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Le Cherchant, Les Rites Egyptiens et Les Grands Conservateurs de l’Ordre

L’homme que le scintillement des étoiles émeut autant que la germination des graines et qui se voit transporté dans une autre dimension, sait qu’il n’y a pas de hasard, que le visible est incomplet, que la vie doit être déchiffrée. C’est ainsi que le Cherchant finit par frapper à la porte du Temple.

Que cherche-t-il ? Ce que d’autres avant lui ont cherché, durant des millénaires, sous toutes les latitudes du monde. Il cherche ce que certains appellent la Pierre Philosophale. Il cherche, la Clef.

1. L’Initiation en Occident

Au commencement il y a eu Isis et Osiris, la mort et la résurrection. Puis les Mystères des temples de Thrace, de la Grèce, la Crète, la Perse, l’Inde. La Connaissance était toujours présente pour qui voulait bien la recevoir, dans des Sanctuaires secrets. Ceux qui cherchaient savaient où les trouver. Ils ont fait le pelerinage. Ils ont reçu et se sont tus. Quelques uns ont parlé, comme Solon, Pythagore, Hérodote, Platon, Horsiésis, Plutarque, Apulée. Et leurs brefs témoignages, d’il y a deux mille ans, sont parvenus jusqu’à nous. Ils disaient être arrivés jusques aux portes de la mort et en être revenus. Ils ne pouvaient en dire plus. Sans ces témoignages, pas de preuve de l’existence d’activités ésotériques. En même temps, peut-on affirmer, en l’absence de témoignages similaires à d’autres époques, que ces activités n’aient pas eu lieu ? Or, quelle similitude d’expérience entre ces impétrants de l’antiquité et ceux d’aujourd’hui ! Les mêmes attentes, les épreuves épuisantes, le passage de l’obscurité à la lumière, de la mort à la vie, le cadre sacré, le bonheur de la révélation (1).

L’initiation ne s’est jamais interrompue. Elle a suivi les voies invisibles et souterraines de la spiritualité. Elle a continué par le canal de l’hermétisme alexandrin ramené par les Arabes espagnols et les Croisés qui ont été en Orient, puis à travers les réseaux de Mages du Moyen Age. Pour traverser les siècles, incognito, elle a certes emprunté différents habits. Elle se cachera dans les loges des bâtisseurs de cathédrales, se verra confiée aux Templiers et aux Rose+Croix, pour se retrouver aujourd’hui dans les Sanctuaires de Francs-maçons.

C’est en Ecosse, et non à Londres qu’est née, en 1598, la franc-maçonnerie moderne, fille de la Renaissance, lorsque, à la demande de Jacques VI d’Ecosse, initié et futur roi d’Angleterre, William Schaw, son Maître d’oeuvre, établit un Code de Statuts destinés à gouverner l’Ordre. (2) Les plus anciennes loges sont écossaises et les six premières loges datent de 1599 :

Aitchison’s Haven (le Havre d’Aitchison), Edimbourg, St André, Kilwinning et Sterling.

En 1600, cinq loges confèrent à William Saint Clair de Rosslyn (3), la charge de Grand-maître et le proclament Patron héréditaire de la franc-maçonnerie. L’Ecossais John Boswell d’Auchinleck est initié en 1600 dans la Loge d’Edimbourg et l’Anglais Elias Ashmole fonde un Ordre de la Rose+Croix en 1636.

Ainsi, durant tout le XVIIe siècle, les Francs-maçons vont continuer à se réunir dans des loges volantes (occasional) qui deviendront des loges fixes (stated) lorsque la franc-maçonnerie aura traversé la frontière pour entrer en Angleterre. En 1655, il y a une Vénérable Compagnie de Maçons de Londres. Les loges de métier sont alors des pépinières où, après leur apprentissage, les Maîtres-Maçons, peuvent être admis dans les Fraternités de Maîtres (4). Or, fait méconnu mais extrêmement important, ces Fraternités de Maîtres ont opéré dans la plus totale discrétion, dispensant en leur enceinte, un enseignement hermétique pendant tout un siècle jusqu’à la création en 1717 de la Grande Loge de Londres - GLL. Il existait donc des Conclaves de Templiers et des Chapitres Heredom-Rose+Croix. Ceux-ci conféraient des initiations selon le Rite des Harodim, que l’on appelait immémoriale à Londres et qui accompagna les Stuartistes en France en 1688, et devint maçonnerie écossaise (5). Aussi, la maçonnerie de tradition, alchimique, templière et hermétique était-elle bien vivante avant l’arrivée de la franc-maçonnerie moderne. Celle-ci allait désormais occuper les devants de la scène, reléguant dans les coulisses, les tenants de la tradition.

2. Rejet et Persistance de la Tradition

En cette année cruciale de 1717, quatre loges prennent l’initiative de fonder la Grande Loge de Londres, ce qui aura pour conséquence de dévier le cours de l’histoire initiatique et de transformer la quête ésotérique en un simple exercice intellectuel de spéculation philosophique. Plus grave, en se substituant aux Fraternités de Maîtres, dans leurs fonctions traditionnelles de gardiens de l’Ordre, la Grande Loge de Londres s’était arrogé le doit de tout contrôler, ce qui a plongé les milieux ésotériques dans un profond chagrin.

Les fondateurs de la nouvelle Grande Loge tournent le dos à l’héritage initiatique coupent tout contact avec la tradition qu’elle ne semble plus vouloir respecter. Ils brûlent les livres et les archives et ne pratiquent tout au plus que deux degrés dans leurs loges (6). Désorientés et choqués, les tenants de la tradition restent à l’écart de cette maçonnerie toute nouvelle, protestent, réagissent, dénoncent.

