors soupçonnée, puis accusée du meurtre d’Hiram. « Mes SS. ne me reconnaissent plus comme telle »pense-t-elle. « Mes outils de compagnonne me désignent. »

Après que ses gants et son tablier ont été inspectés, et qu’elle a effectué les huit pas de la maîtresse Maç. en enjambant le cadavre, ce sont finalement aux trois lumières de la L. que va incomber le rôle des scélérates; Ce sont leurs charges qu’elle trahissent. Si les trois lumières de la L. sont au cœur de la transmission et de la direction des travaux, elles ont aussi une charge affective, de guide et d’exemple. La deuxième surveillante est attachée aux apprenties, la première surveillante aux compagnonnes et la VM. représente toutes les SS. de la L. . C‘est comme si toutes les SS. étaient coupables du meurtre d‘Hiram. Désormais, le chantier est désorganisé.

Il convient d’ajouter à ce stade que le mauvais compagnon est notre pire ennemi, et qu’il ne doit pas rester en nous. Il nous faut le combattre à chaque instant, si nous voulons continuer l’œuvre, mais il est sournois et peut surgir à notre insu. C’est donc un travail de vigilance auquel il faudra s’astreindre, sous peine de retomber dans les ténèbres, nos propres ténèbres.

Puis, d’accusée, la récipiendaire devient victime. Elle est Hiram et va succomber à trois grands coups.

Le premier est porté par la deuxième surveillante, qui symbolise le premier conjuré, à la porte du midi, place où elle tient son office. Le coup de règle vise la gorge, siège du souffle, de la parole, de l’échange. Hiram évite le coup qui est dévié sur l’épaule droite, il tombe sur le genou droit. Le coup doit s’effectuer de gauche à droite, ce qui ne constitue pas un mouvement naturel de frappe(comme à revers). C’est tout le coté droit qui est violemment atteint, provoquant un engourdissement. Hiram est alors privé de son côté actif. En L. , la main droite est celle de l’attouchement, du signe d’ordre, de la griffe de M. , tandis que le genou droit est celui sur lequel la récipiendaire s’appuie pour être reçue, constituée à son grade par le sacre.

Le deuxième coup est porté à la porte de l’occident par la première surveillante, qui représente le deuxième conjuré. Il y a une progression dans la violence, car cette fois, le coup de levier vise la nuque, charpente de l’ossature humaine, sommet de notre axe vertébral dans lequel circule la moëlle épinière. Le coup est porté de droite à gauche dans un mouvement naturel de frappe qui décuple sa violence(sauf à être gaucher). Hiram réussit une nouvelle fois à dévier le coup qui le frappe à l’épaule gauche, il tombe sur le genou gauche, côté passif de la réflexion, du coeur.

Par ces deux coups combinés et successifs, Hiram est à la fois privé d’action et de réflexion. Il sait qu’il est extrêmement vulnérable. Son émotion est forte. Il sait qu’il va mourir parce qu’il ne cèdera pas:fidèle à son sens du devoir, il ne donnera pas le mot sacré des MM. .

Il se rend en chancelant à la porte de l’orient, où se tient la VM. figurant le troisième conjuré qui lui assène le troisième coup à l’aide du maillet. C’est comme un coup de tonnerre qui frappe Hiram au front, siège de l’esprit, de la connaissance. Ce coup est fatal, frappé à l’horizontale, de conscience à conscience.

On peut constater que la triangulation s’exerce sur trois plans distincts. On retrouve sur le corps d’Hiram, la trace des coups aux mêmes emplacements que les portes du temple figurant les plateaux des trois lumières de la L:tête, porte d’orient, VM. /epaule gauche, porte d’occident, 1°surveillante/épaule droite , porte du midi, 2°surveillante. De même la nouvelle VM. sera sacrée par la TRM. sur l’épaule gauche, puis droite , puis sur la tête.

Aucun des trois mauvais compagnons n’a failli au terrible complot. Rien n’a pu les arrêter, ni les sages paroles du maître, ni sa révolte, ni même une once de leur propre conscience. Ils ont préféré anéantir ce qui les dépassait plutôt que de s’y soumettre;Ils voulaient obtenir le mot des M. M, avant l‘heure, par la violence;ils ont tué le M. Hiram, qui a sacrifié sa vie pour faire son devoir. « Fidèle au devoir jusqu‘à la mort ». Ils ont manié les outils des bâtisseurs pour une oeuvre de mort. Mais, ils ont dans le même temps, permis à la compagnonne de mourir pour renaître à une vie nouvelle , à l’aide de ce coup de maillet, déclencheur d’une étincelle de vie. Celle-ci a quitté le monde matériel pour s’élever vers le spirituel, à la recherche de la parole perdue. Il ne nous reste que les secrets véritables de la M. M. Notre Maître Hiram tombe sur le pavé du temple…Pavé mosaïque à n’en pas douter qui alterne successivement les cases blanches et noires de notre condition, à la fois le mal qui fait de nous des mauvais compagnons et le bien qui nous fait relever Hiram par les cinq points de la M. L’espoir était d’ailleurs là, manifesté par l’étoile du pilier sagesse, constamment allumée, même au plus fort des coups. Le Maître peut renaître, plus radieux que jamais. Il a accédé à un nouvel état de conscience qui lui permettra de continuer l’œuvre, de rechercher la vérité et par son travail de poursuivre sa quête de la parole perdue.

J’ai dit

S\ B\


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