Obédience : NC Loge : NC Date : NC


Les mots aveuglent ?
...et j’ajouterai …Et la lumière !

La réflexion est venue d’une comparaison entre ces mots qui si souvent nous étourdissent et l’éblouissement suggérait par les rituels du RER …que mes frères qui sont nés au REAA me pardonnent ...mais on n’arrache jamais les racines de sa naissance et peu importe l’endroit  ou elles donnent leurs fruits et je les invite donc à faire quelques pas en compagnie de ce Rite étranger…mais au fond si peu !

Pour moi qui suit un bavard impénitent et qui si souvent, à défaut d’une pensée claire s’enlise dans le dédale d’un verbe si peu maîtrisé il fut salutaire  de faire ce travail sur les mots et sur l’un d’entre eux.
 
Travail qui m’a invité derechef, à diriger mes pas, à reprendre des voyages interrompus vers le Soi, là ou parfois des étincelles de lumière émanent au milieu des ombres, la ou les mots se forment, dans le silence intérieur.

Travail pour tenter d’organiser le chaos des mots et des idées et je vous propose de partager  trois axes de réflexion.
 
Premier axe : Lumière trop évidente, trop violente, phantasme de l’imagination, c’est à dire trop souvent incomprise et qui obscurcit l’entendement …ou lumière Ineffable, Vérité à jamais insaisissable certes mais néanmoins Lumière qui se lève ?

Deuxième approche : Mots derrière lesquels nous cacherions nos petitesses, nos limites, que nous assemblons maladroitement mais souvent avec conviction en paroles et en concepts pour tenter de nous dire, de nous justifier …ou mots qui approchent le Vrai de ce que nous sommes, mots qui disent une parcelle de la Vérité et  qui nous grandissent ?

Enfin en troisième lieu, dire quelques mots des outils et d’une façon d’Etre  que nous offre le cheminement initiatique dans la loge et qui nous permettent de dépasser nos éblouissements, d’éviter de nous payer de mots : les symboles qui donnent sens et le retour au Silence intérieur ou les mots sont superflus!

Tentons de dégager quelques unes des  idées qui se cachent derrière le mot lumière et qui peuvent nous aveugler si nous n’y prenons pas garde.

« Ce faible rayon de lumière...témoignage de l’impossibilité ou vous serez de la fixer dans tout son éclat » affirme notre rituel d’initiation lorsque nous recevons la première et modeste lueur.

Et le rituel poursuit : « Sic Transit Gloria Mundi » ...c’est ainsi que passe la gloire du monde !

Certes la pleine lumière nous est offerte à contempler, mais la mise en garde est claire, tout est éphémère : les hommes, les honneurs, les constructions humaines mais plus encore poursuit le texte… « toutes les illusions qui disparaissent aussi promptement que l’éclair ».

Enfin promptement, c’est à voir car nos mots trop souvent, s’accrochent à ces illusions et tendent à les rendre pérenne, alors que la symbolique de l’éclair puissant, vigoureux et soudain introduit surtout l’idée de fugace et de transitoire et d’impermanent.
L’aveuglement qui nous guette à chaque pas vient de l’illusion d’avoir vu, reçu, ou être habité par la pleine Lumière Une et Absolue.

Pour ma part j’y vois quelques raisons : d’abord défaut de compréhension de l’origine de cette Lumière et ensuite l’état de notre Etre dans le monde.

Nous sommes des cherchant, nous travaillons, nous fournissons un effort et pour alimenter le moteur et il y a besoin de carburants qui nous sont offerts par la Tradition, les traditions , les écrits  des Philosophes, les paroles des Maîtres de Sagesse, les contes et les mythes racontés dans les livres, le Livre, les rituels.

Mais si, visiter Maître Eckaert, Spinoza, Niecztche,  LaoTseu, Freud, Yung et combien d’autres excellents grands et petits cailloux blancs sur notre chemin est une source ou abreuver nos réflexions, le danger subtil  de l’illusion nous guette au moment même ou cette aide nécessaire nous est offerte.


Ca y est, je la tiens cette lumière rebelle à mon entendement, ce bon Maitre m’éclaire enfin, je peux déposer mes outils, je suis arrivé au bout du chemin.

Mais cette lumière si soudaine, si attendue viens de l’extérieur et elle nous éblouit à la mesure de notre incapacité à la saisir là ou elle se trouve réellement après la digestion et l’interprétation des paroles des Sages, c’est à dire dans ce temple intérieur que nous construisons péniblement.

