Obédience : NC Loge : NC 04/2012

 

Ma foi maçonnique

« Chaque homme dans sa nuit, marche vers sa lumière » a écrit Julien GREEN.

Depuis que l’homme est doté de raison, il cherche à calmer son angoisse existentielle en tentant de comprendre les mystères attachés à tout ce qui le constitue et l’entoure.

Pour les matérialistes, comme pour certains de nos décideurs de la société civile, qui font flores en ces temps d’agitation politique, les hommes finiront grâce à la science pour les uns et grâce à l’inéluctable avancée de la médiocrité pour les autres, par se débarrasser de tout ce qui à leurs yeux constituent un complexe encombrant de mythologie, de religion et de philosophie, contenant des valeurs humanistes, bref, tout ce qui relève en fait de L’EXCEPTION.

Or, c’est justement TOUT CECI qui reste inaccessible à la science et qui s’explique en faisant intervenir une substance immatérielle nommée Esprit.

Substance qualifiée de supérieure à la matière en ce sens qu’elle ne fait pas intervenir les notions d’espace et de temps.

Voilà donc comment depuis des lustres, cohabitent et s’interpénètrent deux aspects de l’univers : esprit et matière.

Le propre de la spiritualité est d’affirmer que le monde sensible est l’envers du monde réel qui est lui, de nature spirituelle.

Pour les religions, c’est Dieu.

Pour nous c’est le GADELU, puisqu’en ce qui nous concerne, la croyance en un principe créateur telle que l’a formulé la Déclaration de Principes du Convent de Lausanne en son article premier, le 22 septembre 1875, ne se positionne pas en contradiction avec la Connaissance scientifique la plus avancée qui pour sa part, en expliquant le « comment » des phénomènes, n’apporte aucune réponse au « pourquoi » ?

Saint Augustin le confirme ainsi :

« Le mystère n’est pas ce que l’on ne peut comprendre, c’est ce que l’on aura jamais fini de comprendre »

Passer de cette dualité ESPRIT-MATIERE à l’unité que nous convoitons, relève d’un challenge que chacun d’entre nous s’applique à faire sien en Loge, par le travail, la persévérance et l’assiduité dans la permanence d’un questionnement individuel face au choc de nos différences.

Tentons un constat actuel, hors du lieu privilégié de ce Temple :

- un grand nombre de nos contemporains ont rompu avec le transcendantal
- ont fait du consumérisme et de l’oisiveté un projet
- ont installé l’envie en lieu et place du désir de l’essentiel
- ont assis le vulgaire sous la lampe et descendu l’exception à la cave
- se cultivent avec l’animateur CHOE comme mentor
- ont ôté au père et la mère réunis la logique naturelle du projet d’un enfant
- ont érigé en dogme la peur des différences.

Ils ont perdu le rêve d’une forme d’éternité, désacralisé la famille, la valeur de l’effort, la foi, pour instituer un rapport nouveau à la réussite passant par le pouvoir de consommer sans modération et la disponibilité à l’oisiveté.

Objectif week-end dans un premier temps, retraite dans un second, droit à la dépendance dans un troisième.

Pourtant, pour MIRCEA ELIADE : « L’homme se construit à partir du Sacré » et St LUC en IV verset 4 nous dit :

« L’homme ne se nourrit pas seulement de pain ».

Oswald WIRTH parle de : « Cette aspiration de l’intelligence humaine à pénétrer l’insondable mystère dont elle est entourée est une des principales voies traditionnelle de l’enseignement initiatique ».

C’est rechercher la vérité et savoir se contenter de n’en entrevoir qu’une facette, au moins celle du discernement qui nous évite la confusion des valeurs que le monde profane sait nous peindre sous le dogme de la tolérance de tout, c'est-à-dire le respect de rien.

Et le Renard du Petit Prince de nous dire : « On ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux » ;

Ce que nous traduisons par : « le visible n’est que la manifestation de l’invisible »

Platon confirmant cette assertion : « Aveugles sont ceux qui s’arrêtent aux choses matérielles et qui ne comprennent pas que seul l’invisible est réel ».

Nous connaissons tous ces dessins étonnants dénommés illusions optiques qui embrouillent nos cerveaux par des tracés que nous ne savons pas démêler.

Bien sûr, la franc maçonnerie n’est pas le seul chemin d’élévation spirituelle, ce n’est qu’un chemin d’enrichissement de soi et d’approfondissement de soi et de ses connaissances au travers d’initiations successives ayant pour but le perfectionnement individuel d’abord, la relation à autrui par l’amour ensuite, ces deux concepts constituant les fondations d’une action dans le monde profane.