En 1724, moins de sept années plus tard, sans tambour ni trompette, les loges de la Grande Loge de Londres se mettent à pratiquer le 3ème degré d’Hiram, grade légué par les Rose+Croix. C’est une première victoire de la Tradition dont peu se rendent compte, même aujourd’hui.

En 1736, Andrew Michael Ramsay est le premier à rappeler aux Francs-maçons qu’ils descendent des Chevaliers de la Croisade, pour ne pas dire des Templiers, et d’ajouter que la franc-maçonnerie a ses origines dans les Mystères de l’Antiquité. Et son Discours traverse le Continent comme une traînée de poudre. Le contact est rétabli, la lumière est revenue. C’est là encore une autre victoire de la tradition !

En 1750, les loges qui pratiquent les degrés abandonnés se réunissent pour fonder la Grande Loge de Ancients et appellent la Grande Loge de Londres, les Moderns, ceux qui ont trahi la tradition. Pour les Modernes, cette soi-disant Grande Loge des Anciens est tout simplement une Grande Loge des Schismatiques, qu’elle condamne.

En 1758, le premier système à 25 degrés est mis en place en France à Clermont et s’appelle le Rite du Conseil des Empereurs d’Orient et d’Occident. Ce Rite amplifié à 33 degrés devient le Rite Ecossais Ancien Accepté - le REAA au moyen « d’un faux document forgé à Charleston ». (7)

En 1780, la Grande Loge de Toute l’Angleterre à York qui pratique 5 degrés, c'est-à-dire, les trois symboliques plus la Royale Archeet le Chevalier Templier, demande que tous les Ateliers et Chapitres de Maçons libres et acceptés soient placés sous sa tutelle.

En 1813, pour faire bloc contre Napoléon, les deux Loges des Antients et des Moderns se réconcilient, leurs chefs étant deux FF\ et frères de sang, les Ducs de Sussex et de Kent. Les Antients veulent imposer les deux degrés de Marque et de Royale Arche. Les Moderns, ayant déclaré que la vraie et ancienne maçonnerie ne comporte que trois degrés symboliques résistent. Or, ils tombent d’accord pour rejeter la Marqueet acceptent la Royale Arche, qui est pour Lawrence Dermott « la racine, le coeur et la moelle de la franc-maçonnerie ». De cette réconciliation est née l'United Grand Lodge of England - UGLE ou la Grande Loge Unie d’Angleterre - Gluda, qui sortira en décembre 1813 l’aberration suivante :

« La pure et ancienne maçonnerie ne comporte que trois degrés et rien de plus, ceux de l’Apprenti, du Compagnon et du Maître-Maçon, y compris le Suprême Ordre de la Sainte Royale Arche ».

Il est curieux que l’on ne se soit jamais demandé comment un degré comme la Royale Arche, le treizième dans d’autres systèmes, ait pu trouver sa place au sein des degrés symboliques. Comme ce fut le cas au sujet du troisième degré, l’Establishment a fait marche arrière. La Gluda sait qu’elle intègre un quatrième degré, mais refuse de le reconnaître. Mais n’empêche que c’est encore une autre victoire de la tradition !

Poussant la logique jusqu’au bout, puisque cet ensemble de rituels et de grades propres à distraire les Continentaux et qui n’ont rien à voir avec la freemasonry, la Gludalaisse faire et s’interdit même de l’interdire ou de le condamner. Mieux, ce que beaucoup de FF\ ne savent pas, c’est que la Gludareconnaît le droit de chaque Maçon à faire partie des Fraternités pratiquant ces rituels : cette reconnaissance fait partie du Traité de l’Union. Encore une victoire de taille de la tradition !

Or, face à la montée et à l’extension des hauts grades, la Gluda finira par les reconnaître et les appellera avec condescendance les side degrees, les grades d’à-côté, voire marginaux. Mais il s’agira quand même d’une victoire de la tradition !

En fait, en rejetant les hauts grades, la Gluda confirme sa propre exclusion du courant initiatique venu du fonds des Ages, de l’Egypte ancienne. Or, cette occultation va conduire la Gludadans une situation fort inconfortable contre laquelle elle réagira sept décennies plus tard. Mais pour l’instant, sa seule obsession est de rappeler que les hauts grades ne constituent pas la freemasonry. Elle reconnaît seulement la Craft masonry et celle-ci ne comprend que les trois degrés, dits symboliques. C’est la seule « régulière », même si quatre font trois et que le cercle est carré. La franc-maçonnerie est une échelle à multiples degrés, elle, est « irrégulière. » Si la francmaçonnerie se veut initiatique, la freemasonry, selon la Gluda, est simplement :

« un système de moralité voilé dans l’allégorie et illustré par les symboles ».

Il y a donc lieu de reconnaître qu’il existe une freemasonry des Anglo-saxons qui n’a rien à voir avec la franc-maçonnerie continentale. Ce sont deux réalités distinctes, et ne plus traduire freemasonry par franc-maçonnerie, ce serait faire économie de quiproquos, de frustrations et de désaccords purs et simples. De secrète et hermétique, la franc-maçonnerie ancienne devient freemasonry discrète et sociale. Elle sera vite confisquée par l’Establishment, c'est-à-dire la Royauté, la Noblesse, l’Eglise anglicane et la Fonction Publique. Napoléon battu et la colonisation britannique en marche, la freemasonry dite régulière se répandra vite, avant la fin du siècle, sur la surface du globe. Les gouverneurs et les militaires, envoyés outremer pour assurer la paix dans l’Empire, découvrent vite, que le tablier qui ceinture le maçon des colonies, en fait un très loyal et très dévoué sujet de Sa Majesté.

