Obédience : NC Loge : NC 28/10/2013


L'impact des nouvelles technologies de l'information et de communication sur la vie des personnes handicapées

La planche que j'ai le plaisir de tracer devant vous traite de l'impact des nouvelles technologies de l'information et de communication sur la vie des personnes handicapées et notamment les personnes non-voyantes. Elle s'appuie sur mon expérience personnelle d'une part, et sur mon expérience professionnelle d'autre part. J'ai travaillé quelques années dans le domaine des nouvelles technologies au ministère de l'industrie avant de partir à la commission européenne pour travailler pendant six ans sur ce qu'on appelle dans le jargon communautaire e-ioclusion c'est-à-dire l'intégration de tous dans la société de l'information ou de savoir et de connaissance et notamment l'intégration des deux catégories les plus exposées au risque de l'exclusion à savoir les personnes handicapées et les personnes âgées.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, je dois faire une remarque introductive sur la société de l'information et une autre sur la définition et la place des personnes handicapées dans nos sociétés.

Francis Bacon disait : savoir c'est pouvoir. Il ne se rendait probablement pas compte de toutes les implications de ce qu'il disait préfigurant bien l'avènement de la société de l'information et de savoir en gestation. Dans la société de l'information où nous sommes l'exercice de tout pouvoir nécessite le recours au savoir. Dans le passé, les rois s'entouraient souvent de savants et d'artistes par goÛt, sans que cela leur soit indispensable pour la conquÊte et le maintien du pouvoir.

Les handicapés, les non-voyants, les non-entendants, les disable en Aanglais, tous ces termes désignent des personnes privées d'un pouvoir. Dans le passé, la religion et la morale encourageaient tout le monde à leur porter assistance en faisant en leur lieu et place ce qu'elles ne pouvaient pas faire. Depuis quelques décennies, on assiste à l'émergence d'une démarche nouvelle. Elle consiste à donner aux personnes handicapées la possibilité d'agir par leurs propres moyens. Cette idée n'est pas tombée du ciel. Elle a été rendue possible par les progrès de la science. Encore à l'époque de Bacon, il n'était pas facile de transmettre le savoir à ceux qui ne voyaient pas ou n'entendaient pas. Cela est devenu chose possible grâce aux progrès du multimédia. Le même contenu peut être restitué en texte, son, image etc et donc atteindre les divers moyens de perception disponibles.

Les sceptiques, les conservateurs, les technophobes diront en quoi est-ce une priorité que de mettre entre les mains des personnes handicapées des gadgettes informatiques alors qu'elles ont tant d'autres problèmes ? on peut répondre que dans la société de l'information, le stockage, le traitement et la diffusion de l'information et du savoir constitue l'activité prédominante et omniprésente. Qui ne peut pas le faire, ne peut rien faire. Si les personnes handicapées ne pouvaient pas maÎtriser ces touvelles technologies, elles ne pourraient plus faire même ce qu'elles faisaient avec difficulté dans le passé. Mais si elles pouvaient manier ces technologies, elles pourraient entreprendre beaucoup d'activités desquelles elles étaient complètement exclues dans le passé. Donc, elles sont à un tournant dangereux : elles peuvent tout perdre ou alors gagner beaucoup.

D'où l'importance de l'einclusion ou l'insertion numérique dans presque tous les domaines de la vie personnelle et professionnelle. Je vais évoquer brièvement les plus importants : à savoir l'internet, le livre numérique, les télécommunications, les déplacements, la télévision et en conclusion les recherches sur la vision artificielle. Si j'ai le temps, je vous montrerai quelques gadgets bien utiles.

Internet

L'internet est le principal vecteur de l'information et du savoir. Les handicapés visuels peuvent naviguer sur internet à l'aide d'un lecteur d'écran. Il s'agit d'un logiciel qui fait l'interface entre l'unité centrale de l'ordinateur et l'écran en captant les données transmises r l'écran pour les transmettre soit à une synthèse vocale, soit à un afficheur braille. L'utilisateur non-voyant prend donc connaissance des pages web ou de l'écran en écoutant la voix de synthèse ou en lisant en braille éphémère le texte sur une plage tactile. Cette opération n'est possible que si le site est suffisamment accessible au lecteur d'écran.

