Obédience : NC Loge : NC Date : NC

 

A partir du règlement général et de votre expérience maçonnique quels sont les devoirs du maître en loge ?

Lors de mon élévation au grade de Maitre, une des questions posées par le Vénérable fut « Demandez-lui s’il se sent prêt à remplir les devoirs d’un Maître Maçon ? » les officiers répondirent par l’affirmative. J’acquérais la plénitude de mes droits maçonniques, et voilà qu’on me parlait de mes devoirs ! N’était-ce pas affirmer au futur Maitre que droits et devoirs étaient inséparables, les uns des autres ? Cette question m’a rappelé un poème de Rudyard Kipling « tu seras un homme mon fils », Et pourquoi pas « Tu seras un Maitre mon frère ? ». La maitrise façonne les maitres, comme la vie façonne les hommes, avais-pensé ce jour-là. Je me souviens d’un vers « Si tu sais méditer, observer et connaître, Sans jamais devenir sceptique ou destructeur ». N’était-ce pas un des devoirs du Maitre, un homme avec ses forces et ses faiblesses ? Certes il propage en dehors du temple les vérités acquises, puisqu’un Franc-Maçon promet de travailler à l’émancipation intellectuelle et morale de l’humanité. La mission ainsi fixée est très importante, mais l’essentiel se passe en loge. Le règlement général rappelle des devoirs élémentaires, mais le mythe d’Hiram, vécu par le compagnon qui devient maître est destiné à montrer l’exemple de devoirs plus élevés. Hiram est censé être un homme juste, justement attaché à eux, et il y laissera la vie.

Le règlement général impose une discipline. Le Maître doit plus que d’autres, la respecter, car il a prêté serment sur ce livre. Respecter le rituel, et la discipline des travaux. ne jamais troubler leur tranquillité, promettre la fidélité au Grand Orient de France, être assidu aux tenues et aux travaux, acquitter sa capitation, ne pas révéler aux profanes les qualités maçonniques de ses Frères, ne pas appartenir aux groupements refusés par le Grand Orient. Mais ces devoirs sont dans la normalité du règlement d’une association-loi de 1901. Ils n’ont de spécificité que de préciser une discipline élémentaire librement consentie. Quoi de plus normal qu’un maitre la respecte. Le règlement en revanche ne dit rien sur les autres devoirs du Maitre, qui les apprendra au cours de sa vie maçonnique. L’expérience sera son Maître.

Quid des enseignements du mythe fondateur ? Hiram grand Architecte, en homme scrupuleux, fait sa ronde avant de dormir pour vérifier que tout va bien. 3 mauvais compagnons rencontrés ce soir-là, qui connaissaient ses habitudes, lui demandent les mots de Maître sous menace de le tuer. Le 1er tient une règle, Hiram refuse. Il le blesse d’un coup de la règle. Hiram s’enfuit. Mais un 2ème tient une équerre, et a le même langage. Hiram perd son sang, mais refuse encore. L’autre le frappe sur la nuque avec l’équerre. Hiram affaibli mais inflexible, s’enfuit. Un 3ème compagnon, le maillet à la main, a la même exigence. Hiram dit : « Plutôt la mort que de violer le secret qui m’a été confié ». D’un coup de maillet sur la tête l’autre le tue... Hiram meurt mais n’a rien dit. Bravo ! Mais vilaine histoire ! Un homme juste tué par des malfaiteurs. A cette époque-là, cela méritait une condamnation à mort.

