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La Parole perdue

Note de l'auteur : Planche faite pour le rite de la Stricte Observance Templière (d'où 2 mauvais Compagnons et non 3).

Toutes les traditions font état d’un moment initial où la vérité des choses était transmise, reçue et vécue dans son intégralité, où le Ciel, la terre et l’homme connaissaient une relation directe et opérative.


Mais toutes les traditions relatent aussi un autre « moment » où cette communication, cette transmission, a cessé d’être immédiate et complète dans son ordre, pour n’être reçue qu’imparfaitement et fragmentairement.

L’histoire mythique de la Franc-Maçonnerie affirme qu’il y a eu une fois une Parole, d’une valeur sublime qui s’imposait à la profonde vénération des humains. Cette Parole n’était connue que de quelques uns.

Elle a été perdue, et une parole de substitution a été provisoirement adoptée.

Or, dans une voie initiatique, il n’y a pas de décadence sans restauration. La Parole perdue a été –ou sera- retrouvée.

Il est important de souligner que la notion de chose perdue relève de l’exotérisme ; en revanche, la recherche  de cette chose perdue, ou « queste », relève de l’ésotérisme.

Je vous propose une planche en trois parties : 
-         la conscience de ce qui a été perdu, et la volonté de le retrouver.
-         l’échec provisoire de cette recherche, et la proposition d’un mot substitué.
-         l’espoir d’atteindre un jour l’état qui nous fera retrouver la Tradition Primordiale.

1 – La rupture

-         D’où venez-vous ?
-         Du matin pour cheminer vers le soir.
-         Que voulez-vous y faire ?
-         Chercher ce qui a été perdu et en partie retrouvé.
lit-on dans notre instruction pour le grade de Maître.

La légende d’Hiram est le centre de l’enseignement de la Franc-Maçonnerie.

Hiram est assassiné par deux compagnons impatients de posséder les secrets du Maître, et en particulier le « Mot ».

La Parole est perdue à cause de la mort de son dépositaire. C’est le drame de la rupture dans la transmission d’un savoir.

Cette rupture n’est pas réparée. Le savoir est irrémédiablement perdu. Mais –il y a toujours un mais, car il faut re-créer- une solution provisoire va être trouvée.

Néanmoins cette possibilité ne s’offre pas indistinctement à tout le monde.

La « recherche de la Parole », à laquelle est associée la prononciation de cette Parole, est l’essence de la démarche initiatique.

Dès le premier grade, la pénalité menace d’avoir la langue arrachée si les secrets du grade sont révélés indûment, ce qui aura pour conséquence l’impossibilité future de prononcer le Mot.

Même s’il a pris conscience de la rupture, avant de se mettre en route, le Maçon doit se remettre lui-même en cause. Il s’agit là d’un véritable « retournement », une prise de conscience que son être fondamental ne se réduit pas à son « je » individuel, circonscrit dans l’espace et dans le temps, et fermé sur lui-même ; qu’il n’est qu’un exilé sur terre, loin de sa vraie patrie, celle qui est au-delà du monde éphémère et illusoire.

S’il est à même de faire ce constat, tout son être sera réorienté, et il lui restera à s’engager sur la voie qui mène à l’essentiel.

La Maçonnerie est une voie - parmi d’autres -, voie théorique, symbolique, pour retrouver la « Parole perdue », c’est-à-dire l’unité de l’homme dans son état antérieur à la diversification des fonctions et des métiers.

Même si la Maçonnerie spéculative n’offre plus que virtuellement les possibilités de réalisation (à la différence de la Maçonnerie opérative), il n’empêche que c’est une voie initiatique régulière, support authentique pour l’influence spirituelle qui lui est propre, et dont la source est dans la Tradition Primordiale. La Maçonnerie est un lieu de transmission de la sagesse divine.

2 – L’échec dans la recherche, et le mot substitué

« … nous allons convenir que les premiers mot et signe que nous ferons en découvrant notre Maître seront les nouveaux mot et signe de Maître ».

