GLDF Loge : NC 27/08/2001

La Canne du M\dC\ 
ou La Canne dans le Temps

Un morceau de bois, un peu tordu, de couleur noire ou marron fonce, mesurant environ 1,7 mètre et coiffé d'une sphère blanche, vous l'avez peut être deviné, je vous parlerais ce midi de « La Canne du M\dC\ ou La Canne dans le Temps.

Sans remonter jusqu'a la nuit des temps, on peut dire que le bâton a toujours existe, et a naturellement toujours été utilise par l'homme. Du moins depuis qu'il est passe du plan horizontal, a quatre pattes, a celui vertical, sur 2 pieds, puis pour continuer, voire terminer sur 3 jambes. 
Qu'il s'agisse d'un outil utilise pour la marche ou l'escalade, d'une arme de défense contre les animaux ou les hommes, ou bien d'un signe de commandement pour le berger menant son troupeau ou celui du Tambour Major dirigeant ses ouailles, la canne est loin de n'être qu'un simple bout de bois.  

Un des bergers les plus célèbres lui a d'ailleurs laisse, a plusieurs reprises, une place de choix dans le « Livre » Lorsque Moise se présenta avec son frère Aaron devant Pharaon pour réclamer la liberté de son peuple, il jeta un bois a terre « et le bâton se transforma en serpent. Le roi fit venir les sages et les sorciers d'Egypte ; grâce a leur pouvoir magique, ils réalisaient la même chose : chacun d'eux jeta son bâton a terre, et les bâtons se changèrent en serpents.
Toutefois le bâton d'Aaron engloutit les leurs.

Un peu plus tard, lorsque s'enfuyant d'Egypte avec son peuple, il fut stoppe par la mer rouge, toujours arme de sa canne « Moise étendit le bras au-dessus de la mer. Les eaux se séparèrent et les Israélites traversèrent la mer a pied sec : de chaque cote d'eux, l'eau formait comme une muraille. » Nous connaissons tous la suite, les chars Egyptiens lances a leur poursuite se trouvèrent engloutis par les flots reprenant leur place. Puis, arrives en plein désert a Refidimm, après que les Israélites eurent installe leur camp, comme l'eau manquait, ils cherchèrent querelle a leur Maître berger. « Alors Moise avançât en tenant a la main le bâton avec lequel il avait frappe le Nil. Il frappa sur un rocher du mont Horeb, et l' eau en sorti, le peuple put enfin se désaltérer ». Est-ce depuis ce jour que la symbolique du bâton apparaît essentiellement comme arme magique ? Quelle que soit sa forme, la baguette tient une place de choix dans les mythes et légendes du monde. 

C'est grâce a une baguette de noisetier ou mieux de coudrier rouge que pendant des siècles nos ancêtres ont découvert l'eau, la source, la vie. Les forces telluriques la font frémir ou mieux, l'infléchie. Immanquablement, l' eau jaillit sous les pieds du sourcier. Mais pour que ce don subsiste, une condition doit nécessairement être respectée : aucune rémunération n'est possible.

Celle du magicien a des pouvoirs légèrement différents. Elle fait apparaître ou disparaître objets et animaux ; a l'aide d'un léger contact de la baguette, les objets s'animent. Le sortilège peut éventuellement être renforce par des invocations ou incantations. Mickey nous en a donne une superbe démonstration dans l'apprenti sorcier avec son balai devenu magique.  

Chez les Celtes, la baguette est l'instrument magique par excellence. C'est le symbole du pouvoir du druide sur les éléments. En effet, il suffit au druide d'Ulster Sencha de l'agiter pour obtenir le plus complet silence de tout ce qui l'entoure, humain, animal et végétal. En outre, un être humain effleure par la baguette celtique se transforme en un animal, généralement, en cygne ou en sanglier.  

La canne de St Pierre utilisée par l'évêque représente le pouvoir céleste sur terre. Sa crosse en forme de crochet ou d'un cercle ouvert permettrait de rattraper et de ramener dans le troupeau les brebis garées. Il est a remarquer qu'elle est étrangement similaire, voire identique, au fameux bâton d'Osiris. Ainsi grâce a ses pouvoirs, la canne ou le bâton devint donc très rapidement le signe par excellence de commandement : symbole de puissance et de pouvoir ; en voici quelques exemples : A mon avis, le plus célèbre est le fameux sceptre d'OTTOKAR sans lequel le roi de SYLDAVIE (royaume mondialement connu) ne peut régner et doit, par conséquent, en cas de perte ou de vol, obligatoirement abdiquer.

