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La Mort d’Hiram, est-elle nécessaire ?

Introduction

Dès notre entrée en F\M\, nous nous accoutumons à l’idée de mort et de renaissance.
Dans notre première épreuve dans le cabinet de réflexion, la mort est déjà présente. Le crâne et le testament philosophique nous invitent déjà à nous  libérer de composantes profanes, matérielles, intellectuelles, qui parent notre ego.
Mais à côté de ces symboles de mort, nous retrouvons le coq annonciateur de la lumière qui nous rappelle que passer une certaine mort permettra sans doute de renaître à une vie nouvelle.

Et c’est ainsi que dès notre arrivée nous savons que la mort est nécessaire afin de mieux renaître.

1ère partie

Mais comment parler de la mort d’Hiram sans revenir à sa propre élévation.

Lors de cette cérémonie, j’entrai à reculons, où je m’éloignai de l’étoile : plus rien n’était plus à sa place.
Mais pire encore et chose horrible, on me soupçonnait d’être un mauvais Compagnon.
J’étais suspect et j’ai dû apporter la preuve de mon innocence et cela malgré que « Mes mains  fussent pures et mon tablier sans tache ».
Après cette vérification, une nouvelle épreuve m’attendait : l’ordalie (1). Par la marche du Compagnon, je me retrouvais dans l’équerre à la tête d’un corps et là, horreur, on me montrait le cadavre du meilleur de nos Frères « Hiram ».
Alors, pour preuve de mon innocence, par le «jugement de Dieu » on me fît enjamber le corps par une marche de trois pas en arc de cercle et traçant un volume. Remarquons que jusque là, tous nos pas étaient horizontaux, dans l’axe pour les apprentis, dans le plan pour les compagnons : inconscience, transgression première ou audace ?

La nouvelle dimension dans cette marche du maître appelle à la verticalisation de l’esprit ce qui nous est rappelé par la notion de « passer de l’équerre au compas ».

Après cette épreuve, le T\V\M\ commença le récit des circonstances du crime qui avait été commis.

Avant d’aller plus loin, arrêtons-nous sur cette notion de crime que je nomme plutôt assassinat. Assassin est de la famille de l’arabe hachich et de son dérivé hachuchiya « buveur de hachisch » nom donné aux membres d’une secte du XIè s. que leur chef fanatisait en leur faisant boire du hachisch et qui, assassinaient souvent des chefs chrétiens ou musulmans.
Et, en droit pénal, la définition d’assassinat est un homicide volontaire avec préméditation ou guet-apens.
Notre rituel nous donne l’information suivante :
« Les conspirateurs, au nombre de trois, se placèrent à chacune de ces portes, afin que si le Maître échappait à l’un il ne pût éviter les autres. »

Nous sommes bien dans une notion de guet-apens, donc d’assassinat.

Et là plusieurs questions se posent à moi :

Comment Hiram savait-il que ces trois Compagnons n’étaient pas encore prêts ?
Pourquoi ne pas avoir donné un faux mot de passe ?
Je crois aujourd’hui que les réponses à ces questions, nous viennent de l’acte même et de la menace faite par ces trois mauvais compagnons.

En effet, par cette attitude, ils représentent l’ignorance, le fanatisme et l’ambition, qui correspondent à des traits et à des pulsions de tout homme obstiné par des objectifs de puissance et de gloire, ou simplement imbu de satisfaction personnelle imméritée. Attitudes que nous cherchions à dominer pour vaincre notre propre nature et avancer sur le chemin de la vérité : « Que venons-nous faire ? Vaincre nos passions … »

Imaginons que les trois mauvais Compagnons aient obtenu le mot du Maître.
Ils auraient le savoir, mais est-ce suffisant ?
« Posséder » le savoir est certes nécessaire, mais non suffisant. Il nous faut aller plus loin pour  découvrir la connaissance, qui ne s’approprie ni par la force ni sans mérite.
Les trois mauvais Compagnons n’auraient donc créé que confusion, désordre et les travaux seraient très vite remplacés par le chaos.

Soudain, les deux surveillants m’ont renversé dans le tombeau après que j’ai reçu à mon tour les trois coups transgression ultime des trois mauvais Compagnon ;
Le 1er  coup avec la Règle qui pourrait symboliser la loi que le mauvais compagnon a transgressé (CORPS).
Le 2ème coup avec la Pince sur la nuque domicile de la transmission de la pensée (AME)
Le 3ème coup fatal avec le Maillet, sur le front, siège de l’intellect (ESPRIT)

Athanor

Je suis allongé dans ce tombeau ou devrais-je parler d’athanor ? En effet, c’est une véritable alchimie qui s’opère en nous.

« La chair quitte les os », nous dit le Second Surveillant qui essaie de soulever le corps par l’attouchement de l’apprenti. Mais impossible, l’état de putréfaction est déjà très avancé.

« Tout se désunit », nous dit le Premier Surveillant, qui à son tour tente de soulever le corps par l’attouchement du compagnon. Mais là encore, en vain. Il ne reste plus que l’os et le processus de dissolution est en œuvre.


Alors pour retrouver la verticalité le T.V.M. déclare : « Souvenons-nous, mes Frères, que seuls, nous ne pouvons rien. Aidez-moi ! » 
Et c’est ainsi que le T.V.M., avec l’aide des deux Surveillants et grâce aux cinq points parfaits de la Maîtrise, attire à lui le cadavre. Il lui souffle à voix basse « MOABON » le mot sacré substitué, Moab signifie en hébreu « issu du père » et ben « fils du père » . Il fait resurgir la vie et redonne corps à l’esprit.

Cette mise en pratique est l’exaltation symbolique du rassemblement de ce qui est épars; c’est  le début du coagula alchimique.

Mais j’était innocent, alors pourquoi me sacrifier à cette mort  ?
Comme toujours dans notre Rite, cette mort est nécessaire pour notre élévation vers l’Esprit.
Ainsi, par son sacrifice, le compagnon provoque une hiérophanie, c’est à dire une irruption du sacré dans le profane qui le transcende. Cette prise de conscience d’un passage à quelque chose de supérieur, permet de vaincre toute forme d’angoisse face à la mort. Ainsi « La vie est dans la mort et la mort est dans la vie »

Cette mort nous permet la maîtrise des contraires (vie et mort, victime et tortionnaire, les trois lumières et les trois mauvais compagnons).

Conclusion

Tout ce qui vient d’être dit permet-il de conclure que la mort d’Hiram, est-elle nécessaire ?
Oui, la mort d’Hiram me semble  nécessaire. Sans cette mort, cette mort acceptée, le seul voyage du suspect (l’enjambement du cadavre) ne pourrait se faire, ce dernier ne pouvait passer de l’état de suspect à celui d’Initié.
A celui d’Initié, car cette mort, de par les outils utilisés par les trois mauvais compagnons, s’effectue sur les trois plan de l’Etre : Corps – Ame - Esprit

La transgression primordiale fonde le mythe et rassemble les hommes dans la mémoire de la tradition dans un processus de filiation.
Le fils renaît dans le père et c’est ainsi que tous les Maîtres reprennent vie nouvelle en revivant le sacrifice d’Hiram.
Hiram l’homme fidèle au devoir, qui préfère mourir plutôt que faillir à sa tache.

J’ai dit T\V\M\

J\ N\
(1) « Le jugement de Dieu » (Dérivé du vieil anglais ordal qui signifie « jugement »)

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