La Gludacrée des loges filles dans le monde entier. Parmi ses enfants, on trouve, entre autres, le Grand Orient de France - Godf, la Grande Loge de France - Glf, le Droit Humain- DH qu’elle a reniés par la suite, mais qui lui restent fidèles dans leur maintien des trois seuls degrés symboliques. Sa fille préférée, la Grande Loge Nationale Française – GLNF est la seule francophone qu’elle reconnaisse comme légitime. Elle a pour mission aujourd’hui de ravir la première place au Godf dans le monde francophone (8).

3. La Mainmise sur les Hauts Grades

En 1884, la tradition a fini par rattraper ceux qui l’évitaient. Ne pouvant étouffer ni restreindre les hauts grades qui menaçaient d’amoindrir le prestige de la Gluda, l’Establishment britannique veut les mettre au pas et réédite le coup de 1717, en créant, cette fois, le Grand Council of Allied Masonic Degrees - le Grand Conseil des Degrés Maçonniques Alliés, dans le but de contrôler les divers ordres qui se trouvent en Angleterre, au pays des Galles, dans les Colonies et dépendances de la Couronne britannique. A noter que les degrés méprisés sont reconnus Maçonniques et mieux, de marginaux, ils deviennent des Alliés.

Cette tentative de récupération est dénoncée par John Yarker (1833-1913), qui proteste naïvement et en vain auprès du Duc de Sussex : C’est une trahison du Traité de l’Union de 1813 sur lequel repose la Gluda. Toucher à l’indépendance des Hauts Grades, fait-il remarquer, c’est rejeter le Traité de l’Union de 1813 sur lequel repose la Gluda, et sans cet Accord, il n’y a pas de Gluda.

Pour avoir mis le doigt sur la plaie, John Yarker va payer chèrement son choix. La machine de propagande et de calomnies de l’Establishment maçonnique se déchaîne contre lui. A cela s’ajoute la colère des partisans du Rite Ecossais Ancien Accepté qu’il dénonce comme étant une supercherie. Aussi, pendant plus d’un siècle, Yarker sera l’objet de toutes les attaques : taxé tantôt de farfelu et de marchand de diplômes, et tantôt de charlatan 9 et d’esprit confus qui n’a rien compris de la vraie francmaçonnerie.

4. Les Rites de la Tradition

Le dépôt de l’héritage, ainsi rejeté par la freemasonry anglo-saxonne, sera accueilli et recueilli sur le Continent européen, et surtout en Italie et en France, où il va croître, s’épanouir et enrichir les Hauts Grades, en s’ajoutant à d’autres traditions. En effet, plusieurs traditions ont circulé parmi les Maçons des rites égyptiens. En Italie, on dit qu’un Rite Egyptien dont on ignore l’origine et le contenu, aurait été introduit dans la région vénitienne aux débuts du XVIIIe siècle, faisant son chemin et touchant les îles Ioniques pour aboutir plus tard à Venise. En France on raconte qu’il aurait existé dès 1720, dans le midi de la France un Rite dit Primitif de Narbonne, issu des sources égyptiennes ou des Rose-Croix. Une autre tradition veut que ce soit à Paris et en 1721, qu’ait été fondé le Rite Primitif, qui serait le berceau même d'un des Rites égyptiens, le Rite de Memphis, ce qui est difficile à prouver. Ce Rite aurait été composé de 7 Chapitres fondateurs et les Frères étaient des Chevaliers pratiquant des rituels de Rose-Croix.

L'Egypte et Malte sont les creusets bouillonnant d'activités hermétiques qui débordent et touchent l’Italie. L'Italie entre en scène avec la naissance de Joseph Balsamo, (futur Comte Cagliostro) à Palerme en 1743, qui semble marquer un tournant. Il y a alors dans le sud de l'Italie et en Sicile, un certain nombre de loges qui travaillent hors de la vue de la Sainte Inquisition. Il y a Naples surtout, où l’on se passionne pour les traditions égyptiennes, ayant légué une vision de l'Egypte toute entière tournée vers l’initiation et les mystères. Les Pyramides envoûtent. Les chercheurs interrogent les oeuvres de Cherchants tels que Giordano Bruno (1548-1600), Tommasso Campanella (1568-1639), Spontini, alchimiste, Franco Maria Santinelli (Fra Antonio Crassellame Chinese), et des groupes Rose+Croix. Il existe alors un certain nombre de loges dans les provinces méridionales et en Sicile.

A Naples en 1750, une Grande Loge de la Maçonnerie avait été constituée, avec pour Grand Maître, le Prince de San Vero, Raimond de Sangro (1710-1771), un passionné d'alchimie et de magie de la transmutation.

C'est dans ce cercle, nourri des écrits de Michel Sendivogius (1566-1646), dit le Cosmopolite, qu'il faudrait chercher les origines de ce qui sera plus tard le Rite de Misraïm. D’autres Rites se sont réclamés de l'Egypte ou se seraient inspirés de l’ésotérisme grec et égyptien. Dès 1759, le Rite primitif ou des Philadelphes de Narbonne est organisé par le Vicomte de Chefdebien d’Aigrefeuille.

Au même moment en Angleterre, les gardiens de la Tradition ne restent pas inactifs.

En 1762, le partisan des Stuart, Sir Francis Drake donne force et vigueur à la Grand Lodge of All England ou Grande Loge de Toute l’Angleterre à York. Celle-ci pratique les grades de Royal Arche et des Templiers. En 1769, le Degré de Mark Mason est pratiqué dans un Chapitre de Portsmouth. En 1780, les Templiers de Saint Jean à Bath et à Bristol créent une Confédération sous une Charte de Compact.Sur le Continent, à partir des années 1770, jusqu’à la veille de la Révolution française, on assiste à une abondante floraison de l’Arbre ésotérique. C’est l’entrée en scène de célèbres ésotéristes comme Dom Pernety et les Illuminés d’Avignon, Kolmer et Cagliostro.

