Obédience : NC Loge : NC 23/02/2004


Le Cercle

Apprentie, je ne savais ni lire ni écrire. J’étais attentive, soumise et je taillais ma pierre brute.

Compagnonne, je sortais de ma léthargie contemplative, tel un papillon naissant pour aller explorer l’univers. Univers géométrique, univers de l’être, macrocosme et microcosme et au milieu de l’étoile flamboyante, j’ai découvert la lettre G.

L’élévation à la maîtrise fut pour moi comme un recommencement.
Elle fut aussi un grand moment d’humilité et beaucoup d’interrogation.

Humilité devant les nouveaux outils. Surtout devant la planche à tracer qui m’a fascinée comme la page blanche de l’écrivain et avec le compas, j’ai tracé avec force et vigueur, un cercle aux dimensions de ma volonté.

Apprentie et Compagnonne, des outils m’étaient confiés pour accomplir des travaux : tout était gradué et graduel.

Maintenant que je suis maîtresse, je doit participer à l’élaboration du plan.  

Voyons, une planche sur le cercle…, oui, mais par où la commencer.

Par le centre, peut-être ?

Je crois aussi qu’il serait intéressant de se questionner sur l’outil qui sert à tracer le cercle en l’occurrence le compas et la symbolique qui y est rattachée, notamment par rapport à l’équerre.

Par exemple, pour marquer un centre, on trace une croix. La Croix, alliance subtile de la perpendiculaire et du niveau. La croix qui forme 4 angles rappelant les 4 angles du carré, le carré qui rappelle la pierre cubique, le carré dans lequel s’inscrit le cercle afin de définir la quadrature, problème insoluble qui ne passera que par la résolution du nombre PI = 3.14. 

En observant le cercle que je viens de tracer, je constate qu’il est une figure parfaite dans un plan, car rien ne dépasse.
Ce cercle délimite un intérieur et un extérieur : l’intérieur est connaissable, l’extérieur est inconnaissable.
Mais qu’est ce donc que cette circonférence qui définit un cercle ?

C’est un tracé déterminé en référence à un point central….et j’aurais tendance à penser que ce point n’est autre que le centre de moi-même, mon vrai moi…

Ce tracé dont le début coïncide avec la fin….ce tracé pour être perceptible par mes sens et reconnu par mon cerveau doit présenter un contraste de ton par rapport au plan. Il doit être plus sombre ou clair que le plan, sinon j’aurais l’impression qu’il n’existe pas, qu’il ne délimite rien, qu’il n’y a ni intérieur, ni extérieur car j’ai vraiment besoin de me sentir délimité, cela me sécurise et me donne l’impression d’exister.

Et dire que ce cercle est la projection d’une sphère sur le plan, voilà tout à coup que la circonférence s‘accroît, alors, par la même occasion, le domaine du connaissable s’accroît, mais c’est tellement ridicule devant l’extérieur qui lui est infini…

J’imagine alors que la circonférence, là devienne maintenant infinie… il n’y a plus rien…ou bien il y a tout ? 
  
Il est vrai que la vérité se trouve au centre du cercle, l’endroit où toute sœur doit se trouver, pour chercher la connaissance, mais le cercle, qui est-il ? que représente-t-il : la loge, le temple de Salomon, son intérieur ?

N’estime-t-on pas que le cercle est un symbole de perfection ? Dans cette hypothèse, en tracer un n’est pas un acte anodin.

Au 3e degré, on dit que la sœur maçonne est située au centre du cercle, dans la chambre du milieu ; mais pourquoi ? Placée ainsi, elle est sans aucun doute protégée des influences du monde profane ; c’est vrai que placée ainsi, elle est l’alliance de l’exotérique et de l’ésotérique et elle fait vivre sa sagesse la plus profonde au cœur même de l’espace symbolique dédié à la spiritualité.  

Le cercle symbole fondamental du grade de la maîtrise est celui qui explore le mieux la profondeur de notre démarche initiatique.
Auparavant, je l’évoquais dans un sens d’enfermement, d’isolement de manière paradoxale, mais aujourd’hui, je le présenterais plus comme un symbole d’ouverture, d’exaltation, de la créativité.

Sa forme évoque aussi l’idée du mouvement perpétuel du centre vers la circonférence et inversement. J’imagine alors cet incessant va et vient qui me rappelle que du mouvement est née la création. Il nous renvoie à la terre, au soleil, au ciel, à la lune…

Un jour, en un lieu précis de la terre, a surgi la vie et lorsqu’elle a subi l’épreuve du temps, elle retourne à la terre ; c’est un rythme, un cycle, c’est le mouvement du cercle avec les notions d’espace et du temps, toujours liés.

Le cercle devient alors commencement et fin.