Aujourd’hui ils risquent la perpétuité. En effet Hiram a un curriculum parfait sur lequel je ne m’étendrai pas. Hiram incarne la vertu, tandis que ces trois Compagnons sont des voyous qui figurent trois vices, l’ignorance, le fanatisme, et l’hypocrisie. On nous dit que ce serait l’enseignement par l’exemple d’une morale au-dessus de la morale profane, que tout maitre devrait intégrer. Tout compagnon devrait devenir un Hiram en puissance.
Mais Hiram n’est-il pas en réalité un patron injuste, qui exploite, paie mal, fait des augmentations de salaire au compte-gouttes, et des passe-droits. A partir de là, ne peut-on comprendre différemment, et suivre d’autres pistes ? Et les malfaiteurs, ne sont-ils pas des contremaitres exploités par le Maître ? Si on les interroge ils diraient qu’il s’agissait d’un accident, qu’ils ne voulaient que lui faire peur, le tuer n’était pas leur but. Ils n’exigeaient que l’amélioration de leur sort, la discussion se serait envenimée. Il y a une ressemblance avec la révolte de Spartacus, Ces voyous, ne seraient pas des voyous mais des esclaves qui ont de larges circonstances atténuantes. Ce qui semble injuste devient juste, et Hiram devient le coupable. En outre Hiram va loin, trop loin peut-être. Même un bon patron ne sort pas de nuit et risque de se faire tuer en vérifiant son chantier. Ce n’est pas un bon risque. Plus encore un mauvais patron qui se croit tout permis, et sort de nuit fait une énorme bêtise. Son attitude n’est-elle pas irréfléchie, folle, ou suicidaire ?

Tout soldat a un bâton de Marechal dans sa musette Mais il faut tacher de comprendre l’élévation du compagnon au grade de maitre, à l’aune du récit traditionnel. Le drame de la mort d’Hiram (appelons-le ainsi puisque l’homme est réputé juste et qu’on le pleurera) se joue sous les yeux d’un compagnon, spectateur qui veut devenir Maitre mais qui est suspecté du meurtre. C’est une contradiction. Le candidat à l’élévation est parfois invité à prendre la place d’un des mauvais compagnons, et participe en personne au crime. Il n’en est que davantage un des assassins. Les preuves de l’innocence sont faibles. Les témoins ne suffisent pas à prouver qu’il est blanc comme neige, par leurs déclarations, parce que gants et tabliers ont conservé leur blancheur. S’il a participé au crime, on dit que ses gants sont blancs alors qu’il a encore du sang sur les mains ! On peut balayer l’argument du franchissement du cadavre, qui n’en est pas un. Encore une contradiction. « Pourquoi cherche-t-on à le disculper si vite alors qu’il participé au crime ? » De plus une circonstance est aggravante il s’est servi (avec ses acolytes) d’instruments nobles, ceux du travail des maçons opératifs pour une mauvaise cause. On est loin d’être dégagé de toute hypocrisie, fanatisme, ignorance, et mensonge à l’opposé de ce que le compagnon en loge vient chercher dans son élévation. Son cas est grave, il ne peut pas prétendre à la Maitrise, car c’est un assassin, ou bien dans le récit classique il y a des choses qu’on ignore et on les saura plus tard. C’est peut-être en relation avec une révolte d’esclaves et un crime juste, ou le désir d’étouffer une affaire scabreuse qu’on maquille, ou même avec la renaissance d’Hiram dont on ne sait pas de quelle nature elle est, mais il est peu crédible qu’il renaisse dans son assassin. C’est en effet rapide et flou d’affirmer qu’il va renaître dans le nouveau Maître, ce compagnon qui l’a tué. Sortira-t-il de l’état de mauvais compagnon, par une transmutation ésotérique (au sens d’intérieur) et initiatique de mort et de renaissance ? Je voudrais bien savoir de quoi il est question. Le candidat à l’élévation laisse faire. Il répond ce qu’on lui a dit de répondre, mais il admet ce qui lui échappe, et réitère sa promesse. Se rend il compte qu’il est entrainé par ses Juges-maitres dans une histoire qui sent le soufre ? Les Maîtres peuvent-ils tout ? Ils ne détiennent pas la vérité, un but qu’on n’atteint jamais. Le souvenir de certains frères, aux mains indignes de l’ennemi, morts sous la torture sans avoir parlé reste encore vivant. Il est du devoir d’un Maître, sinon de les imiter en y laissant la vie, au moins de s’opposer au fanatisme, mais leur mort a peu à voir avec la légende d’Hiram. Hiram n’est peut-être pas pur, tandis qu’eux le sont à coup sûr. En fait ce mythe de la mort d’Hiram est pour moi une énigme que j’accepte parce qu’on me l’enseignée, imposée, et je la respecte mais je n’en ferai pas l’exemple de la vertu, de la vaillance, de l’honneur, et des devoirs du Maitre aussi iconoclaste que cette idée paraisse. On aborde ainsi la question : Où est la Vérité ? La légende d’Hiram est un exemple bourré de tant de contradictions, malgré sa beauté et sa noblesse, qu’on demande du temps pour la comprendre. Elle a une vraisemblablement davantage de puissance spirituelle en elle, que ce qu’on nous a expliqué.