C’est l’apparition de rites et de rituels alchimiques ou hermétistes comme les Arcana Arcanorum, le Crata Repoa et l’Ordre des Architectes Africains de Von Koppen, l’Ordre des Philadelphes, Misraïm à Cavaillon, le Rite de la Haute Magie Egyptienne de Cagliostro ainsi que le Rite Primitif de Narbonne ou le Rite des Parfaits Initiés d’Egypte, ou encore le Rite des Philalèthes constitué dans une loge parisienne, qui pratique l’alchimie et la théurgie. Les initiateurs voyagent comme Parenti en Belgique, Ananiah à Cavaillon.

5. Les Rites Egyptiens de Misraïm et de Memphis

La plupart des systèmes de Rites mentionnés plus haut ont disparu mais leurs enseignements ne sont pas perdus pour autant. Venant des traditions antiques de l’Egypte, d’Alexandrie, de Constantinople, de la Grèce, d’Asie, de l’Inde, ils ont été recueillis dans les hauts Grades. D’où les nombreux degrés engrangés par les Rites de Memphis et de Misraïm, à savoir les 90 degrés de Misraïm et les 95 de Memphis.

Les Rites de Memphis et de Misraïm doivent leur implantation en France aux soldats de Napoléon revenant d’Egypte et d’Italie au début du XIXème siècle.

Le Rite de Misraïm, après s'être manifesté, dès le début du XVIIIème siècle dans la République vénitienne et à partir des îles Ioniques, se retrouve dans l'île de Zante au Sud de la Sicile en 1782 pour aboutir à Venise Au cours de cette même année, Gad Bédarride, selon son fils Marc, reçoit d'un initié égyptien, Ananiah le Sage (10) la filiation et les pouvoirs de transmission d'une Tradition maçonnique de provenance égyptienne. Comme le souligne Robert Ambelain (11), c’est à Venise en 1788, au sein d’une société de Sociniens que Cagliostro constitua le Rite de Misraïm, utilisant d’abord les rituels de son propre Rite Egyptien, puis ceux du Rite Ecossais Rectifié puis ceux du Rite Ecossais, Ancien Accepté. Et l'on sait, par ailleurs, qu'en 1796 une loge Misraïmite fonctionnait à Venise. Et toujours à Venise, avant 1801 grâce aux activités des loges animées par Cagliostro, Ananiah et Abraham (le baron Tassoni de Modena), l'Ordre Egyptien de Misraïm prend naissance.

En 1803, Lechangeur codifie le Rite de Misraïm auquel sont initiés Michel et Marc Bédarride. En 1806, Les Amis du Désert de Toulouse, Auch et Montauban pratiquent un rituel égyptien. En 1813 les FF\ Bédarride, reçoivent le pouvoir dediffuser le Rite de Misraïm hors d’Italie. Ce Rite fait son entrée en France grâce aux Frères Bédarride, qui établissent à leur domicile à Paris, le 21 mai 1814, un Grand Chapitre au Rite de Misraïm qui comporte 90 degrés regroupés en quatre séries. La Loge-Mère a reçu la lumière en mai 1814, sous le titre distinctif de l'Arc-en-Ciel.

Le Rite de Memphis serait né de la fusion de plusieurs Rites ésotériques et gnostiques, ce qu’ont confirmé, chacun à leur époque, John Yarker ou Robert Ambelain. Selon Marconis de Nègre, il a pour lointaine origine les Templiers qui auraient eux-mêmes reçu une filiation remontant jusqu' à un sage d'Egypte converti par Saint Marc. La Loge Isis fut fondée au Caire en 1798, et comptait parmi ses membres des savants et des officiers français, dont la plupart étaient des Maçons des Rites anciens : Philalèthes, Frères Africains, Rite Hermétique, Philadelphes, Rite Primitif, etc., ainsi que des notables égyptiens initiés aux mystères des Pyramides.

Les soldats appartenant à ces divers courants ésotériques entrent en contact avec les FF\ de la Grande Loge d'Egypte, descendants des R+C de la période constantine. Enrichis de ces nouvelles connaissances, les FF\ de retour en France ne pouvaient rester les bras croisés. Parmi eux, il y avait donc Samuel Honis, un officier de l'armée napoléonienne initié à la loge Isis, qui fonda avec ses FF\ de retour en France, une Loge au titre distinctif de Les Disciples de Memphis. Cette loge travaillait selon des rituels fortement imprégnés d'influences égyptiennes.

6. Les Rites Egyptiens doivent être Détruits

Il serait naïf de penser que le monde maçonnique n’ait voulu que du bien aux Rites égyptiens. Le Rite de Misraïm « a été obligé, dès les premiers jours, de lutter pour son existence, pour son droit à l’existence », parce qu’ « on n’a jamais vu notre Rite…encenser aucun des gouvernements qui se sont succédé en France… »

Comme ces Rites égyptiens dérangent, on cherche à les détruire, soit de façon directe comme l’a fait le Grand Orient, en les dénonçant aux Autorités qui les interdisent ou les dissolvent, soit de manière hypocrite en les prenant sous leur protection pour mieux les étouffer. Ainsi dès 1817, le Rite de Misraïm a eu à s’opposer au Grand. Orient qui a essayé à plusieurs reprises de l’absorber. En 1822, par la voix du F\ Vernhes (12) le Rite avait refusé l’intégration forcée au sein du Grand Orient. Et quatre décennies plus tard, en 1862, lorsque Napoléon III imposa par décret au Grand Orient, le Maréchal Magnan (13), celui-ci exigea du Rite qu’il reconnût son autorité.