Ce temple c’est l’athanor intime ou se réalise l’alchimie qui nous mènera peut être ou jamais à la pierre cachée, c’est à dire à la pleine Lumière.

Ce sont les pas que nous faisons sur nos chemins intérieurs qui offrent des parcelles de cette Lumière unique, simples éclairs de lucidité trop éphémères mais si  précieux qui éclairent le regard que nous posons sur le Monde et sur nous même.

Ce sont ces lueurs qui peu à peu guident et modifient la nature et la qualité de nos actes respectant le nouveau système de valeurs que nous construisons peu à peu pour essayer de tutoyer la Loi Universelle,.

Lorsque dépassant le travail nécessaire de l’équerre, l’ouverture du compas grandit, lorsque l’angle de nos perceptions s’ouvre, cette lumière qui éclaire de l’intérieur, qui n’aveugle pas, révèle peu à peu les réalités.

Ce travail sur soi nous offre une perception plus fine de nos mécanismes intérieurs qui régissent nos comportements, nos certitudes, nos erreurs, nos rejets, nos illusions

Ainsi s’éclaire notre quête du Sens ultime de notre vie, de la Vie  qui passe obligatoirement par la pleine connaissance de soi qui progresse par niveaux et paliers souvent de manière chaotiques.

Manifestation d’un égo trop vigoureux, aspiration à l’Absolu d’une vérité ultime, volonté de se connaître, doutes sur ce qui nous apparaît,  passions qui nous envahissent à nouveau alors que nous pensions les avoir dominer …tout cela en même temps …..confusion souvent tant il est  difficile le retournement de notre regard vers de nouvelles priorités !

La seule lumière qui vaille nait à l’intérieur donc, mais que dit le rituel de fermeture ? ...« Si vous cherchez la lumière, sachez qu’elle se trouve à l’Orient et que c’est là seulement que vous pourrez la trouver»

S’il s’agit d’Orient éternel, nous pouvons comprendre que la lumière que nous cherchons ne sera trouvée qu’après l’ultime initiation de la mort.

Mais pour ma part il y a au moins une autre interprétation : l’Orient est l’aube ou apparait le soleil astre symbole de la Lumière après son long périple souterrain, aube qui annonce la pleine conscience, celle de midi plein de la perception du temps sacré de la loge.

Bien sur nous assimilons la Lumière que nous cherchons, à une Vérité absolue que nous avons la prétention d’atteindre, au retour à un Tout indifférencié et ordonnant enfin notre chaos intérieur ....mais  que pouvons nous percevoir réellement ...de cette lumière dont nous ne savons rien ?

Alors face à la conscience de l’impossibilité de saisir sa nature profonde seule la Voie importe car elle seule est identifiable et peut être  parcourue et ce chemin à parcourir …c’est nous.

Contentons nous donc de cette pleine conscience de soi à atteindre sans cesse, de cette plénitude de l’entendement que j’admet comme Lumière que je cherche : un gros travail sans fin...et c’est bien assez pour un homme initié si déjà son aube apparaît à son Orient intérieur...quoique qu’il faille toujours tendre le regard, plus loin, plus haut c’est à dire plus prés au centre pour atteindre à l’universel.

La lumière est partout en loge et pour tendre vers sa pleine compréhension, il faut déchirer les voiles qui la dérobe à notre regard et ses nombreux symboles nous y aident

De la même manière derrière les mots se caches une réalité complexe, difficile à saisir et c’est le travail de l’initié…. seul le lent et persévérant travail sur soi permet d’approcher le vrai du mot.


Deuxième axe d’approche : Comment et pourquoi assemblons nous les mots en des rhétoriques qui ont la prétention d’être des concepts universels ? 

Les mots au delà du travail de la réflexion de la raison manifestent  toujours l’état de nos représentations intimes au moment ou nous nous exprimons.

Le mystère des mots, leurs évidentes limites à dire le vrai sont aussi me semble t’il l’expression spontanée de l’inconscient dont nous ne savons rien, à tout le moins d’un subconscient nébuleux  et j’ai dit l’importance des difficultés de faire apparaître l’aube de le conscience.

Sans que nous en ayons conscience, nos comportements, nos actes dans le monde, nos pensées, nos agitations sont déterminés chez chacun de nous par nos  systèmes de pertinence et ils nourrissent cet inconscient,

Education, position sociale, influences parentales, religion, histoire personnelle, tout cela nous forme, nous déforme, obscurcit notre jugement et par acceptation, mimétisme, par opposition et rejet, notre mental se modélise.