Ainsi se définit le REAA selon une trilogie un peu lapidaire :

Connaissance, Amour et Action.

Ce rite qui laisse à chacun sa liberté d’interprétation, permet d’acquérir par le travail, le silence et ce qui réunit ces derniers, la méditation, des fragments de la Perfection.

Mesurez bien, Frères Apprentis, la puissance du silence auquel vous semblez contraints, pour un temps, car c’est cet espace de méditation qui vous apportera la sagesse de la parole, quand elle vous sera rendue.

Une fois assimilées les bases du cursus initiatique ici en Loge, le Franc Maçon « de sa libre et propre volonté » a le devoir alors, de poursuivre un chemin dépourvu de repères matériels, dans une humilité permanente, le respect du sacré, la volonté de promouvoir un monde de liberté et de justice.

Sans la tradition et le symbolisme, l’Ecossisme perdrait toute signification ?

Paul NAUDON écrit :

« La tradition conduit aujourd’hui les hommes qui pensent que la perfection, l’unité, l’absolu, le Principe auquel ils aspirent, qu’on l’appelle Dieu, le GADLU ou la Raison, se construit dans le devenir par la progression vers la Connaissance ».

Je prie les Frères qui me connaissent depuis de longues années de m’excuser de vous imposer encore une fois mes digressions sur l’emploi d’un vocabulaire ciselé et précis.

Mais, pour nos nouveaux Frères, je ne peux résister à mon refrain sur les mots « SAVOIR et CONNAISSANCE ».

Le Savoir, facilement accessible de nos jours sur Internet, n’est pas la somme des Connaissances humaines.

Si un fond de Savoir est nécessaire, ce n’est qu’au travers d’une Alchimie secrète dans le cœur et l’esprit de chacun de nous, que des parcelles de Connaissance peuvent parfois nous être accessibles.

Souvenez-vous du cabinet de réflexion où plusieurs symboles alchimiques étaient offerts à votre observation et réflexion.

Mais revenons à notre sujet.

Sans se soucier de son intérêt, le Franc Maçon s’engage à consacrer toute son énergie à la poursuite des buts qui sont fixés par l’Ordre, notamment le triomphe du bien sur le mal, de l’ordre sur l’anarchie, de la raison sur les préjugés, de la sagesse sur les passions, de la liberté d’expression sur la pensée unique, enfin le refus de soumission à tous les despotismes et dogmatismes.

C’est tout simplement ce qu’il y a de plus difficile et c’est tout simplement la définition de l’Art Royal exercé avec fierté.

Faire l’économie de cette difficulté nous dévierait du sens que nous donnons à notre démarche d’initié, celle de permettre à notre spiritualité spécifique d’agir sur notre comportement d’abord et de laisser déteindre alentour le désir d’élévation de l’homme.

L’initiation est la clé ouvrant cet espace possible d’une naissance à quelque chose de nouveau, pour autant que l’implication personnelle et assidue à la pratique du Rite soit un désir profond d’appartenir à ce privilège d’accepter d’abandonner pour grandir et le faire dans le partage d’une émotion.

Encore un petit refrain chronique chez moi, sur l’envie et le désir, que voulez vous, j’aime les mots et déteste qu’on les malmène.

L’envie d’être maçon pourrait se contenter d’une carte d’adhérent et de quelques décors vestimentaires un peu étranges ; cette envie, si elle n’est pas comblée rapidement devient une extraordinaire source de frustration qui fait les Maçons « à éclipse », ceux qu’on voit et qu’on voit moins et plus du tout.

Le désir d’être Maçon est un engagement profond sur le sens que l’on cherche à donner à toute sa vie dans le Temple et, assurément avec plus de difficultés, hors du Temple. Là, on ne joue plus à l’enfant gâté qui fera sa grosse colère si son Ego résiste. C’est un projet au long court qui doit nous permettre de nous regarder sereinement dans une glace au seuil de l’Orient Eternel. L’enjeu n’est plus de même nature !

D’éveils en élans, de doutes en lassitudes, nous cheminons vers un perpétuel devenir dont nous espérons une perfection comme salaire symbolique de nos efforts.

L’émotion, porte d’entrée de soi, chemin pavé du don de soi, vitrine de tout de soi, première couleur de l’initiation, dernier témoignage avant la porte de l’Orient Eternel et qui sait une autre route ?

Laquelle ? Celle de la conscience d’une mesure individuelle, certes orientée vers le haut, mais pétrie de l’humilité d’être limitée.

