Obédience : NC | Loge : NC | 14/11/200 |
Manger et boire ensembleA la Gloire du G\A\D\L\U\, V\M\ et vous
tous mes FF\ en vos G\ et Q\, notre Vén\M\ nous invite
à un Banquet d’Ordre. Molière a dit : « Il faut manger pour vivre et non vivre pour manger », et pourtant, mes FF\, est-ce toujours vrai aujourd’hui ? Nous vivons dangereusement. Se nourrir est devenu une réelle prise de risques quotidienne à l’époque où,- la vache folle hante nos assiettes et les frites Mac-Cain sont transgéniques - la maladie de Creutzfeld-jakob nous guette, - les pollutions successives de nos mers et de nos rivières nous invitent à éviter les crustacés pollués aux bacilles fécaux et les poissons aromatisés au mazout, - les saumons et les poulets sont gavés avec des farines animales, - les rillettes et les fromages sont livrés avec salmonelles et listériose et ceci sans supplément, - les cuisses de canards avariées vont remplir nos assiettes, - les moutons ont la tremblante - les antibiotiques farcissent la viande de porc et - les crabes phosphorescents pêchés dans la Hague illumineront nos repas, j’avais envie d’inviter, ce midi, José BOVE ou Jean Pierre KOFF pour nous parler de mal bouff. Mais sont-ils F\M\ ? Rassurez-vous mes FF\, je ne vous entretiendrai pas de cela ce midi. Pour l’oublier et nous donner du cœur à l’ouvrage, je vous propose d’ouvrir une « Sacrée Bouteille » en guise d’apéritif. Ecoute de
« Sacrée bouteille »
Graeme ALLWRIGHT. « Ecoutez et soyez intelligents ! Ce qui entre dans la bouche ne souille pas l’Homme, mais ce qui sort de la bouche c’est ce qui souille l’Homme. Ce qui sort de la bouche vient du cœur et c’est cela qui souille l’Homme. Car du cœur viennent les mauvais calculs, les meurtres, les adultères, les vols, les faux témoignages, les blasphèmes. Voilà ce qui souille l’Homme alors que de manger les mains sales ne souille pas l’Homme. » fin de citation. Je vous propose donc d’évoquer ensemble la nourriture spirituelle et plus particulièrement, la nourriture partagée à l’occasion du Banquet d’Ordre. Le banquet a, de toute époque et pour beaucoup de raisons, toujours eu une signification forte. Jadis, il était de coutume de terminer chaque tenue par un banquet, mais pour que les travaux de mastication ne prennent pas plus d’importance que nos travaux philosophiques et spéculatifs, - même si ces derniers ne remplissent pas le ventre d’un honnête F\ M\-, il a été convenu de le réserver à certaines occasions. Deux termes sont utilisés : le Banquet d’Ordre et les Agapes. Au menu, ce midi, après cette introduction en guise d’apéritif, je vous servirai en premier plat une présentation du Banquet sur un plan historique et rituel. Il est agrémenté à la sauce symbolique. Les Agapes suivront. Enfin, la Cène, repas important dans notre culture judo chrétienne, terminera ce travail. Rappelons en avant propos que, jadis, le banquet était constitué par des offrandes. Il exprime un rite communiel et en particulier, pour les occidentaux, celui de l’Eucharistie. De façon plus général, il est un symbole de participation à une société, à un projet, à une fête. La notion de
« bonne chère »
apparaît, d'ailleurs, comme tout à fait
subjective. Si, se nourrir n'est que la satisfaction d'un besoin
physique et psychique, ce contentement viscéral devient une
démarche intellectuelle lorsque la gourmandise
apparaît, forte aberration de la faim, qu'elle finit souvent
par gouverner. Le banquet est l’une des plus solides et des plus anciennes traditions maçonniques. Ainsi, les objets de tables, décorés aux armes des loges avec des symboles maçonniques sont nombreux et démontrent, chez nous, l’importance de la convivialité. Les Constitutions d’Anderson de 1773 prescrivent ces moments privilégiés. En effet, la tradition du banquet explique les nombreuses assemblées dans les restaurants et le fait que l’opinion publique au XVIIIème siècle assimilait souvent la Maçonnerie aux sociétés bachiques, nombreuses à l’époque. L’usage du banquet varie avec le rite pratiqué. Au Rite Ecossais Ancien et Accepté, le Banquet d’Ordre a lieu une fois par an. Les fêtes solsticiales sont aussi l’occasion de se réunir pour un banquet, en compagnie de la famille et des amis profanes. Le rituel du Banquet d’Ordre est emprunté aux traditions des loges militaires sous l’Ancien Régime. Appelé également « travaux de mastication » ou « travaux de table », les aliments et les ustensiles adoptent des dénominations particulières :
Ä L’eau est « la poudre
faible » ; le vin : « la poudre
forte ou poudre rouge » ; le champagne est
« la poudre
pétillante » et les alcools et liqueurs
sont « la poudre fulminante ». Enfin, manger, c’est « mastiquer », boire, c’est « tirer une canonnée ou faire feu » et découper, « c’est dégrossir ». Signalons, mes FF\ que ce langage reste très
militaire. Et maintenant, mes FF\, passons au Rituel. Les banquets se tiennent presque toujours au grade d’Appr\, afin que tous les Maçons puissent y être admis, quelque soit leurs grades et qualités. Il ne doit y avoir qu’une seule table, disposée en fer à cheval ce qui rappelle le Triclinium (2) des Anciens. Elle s’apparenterait, du reste, à la forme de la Table de la Sainte Cène. Les FF\ se placent en dehors, excepté le M\ de Cér\ qui se place parfois dans le fer à cheval en face du Vén\ M\. Ce dernier occupe le milieu de la table, ayant à ses côtés les Off\. Les FF\ Surv \ prennent place aux deux extrémités. Quant au F\ Expert, il lui est conseillé de