Nous sentons confusément que l’esprit n’est pas stable qu’il évolue subtilement ainsi que nos perceptions et les mots pour les dire.

Par ailleurs et c’est très important, les mots que nous prononçons sont des tentatives d’affirmer le Je, un Moi qui deviendrait capable d’agir sur le monde...les mots deviennent en quelque sorte le moyen utilisé par le sujet qui veut cesser d’être un objet.

Après l’évolution des mœurs pendant la Renaissance, après le « Je pense dons je suis » de René Descartes  qui postule un Je capable de contrôler l’esprit et par la même le monde, l’une des expressions la plus importante  de cette volonté, de ce besoin d’individuation qui s’est développé tout au long de l’histoire humaine, est l’émergence au 18 ième siècle des Lumières ( lumières...nous y revenons !)

Les lumières sont l’expression de la raison qui serait seule capable d’appréhender le monde extérieur...et de là à vouloir comprendre et saisir par la seule raison la réalité de notre monde intérieur, il n’y a qu’un pas que nous franchissons allégrement.

L’homme s’éloigne ainsi, grâce à la raison de l’idée d’un Dieu créateur qui organiserait tout pour lui mais nous le savons, la raison ne suffit pas à expliquer le monde.

Il y faut mettre aussi une bonne pincée d’intuition, d’imagination, la lune nous y invite à laisser la porte ouverte à l’inattendu, au risque parfois de céder à une pensée magique ou religieuse aveuglante…est ce un hasard si lune et soleil encadre l’Orient et le triangle de la pleine lumière ?

L’imagination, la sensibilité du poète et du comédien ne nous offrent elles pas une parole qui libère qui élargit notre espace intérieur, qui nourrit notre cœur ?

Le rituel du RER nous propose à interpréter l’idée d’un GADLU qui est la vérité même et dont la parole est toute puissante et créatrice…j’ai longtemps buté sur cette  invocation…peut on concilier cela  avec le règne de la raison ?

Contradictions salvatrices entre un principe créateur extérieur tout puissant et  ma volonté intérieure d’affirmer un  Je qui décide, mais questionnement dérangeant qui me fait avancer vers …et puis aussi un rappel à l’humilité face à l’orgueil qui déborde car  que sont mes modestes mots face à l’infini ?

Pourtant l’Univers existerait il sans nous, s’il n’y avait pas les mots ?
…aurait-il un sens si nous n’avions pas la conscience pour le nommer et sonder son mystère ? …l’animal connaît il l’univers ? 

A huit reprise tout au début de la Genèse après l’acte créateur du ciel et de la Terre « Dieu dit…Dieu puis Jean « Au commencement était le verbe… »
 
Dés que je nomme je crée…de là à se prendre pour Dieu !...illusion de créer par notre parole alors que seul le travail, s’il est œuvre et non soumission sous le tripalium (le joug), nos actes dans le monde participent  modestement à une construction qui se poursuit.

L’homme n’est qu’un fragment du monde et non pas un chef d’œuvre de la création….un chef d’œuvre se comporterait comme il le fait ? ….ses actions par volonté de toute puissance, de domination étant si souvent mortifères!

Se prendre pour Dieu ?...nous y voilà !

Les mots nous en avons besoin bien sur pour partager avec l’autre, pour valider en les partageant nos réflexions, nos pensées, nos émotions, notre Amour, notre compréhension fraternelle ou amicale de son altérité, pour manifester l’écoute active et l’empathie que nous ressentons pour notre frère humain.

Mais mes mots sont de la paille qui s’envole, s’ils restent sans justification : seuls les  actes sont les fruits qui témoignent de la qualité du grain et lorsque je tend parfois la main pour aider et recevoir, pour poser un acte et pour construire, je témoigne de cela.

Attention aux mots qui sont si souvent la projection à l’extérieur d’un égo trop à l’étroit dans sa prison, si souvent l’expression d’un intellect qui veut exister coute que coute lorsque l’aube de la pleine conscience n’est pas encore apparue, quand la volonté de puissance nous égare.

Mais pour autant ces mots, manifestation parfois de l’Ego, mentent ils en nous aveuglant?