Mais revenons aux devoirs Le compagnon doit prêter le serment du Maître, et en revêtir les décors. Restera-t-il un mauvais compagnon, malgré son serment du Maître ? Mais pour autant sera-t-il un bon Maitre ? Son serment l’engage. Or peut-il éviter un jour une propension à la faiblesse, à la lâcheté, à l’hypocrisie devant la mort qui fait peur ? Il doit dès lors « se revêtir » non des décors mais de ses devoirs. Les devoirs cimentent les liens entre les hommes, ils unissent alors que l’exigence des droits peut les rompre, si bien que je crois aux devoirs, et les préfère aux droits.

Je réserverai ma reconnaissance à ce que m’a appris l’expérience maçonnique au milieu de mes Frères. A-t-elle eu une influence sur mes devoirs de Maitre ? Il serait vain de prétendre le contraire Les devoirs s’accumulent, mais le Maitre doit être son propre évêque, qui connait ses responsabilités : Travailler, surveiller, être un exemple, parfois s’effacer, aimer, toujours transmettre. Etre un exemple par la parole et les actes, le premier de ses devoirs. C’est en faisant qu’on apprend. Faire et en faisant se faire. L’expérience a donc un rôle primordial. Il faut être réceptif à ses enseignements afin de faire les progrès nécessaires. Ce qui nécessite un certain nombre de qualités innées ou acquises. Il doit montrer « l’efficacité de la persévérance, d’une discipline librement consentie, de la tolérance la plus large, et d’une loyauté parfaite ». Il doit combler son ignorance par un travail lent, jamais terminé, et personnel, à l’aide du mythe (aussi contradictoire soit-il) des autres symboles, la pratique maçonnique, les planches de ses Frères, la parole qui circule, et enfin sa propre réflexion sur lui-même. Ces règles lui permettront de récolter de nombreux fruits sur sa route. Une route difficile !

La transmission est une obligation aussi importante. Il est du devoir du Maître de ne pas garder pour lui ce qu’il aura appris, et d’en faire passer la quintessence aux autres La transmission maçonnique est orale. Elle est diverse, libre, originale (au sens de personnelle). Elle doit rester pure comme l’eau des sources. Être compagnon a libéré la parole, le devoir est d’en faire bon usage, une fois Maître. En maçonnerie il est bon que la communication soit brève, dense, et claire en allant à l’essentiel. Elle doit donner l’envie de continuer à celui qui écoute. Un Maître doit faire preuve d’une instruction maçonnique conforme à son grade et transmettre ce que les anciens ont enseigné, ce que l’expérience et la fraternité lui auront appris. Il doit transmettre non son propre savoir tel un savoir figé, mais des pistes à emprunter qui sont de la liberté de chacun, à qui elles permettront par un travail, persévérant et personnel analogue au sien, la construction de son temple intérieur. Transmettre à l’apprenti, au compagnon, le gout du travail bien fait, comment travailler sa pierre brute, et maçonner. Il faut éveiller, parfois réveiller. Enseigner les symboles, non pas ce qu’on en dégage soi-même, ce serait improductif et sans grand intérêt, mais apprendre à ceux qui écoutent à les utiliser comme des outils de leur pensée à eux. Tache plus ou moins difficile, mais devoir essentiel. Les symboles, sont la source inépuisable d’une richesse spirituelle sans fin. On n’impose pas les symboles, on les propose, ils se proposent eux-mêmes à chacun. Les apprentis et les compagnons doivent découvrir leur façon à eux de les comprendre et de les appréhender. Montaigne disait « il vaut mieux avoir la tête bien faite que bien pleine ». Pour qu’un apprenti s’intéresse, il faut qu’il comprenne ce que signifient le dégrossissage de la pierre, et le travail en maçonnerie. L'initiation est une transmission dont le sens lui apparaitra peu à peu. « On instruira un jeune Frère dans le travail pour que les Matériaux ne soient point gâchés par son manque d'expérience et pour accroître et consolider l'Amour Fraternel » lit-on dans les Constitutions d’Anderson. La référence au rituel est le meilleur instrument d’éveil aux Frères qui y seront attentifs. La Franc-Maçonnerie a des Traditions, l’Atelier où il vient qu’un Maître doit perpétuer et transmettre. Pour cela il lui faut communiquer, mais ce n’est pas seulement parler. C’est parfois un silence, un regard, un soupir, un geste, et surtout l’exemple qu’il montre. Cependant la parole est essentielle, mais elle peut porter des orages, car la parole est double. « La langue est la meilleure et la pire des choses » disait Ésope. La franc-maçonnerie est une bonne école, mais elle a aussi ses bavards. Un Maître doit traquer les bavardages, à commencer par les siens. Et puis il y a des choses si banales mais tellement importantes qu’on pourrait les oublier. Etre attentif aux consignes du 1er maillet, Etre avare de parole, mais exprimer une pensée juste par une parole juste, respecter la parole des autres quand elle circule. La première des Traditions est de transmettre l’héritage de l’Atelier, par l’exercice du rituel, la formation, l'instruction, les planches et l’exemple, mais en ne perdant jamais de vue que l’héritage à donner aux apprentis et aux compagnons est de trouver la petite musique intérieure qui guidera chacun sur son chemin vers le meilleur qui est en lui. Apprentis et Compagnons deviendront Maîtres, sèmeront et moissonneront à leur tour, et enseigneront aux plus jeunes à chercher en eux, et à poursuivre la chaine.