Le Grand Maître Hayère répondit :

« Le Rite de Misraïm tient trop à son indépendance pour reconnaître vos pouvoirs et votre domination : si l’Empereur croit devoir nous supprimer, qu’il le fasse ; mais nous ne nous soumettrons jamais ! » (14)

Le Rite a même des ennemis outre-Manche. On aurait pu penser que la Grande Loge d’Irlande, était animée d’excellentes intentions envers le rite lorsque le Grand Maître le Duc de Leinster ainsi que son adjoint, John Fowler se font initier au 90e degré de Misraïm, le 21 février 1821. Le Grand Hiérophante Michel Bédarride les aida même à constituer un Conseil complet de 17 membres tous élevés au 77e. En réalité, ils ne cherchaient pas à poursuivre une voie initiatique et ésotérique, mais comme ils ne le cachent nullement, ils se sont fait initier « …visiblement en vue de garder le Rite sous contrôle et de le laisser mourir d’inanition ».

Même perfidie du côté de la blonde Albion. Le Grand Maître de la Grande Loge Unie d’Angleterre, le Duc de Sussex, reçoit le 90e degré du Rite de Misraïm et est investi des pleins pouvoirs pour l’Angleterre, l’Ecosse et l’Irlande. Il figure, dans la liste des membres de Misraïm pour l’année 1821-22 15, à côté du Duc d’Atholl, un ancien Grand-maître de la Grande Loge des Anciens ou des Schismatiques. Il fallait tuer le Rite.

Mais le Rite de Misraïm respire toujours. Un demi siècle plus tard c’est le REAA qui veut l’annexer et Robert Wentworth Little qui introduit le Rite à Londres en décembre 1870, dénonce la manoeuvre. Le Rite est resté indépendant et autonome sans avoir jamais accepté d’être soumis ou intégré au GO, qui finit par le reconnaître entre 1882 et 1890. C’est en présence du T\ Ill\ F\ Proal, TPSGC et GM du REAA et des invités du GO que le Grand Maître de l’Ordre, le T\ Ill\ F\ Osselin et la Grande Loge Misraïmite célèbrent, avec les membres de ses Ateliers L’Arc en Ciel, Buisson Ardent, Pyramides, la Fête de l’Ordre, le 4 août 1889. Le Grand Secrétaire demande de tourner la page sur le passé et de travailler ensemble pour la gloire de la maçonnerie. L’Arc-en-ciel travaillera jusqu’en 1925.

Le Rite de Memphis, par contre, suivit une autre voie. Le 17 mai 1862, Marconis de Nègre, impécunieux et vieillissant, surtout préoccupé par la survie de son Rite, dont il est le Grand Hiérophante, saisit l’offre du Maréchal Magnan pour confier le Rite au Grand Orient. Ensemble, ils réduisent les 95 degrés à 33 (16). Alors qu’il croit avoir sauvé son Rite, il meurt trop tôt pour savoir, comme nous le souligne l’auteur britannique Ellic Howe, que le Grand Orient s’est tout de suite mis à interdire la pratique des Hauts Grades pour imposer son propre rite français aux sept degrés. Howe triomphant ajoute que : « ce n’est pas le rite mais son cadavre qui fut légué au GO… Le Rite s’est éteint comme un pétard mouillé… Selon le Bulletin du GO de janvier 1868, il n’y a plus de loges de Memphis en France (17) ».

En effet, pour le Grand Orient le Rite est mort et enterré. Il n’en veut plus. Il n’en parle plus. Pourtant, en août 1864, le Rite de Memphis est toujours vivant et possède des loges en activité : Le Sectateurs de Ménès et Les Disciples de Memphis, un Chapitre à Paris et une Loge de Chevaliers de Palestine à Marseille. Il est toujours à l’honneur dans le Royaume des Deux-Siciles et mais surtout en Egypte qui assurera sa survie.

Dès 1862, le Grand Maître d’Egypte, le Marquis du Beauregard, déclare illégitime l’acte par lequel Marconis a abdiqué ses droits en faveur du Grand Orient et maintient l’organisation à 95 degrés. En 1864, des FF\ de Memphis créent le Grand Orient d’Egypte (18) pour travailler dans les Hauts Grades et une Grande Loge d’Egypte pour s’occuper des trois degrés symboliques. Celle-ci fut par la suite reconnue par la Gluda. L’exemple de Beauregard sera suivi par d’autres Responsables ou Grands Maîtres du Rite dans le monde, comme Calvin Burt aux Etats-Unis, Oddi en Italie, Ullic en Roumanie, Teodor Reuss en Allemagne, J Bricaud en France ou John Yarker, qui, assureront la survie du Rite, soit en maintenant l’échelle complète des degrés, soit en offrant à leurs loges, comme en Grande Bretagne, la possibilité de travailler au Rite soit à 96 degrés soit à 33 degrés. (19) Ce qui montre qu’un Rite à vocation internationale ne peut être confisqué par aucune Obédience nationale.

7. Giuseppe Garibaldi

En effet, ces Rites Egyptiens de Misraïm et de Memphis, refusent de mourir. Ils survivent à toutes les tentatives de meurtre et d’embrigadement ainsi qu’aux persécutions et vont continuer de vivre une vie autonome et indépendante sous aucune tutelle. Après avoir cheminé séparément pendant plusieurs décennies, ils se retrouvent côte à côte sous Giuseppe Garibaldi, qui les unit en 1881 lors de son accession à la Grande Maîtrise des Rites de Misraïm et de Memphis. Ses pairs, les Grands Maîtres des Souverains Sanctuaires (les organes dirigeant un pays) des Etats-Unis, de la Grande Bretagne, de l’Italie et de la Roumanie le nomment Grand Hiérophante Mondial.