porter de bonnes chaussures car il doit s’assurer
régulièrement que la loge est bien Couverte. Il y a 7 santés d’Obligation et on intercale entre la 6ème et la 7ème, toutes celles que l’on juge à propos d’ajouter. Il est d’usage, si les Honneurs sont portés à un personnage présent qu’il remercie par une courte réponse, suivie d’une batterie. Dans certains rites, la somme des battements de mains composant toutes les batteries successives atteint 180, c’est à dire la mesure en degrés d’une demi circonférence. J’imagine le rapprochement avec le symbolisme de la Table Ronde autour de laquelle les Chevaliers prenaient place en stricte égalité, comme à l’occasion de notre Banquet d’Ordre. Notons cependant que, si la Loge de Table est en demi cercle, elle symbolise également le Paradis Terrestre, c’est à dire le début du cycle ; alors que notre table se rapproche du Carré Long symbolisera l’attente de la Jérusalem Céleste et donc la fin du Cycle. J’ajoute enfin, qu’au XVIIIème siècle, les Maçons se réunissaient dans les salles d’auberges, lieux propices à organiser des festins. Ils traçaient les symboles à la craie sur le plancher puis les effaçaient à la fin de la tenue avant de souper, moment privilégié pour développer la convivialité. Cette convivialité, en plus du plaisir
qu’elle procure, joue un rôle social. Ainsi
souvenons-nous des dîners des philosophes des
Lumières. En règle générale, les repas sont l’occasion d’échanger des idées. On s’y étonne, on s’émerveille, on s’indigne et surtout on rit. Enfin, pour les Maçons, le calme, la sérénité et la qualité des travaux sont assurés dans la mesure où il existe un temps pour se détendre et se libérer. Quel lieu plus propice que la Salle Humide, même si « tous les F\ semblent aspirer au repos » en fin de tenue… ? Outre le banquet d’ordre, un autre terme désigne ces moments forts pendant lesquels les FF\ se réunissent dans la convivialité, ce sont les Agapes. Ce mot grec signifie « tendresse ». La tendresse est proche de l’affection, de l’amour, du dévouement, autant de qualités du vrai Maçon. L’équivalent latin d’Agape est « caritas », c’est à dire « charité », cette vertu qu’il faut pratiquer toute l’année. En effet, la Charité « est comme l’Amour, on n’en parle le moins possible mais il faut le pratiquer le plus souvent ». Cette charité est
exacerbée en hiver alors que les Restos du Cœur,
chers à Coluche, nous le rappelle, tout comme la soupe
populaire servie par l’Armée du Salut. Mais du reste, les Agapes ne se soldent pas uniquement par la satisfaction de besoins physiologiques. Elles traduisent surtout un « plus », quelque peu magique, qui amène progressivement les convives à transformer leur comportement en devenant moins agressifs, plus expansifs et plus authentiques. Partager en commun vins et nourriture est susceptible de créer un courant de communication et de compréhension sous l’effet d’une libération de l’être et de ses pensées. Les agapes s’apparentent alors à une sorte de rituel de nature à entretenir ou renforcer des liens privilégiés, amicaux et fraternels. Il n’est donc pas étonnant qu’elles aient été historiquement et restent de nos jours, par le partage d’un même repas, un moyen recherché pour constater, favoriser ou développer une même identité, un même but ou des sentiments communs. Aussi, est-il encore habituel d’organiser un repas familial ou amical en guise de témoignage d’affection. L’inverse est tout aussi vrai et pour contribuer à aplanir des difficultés, des divergence de points de vue, des situations conflictuelles ou tendues, un bon repas est très utile. Autant de raisons qui démontrent que les Agapes s’inscrivent dans notre mode de vie quotidien. Sous couvert de mettre en exergue ou fêter un événement, elles visent à faire prendre conscience ou favoriser une certaine communauté d’idées, de valeurs, d’intérêts. Elles servent à développer une certaine Solidarité ou Fraternité dans la mesure où ce partage contribue à une transformation affective et intellectuelle, permettant réellement de se rapprocher les uns des autres. Parfois, on oppose Agape
à « Eros », dieu de
l’Amour. Agape est un amour de bienveillance et de
prévenance tandis qu’Eros correspond à
l’amour des amants. Ce repas est aussi l’occasion, pour les Appr\,
de servir et desservir tous les FF\, symbole d’apprentissage
mais aussi signe de respect. C’est aussi l’occasion de rappeler que les Agapes étaient également le repas pris en commun par les premiers chrétiens. Dans le Nouveau Testament, il devient synonyme d’Amour Fraternel. Ainsi, dans ce contexte, Agapè est soit l’amour gratifiant de Dieu pour les Hommes, soit l’amour inconditionné, le dévouement des Chrétiens pour autrui. En effet, tous les Hommes sont frères puisque fils d’un même Dieu. Ce dévouement existe également pour tous les FF\ Maçons. Et notre Banquet d’Ordre ainsi que les Agapes
procèdent du même esprit de fraternité.