Qqu'est-ce qu'un site accessible ?

Sur une page WEB, il y a différens objets : titres, liens, paragraphes, niveaux, cadres, formulaires, boutons etc... Ces différents objets sont identifiés au moment de la saisie de la page WEB par des codes spécifiques. Lorsque les codes appropriés ne sont pas utilisés, le lecteur d'écran n'est plus capable d'identifier et de distinguer ces objets les uns des autres et donc la navigation devient impossible ou très difficile. Les liens et les boutons doivent aussi être textuellement décrits et non pas signalés uniquement par une image. Les normes d'accessibilité sont définies par un organisme international appelés WAI. La plupart des sites ne les respectent pas ou peu. La loi de 2005 sur l'égalité des chances et la participation des personnes handicapées impose leur respect aux sites publics. Il en est de même dans certains autres pays européens. Mais la législation est loin d'être pleinement respectée.

Les livres accessibles :

Les livres accessibles aux personnes empêchées de lire les textes imprimés peuvent être en braille, en audio format MP3 ou DAISY, gros caractères, ou livres numériques. Une directive européenne autorise les Etats-membres à accorder une exception aux droits d'auteur aux bibliothèques spécialisées pour adapter des livres aux personnes handicapées. Mais cette exception relève du droit national, ce qui veut dire qu'un livre adapté dans un pays de l'UE ne peut pas être envoyé à un lecteur handicapé dans un autre pays. Les associations représentant des non-voyants surtout dans les pays en voie de développement où la production de livres adaptés est très limitée, se sont émues devant ces difficultés et ont déposé un projet de traité international accordant une exception généralisée des droits d'auteur aux personnes empêchées de lire l'imprimé. Une bataille juridique est toujours en cours entre les éditeurs farouchement opposés à cette initiative et les associations représentant des personnes empêchées de lire. En attendant l'issue des négociations, les éditeurs et les associations concernées sont tombées d'accord au niveau international et européen pour créer une structure volontaire favorisant la libre circulation des livres adaptés.

Les livres numériques dont le marché se développe actuellement sont souvent inaccessibles aux non-voyants soit en raison de la protection (DRm) ajoutée au livre contre les copies qui gêne le lecteur d'écran, soit en raison de l'inadaptation du format, soit parce que la plupart des liseuses n'ont pas été adaptées. Des progrès sont en cours pour résoudre ces problèmes. Le rapprochement engagé entre le format EPUB, utilisé en général pour les livres numériques destinés au grand public et le format DAISY utilisé par les bibliothèques pour non-voyants et malvoyants’est très prometteur et pourrait, s'il aboutissait, mettre pratiquement la grande majorité des publications à la portée des aveugles sans une adaptation préalable.

Les télécommunications :

Les problèmes les plus épineux se posent aux non-entendants. Ils ne peuvent pas parler au téléphone et ont besoin de communiquer soit par texte, soit avec la langue des signes via des interprètes dans des centres relais. Ces centres relais sont encore très rares. La transmission d'une conversation en langue des signes nécessite l'existence d'une connexion internet haut débit qui ne fait pas partie du service universel des télécommunications. La dernière version de la directive européenne relative au service universel autorise les autorités nationales à inclure le haut débit dans le bouquet de services obligatoires sur tout le territoire dans le cadre du service universel. Mais cela reste facultatif et rencontre une ferme opposition des opérateurs téléphoniques. Le problème le plus controversé et non encore résolu reste l'accès des sourds aux services d'urgence.

Pour les aveugles, des lecteurs d'écran ont été mis sur le marché qui s'installent sur certains modèles de téléphones mobiles et en vocalisent le menu. Seuls les Iphones sont adaptés dès l'achat car un lecteur d'écran appelé Voiceover est installé d'emblée sur tous les produits apple et les vocalise s'il est activé.