Mentons nous lorsque prêtons nos serments à chaque degré, quand ainsi nous nous engageons dans la voie du Devoir ? …je ne le pense pas, car ils sont sincères même si nous pressentons déjà qu’ils seront difficile à respecter.

Parfois les mots sont des armes de destruction, de manipulation, de volonté puissance sur l’autre.

Mais souvent, nos mots expriment simplement et sincèrement l’état limité de notre conscience au moment ou nous les prononçons même si ils nous désorientent, nous font perdre le sens de notre quête.

Ils nous aveuglent sur les réalités du monde et de nous même car l’aube, l’étincelle intérieure, la lucidité n’est pas encore réellement advenue ou si faiblement…..ou plus exactement nous ne sommes pas encore prêt pour la recevoir…ce sont ces limites que nous devons dépasser !

En polissant les mots en les assemblant en pensée cohérentes nous tentons de dire sincèrement le vrai et même si nous en avons accepté l’approximation et nos limites.

Et le danger est là bien présent me semble t’il : dés que nous nommons le manifesté, nous affirmons, nous nous  figeons…nous nous installons confortablement dans nos petites vérités….nous sommes arrivés, tout est dit…nous nous arrêtons de voyager en quelques sorte.

Heureusement nos tenues, les rites et rituels nous invitent sans cesse à persévérer dans la recherche, nous rappelle à l’Ordre d’un travail jamais achevé.

Et puis n’est il pas dit que de doute façon, nous ne savons qu’épeler…alors les mots qui se prennent pour des idées !

Pourquoi, lorsque je nomme, je tente d’organise ma pensée, d’échapper à confusion , j’ai l’impression toujours, tout en voulant la saisir, de m’éloigner  de la vérité que je cherche ? …Vérité qui de toute façon est ineffable …être vide de l’Idée même pour espérer s’approcher de sa substance…décidément le bon Maître me poursuit !

Mais si les mots ne sont pas toujours d’actualité ou pertinents que nous offre notre chemin initiatique ? …et je me limiterais trop rapidement dans  cette courte 3ième partie aux Symboles et au Silence.

Nous l’avons vu le mot nomme, précise, limite…et il ferme quand il s’installe, mais aussi il est nécessairement et souvent utiliser pour exprimer maladroitement ou par défaut.

Mais le symbole lui évoque, élargit notre regard sur le monde et sur nous même…il est le moteur de l’interprétations …il ouvre à des perceptions multiples et contradictoires qui introduisent le doute salvateur, il ouvre au mystère qu’il approche sans prétendre le résoudre.

Nous le savons le chemin initiatique est la quête du Sens, vers une vérité inaccessible…et le symbole est notre outil privilégié dans cette quête…par le frottement et l’interpénétration avec ce que suggère les autres symboles,  il offre une ouverture aux nombreux sens possibles que la raison va devoir néanmoins tamiser pour éviter de se perdre dans les labyrinthes de la confusion ou de la pensée magique!

Quant au Silence qui est évoqué ici il est tout autre que celui de l’apprenti dont nous savons l’impérieuse nécessité, fait de l’écoute de l’autre et de l’analyse intérieure nos réactions ;

Les mots  sont souvent l’expression de l’impossibilité ou nous sommes d’être dans le silence intérieur…un jour nous revisitons l’impérieuse nécessité  du silence  ou plutôt  il s’installe …il n’est plus attention et écioute…mais silence de l’harmonie avec le tout…les mots deviennent alors superflus et les pensées qui les alimentent sans objet…parfois lors de moments trop brefs, imprévisibles, nous rencontrons notre silence intérieur et la paix se répand,  présente, palpable et puis…l’agitation et la confusion reviennent !

Pour atteindre ce silence intérieur il est nécessaire de construire sans attendre un retour, car le chemin doit être sans attachement …avec  simplement la volonté de poser l’acte du bâtisseur…sans rien attendre du fruit….en sommes nous capable ?

Derrière les mots, la vérité se cache, il faut simplement ( enfin presque !!!) arracher les voiles successifs tendus  devant notre entendement et c’est notre devoir d’engager le combat avec nos ombres …pour mieux peut être , un jour déposer les armes.

Dés lors que  la conscience est venue que le verbe est silencieux qu’il n’est plus du ressort de l’entendement  dés lors que le cœur est ouvert, qu’il est vaste et accueillant à l’autre … alors l’agitation compulsive  des mots peut cesser  …enfin presque!

Vous tous mes frères, VM, j’ai dit

M\ R\


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