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Marianne à La REPUBLIQUE

Je vais vous parler ce soir de la statue qui trône sur la place de la république à Paris
Cette place connue de tous comme stade d'entrainement permanent de nos forces syndicales  et lieu d'expression libre des intellectuels de tout bord, a longtemps été "décorée" par des œuvres graphiques d'artistes de rue, au point que la statue qui y siège avait simplement disparu, sous les graffitis, tags lumignons, tentes voire barnums.
Or en aout dernier un grand nettoyage a été réalisé.
La République apparait maintenant comme aux premiers jours de son installation en 1883, et, Oh surprise, les symboles maçonniques y sont très nombreux  et magnifiquement sculptés.


 
Petit rappel historique sur la place de la République :
 
Avant son ouverture, la place de la République correspondait au bastion de la porte du Temple dans l'enceinte de Charles V. Elle prendra sa forme actuelle au cours du XIXe siècle, particulièrement à la suite des travaux d'urbanisme d'Haussmann sous le Second Empire.
En 1811, elle est ornée de la fontaine du Château d'eau, œuvre de Pierre-Simon Girard, et prend le nom de place du Château-d'Eau. Cette fontaine est déplacée à La Villette en 1875.
 
En 1878, le conseil municipal de Paris, à majorité radi
cale
, propose l'érection d'un monument à la République dans l'est parisien ; la commande est effectuée en 1879.

La place portera désormais le nom de Place de la République.
 
L'administration de Paris est essentiellement du ressort du préfet de la Seine, nommé par le gouvernement français.
Le conseil de Paris tente de marquer son indépendance en demandant une République munie d'un bonnet phrygien, malgré l'interdiction officielle d'une telle représentation.
 
Le concours est remporté par les frères MORICE, Léopold pour la statuaire et Charles pour le socle.
 
Le monument fut d'abord érigé le 14 juillet 1880 avec un modèle en plâtre, remplacé par une statue de bronze à l'occasion de son inauguration le 14 juillet 1883.
 
A noter que :
-  le Président de la République était Jules GREVY, Franc-maçon qui a appartenu à la Loge d'Arras « La Constante Amitié », du Grand Orient de France.
- Le Président du Conseil était Jules FERRY, qui fut initié le 8 juillet 75 par la loge "la Clémente Amitié" au Grand Orient de France, en même temps que LITTRE.
 
Présentation générale :
 
L'œuvre est constituée d'une allégorie de la République en bronze de 9,5 m de hauteur, érigée sur un piédestal en pierre de 15,5 m de haut et environ 13 m de diamètre au niveau du sol.
 
Le piédestal comporte trois statues en pierre, allégories de La Liberté, de L'Égalité et de La Fraternité. Sous ces statues, tout autour du piédestal, un ensemble de douze hauts-reliefs en bronze représentent des dates marquantes de la République française.
Une statue de lion en bronze, symbolisant Le Suffrage universel, est placée au pied de la statue, sur quelques marches.
 
En détail:
 
La République, est l'œuvre de Léopold MORICE.
 
Elle représente Marianne, qui symbolise la France.
 
Marianne est le nom de la jeune femme dont Harpagon et son fils Cléante sont amoureux, dans la pièce de théâtre L'Avare, de Molière. Dans cette pièce datant de 1668, elle représente l'enjeu du libre choix contre le choix imposé par la force.
C'est un  prénom très répandu aux 18° et 19° siècles.
 
Réalisée en bronze, haute de 9.5 m, elle est vêtue d'une toge à l'antique, ceinte d'un baudrier  auquel est rattachée une courte épée et coiffée d'un bonnet phrygien.