A partir de cette année 1881, où est né le courant garibaldien, aucune autorité, (émanant d’un Souverain Sanctuaire ou de Grands Patriarches de Memphis ou de Misraïm, séparés ou unis en France ou en Italie), n’a accordé à quiconque et à quelque Obédience non égyptienne, le droit de parler en son nom ni de conférer en son nom les degrés qui sont les siens. Les deux Rites traverseront deux guerres mondiales, y compris le nazisme, qui a assassiné ses chefs, pour renaître, tel le Phoenix, au milieu du XXe siècle.

8. Allegri, Zazio, Ambelain, Kloppel

Après la mort de Garibaldi, il y a degli Oddi, puis John Yarker, ensuite Teodor Reuss. Celui-ci donne une Patente à Jean Bricaud pour la constitution d’un Souverain Sanctuaire de France. A son tour, Bricaud se considère légitime héritier et transforme le titre de Grand Hiérophante en Grand Maître Général. Les Souverains Sanctuaires nationaux ont cessé de se rencontrer pour désigner leur Primus inter Pares. C’est seulement au Convent du Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm à Bruxelles de 1936 que Guérino Troïlo devient Grand Hiérophante Mondial 98e, avec G Bogé de Lagrèze, comme son Substitut. Arrive la Deuxième Guerre Mondiale qui conduit toutes le Obédiences entrent en sommeil, sauf la loge d’Alexandrie d’Egypte de Robert Ambelain qui continua de travailler chez lui dans la clandestinité. Le réveil des Rites Egyptiens après la guerre, sera assuré en Italie par Marco Edegio Allegri, Grand Hiérophante de Memphis en 1923 et Grand Hiérophante de Misraïm en 1925. Il unifie les rites en 95 degrés et fonde le Souverain Grand Sanctuaire Adriatique. Il aura pour successeur Ottavio Ulderico Zazio.

En France, Robert Ambelain détient une Patente de Grand Maître Substitut pour la France, depuis le 15 août 1944 de G Bogé de Lagrèze. Henri Charles Dupont qui a succédé à Constant Chevillon, assassiné par les Nazis, désigne par écrit le 13 août 1960, Robert Ambelain comme son successeur. La même année, Robert Ambelain fonde la Grande Loge de Memphis-Misraïm et, devenu Grand Maître Mondial en 1963, redonnera cependant à ce Rite force et vigueur, surtout après l’avoir détaché du gnosticisme et du martinisme.

9. De l’Inutilité d’une Grande Maîtrise Mondiale

Son successeur Gérard Kloppel, nommé le 31 décembre 1984, sera renversé en 1998 dans une révolution de Palais, fomentée par son second Georges Claude Vieilledent. Toutefois, le 20 mai 1998, il nomme Cheickna Sylla et démissionne pour revenir, moins de deux années plus tard, destituer ce même Sylla. Dans une lettre en date du 5 mai 1999, adressée aux Grands Conservateurs du Rite, Kloppel condamne « des dérives…avec des conséquences graves au niveau de notre ordre : la multiplication d’Obédiences, 28 actuellement, les passages de grades, sans aucun respect des Constitutions, sans formation des FF\, voire avec des Rituels autres que ceux de Memphis-Misraïm, nomination des FF\, aux plus hauts degrés sans aucun respect des règlements et de la Tradition ».

Puis, le 2 mars 2000, par lettre envoyée à tous les Très Sublimes Frères, 95e du rite, Kloppel écrit qu’il ne peut plus « cautionner tout ce qui a pu se passer en termes d’irrégularités, de non respect des Constitutions…, notamment la réintégration sans mon avis, de FF\ exclus à vie et le fait que Memphis-Misraïm est devenu la risée justifiée des autres Obédiences, qui furent, durant plus de trente ans, amies ».

En conséquence, comme l’avait fait précédemment le Grand Maître de France, Henri-Charles Dupont qui avait repris la Grande Maîtrise transmise au T\ Ill\ F\. Pierre Debeauvais, Gérard Kloppel, agissant comme Grand Hiérophante International, révoque Cheickna Sylla comme Grand Maître Mondial et lui reprend la Grande Maîtrise, qu’il lui avait lui-même conférée.

Pour avoir eu le temps de réfléchir, loin de la meute qui le tourmentait, et d’assister impuissant à la dé-spiritualisation du Rite, l’ancien Grand Maître va beaucoup plus loin et aboutit à la conclusion suivante :

« …un Grand Maître International n’a plus sa raison d’être ».

Il propose alors de le remplacer par de « petits groupes d’Adeptes, mieux aptes à favoriser la nouvelle évolution, tâche essentielle pour toute Maçonnerie qui se veut authentiquement Spiritualiste ».

Cette proposition méritait examen, mais il n’existait pas de forum pour le faire et nombre des Grands Conservateurs de l’Ordre ont préféré prendre leurs distances en attendant la fin de l’ouragan. Aussi d’exclusions en exclusions, de dérives en dérives, le Rite de Memphis-Misraïm dévale la pente, sans direction et sans frein…

10. La Fin du Souverain Sanctuaire International

On doit à la vérité de dire que la création du Souverain Sanctuaire International n’a jamais fait l’objet d’accord unanime, étant composé au départ non des Grands Maîtres de chaque Souverain Sanctuaire National mais de Grands Conservateurs presque tous de nationalité française. Les FF\ Italiens s’y sont opposés dès le début, y ayant vu un instrument de domination néo-coloniale créé et inventé par le Souverain Sanctuaire de France pour coloniser les autres Souverains Sanctuaires Nationaux.

