GODF | Loge : Fraternité cauchoise | Date : NC |
Vérité
et Justice
Le point de départ de
cette
planche est la réaction d’un frère sur
la décision rendue par la CSJM à
propos de la mixité le 8 avril 2010; Si je reconnais volontiers que
notre conseil a poussé « le bouchon un peu loin
», que cela ait donné prétexte
à crier « Haro sur le baudet »
soit! Mais la décision du
dernier
convent concernant l’ admission de femmes au GODF confirme
que l’ambiguïté
antérieure mettait en lumière qu’ une
disposition règlementaire ait pu être
détournée, dévoyée avec le
temps et érigée en dogme : <<pas de femmes au
GODF
>> Le second aspect, je cite pour
mémoire (extériorisation, politisation de
l’obédience, implication sociétale)
m’interroge, l’article premier de notre
constitution est dans sa formulation,
son écriture, sa pensée, au mieux un programme de
gouvernement à l’échelle de
l’humanité, au pire « un
brûlot révolutionnaire »
Je ne le connais pas par coeur,
j’en connais bien le sens, aujourd’hui les moyens
scientifiques, financiers et
humains peuvent faire vivre cette « utopie
». Dans « Anarchistes-Francs
Maçons et autres combattants de la liberté »
Edouard Boeglin note « Si
la Franc Maçonnerie n’est pas fidèle
à sa raison d’être, améliorer
l’homme et
la société, on ne voit pas très bien
ce qui justifierait son existence
» Nous sommes là au
coeur de la
problématique du titre, la vérité est
que cela est possible et la justice est
de mettre cela en oeuvre pour y aboutir. Alors qu’en est-il ? La Vérité
doit elle être au
service de la Justice Ou La Justice au service de la
Vérité ? On distingue les connaissances
innées, des connaissances acquises. Est inné tout
ce qui est inscrit dans notre
être même, tout ce qui est inhérent
à la nature d’un être et n’est
pas issu de
son expérience particulière. L
‘expérience, et l’acquis qui
en dépend est lui-même particulier, pouvant
changer d’un individu à un autre. On pourrait affirmer sans trop
se tromper que tous les principes moraux, qu’ils soient
religieux politiques ou
juridiques sont des universalités de destination et non des
universalités
d’origine c’est-à-dire inscrites dans
les esprits comme une loi naturelle!
C’est là toute leur fragilité! La Vérité
serait donc innée et
la Justice simplement un acquis ? La Vérité
est une idée, une
hypothèse, un élément de connaissance
ou une affirmation au discours vrai, une
connaissance conforme au réel. Et en cherchant à
connaître le
réel toujours mieux nous ne faisons qu’approcher
toujours plus prés ce concept
de vérité, cela rejoint notre quête
maçonnique et notre recherche de perfection
dans le savoir et la connaissance. La Pensée est cette
activité
qui nous permet de comprendre le réel en allant
au-delà de nos perceptions,
permettant- ainsi une conscience de ce réel plus large et
plus exacte. Platon dans la Caverne, Darwin,
Galilée ont contribués à ne pas
admettre sans comprendre. La société est codifiée dans tous ses aspects juridiques, chacun de nous attend dans ses rapports avec la loi que soit établie la Vérité et rendue la Justice. La notion de Justice revêt trois acceptions principales.La justice notion idée du droit naturel ou rationnel, donner à chacun ce qui lui est dû. La Justice vertu conforme à l’équité qui vise à transformer le droit selon l’exigence morale. La Justice institution qui s’intéresse aux règlements des conflits en s’appuyant sur le droit positif. L’idée de
Vérité pourrait,
elle, être définie comme étant le
caractère des opinions avec lesquelles on ne
peut être qu’en accord total. La
Vérité ainsi s’imposerait à
notre esprit et
serait le fondement d’un accord universel. Or la
Vérité s’exprime-t-elle
dans la Justice et la Justice se limite-t-elle à
l’expression de la Vérité ? La Vérité
et la Justice
sont-elles des notions séculières ou sont-elles
transcendantes ? De l’Antiquité à nos jours, la Vérité et la Justice ont naviguées entre ces deux pouvoirs que sont le temporel et le spirituel, de Marcille de Padoue à Machiavel de Luther à Richelieu, l’opportunisme sera pratiqué pour tirer parti des circonstances, à les utiliser au mieux en transigeant avec les principes qu’ils soient moraux ou juridiques. Les différents régimes monarchiques pourront ainsi justifier leur pouvoir absolu et imposer leurs notions de Vérité et de Justice en fonction des intérêts du moment.La révolution française ne fera que changer les détenteurs du pouvoir souverain. Dès lors la Vérité est celle que l’on veut qu’elle soit en fonction des circonstances et la Justice n’est autre qu’un moyen de conservation du pouvoir. Je développerais trois exemples choisis de façon arbitraire car il s’agit du maintien de l’hégémonie de l’église, de l’état, du patronat. Né en 1564
à Pise, Galilée fut
un pionnier des mathématiques appliquées, de la
physique et de l’astronomie.
Condamné à la prison à vie par
l’inquisition pour avoir défendu et
enseigné les
théories de Copernic, il mourut à Florence chez
lui en 1642. Le jugement de
l’Inquisition ne fut annulé qu’en 1992 ! La découverte et
l’emploi du
raisonnement scientifique par Galilée est une des
conquêtes les plus
importantes dans l’histoire de la pensée humaine.
