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Tout se désunit !

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En maçonnerie, le mythe de l’homicide fraternel du maître Hiram est le principe de la symbolique de la Franc-maçonnerie et plus particulièrement au troisième degré.

Hiram est mort, assassiné par ses frères. Trois compagnons souhaitant s’approprier les secrets du maître l’attirent dans un guet-apens et le tuent. Pour dissimuler leur forfait, ils l’enterrent et à l’endroit de la sépulture, plantent une branche d’acacia, grâce à laquelle le corps du maître sera retrouvé.

Les trois « mauvais compagnons » représentant l’Ignorance, le fanatisme et l’ambition. Ce drame se réitère chaque fois que le temps mythique est évoqué dans une loge au cours d’une tenue au grade de maître.

Sa dépouille est, alors, retrouvée par les neuf maîtres envoyés à sa recherche. Accompagné par les deux surveillants, le vénérable maître s’approche. Le second surveillant s’exclame « Voilà l’acacia ».

Après que le Vénérable Maître a identifié le cadavre, le second surveillant se penche sur celui-ci ; il lui saisit l’index de la main droite - le doigt sur la base duquel s’exerce l’attouchement d’apprenti - et prononce le mot sacré du grade. Il tente ainsi de le ranimer, orienté verticalement selon le fil à plomb. Le doigt lui échappe et il s’exclame « La chair quitte les os ».

Le premier surveillant essaie à son tour, il saisit le médius, sur la première phalange duquel s’exerce la demande du mot sacré de compagnon, et énonce celui-ci, lui aussi constate l’échec de sa tentative et il s’exclame à son tour « Tout se désunit ».

Ces deux exclamations sont à la base du symbolisme du grade de maître.

La nature nous offre de nombreux exemples de régénérescence : Après la St-Jean en hivers, de l’arbre sec va reverdir un nouveau rameau ; Du grain se décomposant en terre va sortir une jeune plante ; Des grappes pourrissant sur la vigne, méticuleusement triées, va être pressé le Bonnezeaux.

Les Traditions nous fournissent également les leurs, Osiris déchiqueté est devenu le dieu de l’agriculture.

En effet, selon la légende,  Seth, jaloux de son frère Osiris régnant sur l'Égypte, l'assassine et le jette dans le Nil. Isis retrouve le corps de son mari à Byblos (Liban actuel) et le ramène en Égypte. Fou de colère, Seth démembre le mort et éparpille les morceaux à travers l'Égypte. Isis réussira à récupérer les restes épars et avec l'aide d’Anubis, procédera à la première momification et redonnera vie au cadavre.

Elle aura avec Osiris un enfant posthume : Horus. En ramenant son époux Osiris à la vie, Isis a ouvert la voie de la résurrection à tous les mortels.

Mais un autre événement, moins connu peut-être, nous parle d’une étrange résurrection. Il s’agit d’un manuscrit daté du 24 octobre 1726, le Ms Graham.

« Sem, Cham et Japhet eurent à se rendre sur la tombe de leur père Noé pour essayer d’y découvrir quelque chose à son sujet qui les guiderait vers le puissant secret que détenait ce fameux prédicateur. Ces trois hommes étaient déjà convenus que s’ils ne découvraient pas le véritable secret lui-même, la première chose qu’ils découvriraient leur tiendrait lieu de secret. Ils ne doutaient pas, mais croyaient très fermement que Dieu pouvait et voudrait révéler sa volonté, par la grâce de leur foi, de leur prière et de leur soumission ; de sorte que ce qu’ils découvriraient se révélerait aussi utile pour eux que s’ils avaient reçu le secret dès le commencement, de Dieu en personne, à la source même. Ils parvinrent à la tombe et ne trouvèrent rien, sauf le cadavre presque entièrement corrompu. Ils saisirent un doigt qui se détacha, et ainsi de jointure en jointure, jusqu’au poignet et au coude. Alors, ils relevèrent le corps et le soutinrent en se plaçant avec lui pied contre pied, genou contre genou, poitrine contre poitrine, joue contre joue et main dans le dos, et s’écrièrent : « Aide-nous, 0 Père ». Comme s’ils avaient dit : « 0 Père du ciel aide-nous maintenant, car notre père terrestre ne le peut pas ».