La seule orientation de notre quête se situant naturellement vers les zones à découvrir :

- du septentrion de notre réflexion,
- au midi de nos découvertes,
Et à l’orient de notre destin.

Que reste-t-il sinon la conversion du regard vers la voûte étoilée pour passer de « l’humble postulant plongé dans les ténèbres » au porteur de la Lumière de Jean ?

Henri TORT-NOUGES écrivait :

« Cet humanisme ne peut se concevoir sans le Principe Créateur, ce principe spirituel que nous nommons GADLU, car la maçonnerie correspond à la base métaphysique des Religions et à leur contenu ésotérique ».

Ce qui explique peut être la longue opposition des Eglises, notamment catholique, à la franc-maçonnerie, un temps excommuniée.

La Franc Maçonnerie gardant précieusement dans son cursus, le versant ésotérique de la tradition devenait ainsi une sorte de conservatoire de la mémoire de l’humanité.

Nul doute que cette concurrence devait être abattue par la publication de Bulles papales et de sanctions contre les adeptes.

Souffrances, peurs, opprobre, déversés sur notre petit peuple par ceux qui se disaient porteurs du message christique !

Péripéties de l’histoire me dira-t-on. Certes, mais aussi preuve apportée par nos furieux adversaires sur la justesse de notre position si dérangeante, en apparence, car nous prônons le rassemblement de ce qui est épars et non la division parmi les hommes.

Alors, maintenant, comment passer de ce temporel limité au partage de convictions communes, à l’Universel ?

De l’Universel, il nous appartient d’en dresser les plans en bons apprentis architectes. Ceux d’une construction orientée, selon les mots d’Henri TORT-NOUGES, orientée par le sens que nous donnons à une vie en quête de « complétude ».

Une vie, notre vie, puisque nous comprenons très vite qu’il ne s’agira toujours que de celle-ci, comprise comme un Univers complet, une entité singulière, partie d’un autre plurielle, l’ensemble constituant un TOUT pensant et agissant.

L’AUTRE n’est plus appréhendé comme un être dans sa différence d’état, mais dans sa dimension « en devenir », pièce agissante de cette « noosphère » définie par TEILLARD DE CHARDIN.

Cet esprit de fraternité dans la communion d’excellence EST une des constructions de notre Rite dans l’UNIVERSEL.

Il est une des racines Traditionnelles que le REAA, outil de réalisation intérieure spirituelle, enfonce dans les fondements religieux et philosophiques de l’humanité.

Et nous savons que la force de ces fondements repose pour l’essentiel dans la spécificité de ne reposer sur aucune révélation particulière et n’en reconnaître aucune. Ces fondamentaux ne s’appuient sur aucun dogme, mais n’en rejettent aucun.

Très probablement du fait que dès sa naissance, notre RITE a intégré l’humanisme occidental, lui-même issu de la convergence de la philosophie grecque, du droit romain et des préceptes du judéo-christianisme.

Et cela s’opère en sacralisant le Temple lors de chaque tenue en son temps tout aussi sacré.

Avoir la foi maçonnique, c’est transcender la contingence vulgaire de la matérialité temporelle comme spatiale par l’apprentissage opiniâtre du silence, de l’écoute, du renoncement, de la raison, de l’intuition, tous contenus dans ce qui se résume dans la CONNAISSANCE, pour vivre d’Amour, non contemplatif, mais d’action.

La foi de Paul, je cite :

« Celle de posséder ce que l’on espère et de connaître des réalités que l’on ne voit pas ».

Que pour le théiste ce soit Dieu
Que pour le spiritualiste ce soit la l’intelligence supérieure
Que pour l’agnostique ce soit la conscience collective de l’humanité
Que pour le matérialiste ce soit l’œuvre du hasard et de la nécessité

Tant mieux, si chacun témoigne d’une humilité qui ne renonce pas à la dignité !

« Découvrir en soi une parcelle de Lumière qui participe à la Lumière du monde » ! C’est ce que nous appelons travailler à la Gloire du GADLU.

Avec la Foi en la perfectibilité de l’homme, avec la ferme espérance dans l’avenir, nous devons nous libérer progressivement de nos insuffisances afin d’établir en nous et hors de nous cet équilibre difficile entre matériel et spirituel.

En Maçons engagés, nous agissons sous la directive de St LUC pour qui :

« Personne n’allume une lampe pour la mettre dans un endroit caché ou sous le boisseau, mais bien sur un support, afin que ceux qui entrent voient la Lumière » !

J’ai dit.

G\ D\


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