Un Maître doit chercher toujours plus de lumière, et la transmettre à ceux qui la demandent. Il y a dans cet acte une sorte d’amour de son semblable et encore plus de son frère maçon. Transmettre c’est aimer. Aimer c’est transmettre On ne fait bien que ce que l’on aime. Le chemin vers la lumière est un partage. Un maître est libre, et veut que soient libres ceux qui l’entourent. Donner la lumière c’est apprendre aux autres comment on peut libérer sa pensée. Mais un Maître doit aussi se connaitre, savoir où il en est, vers quoi il va. Une immersion prolongée en maçonnerie comme dans un autre milieu peut changer la conscience spirituelle d’un homme, sa vision de lui-même et sa conception du monde. Il n’est plus le même homme, c’est ce qu’il a cherché, c’est vrai, mais il doit l’être sans dogmatisme. Il ne peut pas être certain de ses progrès, s’il ne fait pas usage de sa raison, et de sa vigilance mais aussi du regard des autres. Il doit garder une liberté de conscience, un esprit critique, afin d’éviter un formatage insensible, qui va à l’opposé de ce qu’il cherche. Il n’est pas un robot qui se répète, et se vide peu à peu de toute substance, il n’est qu’un homme. C’est alors qu’il pourra marcher vers la perfection de son temple, savoir qui il est, ce qu’il fait, et ce qu’il doit faire. Maître spéculatif au temple, devenant Apprenti et compagnon opératifs dans le monde profane, pour lui rien ne remplacera « la lucidité dont la brulure est pire que celle du soleil » comme le pensait René Char.