 
Le bonnet phrygien est une coiffure, souvent de teinte rouge ou jaune, pouvant porter ou non une cocarde bleu-blanc-rouge
C'est un des symboles de la République française et l'un des attributs de Marianne.
Le bonnet phrygien tire sa symbolique de liberté de sa ressemblance avec le pileus (chapeau en latin) qui coiffait les esclaves affranchis de l'Empire romain, représentant leur libération.
Ce bonnet est repris en France au début de l'été 1790 comme symbole de la liberté et du civisme, d'où son nom de « bonnet de la liberté ». Le bonnet phrygien devient symbole de la Révolution française, mais il devient plus tard symbole de désobéissance sous la IIe république.
Ainsi que l'écrivait le marquis de Villette (12 juillet 1791) : « Cette coiffure est la couronne civique de l'homme libre et du Français régénéré »
Cette Marianne brandit dans sa main droite un rameau d'olivier, symbole de longévité et d'espérance, mais aussi symbole de paix et de réconciliation, et encore symbole de victoire, de force et de fidélité.
Sa main gauche soutient une planche évoquant les Tables de la Loi, mais,  un regard attentif permettra de lire "déclaration des droits de l'homme".
Ces droits que l'épée est prête à défendre.

Le piedestal
Le socle sur lequel repose la République, est en pierre ; il mesure 15,5 m de hauteur, et 13 m de diamètre. Il est l'œuvre de l'architecte Charles MORICE, le frère de Léopold, et est constitué de deux parties cylindriques distinctes :
- une partie inférieure, d'environ 4 m de haut et plus large, et une partie supérieure, plus étroite mais plus haute.
 Cette colonne, qui sert directement de piédestal à la République, est ornée sous les pieds de celle-ci, successivement, d'une guirlande de bronze qui en fait le tour, des armoiries de Paris et de l'inscription « À la gloire de la République Française - La ville de Paris - 1883 ».
- La colonne sert de dossier à trois statues de femmes en pierre, chacune allégorie d'un terme de la devise Liberté, Égalité, Fraternité :

La liberté
est assise au dessous et à la gauche de La République. Elle porte un flambeau dans la main gauche, (similaire à celui de la statue de la liberté de Bartholdi) tandis que sa main droite est posée sur son genou, tenant des fers brisés.
Elle est représentée tête nue.
En arrière-plan, un chêne est sculpté en relief dans la colonne, symbole de force et de solidité, mais aussi, chez les celtes l'emblème de l'hospitalité et l'équivalent d'un temple.

 
l'égalité
 se situe au dessous et à la droite de la république,
Elle a un air martial avec les attributs d’Athéna, déesse de la guerre : la cuirasse (égide) est sanglée par dessus sa robe et ses jupons et elle porte le casque typique de la déesse.
Elle tient dans sa main droite le drapeau de la République, dont la hampe est marquée des initiales « R.F. »,
On se souvient que le drapeau tricolore, composé du bleu et du rouge de la ville de Paris encadrant le blanc de la royauté, fut imposé par La FAYETTE à ses troupes le 17 juillet 89.
(La FAYETTE né Gilbert du MOTIER, marquis de La Fayette fut initié à Metz en 1775.)
L'égalité teint dans la gauche un niveau de charpentier, symbole d'égalité.
 
la fraternité
est un groupe statuaire, orienté dans la direction opposée à la République.
La Fraternité est représentée par une femme posant son regard bienveillant sur deux enfants qui apprennent à lire.
La Fraternité est vêtue d’une robe au corsage lacé de manière assez serrée ; elle est coiffée d'un foulard noué derrière la tête.
De sa main gauche elle déverse le contenu d'une corne d'abondance.
Une gerbe de blé en arrière plan et un bouquet évoquent la prospérité.

 
Les sièges de chacune des 3 allégories diffèrent selon la fonction :
- la liberté est assise sur un tronc de chêne,
- l'égalité siège sur un trône en pierre de type romain presque totalement dissimulé par sa robe
- enfin, le fauteuil de la fraternité est ouvragé (son aspect peut aussi évoquer les brancards d'une
jolie  charrue) il masque en partie une gerbe de blé et une roue  dentée, ce qui, pour moi évoque les 3 mondes : artisanal, agricole et industriel.
 
Deux médaillons marqués « Labor » (le travail) et « Pax » (la paix), ornés de faisceaux de licteur, se trouvent respectivement entre La Liberté et La Fraternité, et entre La Fraternité et L'Égalité.