Consultés au sujet des Grandes Constitutions et Règlements Généraux, - GCRG, ils avaient attiré l’attention des FF\ français, sur nombre des dispositions inacceptables qui, entre autres, dépouillaient les Grands Maîtres Nationaux de leurs pouvoirs et prérogatives traditionnels pour les concentrer entre les mains du Grand Maître Mondial :

« A ce propos, il est utile de rappeler tout de suite que le Fr\ G C Seri, avant même que ce document ne soit approuvé, en diverses occasions et par anticipation avait dûment informé le F\ Kloppel que la transformation des Souverains Sanctuaires nationaux en organismes satellites du Souverain Sanctuaire Français, camouflé de façon grossière en Souverain Sanctuaire International, n’était absolument pas possible par le fait même que si le colonialisme est intolérable dans le monde profane, il l’est - d’autant plus dans le monde initiatique. (20) »

La Belgique n’a jamais cédé au Grand Maître Mondial le droit de conférer à la place de son Grand Maître National les 90 au 95e degrés. Ainsi ils ne reconnaissent aucune supériorité ni rôle spécial au Souverain Sanctuaire International :

« Pour ce qui est de nos relations avec les autres Obédiences nationales de Memphis-Misraïm ou les autres Obédiences, tout court, nous voulons nous situer ni au dessus, ni en dessous mais à égalité ».

En outre, les FF\ belges ne cessent d’insister sur l’article 14 des mêmes GCRG :

« Memphis-Misraïm est une association d’Obédiences nationales, ce qui implique : la reconnaissance des sensibilités propres à chaque pays, la nécessité pour chaque G\ M\ et S\ S\ national de gouverner en tenant compte de ces sensibilités et contextes particuliers, le fait qu’aucun pays ne puisse se considérer comme supérieur à un autre ni s’arroger le droit de s’immiscer dans ses affaires intérieures, l’interdiction morale et effective de diffuser des informations (très souvent fausses, voire même calomnieuses sur des Obédiences nationales ou leurs Dignitaires, etc. »

Mieux, la Belgique propose alors comme solution en vue de garder au Rite toute sa vitalité et toute sa pureté :

« Nous pourrions alors, à l’instar de ce qui se pratique pour le R\ E\ A\ A\, organiser périodiquement des réunions rassemblant les Hauts Dignitaires des Obédiences Nationales pratiquant le Rite de Memphis-Misraïm. Chaque Obédience Nationale, comme au R\ E\ A\ A\, resterait indépendante et souveraine dans son pays ».

A la lumière de ces affirmations de principe, le bon sens dicte que l’on considère sérieusement la mise en place au plus vite, d’une structure légère, un secrétariat de coordination qui permette aux responsables du Rite dans leurs différences Obédiences nationales toutes placées sur le même pied d’égalité, notamment les Patriarches Conservateurs du Rite, 95e et Patriarches Sublimes Maîtres du Grand OEuvre, 90e de tous les Souverains Sanctuaires nationaux, de se rencontrer, de se parler et d’agir ensemble pour le bien du Rite. Pour l’heure, plusieurs Souverains Sanctuaires Nationaux se sont mis en retrait et ne participent plus aux réunions que convoque Cheickna Sylla. Le Souverain Sanctuaire International sest réduit comme une peau de chagrin avec seulement deux Souverains Sanctuaires, celui d’Afrique et celui de France pour le soutenir. Le Grand Maître Mondial désormais n’est Grand Maître Mondial que de lui-même. En réalité, il n’y a plus ni Souverain Sanctuaire International, ni Grande Maîtrise Mondiale qui soient autorisés à parler au nom de l’ensemble des Souverains Sanctuaires Nationaux du monde entier.

11. Quel Avenir pour le Rite de Memphis-Misraïm ?

Comme on a pu le constater, le Rite de Memphis-Misraïm, en se développant, ne s’est pas donné les structures appropriées pour gérer un Rite international et permettre aux Patriarches Grands Conservateurs de l’Ordre de se rencontrer sur un pied d’égalité et de regarder ensemble l’avenir. Or, c’est là une tâche rendue d’autant plus urgente et indispensable que les activistes de la contre-initiation pullulent, s’excommunient et déshonorent l’Ordre. Cette situation devrait donc interpeller fortement tous les Souverains Sanctuaires et Patriarches Grands Conservateurs qui ne peuvent ou ne veulent plus détourner les yeux du malheur présent.

Or, s’il existe des problèmes au niveau de l’Organisation, au niveau de la spiritualité, c’est tout à fait le contraire. Le Rite de Memphis-Misraïm est en pleine expansion. Il est l’un des quatre rites qui font le plus de progrès en ce début du troisième millénaire, surtout en Afrique francophone. Et ce n’est pas nous qui le disons21. Ce n’est pas un hasard : le Rite de Memphis-Misraïm porte un message de haute spiritualité dont le monde a grand besoin aujourd’hui, ce qui fait que les dignitaires des autres Obédiences viennent souvent y chercher un complément de spiritualité qu’ils ne trouvent nulle part et que seul ce Rite peut leur apporter.

Ajoutons que certaines Obédiences cherchent à s’emparer du courant garibaldien du Rite de Memphis-Misraïm et proposent même un rite égyptien réduit et surtout sans la moelle substantifique que sont les Arcana Arcanorum (Régime de Naples).22 Ces Arcanes des Arcanes ne leur ont jamais été communiqués ni confiés, ce qui fait qu’elles ne pourront jamais les transmettre. Prétendre le contraire est une supercherie.