La contribution de Galilée a
détruit la vue intuitive et l’a
remplacée par une vue nouvelle. Il nous donne la clé
pour
sortir de la caverne de Platon ! La deuxième affaire
est celle
d’ Alfred Dreyfrus accusé d’espionnage
et de trahison au profit de l’
Allemagne, il est condamné au bagne à
perpétuité en 1894. Deux ans après,
l’incohérence
de cette condamnation; Esterhazy le vrai coupable
désigné, la grande muette
persiste, une partie de la classe politique dont le
président du Sénat Auguste
Scheurer-Kestner alerté par Mathieu Dreyfus, Georges
Clémenceau, Emile Zola
donnent une dimension nationale à l’injustice.
Dreyfus est rejugé, un nouveau
conseil de guerre le condamne à 10 ans de travaux
forcés, après quatre années
de déportation et une grâce
présidentielle, ce n’est qu’en 1906 que
son
innocence est officiellement reconnue. Le dernier cas, m’est
plus
proche car pendant longtemps j’ai participé
à l’anniversaire de cette ignominie
dans les locaux du Cercle Franklin. Les dockers charbonniers sont en
grève
contre une baisse des salaires et je crois une mécanisation
de leur travail. La Compagnie
Générale
Transatlantique considérant que la grève a trop
duré, prend le prétexte d’une
rixe où un contremaître Louis Dongé est
tué, pour acheter des témoins, qui
diront que le syndicat C.G.T dont Jules Durand est le tout jeune
secrétaire à
voté la mort du contremaître. Jules est arrêté le 11 septembre 1910 sous le chef d’inculpation d’incitation et complicité de meurtre sur la personne de Louis Dongé. Il est le seul, n’étant même pas présent sur le lieu de l’assassinat, à être condamné à mort, les vrais coupables, trois sur quatre ont des peines de prison. Pris d’une crise de nerfs à la fin du procès, Jules Durand commence à perdre la raison.A la suite du procès, les manifestations, les mouvements gagnent la France, l’Angleterre et les Etats-Unis. Devant l’ampleur de la mobilisation, sa peine est commuée en sept ans de réclusion. La protestation et
l’action ne
perdant pas leurs forces il est finalement libéré
en 1911, pour être transféré
à l’asile de Sotteville où il mourra le
20 Février 1926. Il avait une femme et
deux enfants. Pour l’anecdote, le
« Havre
Eclair » journal local qui avait
désigné Durand comme un responsable,
sinon le coupable, fut interdit de parution à la fin de la
seconde guerre
mondiale pour « collaboration »
avec l’occupant nazi. A ce stade de ma planche, je me
demande si elle n’est pas savonnée car mon
humanisme, ma volonté de partager
mes interrogations avec mes frères ne peuvent seuls
dépasser les limites du
pétrin où je me suis fourré. Est- il toujours raisonnable de s’abriter derrière le bouclier de l’article premier de notre constitution ?. Mais il est un fait incontournable , l’oubli de l’utopie a un prix: la résignation au << monde comme il va >> Dés lors comment déterminer le vrai du faux, le juste de l’injuste ? Pourquoi certains se lèvent-ils face à l’oppression ? Des résistants au
régime nazi
dés 1933 aux petits moines Birmans aujourd’hui.
Quelle inspiration soudaine
guide ces personnes à risquer leurs vies? L’ancien testament nous
précise
que la recherche de la vérité est aussi
nécessaire car son existence est
immuable et certaine. Selon la version
théologique
juive des cinq premier livres de la Bible, Dieu enjoint aux enfants
d’Israël de
se « confectionner une frange blanche aux coins de
leurs vêtements, ils
placeront dessus un fil couleur azur »
Par cette symbolique, il est
démontré la nécessité
d’une recherche permanente de la
vérité. Serait-ce l’origine de
notre
tablier de maître ? Cette force de
résistance face
à la réalité se retrouve dans
l’analyse des finalités morales et spirituelles
du pouvoir du souverain par Thomas d’Aquin. Il affirme qu’il
devient
méritoire de renverser les tyrans dont les lois bafouent
l’ordre divin. Je cite: « S’il
est du
droit d’une multitude de se donner un roi, cette multitude
peut sans injustice destituer
le roi qu’elle a institué ou refréner
son pouvoir, s’il abuse tyranniquement du
pouvoir royal » . Certains diront là,
notre frère
s’accommode bien du droit divin quand ça
l’arrange mais c’est aussi la preuve
que je ne suis pas sectaire quand il s’agit simplement de
vérité, de justice et
de démocratie. Critique
éveillée et lucide sur
nos actes, quête d’un absolu qui nous
dépasse, devoir de résistance,
Vérité et
Justice peuvent être affirmées comme des notions
transcendantes. Cette quête de la
Vérité et de
la Justice représente tout à la fois un pouvoir
et une vertu. La Justice immanente devrait
avoir pour finalité le rétablissement
d’un équilibre rompu et non la
satisfaction d’appétits
éphémères. Elle ne pourra atteindre cette finalité que par l’interrogation perpétuelle de la Vérité et si l’on sait l’accepter, guider nos actions vers le bon et le beau. J’ai dit Vénérable MaîtreJ\M\ T\ |
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