Le cercle, c’est l’alpha et l’Oméga,
Le cercle est l’Un dans le Tout, 
Le cercle est l’Unique dans l’Unifié
Le cercle est l’Unifié dans l’Universel et enfin dans l’Unification.

Je pourrais aller très loin dans cette aventure, cependant, je reviens à l‘objet du sujet qui m’intéresse : aller à la recherche du centre du cercle que l’on dit être partout et dont la circonférence est nulle part.  

Le cercle toujours synonyme d’harmonie nous renvoie à l’idée d’ordre. Il correspond au ciel, au monde spirituel auquel chaque sœur tente d’accéder, degré par degré, en écartant les branches du compas et en le libérant peu à peu.

C’est du cercle que naît la spirale et dans le monde chaotique dans lequel nous vivons, conscientes du chemin que nous avons à parcourir et du but recherché, nous devrons sans cesse, faire et refaire le trajet du centre vers l’extérieur, puis de l’extérieur au centre. Plus nous avançons, sur la voie initiatique et plus cette quête nous interpellera.

La position du centre est statique, cependant il nous mène vers la circonférence afin d’y apporter toute l’énergie prise en son sein. Il est centrifuge, foyer d’où part le mouvement de l’intérieur vers l’extérieur, mais c’est aussi un lieu de transformation avec une force centripète d’où se dégage une double énergie.

Comme le cercle, le centre nous renvoie à nous-mêmes. Notre histoire nous situe au centre de celui-ci où se réunissent toutes les sœurs, au milieu de la loge où règne l’égrégore, au centre de notre idéal maçonnique propre à chacune de nous. Ce centre qui est création est aussi une concentration d’énergies :

il est unique, il unit, il centralise, il rassemble, il unifie, mais aussi, il fait rejaillir cette énergie qui nous est vitale, si nécessaire à l’amélioration de notre Etre, indispensable au devenir de l‘Humanité et en nourrissant notre conscience d’Amour et d’attention, celle ci deviendra un flambeau vivant qui mène à ce centre.   

Maintenant, je voudrais parler du point et je dirais donc que celui-ci est le principe à partir duquel tout peut naître et qu’il est également le terme du retour. Il est le germe qui contient la puissance créatrice. Au sein de la franc maçonnerie, il est chacun de nous au moment de la chaîne d’union.

Ce point en devenant centre accroît ses potentialités symboliques. Il est un foyer d’intensité, un lien qui assure une unité entre toutes. Ainsi chacune de nous doit-elle travailler sur elle-même sans relâche pour devenir un centre, une source de rayonnement des valeurs de la vie. Pour parvenir à ce résultat, il doit atteindre la sérénité intérieure. C’est seulement après ce travail, après ce recentrage de soi, qu’il pourra rayonner vers l’extérieur.  

L’équerre et le compas :

Je ne pouvais ne pas mentionner dans ma planche les instruments qui m’ont été utiles pour dessiner ce cercle :
L’équerre et le compas sont des outils anciens que l’on applique figurativement à la vie pour marcher dans les voies de la Sagesse et posés sur le livre sacré, ils sont les témoins de tous nos serments.

Ce ne sont que des instruments de géométrie et d’architecture, mais pour nous Francs Maçonnes, nous en avons une signification symbolique.

En effet, l’équerre est fixe et sert à tracer le carré ; elle permet de passer de la pierre brute à la pierre cubique et par là de pouvoir construire un édifice solide et harmonieux : elle rend droit ce qui est oblique. C’est le symbole de la Loi morale

Le compas lui, présente une signification symbolique apparentée à celle de l’équerre, mais différente et complémentaire. Mobile, il est le symbole de l’esprit et son usage est de marquer les limites de l’édifice et de chacune de ses parties et d’en fixer les proportions.

Il symbolise aussi les limites que la sœur maîtresse doit s’imposer à elle-même dans ses désirs et sa conduite. Le travail du compas est à un niveau plus élevé, puisqu’il est détaché de la matière alors que l’équerre est plus engagée dans celle-ci.

La matière est une réalité, elle est essentiellement une force obscure, inconnue qui nous résiste et elle n’a sens que pour une intelligence qui la pense et une volonté qui la maîtrise.
 
Le passage de l’équerre au compas signifie donc le passage d’une étape à une autre de l’initiation maçonnique et l’on pressent donc que cet assemblage est vraiment essentiel.

Et maintenant, j’en arrive à la conclusion dans laquelle je voudrais simplement citer deux petites phrases qui me paraissent essentielles :

Le monde est rond et qui ne sait nager va au fond….
et
Le vide que nous vivons ne peut être rempli par des mots, mais par un engagement.

J’ai dit.

M\H\ C\

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