Obédience : NC Loge : NC Date : NC

 

L’Être au centre du Principe

Vénérable Maitre et vous tous mes frères en vos grades et qualités. Je dois reconnaitre que j’ai choisi ce sujet à forte résonnance pour moi, sans vraiment savoir comment j’allais le traiter, je vous avoue que j’ai eu beaucoup de difficulté à accoucher de ce travail au 1er degré.

Dans un 1er temps, il s’agit de notes que j’avais prises lors d’un atelier d’apprentis avec Bernard GERKE.

Ensuite, il a fallu apporter un éclairage aux apprentis, tout en tenant compte de leur grade.

En m’appuyant sur la pensée Guénonienne, et afin de cerner la thématique, je vais développer les notons suivantes :

-L’Etre en majuscule/l’être en minuscule/le non Etre/ les Etats de l’Etre
-Le centre et le cercle
-Le Principe, en liaison avec le Soi
-La démarche traditionnelle
-La réalisation de Soi : l’écorce et le noyau
-Et une conclusion

Être :

C’est exister au monde : l’acte d’être

La maxime de DESCARTES : «  Je pense donc je suis » exprime une identification (c’est par la pensée que je m’individualise, que j’existe en ce monde). Selon René GUENON : l’Etre (avec majuscule dans le texte) est pris dans son sens général celui de la manifestation ou Principe de l’existence universelle. La relation entre Être (le principe) et l’existence (sa manifestation) étant comparable à Dieu et à la création.

L’être en minuscule dans le texte fait référence aux formes vivantes peuplant notre monde de corps, que ce soit un organisme cellulaire ou l’être humain mais aussi toutes les entités «  l’indéfinité (ce que l’on ne connait pas encore…) ».

Le Non Etre

Il ne concerne pas l’être ou l’existence selon Maitre ECKHART

Le non être n’est pas non plus le néant car l’être est pénétré du non être

Le centre

Le centre est l’axe de l’immobile du milieu, c’est l’axe du monde qui symbolise le passage entre le plan terrestre (symbolisé par le tableau de la loge) et le plan céleste (voûte céleste dans la loge). Il est rayon à la fois du cercle mais aussi rayon du soleil car toujours considéré comme porteur de lumière. Similitude de l’axe du monde avec l’arbre, l’échelle et même encore la montagne. La montagne est souvent utilisée pour représenter symboliquement le lieu du séjour du centre spirituel. Lieu de passage entre les états humains et supra humains, donnant l’accès aux états supérieurs de l’Être. Le centre en tant que cercle ouvre des perspectives infinies à l’esprit, il est le monde spirituel, c’est aussi le mouvement, le temps, l’éternel recommencement, symbole de la divinité, de la manifestation, de l’univers. Le centre et le cercle ne font qu’un car il s’agit d’un symbole unique nous ramenant au Grand Architecte de l’Univers. Nicolas DE CLUSE dit à ce propos : « Dieu est circonférence et centre, partout et nulle part » et Pascal de renchérir ; « Dieu est une sphère dont le centre est partout et la circonférence nulle part ».

Trouver le chemin du centre c’est approfondir la connaissance de Soi (cercle/écorce), apprécier le Soi (noyau dur insécable). Cette quête, ce cheminement vers le centre s’effectue à la fois dans un plan horizontal et bien sûr aussi vertical. Ce cheminement prend une dimension cosmique par la compréhension du sensible (visible) et de l’intelligible (l’invisible).

Le Principe

Le principe ne peut être atteint, ni par la vue, ni par l’ouïe, le principe ne peut pas être entendu, ni décrit.

Tout ce qui peut être vu, entendu, imagé, énoncé ou décrit appartient nécessairement à la manifestation, à l’existence des êtres (minuscule). Le Principe selon Platon est : Le passage du désordre à l’ordre dans l’harmonie ou « ORDO AB CHAO ». Le Soi en tant qu’Etre (en majuscule) est identique au Principe car il est lui aussi invariable et ne dépend pas de la loi du devenir, il ne se modifie pas, il échappe lui aussi à toutes les formes.

Le Soi est le fondement, la base de tous les états de la manifestation, la véritable personnalité de chaque être.

Le Soi contient plusieurs enveloppes selon René GUENON :

La première est au niveau de l’être pur (état primordial)

La seconde est le reflet de la connaissance

La troisième est la conscience mentale

La quatrième est relative au souffle vital

La cinquième (la dernière) la plus extérieure de la manifestation, est la forme corporelle de ses fonctions d’assimilation.

« Les vraies miracles sont invisibles ; Dieu les réalise dans le cœur des hommes » disait Saint EXUPERY.

La démarche traditionnelle

Le travail en maçonnerie peut nous permettre de revenir à cette unité première, qu’était l’Etre pour réaliser sa possibilité totale (identique au commencement) en se dépassant lui-même.

Il s’agit de ramener l’être à un état de simplicité, indifférenciée, comparable à celui de la « Materia prima » afin qu’il soit apte à recevoir la vibration du « Fiat Lux » (lumière), il faut que l’influence spirituelle lui donne « cette illumination ».