La parole de substitution « Mak Benak » n’est pas un expédient, mais un plan de construction nouveau, et un architecte nouveau.

Le Mot est remplacé par un autre dont la portée est différente. Le mot substitué a pour finalité de maintenir la cohésion du groupe des héritiers spirituels du Maître disparu.

Il ne contient pas lui-même l’enseignement contenu dans la Parole perdue, mais il rappelle l’existence de celle-ci.

Il grave dans la conscience le souvenir de la rupture. Il institue la mémoire collective des héritiers.

Il est un « signe », celui grâce auquel les héritiers se reconnaîtront comme Frères issus d’un même père.

La chose substituée est comme un reflet, direct ou indirect, proche ou éloigné, de celle qui a été perdue.

Le « mot sacré » du 3e grade, qui a d’ailleurs plusieurs prononciations selon les rites, est un mot substitué, d’ailleurs déformé. On lui donne des interprétations diverses : « la chair se détache des os », « le corps est corrompu », « l’architecte est mort », « chef des constructeurs », « le fils du Père », « la Vie nouvelle »…

Que ces déformations aient été voulues ou non, elles ont pour conséquence de dissimuler entièrement ce qu’on pourrait regarder comme le point le plus essentiel du grade de Maître.

3 – l’espoir

Le voyage initiatique est accompli par qui ne se contente pas de la parole substituée. Vouloir l’essentiel, c’est aspirer au voyage.

Sur le chemin initiatique, le voyageur approche l’indicible, en se frottant à diverses désignations du Nom, qui sont celles de la tradition hébraïque.

Dieu et Son Nom ne font qu’un.

Au 3e chapitre de l’Exode, Moïse demande à l’Eternel qui Il est. L’Eternel répond : « Je suis Celui qui suis… c’est là Mon nom éternellement, c’est Ma commémoration dans tous les âges »

Il est intéressant de s’arrêter un moment sur la question de Moïse et la réponse de Dieu.

La question de Moïse est : « si l’on me demande quel est Son nom, que dois-je répondre ? ».

En hébreu, cette phrase est très courte :

Li Mah Schemo Mah (A moi, quoi, son Nom, quoi) : 4 mots.

Si nous prenons maintenant la dernière lettre de chaque mot, ce sont celles du Tétragramme. Autrement dit, la réponse de Dieu est comprise dans la demande de Moïse.

Maïmonide dit que seuls les sages connaissaient le Nom sacré, et les mystères qui s’y rattachaient, et ils ne le communiquaient qu’à ceux de leurs disciples qu’ils considéraient dignes d’une telle confiance.

L’élévation au grade de Maître est un point de départ, mais il faut qu’il y ait quelque chose qui permette d’amorcer la recherche, qui constituera le travail intérieur conduisant à la réalisation effective de la Maîtrise.

Au lieu de se disperser, de se perdre dans le multiple, l’homme doit distancer, détacher son esprit, son être entier, du côté illusoire des choses.

C’est le sens des paroles de l’Orateur, le jour de la réception du nouveau Maître, lui expliquant le tapis de Loge :

« Apprenez par ces images le caractère éphémère de toute chose, le mépris de tout ce qui brille, et l’espérance d’un avenir splendide.

Faîtes preuve de maîtrise parfaite et de grandeur d’âme dans tous les dangers. Ne vous laissez pas détourner du droit chemin par de vaines menaces, et ne vous écartez pas de la noble vertu.

Allez maintenant en tant que Maître loyal envers vos Frères et Sœurs, montrer votre dévouement, votre attachement à notre Ordre, et jouissez d’une bonne réputation  par votre exemple.

Faîtes preuve d’une fidélité inébranlable et de discrétion envers notre Ordre et ses secrets.

Ainsi, vous pourrez découvrir ce jour où ces images pourront être ôtées de vos yeux et vous aurez le bonheur de contempler l’Ordre dans tout son éclat. »

D\ B\C\

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