Aide aux déplacements :

Les nouvelles technologies peuvent assister les handicapés visuels dans leur déplacements. Il existe déjà certains navigateurs GPS qui sont vocalisés et adaptés à l'usage des aveugles. Cependant, la précision des signaux GPS est insuffisante pour un guidage efficace et par exemple pour permettre à un aveugle de repérer exactement l'entrée d'un bâtiment ou magasin. Le futur système européen Galileo ramènera la précision de ces signaux de 30 à 50 mètres à 2 ou 3 mètres et donc permettra un guidage précis. Son précurseur EGNOS assure déjà seulement en Europe une telle précision grâce à une correction des données GPS. Pour en profiter, il faut avoir un navigateur sensible aux signaux EGNOS. Les signaux GPS ne sont pas perceptibles à l'intérieur. De nombreuses expérimentations portent sur l'usage des émetteurs RFID pour guider les visiteurs pas seulement non-voyants à l'intérieur de ces labyrinthes qui sont les grands bâtiments, métros, gares et aéroports. Pour les handicapés mobiles, les recherches portent sur les fauteuils roulants capables de monter les marches et d'obéir à la pensée de l'utilisateur sans qu'aucun geste physique soit nécessaire. Il faut également signaler les recherches sur la robotique et les voitures à pilotage automatique dont Google a démontré récemment un prototype conduit par un aveugle.

La télévision :

L'accès aux émissions de télé pour les sourds requiert le sous-titrage des émissions. En France, les chaînes ayant une audience supérieure à 2% ont une obligation d'accessibilité. Le coût du sous-titrage pourrait fortement baisser grâce aux logiciels de sous-titrage automatique. Ils ne fonctionnent pas encore très bien. Les essais faits par la M6 avaient fait l'objet de critiques et de railleries dans la presse. Mais les progrès en la matière sont attendus et donc, on peut espérer faire le sous-titrage systématique de toutes les émissions dans l'avenir à un coût modique. L'accessibilité peut être également assurée par la traduction simultanée en langue des signes. Cette traduction coûte très chère et donc ne sera possible que sur une part bien limitée des émissions. Il n'existe pas encore de traducteur automatique en langue des signes.

L'accès des aveugles est possible grâce à l'audiodescription. Il s'agit d'un nouveau procédé consistant à insérer la voix d'un descripteur dans les moments de silence d'un film ou émission pour décrire les gestes et les scènes. L'audiodescription n'est pas automatisable et nécessite la rédaction d'un texte de description adapté et l'intervention d'un descripteur. Son coût moyen est estimé à 6 000 Euros par film. Mais les aveugles ont également besoin de poste de télé ou télécommande vocalisée pour pouvoir accéder au menu de leur télé et aux guides de programmation. Certains fabricants de télé comme panasonic se sont engagés à mettre sur le marché des téléviseurs accessibles aux aveugles.

Avec l'avènement de la télévision numérique, on dispose d'un espace plus important pour diffuser les données d'accessibilité. Mais ce potentiel fait l'objet d'une concurrence intense entre les acteurs notamment commerciaux au détriment de l'accessibilité.

Vision artificielle

Des recherches très prometteuses ont abouti à la mise sur le marché des rétines artificielles. Ces implans greffés sur l'oeil de certains aveugles leur ont permis de récupérer un minimum de vision. Il ne serait pas absurde d'espérer que d'ici une dizaine d'années ces implans puissent générer une vision complète voire supérieure à 10 sur 10.Au-delà de la communauté des aveugles, la vision artificielle intéresse les robotistes ainsi que les militaires pour la vision dans le noir et la vision supérieure à la normale. La fabrication des prothèses comme jambes et bras artificiels pourra sonner le glas du handicap au moins dans les pays développés. A ce moment, pas forcément si lointain que cela, vous pourrez oublier tout ce que je viens de dire.

Je vais vous montrer pour vous amuser un peu un détecteur de couleur, et un guide électronique du métro parisien.

J'ai dit V\ M\

K\ J\


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