Ce spectacle ne doit en rien décourager ou désorienter le Cherchant. Il a seulement le devoir de s’interroger sur la légitimité et l’authenticité de la multitude d’Obédiences qui prétendent être habilités à transmettre l’héritage de Memphis-Misraïm. Comment s’y retrouver ? Comment faire le bon choix ? Une seule piste : Ordo ab Chao. C’est la devise du Maçon dont le devoir est de bâtir l’Ordre à partir du Chaos.

12. Conclusion

Les Rites Egyptiens ne sont pas des rites comme les autres. Ils se disent héritage et dépôt des Ecoles initiatiques qui leur ont fait traverser les siècles jusqu’à nos jours. Ils se réclament d’une filiation remontant à l'Antiquité pré-chrétienne, à l’Egypte pharaonique et à l’Inde védique, et d’une richesse qui traverse plusieurs cultures, les alimente et les rend universels. Les Rites Egyptiens ont une fonction initiatique qui est leur seule raison d’être. Ils affirment avec force leur spécificité, qui est leur attachement au courant hermétique et ésotérique de recherche de la Tradition pérenne.

Le Cherchant pour avoir interrogé le Sphinx sait que les réponses sont des énigmes et que la vie initiatique est un apprentissage au déchiffrement des symboles. Il s’est fié aux scintillements des étoiles pour éclairer sa route. Il a vu les silhouettes qui font penser aux Temples. Et voici qu’il se trouve aux abords du Sanctuaire où le hasard l’a amené. Il le reconnaît. Il sait qu’il est devant la porte du Temple d’Egypte. Il frappe.

Pensons qu’à l’Intérieur, lorsque s’ouvre la porte

Le Chaos a fait place à l’Ordre Conservé !

Notes :
(1) Voir Jean Mallinger : Des Initiations Antiques aux Initiations Modernes, Publi-Nord, Lille, 1980.
(2) David Stevenson: The Origins of Freemasonry - Scotland’s Century 1590-1710, Cambridge University press 1988.
(3) Famille liée au Graal, aux Templiers et à la Chapelle Hermétique de Rosslyn. Une Catherine Saint Clair fut l’épouse de Hugues de Payns, fondateur de l’Ordre du Temple (1118-1314). Voir : Tim Wallace-Murphy & Marilyn Hopkins : Rosslyn, Guardian of the secrets of the Holy Grail, UK 1999.
(4) Voir Origins of the Craft and High Grade Freemasonry par John Yarker, 33e90e96e. Discours fait à Manchester le 31 mars 1883 ; Historical preface - Origins and Progress of High Grade Masonry Manchester 1903.
(5) J. Yarker : High Grade Freemasonry more specially the AASR as compared with AAPR - Lecture of 26 November 1883.
(6) Selon Findel, l’historien allemand, il n’y a qu’un « seul degré d’initiation »en cette année.
(7) Voir Speculative Freemasonry de John Yarker, November 1883.
(8) Voir G. Ottenheimer et R Lecadre : Les Frères Invisibles, Albin Michel.
(9) En 1996, un article de Ars Quatuor Coronatorum écrit, semble-t-il, pour le réhabiliter a pour titre :
John Yarker, charlatan ? Notez le point d’interrogation. Or dans les références subséquentes de l’article en question, le point d’interrogation a disparu. Ce qui révèle la force de l’endoctrinement et la puissance de l’Establishment. Et nombre d’historiens français, répétant les insanités d’outre-manche vont se mettre, eux aussi, à salir ce grand Maçon et homme de bien.
(10) Sous ce nom, on prétend qu’il y avait Cagliostro. A élucider.
(11) R. Ambelain: Franc-Maçonnerie d’Autrefois, Robert Laffont, 1998.
(12) Voir Vernhes : Défense de Misraïm, Paris, 1822.
(13) Il reçut tous les degrés du 1er au 33e en un seul jour, le 13 janvier 1862.
(14) Discours du F\ Dr Chailloux, Grand Secrétaire du Conseil de l’Ordre in Rite Oriental de Misraïm ou d’Egypte : Fête de l’Ordre du 4 août 1889, Paris.
(15) Les documents concernant cette initiation ont disparu au Freemasons’ Hall, mais impossible de la nier puisque R Gould en parle dans son The History of Freemasonry, London 1887, Vol 3 pp 133.
(16) Et ce n’est pas Yarker comme le prétendent les sources intéressées !
(17) E Howe : Fringe Masonry in England, Sept 1972 et The Rite of Memphis in France and England 1838-1870, 9 Nov 1978 in Ars Quatuor Coronatorum, Volume 93.
(18) Contrairement à ce qu’affirment E. Howe ou G. Odo, ce Grand Orient d’Egypte n’a rien à voir avec le GO de France.
(19) The Kneph, Journal Officiel du Rite Ancien et Primitif de la Maçonnerie. Vol 1 No 11 du 1er novembre 1881.
(20) Revue Italienne : Misraïm du 30 juin 1998.
(21) Voir George Odo : La Franc-maçonnerie en Afrique, Ed Maçonniques de France, 2001.
(22) Pour G. Ottenheimer et R Lecadre, op. cit., p 300. « En vérité, il est aussi question d’une banale course aux effectifs, à l’échelle planétaire. Dans l’espoir de ratisser large, chaque obédience réactive en son sein tous les rites possibles et imaginables. C’est parfois risible, lorsque le GO se pique soudainement de Rite Egyptien dans le seul but de tailler les croupières à Memphis-Misraïm… La Grande Loge Unie d’Angleterre s’y intéresse également, avec encore moins de légitimité que le GO… »Les auteurs du livre ajoutent que les Obédiences aux trois degrés ont besoin des Hauts Grades de Memphis-Misraïm pour impressionner et attirer les Chefs d’Etat de pays en développement.

J\ T\ M\ K\


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