Un Maître doit dépasser l’image dans la lecture des symboles, et s’efforcer d’en saisir le sens profond. Il s’enrichira de mots, et comprendra les choses, jusqu’à ce qu’il n’ait plus de mots pour les dire. Cent fois sur le métier il doit repasser son ouvrage, et ne jamais s’arrêter en chemin. Car connaissance, quête de vérité sont censés l’arracher aux ténèbres. Le mythe d’Hiram symbolise aussi la recherche de la Parole perdue, et au rite français le mot secret, qui sont indissociables, et que les traditions spirituelles permettent de comprendre. Mais cette Parole ou ce mot lui demeureront inaccessibles dans toutes, mais il comprendra mieux les êtres et les choses. Nommer est profane, c’est connaitre, créer, et voir s’éloigner. On peut exprimer par des Signes, ou psalmodier comme le font les traditions hindoues et musulmanes. Mais pour ces traditions où Signes et psalmodies aident à donner un sens profond à la parole que les mots ne feraient que désigner, la parole perdue vient d’un Dieu, elle est Dieu, le Verbe. Mieux vaut en effet chercher le sens profond, car le sens mieux que le mot est rassembleur, tandis que le mot est ravageur et peut entrainer la guerre. Rassembler ? Tout maitre doit rassembler ce qui est épars, mais la Parole perdue, est-elle perdue ou éparpillée ? Je n’en sais rien, n’ayant pas la vérité. C’est le domaine de la croyance, de la foi, de l’adhésion à des mystères que j’ai le droit d’avoir, mais le devoir de taire, car il ne m’appartient pas d’entrainer quiconque dans mon jardin privé. J’aurais trop peur de me tromper. Il est tentant cependant d’en faire le but de sa quête. Hiram a emporté un secret dans la tombe. La découverte du corps entraine son remplacement par des lettres, qui resteront secrètes. Le mot de Maître est perdu, Hiram était seul à le connaitre, mais pour le chercher il faut être 3 comme les 3 mauvais compagnons qui ont fait obstacle, et pour le retrouver et le transmettre il faut être 3 également. Le sens de l‘élévation au Grade de Maître, est sans doute une approche du sens caché des mots et profond des choses. Si la Parole perdue symbolise la mystérieuse essence des choses et des mots, un mot secret ne permet-il pas d’arriver à leur connaissance ? « Maître » mot rituel substitué à un autre indéfinissable le permet-il ? Je n’en sais encore rien, personne ne sait. Mais au bout d’un long moment, la recherche de ce qui est perdu devient la recherche du corps d’Hiram, de l’être avant la chute, de son principe originel. Cela va loin. Certes il reste une branche d’acacia qui va guider. « L’acacia m’est connu » mais il ne reste que l’acacia. Au Maître de chercher le cadavre sous la terre, et de trouver ce qui est caché, l’or sous le vernis, l’homme sous son apparence, et la parole perdue ?

L’action du Maître doit porter sue le bien de ses Frères. « Ne te demande pas ce que tes frères peuvent faire pour toi, mais ce que tu peux faire pour eux ». Un Maître doit faire vivre sa loge par son assiduité, ses travaux, donner aux Compagnons et Apprentis son avis, tachant de susciter en eux l’amour du beau de la vérité et du bien. S’il doit montrer l’exemple de la force, la sagesse et la beauté, son devoir est d’en faire un usage, efficace mais discret. Il doit être vrai, sincère, authentique (comme on dit aujourd’hui) maître de lui-même, sinon il ne sera pas reconnu Maître par ses Frères. Il doit être courtois. Exprimer sa pensée tachant d’être juste, une parole libre et sincère, sans offenser personne, dire la vérité si elle ne blesse pas. Ne pas se perdre dans des paroles douteuses et des actes médiocres. Avoir les croyances qu’il veut, tous les hommes sont mes Frères, et tous sont mes égaux. Un Maître reconnu se doit d’élever le niveau de conscience spirituelle de ses frères, en étant tolérant. Mais cela nécessite d’abord qu’il connaisse lui-même ses limites de tolérance. Qu’est-ce que la tolérance cette vertu dite cardinale ? C’est d’accepter ce qui ne semble pas toujours acceptable ou juste, parait plutôt mauvais, et qui interpelle. On ne tolère pas ce qui semble bon, une vérité qu’on ne discute pas, on l’adopte comme un axiome. Mais est-ce indulgence pour un enfant qui a dérobé un bonbon ou tolérance ? L’indulgence signifie bienveillance, tandis que la tolérance signifie critique puis acceptation. La tolérance a des zones d’ombre. Elle peut cacher des pensées négatives. Le double aspect des choses est toujours présent. Peut-être faut-il être simplement indulgent...

Un Maître doit tisser des liens solides avec ses Frères d’Atelier, ceux d’autres ateliers, et tous les francs-maçons. Il doit connaitre les divers usages et traditions des Ateliers qu’il visite. Aux Travaux à l’Agape, au Banquet d’Ordre, et dans d’autres cérémonies il doit être souple mais rigoureux. Les Maîtres voyagent pour répandre la lumière, rassembler ce qui est épars, transmettre ce qu’ils savent, apprendre ce qu’ils ignorent, et hâter la propagation de la vérité, si elle existe, de la justice et du droit, en unissant les différences et les bonnes volontés, jusqu’au jour où la raison triomphera. Mais ce jour n’arrivera peut-être jamais. Il n’est cependant pas nécessaire d'espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer. Le débat entre les hommes fondé sur une liberté, et un respect réciproques peut permettre de s’améliorer en dégageant ce qui les réunit au-delà des interdits et des contraintes. La franc-maçonnerie est une immense solidarité spirituelle ou les Frères se reconnaissent, venant de partout et travaillant ensemble pour continuer à construire les droits et les devoirs de l’esprit, et, tout en restant modestes, tâcher de résoudre les déchirements des hommes. La vie est comme un lac d’amour, continue mais avec des obstacles qu’il faut savoir dénouer.