C’est cette alchimie que ressent tout Franc-maçon qui travaille à son introspection et œuvre à son propre perfectionnement par la descente au plus profond de soi-même qu’implique une telle démarche, est-elle communicable, il ne me semble pas car elle est du domaine de la spiritualité à la Grande Loge De France. La spiritualité est tension intérieure, vers la recherche de l’absolu en soi, du souffle vital, en quête de la manifestation, de l’infini au plus profond de notre être. Elle est effusion de l’âme, c’est une affaire secrète, personnelle et intime, car la spiritualité se veut communication avec soi-même, elle est le contact direct avec le sacré et le divin. Elle est appel au changement vers la transcendance ineffable et souvent inaccessible à l’esprit commun.

Ce qui amène  tous les francs-maçons à trouver en eux dans leur égo le chemin de la spiritualité, le chemin de la réalisation. Le but ultime de la connaissance métaphysique n’est donc rien de moins que la réalisation humaine individuelle. Il s’agit d’une réalisation effective par le collectif (les frères de la loge) et par la transmission de la Tradition, ce que René GUENON appelle « L’intellect transcendant ».

Pour cela il faut être rattaché à une lignée initiatique traditionnelle comme la Franc-maçonnerie car elle est en effet dépositaire d’une « influence spirituelle » transmise lors de l’initiation ; En l’absence d’une telle transmission, il me semble impossible d’arriver à s’affranchir à jamais des entraves et des limitations du monde profane.

La réalisation

Lors de l’initiation, le Vénérable Maitre demande au néophyte de gravir les marches de l’orient, le genou droit à terre, il lui pose l’Epée flamboyante et lui dit je vous créé en frappant un premier coup de maillet sur la lame posée sur la tête, puis lui dit : Constitue en lui donnant un 2ème coup de maillet sur la lame posée sur l’épaule gauche et enfin lui dit Reçois lui donnant un 3ème coup de maillet sur la lame posée sur l’épaule droite. Pour moi, symboliquement, c’est à cet instant que le Vénérable Maitre transmet une vibration initiale, ce « Fiat Lux » qui illumine le chaos. Cette illumination est précisément celle de la transmission de l’influence spirituelle. Le travail de l’apprenti doit permettre ce développement «  en actes » des possibilités auxquelles l’initiation donne accès.

L’apprenti, le compagnon et bien sûr les maitres doivent tendre vers l’unification de tous les éléments de l’Etre, par le travail intérieur nécessaire : (VITRIOL), celui de la descente en soi, de l’influence spirituelle au centre de cet être. Ce travail est la méditation des symboles de la loge, et de l’étude de notre rite (Rite Ecossais Ancien Accepté REAA) qui a pour fonction de faciliter notre concentration par la répétition.

Par contre il ne faut pas rester sur le seuil me rappelle souvent NTCF Bernard, en me mettant en garde de ne pas rester dans l’écorce pour ne pas se diriger vers le noyau (symbolisé par le centre et le fil à plomb dans notre loge).

IBN ARABI parle de l’écorce et du noyau qui seraient pour lui la distinction entre l’exotisme et l’ésotérisme, deux aspects d’un même enseignement. Cette distinction se retrouve dans presque toutes les traditions. Ainsi la tradition islamique est marquée plus nettement par la voie exotérique (commune à tous les musulmans) figurée par la « Shariyah », tandis que la vérité intérieure promue par « le soufisme » qui est appelée « Haqiqah ». Le soufisme n’est pas une pratique qui se rajoute ou qui serait accessoire mais, au contraire, c’est une partie essentielle à la doctrine islamique, car sans elle celle-ci serait incomplète par le haut, c’est-à-dire quant à son principe même.

Ce cœur de la doctrine est en même temps comme je vous l’annonçais plus haut commun à toutes les traditions spirituelles authentiques. Par exemple René GUENON emploie indifféremment des termes et des notions appartenant pourtant à des traditions différentes, ce qui est important c’est le cheminement vers la connaissance et pas le savoir. En janvier 1926, dans un article « Le verbe et le symbole ». Il affirme : «  La révélation primordiale est l’œuvre du verbe, de l’intellect divin, incorporée dans des symboles transmis depuis l’origine de l’humanité ».

Dans «  Jonathan Livingston, le Goéland », il est dit : «  Ne te fie pas à tesyeux, tout ce qu’ils te montrent ce sont des limites : les tiennes…Regarde avec ton esprit, découvre tes convictions et tu trouveras la voie de l’envol… » Livre de Richard BACH.

Conclusion

L’écorce s’interpose et cache ce qui se trouve à l’intérieur, il faut que celui qui l’a percée prenne conscience du rayon correspondant à sa propre position sur la circonférence, et qu’il s’affranchisse de cette spirale (rotation infinie) pour suivre ce rayon et aller vers le centre. Il y a sans doute, pour chacun d’entre nous, une heure où la lumière se fait, une heure où la vérité se révèle : «  c’est l’heure de grâce ». Elle survient après une longue attente dans le désert de la pensée, un patient travail dans la douleur.

C’est la rencontre du Soi et de son Etre, rencontre de soi et du Grand Architecte de l’Univers.

Tous pétris de la même pate, les hommes lèvent comme le pain, d’un seul tenant. Mais celui qui refuse de recevoir le levain et d’être pétri, ne deviendra jamais ce qu’il peut.

Vénérable maitre et vous tous mes frères en vos grades et qualités.

J’ai dit,

D\B\


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