Obédience : NC Loge : NC Date : NC


Le secret des métiers

Vénérable Maître et vous tous mes frères, en vos rangs, grades et qualités, on peut lire dans le Livre des métiers d'Étienne Boileau : « Quiconque voudra tenir le mestier il conviendra qu'il le sache faire de tous points de soy sans conseil ou ayde d'autruy et qu'il soit à ce point examiné par les gardes du mestier ». C'est ici que nous rencontrons l'obligation du chef-d'ouvre qui fut d'ailleurs une mesure d'ordre économique et un facteur de cloisonnement social. Par lui se ferma la classe des maîtres à toute une masse d'artisans qui non seulement ne jouissaient pas des dispenses attribuées aux fils de maîtres, mais surtout ne pouvaient payer les taxes et les banquets qui accompagnaient toute accession à la maîtrise. C'est ainsi que le compagnon est un éternel apprenti pour ne pas appartenir  à une classe sociale lui permettant d'accéder à la maîtrise. Il a dû réaliser lui-même ses outils un à un pour ne pas en avoir hérité et le plus souvent, il quitte un atelier dans lequel il n'a pas d'avenir pour aller de chantiers en chantiers où son savoir-faire trouve à s'employer. La Franc-maçonnerie est issue de ses compagnons maçons dit franc pour ne pas avoir de maître et elle ne réintroduira la maîtrise dans ses rangs que d'un point de vue symbolique ou spéculatif en désignant comme tel, le plus souvent,  des gens extérieur au métier en lui-même en terme de pratique même s'ils en ont reçu les secrets.

Ses secrets résident dans un certain nombre de tours de mains et surtout des pratiques se substituant à des calculs savants qui ne sont pas à la portée de tout un chacun lorsqu'ils sont possibles. Quoi de plus mystérieux pour un profane que de voir des maçons établir un angle droit à l'aide d'une corde à nouds ! (Nos VV\ MM\ d'Honneurs en porte l'explication sous la forme d'un bijou qui décore leur cordon. 3, 4 et 5, etc.) Et il n'est pas nécessaire de connaître les lois de la gravitation universelle pour se servir d'une perpendiculaire ou d'un niveau, mais encore faut-il savoir les utiliser et pour ce faire en saisir l'esprit ! Notre compagnon reçoit par exemple une règle de 24 coudées. Certes, nous pouvons considérer que cela correspond à la division des jours, mais c'est avant tout, une table qui permet de passer du binaire au ternaire pour être divisible par 2, 4, 8 et 3, 6, 9. Toute mesure part du report de cette règle afin d'obtenir une échelle de nombre divisible par deux et part trois. Ce qui permet, par exemple, d'établir un élément au 2/3 d'une structure qui possède une moitié sans prendre une mesure autre que de compter son nombre de pierres ou, pour ce qui concerne une pierre en soit, que sa mesure corresponde au report d'une règle de 24 pouces à l'aide d'un compas. Il s'agit d'éviter (même si notre compagnon en est capable, ce qui n'est pas toujours le cas.) toute forme de calcul sur des nombres incommensurables tel pi ou racine de 2, etc.  Il doit être ahurissant de voir pour la première fois un homme soulever du sol une pierre de plusieurs centaines de kilo à l'aide d'un levier pour une personne qui ne sait pas ce que c'est ? Saura-t-il pour autant sans servir si on ne lui en explique pas le fonctionnement, rien n'est moins sur !

Dans tous les cas de figure, il s'agit de dépasser le conflit binaire pour retrouver l'unité par le ternaire dans toute forme d'édification, notre levier en est un exemple frappant en terme de moyen. Passons par l'équerre, ont donne à celle-ci le sens d'équité et il n'y a pas d'équité sans juste milieu entre des extrêmes qui s'opposent, ce qui représente, la plupart du temps, de mettre en ouvre une troisième voie intermédiaire. Et de même que pour un maçon il serait vain et dérisoire de tailler une pierre dont les mesures ne sont pas divisibles par deux et part trois en usant de sa règle, il serait pour nous, tout autant vain et dérisoire (d'un point de vue spéculatif), de s'attaquer à un problème qui ne rentre pas dans cette logique afin d'être, en tant que franc-maçon, à même de réconcilier des contraires afin de rassembler ce qui est épars. Pour la petite histoire, il est question ici de Logique Modale et plus généralement d'une sorte de théorie du calcul des propositions modales non analysées qui relient ensemble le nécessaire et le possible. (A titre d'exemple, la pyramide de Khéops possède une circonférence égale à celle d'un cercle dont le rayon serait sa hauteur. Impossible de se planter en taillant une de ses pierres de parements et peut importe le rapport de volume entres-elles, il suffit de tracer un degré d'angle en formant une équerre ayant pour base le même principe. Ceci en tirant une corde en travers, puis de tracer ¼ de cercle avec son aide sur la pierre pour rejoindre sa base, de faire courir une corde le long de ce tracé, d'en reporter la mesure et de tirer une corde entre les deux points pour savoir où tailler et le tour est joué. La partie vaut le tout, d'où l'exactitude, presque miraculeuse en regard de sa masse, d'une telle construction qui ne fait appel à aucun calcul, puisqu'il n'est même pas nécessaire d'envisager ce qu'elle sera pour la faire exister, il n'est besoin d'aucun modèle.) Le secret d'un métier réside donc dans la forme de logique qu'il m'est en ouvre. Le nôtre est celui des bâtisseurs, maîtres maçons et tailleurs de pierre, et nous appliquons les vertus de leur logique aux choses de la vie ainsi qu'à nous-mêmes dans le but d'évoluer de concert avec elles en taillant notre pierre.

V\ M\ j'ai dit.

3ième.  Le secret des maîtres maçons. T\ R\, notre secret en tant que V\ M\, c'est que nous sommes des imposteurs, que la parole est perdue, que nos mots sont faux, que nous peinons sang et eau pour édifier tant bien que mal un Temple à la gloire d'une Humanité qui nous déçoit dans sa forme brute ainsi que nous-mêmes, que nous ramons dans les ténèbres et qu'en fait,  nous ne sommes que des Pierres en mal en d'Amour ou de Perfection ! Quant-au reste, que nous est-il dit lorsque nous accédons à la maîtrise ? Qu'il n'y a pas de magie ou de recette miracle, que tout est dans la pratique du métier qui consiste à le remettre cent fois sur l'ouvrage, que notre secret est la persévérance. C'est à dire qu'il n'y a de maître que pour les non-maître et qu'entre nous ou vis à vis les uns des autres, nous ne sommes que des compagnons. Et par la même d'éternel apprenant pour ne pas dire des apprentis, puisque ce n'est plus de notre âge. Il n'y a donc de Maître que celui qui enseigne, qui transmet ! Et il n'y a de bon maître que celui qui ne sait pas - ou, qui sait qu'il ne sait pas, car il découvre du même temps qu'il donne à connaître, ce qui fait sa joie.

Très Respectable, j'ai dit !


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