Les historiens, quant a eux, lui préfèrent les bâtons de Louis XIII, en ébène et a la pomme d'ivoire, ainsi que ceux de Louis XIV (et de ses courtisans) naturellement très raffines, siècle des lumières oblige. 

Quant au Bâton de Maréchal de France, il signifie le pouvoir délègue par le Roi. Cette délégation s'arrêtait d'office lors du décès du souverain quand le Grand Maître des Cérémonies eut par trois fois crie « Le Roi est mort » et brise le bâton sur son genou. 3. Cette coutume existait déjà chez les Francs et les premiers Capétiens, les hérauts d'armes portaient une baguette sacrée, qui de plus, figurait la marque de leur dignité. 

Mais nous n'avons rien invente. Dans la Grèce Antique, c'était une distinction que portaient dèja les juges et les généraux. Le bâton était aussi signe de la connaissance ou marque de dignité ; de ce fait, les professeurs charges d'enseigner les textes d'Homère, tenaient un bâton rouge pour l'Iliade (couleur réservée aux Héros) et celui-ci était jaune lorsqu'il s'agissait de l'Odyssée (en signe des voyages éthers d'Ulysse).

Aujourd'hui, le Bâtonnier est le représentant de l'ordre des avocats. Mais c'est par une lettre de Philippe VI, en avril 1342, que cet ordre fut autorise a porter le bâton de saint Nicolas. Auparavant, ce terme revenait au chef élu qui portait, lors des processions le bâton ou la bannière d'une confrérie. Les chefs d'orchestres ont pris l'habitude de diriger les musiciens a la baguette, blanche de préférence. Ce ne fut pas toujours le cas, elle est la descendante de la canne qui donnait la cadence.

Cette métamorphose serait-elle consécutive a la malheureuse expérience de notre illustre Lully qui se donnât un coup de canne sur le pied et mourut de gangrené ? Démocratie oblige, a moins qu'il ne s'agisse des conséquences d'une révolution, le pouvoir finit par être « partage »
A la fin du XVIIIeme siècle, la canne remplace l'épée des gentilshommes pour devenir durant un siècle et demi un « appendice du costume » des bourgeois qui se répandit aux autres clases sociales.  Au 19eme siècle, naît donc l'expression « vivre la canne a la main » C'est un symbole de bourgeoisie, de celui qui peut se promener et, donc, n'a pas a travailler pour gagner sa pitance. Cet objet devient naturellement le reflet de son propriétaire, de son maître :  « L'élégant y enchâsse de fines pierres, le tapageur y introduit un fleuret, le vieillard la dote d'un bec de corbin. Le rentier la coiffe de corne noire et le bravache d'un chapeau de plomb pour assommer quiconque frôlera ses moustaches. »  En outre, la canne a aussi joue un rôle professionnel très important. D'une apparence traditionnelle, elle recèle, en son fût, tout un matériel adapte et spécialise. On la nomme canne a système. 

La canne de maquignon est commercialisée avec une toise en bambou spécialement étudiée pour les vétérinaires et marchands de chevaux, la canne-vrille est fabriquée pour le forestier et la canne soude revient a l'employé d'octroi. Les deux derniers outils dont je parlerais seraient, j' en suis sur, utilises de main de Maître par nos FF\ Dan\ : il s'agit de la canne-velte a jauger pour le marchand de vin ou accessoirement pour le grain et la canne de dégustation du « voyageur en liquides » Il ne faudrait pas oublier les créations les plus diverses  de l'age d'or de cet objet (et surtout de ses fabricants) : les cannes parapluie, lampe, porte cigarette, porte gants, lorgnette. Un des rares moyens d'expression tolère de l'époque était la caricature, il est bien évident que les artisans l'ont plus que largement utilise. 

Un autre type de canne très répandu, et parfois vital, sont les cannes armées tels poignards, épées, pistolets ou les fusils. Contrairement a celle des Hommes Gentils, la canne du compagnon du tour de France, légèrement plus petite que la notre, est bien plus qu'un simple accessoire de costume ou qu'un outil. Elle est partie intégrante de son être, plus que le prolongement de sa main. C'est a la fois un compagnon : 
· De marche pour ses voyages de ville en ville lors de son Tour de France de défense contre les animaux dangereux, les voleurs ou pire encore des frères d'autres obédiences, pardon, d'autres Devoirs, 
· Un porteur, pour la fameuse « malle aux quat' nœuds », le baluchon contenant tous ses trésors, nouée au bout de la canne et posée sur l'épaule.
· Mais c'est aussi, et surtout, une source d'informations pour celui qui sait regarder. En effet, elle transmet une multitude de messages : 
Ø De  savoir-faire (donc de faire savoir) : les apprentis ne peuvent en posséder une, elle n'est remise qu'au compagnon, en même temps que ses « couleurs » (les rubans), lors de sa Réception après la réalisation de son chef d'ouvre, 
Ø De  reconnaissance : de part les différentes tailles, aspects, décors, et rubans qui l'ornent, le métier, les qualités, l'appartenance a une société ou un devoir, les villes traversées par le compagnon sont ainsi dévoiles, mais uniquement aux inities. 
Ø D'intentions : la manière de porter la canne annonce la couleur. Avoir la main sur le pommeau ou la pomme en avant signifie la paix, la tenir en arrière c'est la confiance. Laisser traîner la canne est un signe de mépris, la réaction dans ce cas est en général immédiate : l'embout en avant pour la provocation. Par contre, cette même tenue de nuit devient de la clairvoyance. D'ou provient cette canne d'Aaron ? 