À partir de la révolution française, le faisceau de licteur est utilisé comme symbole politique. Il évoque la Justice, la revendication d'une autorité légitime, la force collective, la république et parfois la révolution.  C'est l'autorité de l'état.
Ces devises Pax et Labor font leur apparition à la fin du 19è , et, à mon sens leur importance est primordiale.
En effet toute la statuaire jusque-là symbolise les droits des citoyens vis à vis de la nation. Mais des droits seuls, cela est incompatible ave le vivre ensemble. ll manque la notion de Devoirs qu'il est difficile de représenter :  la présentation des droits de l'homme sous la forme de tables de la loi peut y faire allusion, mais l'édifice se devait d'être laïque. Pax et Labor peuvent donc renvoyer le  citoyen à ses obligations, et s'il n'y adhère pas spontanément, les faisceaux de licteurs sont là pour rappeler que l'autorité sera présente pour les imposer.
 
Le Socle
Il  est circulaire, fermé par un fronton  orné d'un lion de bronze qui symbolise le courage et la force du peuple, protégeant l'urne du suffrage universel, et surmonté d'un bonnet phrygien rayonnant.
Le soubassement circulaire est composé de douze hauts reliefs, en bronze vert, sculptés par Jules DALOU, et retraçant les grandes heures de la république.

 
En partant de la liberté, on contemple successivement
- une représentation du serment du jeu de paume où figurent notamment BAILLY (membre de la loge les Neuf Sœurs à l'orient de Paris et l'Abbé GREGOIRE (membre de la loge l'Harmonie à l'orient de Paris)
- le 2° haut relief illustre la prise de la bastille le 14 juillet 1789 ;
- le suivant évoque la nuit du 4 aout 1789 ; au cours de laquelle les privilèges de l'Ancien Régime furent abolis par l'Assemblée Constituante ;
- vient ensuite une représentation du serment prêté par LA FAYETTE et TALLEYRAND le 14 juillet 1790, lors de la fête de la fédération ;
- sous la date du 11 juillet 1792, sont représentés les députés de la Convention adoptant le décret de la Patrie en Danger ;
- puis vient un épisode de la bataille de Valmy que les généraux DUMOURIEZ, BEUNONVILLE et KELLEMANN remportèrent conjointement le 20 sept 1792 ; tous ces généraux étaient maçons.
- sous la date du 21 septembre 1792, un scène représente la Convention proclamant la République et l'abolition de la monarchie ;
- la scène suivante, sous la date du 13 prairial an II, illustre le naufrage du vaisseau Le Vengeur coulé par la flotte ennemie après que des marins patriotes eurent refusé leur reddition ;
- un épisodes des Trois Glorieuses est figuré par le haut relief qui s'inscrit sous la date du 29 juillet 1830 ;
- sous celles du 4 mars 1848, on distingue Arago, proclamant la naissance de la II° République ;
- pour célébrer le 4 septembre 1870, un haut relief montre les acclamations de la foule devant le Parlement où fut instituée la III° République par Léon GAMBETTA et Jules FAVRE (membres des loges l'Encyclopédique et Les Chœurs Républicains à l'Orient de Toulouse);
- le 12° haut relief, daté du 14 juillet 1880, représente une scène de liesse populaire où l'on distingue la colonne de la place de la Bastille, en souvenir du jour de l'adoption de la loi arrêtant la date du 14 juillet comme fête nationale.

 
En conclusion :
Il est évident que la maçonnerie a largement contribué à l'érection de cette statue, mais, il est aussi évident que des profanes à la sensibilité aiguisée peuvent manipuler le symbole avec beaucoup de fineuse et de profondeur.
Le vrai symbole est donc universel.
 
Pour terminer, je pense que si  les usagés de cette place de la république pouvaient simplement percevoir et comprendre les deux devises Pax et Labor, et les intégrer, un équilibre entre droits et devoirs permettrait de rétablir l'harmonie dans la nation.

L\ F\

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