Ils reposèrent ensuite le cadavre, ne sachant qu’en faire. L’un d’eux dit alors : « II y a de la moelle dans cet os » [Marrow in this bone] ; le second dit : « Mais c’est un os sec » ; et le troisième dit : « il pue ».

Ils s’accordèrent alors pour donner à cela un nom qui est encore connu de la Franc-maçonnerie de nos jours ».

Cette expression de Maître « Marrow in the bone » - la moelle dans l’os -, dont les initiales M\ B\ (Mak Benah ! « ou » Mac Benac !) correspondent au Mot Sacré des Maîtres dans certains rites.

Cette symbolique est ébauchée dès le grade d’apprenti : la chaîne d’union de tenue funèbre amène le dernier initié à remplacer le frère disparu. Lors de cette cérémonie, une branche d’acacia est disposée sur le drap noir qui recouvre la chaise placée sur le pavé mosaïque.

L’acacia, arbre toujours vert, produit un bois qui détient la réputation d’être quasiment imputrescible, il est symbole de vie et d’immortalité. Il représente la dimension éternelle de la maçonnerie.

Mais l’immortalité transite par la pourriture : la germination des plantes est liée à une décomposition. Une vie nouvelle passe par une disparition préalable, c’est une nouvelle fécondation, une résurrection.

L’apprenti, « après être mort aux préjugés du vulgaire, s’est vu renaître à la vie nouvelle que confère l’initiation ». Pour passer de l’équerre au compas, le compagnon aura à enjamber la tombe d’Hiram: A l’image de l’épi qui lui a servi de mot de passe, il sera devenu « fils de la putréfaction ».

Lors de la chaîne d’union de tenue funèbre, c’est le premier surveillant qui constate « Vénérable maître, la chaîne est rompue à l’occident ». Maintenant, il découvre le désordre « Tout se désunit ».

Rupture dans la fraternité : ce sont des compagnons qui ont tué Hiram. Par conséquent, fracture dans l’unité de l’Ordre. Cassure enfin dans la continuité de l’œuvre, la construction du temple. La disparition d’Hiram entraîne celle de la parole.

Cette disparition du mot secret initial introduit le désordre dans la fraternité.

Isis, est partie à la recherche des morceaux dispersés du corps de son mari, Osiris afin de le reconstituer. Les chevaliers du moyen âge vont eux à la quête du Graal. Les maîtres maçons s’efforceront de retrouver la parole perdue.

La parole perdue représentait une puissance énorme « Au commencement était le Verbe ». C’était le matériau avec lequel allait être bâti l’univers.

Mais est-elle réellement perdue ? Elle apparaît souvent sous la forme du tétragramme hébraïque inscrit dans le delta lumineux. Mais elle n’est pas assimilable par l’homme. Sa disparition était nécessaire pour permettre de donner naissance aux mots substitués, plus facilement utilisables, mais toujours avec précaution, car nous nous limitons à les épeler ou à les énoncer par syllabes alternées.

L’effort conjugué des deux surveillants ne parviendra pas â ranimer Hiram, le second en mettant en œuvre la dimension du temps et le second surveillant en ayant recours aux trois dimensions de l’espace. Même en combinant leurs efforts, dans notre monde à quatre dimensions, qu’ils ne réussiraient pas non plus. Par ce double échec, le compagnon découvre que les enseignements reçus au cours des deux premiers degrés ne s’avèrent pas suffisants pour assimiler le message qui lui est présenté.

Comme les mauvais compagnons étaient trois, comme trois hommes - Salomon, roi d’Israël, Hiram, roi de Tyr, et Hiram Abi, architecte du Temple étaient le détenteur du mot sacré, trois Maîtres seront nécessaires pour ressouder la chaîne et faire renaître Hiram.

La cinquième dimension, apportée par le vénérable maître qui joint son énergie à celles des deux surveillants, permet à Hiram de passer de l’horizontalité à la verticalité par les cinq points parfaits de la maîtrise.

L'initiation, à travers la légende d'Hiram est une renaissance, une transmutation qui s'opère par une mort et une résurrection rituelle.

Comme tous les mythes ou contes, de divinités assassinées. Ils servent de modèle au comportement humain. Ils fondent l'être dans le sacré. C'est grâce au symbole que l'être sort de sa situation et s'ouvre sur l'univers. Le symbole éveille l'expérience individuelle et la transforme en acte spirituel.

J’ai dit V\ M\

F\ R\


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