Ainsi avec toutes ces qualités, fier de ces devoirs qu’il promet de remplir, un Maître devrait être l’homme parfait, un Maître exceptionnel. Ce serait trop poli pour être honnête. Il pourrait cacher l’indifférence sous un masque affable. Trop de devoirs tuent les devoirs. Heureusement les décors ne font pas le franc-maçon, qui serait une silhouette vide. C’est un homme avant tout, certes fort, mais aussi faible qu’un autre, parfois incapable d’assumer tous ses devoirs. Alors s’il en assume certains, soyons indulgents, comme lui-même doit l’être avec les Apprentis et les Compagnons. Il accepte ce qu’on lui donne, mais il est libre de refuser. Ses vertus devraient être d’aimer ses frères, de vouloir leur transmettre, d’être perspicace, vigilant, enfin de s’améliorer toujours, et d’essayer de servir d’exemple. Il ne doit rien imposer aux autres. Un Maître tel un bon ouvrier ne doit jamais se résigner, ni se décourager, et apprendre l’humilité. Une dernière question me vient à l’esprit. Que va-t-il rester en moi du mauvais compagnon, si tant est que j’en sois un ? Suis-je en accord avec ce que j’ai appris ? Est-ce que je me suis bien servi de ma tête, de mon cœur, de mes outils, des symboles. Serai-je un bon Maître ? Peut-être n’en existe-t-il pas ? La prudence est de mise, un bon maitre est un maitre qui travaille et ne s’endort pas. Socrate disait « tout ce que je sais c’est que je ne sais pas ». Mais pour l’affirmer il faut l’expérience maçonnique, faite d’humilité et de recherche. Elle en enseigne plus que le meilleur des Maîtres.

Je reviens vers les opposés et le binaire. Chaque chose porte son contraire, chaque qualité a son défaut, chaque victoire porte sa défaite. De l’autre côté de chaque chose il y a son opposé. Le maitre en loge doit avoir présente à l’esprit cette réalité. Il y a deux contraires dans une même entité qu’il lui faut savoir reconnaitre. Elever sa spiritualité est un désir, un but, mais pas une fin. Il n’y en a jamais, ni de limites. Le Maître doit savoir expliquer cette ambivalence des choses, mais rester en retrait, chacun comprendra à sa façon, car nous ne sommes pas faits de la même pâte. L’univers est fait de contraires : Blanc/noir, Yin/yang, jour/nuit, dieu/diable, mal/bien, homme/femme, vide/plein etc. Nous vivons dans un monde asymétrique des contraires, la table des opposés d’Aristote. Un exemple est le pavé mosaïque, et ses carrés noirs et blancs, mais qui, réunis, deviennent autre chose. Je pense aussi à la matière et à l’antimatière. A nous de les percevoir et de dépasser la philosophie d’Aristote. Rien n’est tout blanc ni tout noir. Faut-il pour autant que le Maître soit neutre et dise que tout est gris ? Non, le maître a son idée sur la ligne qui sépare le blanc du noir, mais il a le devoir d’écouter celle des autres, et de la respecter. La parole disait encore Montaigne « appartient pour une moitié à celui qui la prononce et pour l’autre à celui qui l’écoute ». Je dois seulement aider les autres à se chercher et à trouver eux-mêmes leur chemin.

Mais, très respectable Maître et vous tous vénérables Maîtres le mien n’est pas terminé. Le Maître a tant de devoirs, que j’ai besoin de votre aide fraternelle. C’est la raison pour laquelle je frappe à la porte de votre respectable Atelier de perfectionnement au 4ème grade de Maître, confiant d’apprendre comment améliorer ma connaissance et ma pratique des devoirs du Maître !

J’ai dit T\ R\ M\

J\ P\


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