Lors de ces repas, qui représentaient un aspect important de la vie en communauté, à Qumrân notamment, on bénissait le pain et le vin conformément à la coutume juive. De nombreux récits de l’Ancien et
du Nouveau Testament commencent ou finissent par des repas.
Jésus lui-même ne dédaignait pas la
bonne chère et le bon vin. Les convives sont allongés sur des banquettes comme le veut le rituel car il s’agit de montrer que depuis la sortie de l’Egypte, le peuple élu est libre. J’en averti une nouvelle fois nos FF\ Appr\, nous n’en ferons pas de même ce midi. Un autre repas important de la tradition
chrétienne est la Cène. Le Talmud prescrit de fracturer le pain car en le
séparant, on suggère l’autonomie de
chacun et d’en donner les morceaux aux convives qui
reçoivent ainsi le gage de l’autonomie et la
nourriture qui les unit. Dans le Deutéronome, verset 8, il est dit « Pour que tu saches que ce n’est pas par le pain seul que l’Homme vivra, mais par tout ce qui sort de la bouche du Seigneur, l’Homme vivra. » En effet, la bouche de l’Homme a plusieurs fonctions. Des plus utilisées, celle de manger et celle de parler, celle d’ingérer de la nourriture physique et spirituelle. C’est aussi celle de porter au dehors une parole nourrissante pour les autres. L’œuvre de Jésus repose sur cet objectif prioritaire, c’est à dire, la Bonne Parole encore dénommée : « Evangile ». Au 6ème jour de la création, Dieu
donne la nourriture physique à Adam, ce sont les plantes
créées au 3ème jour. Ce
n’est qu’après le Déluge que
Dieu a permis à l’Homme de manger de la viande,
hormis celle d’un animal vivant. Dis-moi ce que tu manges, je te dirai qui tu es. Déjà le livre du Lévitique donnait de nombreuses restrictions et limitations. Je gage qu’il serait judicieux de les méditer. Mes FF\comme je vous l’ai déjà dit, la nourriture symbolique ne nourrit totalement l’Homme. Ceci s’applique également au F\ M\, alors concluons rapidement avant d’aller nous restaurer. Les travaux de mastication s’inscrivent, selon moi, dans une dynamique de développement de la Fraternité, de la convivialité avant d’être travaux rituels et symboliques. Ils scellent l’amitié née des travaux collectifs et des affinités diverses. Admettons, dans le meilleur des cas, que la
Fraternité engendrée par les Agapes et les
Banquets, se révèle toujours circonstancielle, la
plupart du temps, superficielle et le plus souvent, limitée
à la seule durée de la rencontre. D’une
manière générale, ce type de
Fraternité s’appuie sur l’aspect
quantitatif des choses et trouve sa racine dans
l’affectivité. Enfin, mes FF\, apprécions, ces moments de liberté joyeuse et remercions notre Vén\ M\ de nous permettre d’y goûter régulièrement. Permettez que je termine en formulant cinq vœux qui rappellent la Tradition et auxquels, j’espère, vous serez « presque tous » sensibles :
Ä premièrement, que le service soit
entièrement à la charge des Appr\
« et maintenant, allons voir les filles ». J’ai dit V\ M\ et vous comprendrez qu’« il faut que je m’en aille ». Ecoute de « Il faut que je m’en aille » de Graeme ALLWRIGHT. S\ H\ (1) Manger à la même table
qu’une autre personne |
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