C'est, dit-on, en souvenir de Frère Jacques, un des fondateurs de la confrérie, que la canne de jonc devint un des attributs des Compagnons. C'est en effet a une touffe de joncs que s'accrocha Maître Jacques en péril de mort dans un marécage. Etait-ce près de Compostelle ? A moins qu'il ne s'agisse du jonc marin qui servait a ce même Frère Jacques pour protéger ses instruments de mathématique ? Naturellement, en bons F\M\, une troisième version s'offre a nous. Ce serait une canne de même matière qui aurait été retrouvée près du cadavre de Maître HIR\. 

Les couleurs du compagnon du Devoir 
-         Combien y a-t-il de couleurs ?
-         Cinq et une cachée. 
-         Que signifie la blanche ?
-         Les larmes que Maître Jacques a versées pour nous. 
-         Que signifie la rouge ?
-         Le sang qu'il a verse pour nous. 
-         Que signifie la bleue ?
-         Les coups qu'il a reçus pour nous. 
-         Que signifie la jaune ?
-         La persévérance.  
 
En F\M\, notre M\dC\, se déplace toujours (ou presque) avec sa canne. Elle représente naturellement l'autorité, le pouvoir, la force, la protection de la loge, temporairement détenus par le V\M\.  Au rite d'York, le bâton est utilise comme le maillet en ce sens qu'il sert a invoquer l'Esprit. Le M\d\C\ le tourne au-dessus de sa tête lors des déambulations pour indiquer les directions, un peu comme un sergent major, sans toutefois le lancer en l'air. Est-ce par référence a la Bible, lorsque Moise brandissait son bâton au-dessus de sa tête pour appeler le Divin a intervenir ? Au RER, le M\d\C\ et les 2 diacres ont des verges, plus grandes et plus fines. A la fin de la tenue, une pyramide formée par ces trois cannes d'Aaron est créée.  Dans certaines loges belges, il est de coutume d'offrir aux nouveaux compagnons une canne, appareil qui les soutiendra dans leurs différents voyages.  

Mais pour en revenir a un rite qui m'est un peu plus familier, le REAA, notre première rencontre, en principe invisible, avec la canne du M\dC\ s 'effectue lors de notre entrée dans le temple le jour du passage sous le bandeau. Elle remplace le linteau de la porte, a une hauteur parfois variable suivant les récipiendaires, surtout lorsqu'ils se nomment Eric BAR\ ou Thierry SAN\  Plus tard, muni de sa canne, le M\dC\ assiste le V\M\ et les 2 S\ de l' ouverture a la fermeture des travaux, et rythme, presque, tous les déplacements d'un pas cadence sur son pied gauche d'une manière binaire ou quaternaire. Par contre, lorsque d'augustes visiteurs sont accueillis maillets battants, il adapte son pas sur une mesure binaire ou ternaire afin que l'harmonie soit totale.  Il est a noter que, dans notre respectable atelier, la canne du M\dC\ est faite en GAIAC (acacias de NC), surmontée d'une boule en ivoire et le bout est en métal. Elle est donc compose de 3 éléments suivants : végétal, animal et minéral. 

La Canne d'Aaron est donc, AMHA, bien plus qu'un simple ornement d'apparat. A peine arrivée sur le parvis, elle exerce dèja son pouvoir, nous aide a nous débarrasser de nos métaux et a remettre de l'ordre dans nos passions. C 'est un tuteur omniprésent qui, en principe, nous maintient droit, sans pour autant être rigide. Personnellement, j'y retrouve en plus le fil a plomb du Second Sur\, et des symboles qui s'y rattachent, un lien nous menant au Zénith.  Mais n'est-elle pas tout simplement le battement du cour de la loge ?

J'ai dit V\M\

J\ V\ 

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