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Les métaux et le silence

Cette 1ère phrase du rituel, nous l’entendons 2 fois par mois. Cette phrase est dite par l’expert sur les parvis. Elle nous demande deux choses très importantes, de nous dépouiller de nos métaux du monde profane et de prêter attention donc de faire silence.

Ce sont ces deux aspects que je vais essayer de traiter. Ces deux parties sont complémentaires pour moi, l’une ne vas pas sans l’autre. Ici tout est symbole et tout commence par le silence. Même la première demande de déposer les métaux.

Lorsque j’ai frappé à la porte du temple avant mon initiation, l’un de vous m’a tendu un panier en me demandant d’y déposer tous les objets métalliques que je portais sur moi. J’y versais quelques pièces, mes bijoux et même mes lunettes.

On peut dire alors que j’étais libre puisque dépouillée de mes métaux. On peut dire aussi que j’avais abandonné mes idées préconçues. C’est ce que j’ai appris plus tard. Sur le moment la seule question que je me posais était que sans lunette ne je pourrais pas voir grand-chose. Deux secondes plus tard la question ne se posait plus puisque j’avais un bandeau sur les yeux.

Mes premiers pas avec vous ont été un voyage. Du chaos à la paix. De l’ordre au désordre. De l’obscurité à la lumière. Le silence était bien le fils conducteur. C’est grâce à lui que je suis sortie du cabinet de réflexion, et c’est avec lui que ce voyage s’est terminé avant de recevoir la lumière.

Les métaux ont toujours constitué pour l’homme des symboles de puissance ou de richesse. Maîtriser le bronze ou le fer c’était posséder des armes et donc le pouvoir. Détenir l’or c’était accéder à la richesse.

Pourquoi faut-il donc les abandonner. Les métaux nous isolent et nous séparent des autres. Ce sont eux qui marquent nos différences. Ces différences qui peuvent susciter l’envie ou le dédain – cela dépend ou l’on se trouve. L’abandon des métaux représente l’entrée dans la simplicité. Je prends pour l’exemple une phrase du Christ qui dit « que celui qui veut me suivre abandonne ses biens, les vende et les distribue aux pauvres ».

Personne en loge nous demande d’aller jusque là. Mais oublions ce qui dans le monde profane fait que l’homme a soif de reconnaissance, de distinction. Nous espérons briller, avoir une réputation, sortir de la masse. En un mot avoir ce que les autres n’ont pas. Oublions ceci et essayons de mettre en pratique « connais toi toi-même et tu connaîtras l’univers et les dieux ». Se connaître soi-même, voici le grand travail. Comment se connaître soi même, peut être en oubliant ce que nous sommes. Peut être en disant cette simple phrase JE NE SAIS NI LIRE NI ECRIRE.

Dans le monde profane, nous vivons submergés de bruits, de musiques tonitruantes, de bavardages et de cancans inutiles, tout ceci en vrac, nous agresse, nous affaiblit chaque jour. ce silence serait il le trésor caché que nous recherchons aux quatre coins du monde, alors qu'il se trouve au fond de nous même. Tout au long de notre vie nous devons tenir un rythme de silence intérieur, une manière approfondie et d’élargir notre cœur. Le silence est une promesse que l’on se fait à soi-même d’abord, à la loge ensuite. C’est donc une épreuve, mais c’est aussi le garant du secret de nos travaux.

En tant qu’éternels apprentis, le silence devient notre compagnon favori, il est vivant, créatif et enrichissant. Le silence est une discipline, une rigueur. C’est un face à face avec soi même. Le silence est une ascension, et nous apprenons sur le chemin la concentration et le détachement. C’est une attention à se construire harmonieusement. Se mettre au silence c’est abandonner ses métaux, pour développer l’écoute intérieure.

Le silence est une mise à nu de nous-mêmes. C’est un apprentissage de la solitude. Nous avons été conçus dans le monde du silence dans le sein de notre mère. Pendant notre gestation nous avons progressivement découvert les bruits et les sons qui nous parvenaient. Ce n’est qu’à la naissance que nous avons rompu le silence par le premier cri de la vie. A notre mort, nous retournerons au silence, dans la solitude.

Le silence est le premier pas dans la voie initiatique. Il est la force cachée qui nous permet de surmonter les difficultés tout au long de cette voie. C’est par l’écoute que nous entrons dans le silence et devenons responsables de nous mêmes. Et pour nous initiées il est primordial que nous ayant entendu au plus profond de notre être la voix de la tradition afin de pouvoir transmettre à notre tour.

Cette écoute ne peut être parfaite sans l’abandon de nos métaux. Faire taire tout ce tumulte, ce vacarme intérieur qui nous rend sourd et aveugle jusqu'à rendre une présence aussi inutile qu’une véritable absence. Comment espérer atteindre l’ordre et l’harmonie si l’on ne dépasse pas le niveau de nos passions. Comment espérer tailler notre pierre si on ne commence pas à regarder nos défauts. Et seul le silence nous permet ce regard.

Apprentis nous le sommes toute notre vie. Les degrés acquis par la suite ne nous font pas quitter de degré, mais ils s’y ajoutent. Le silence nous concerne tous, car il est l’épine dorsale de notre démarche. Il en est le moteur. Se mettre au silence, c’est se mettre en état de réceptivité totale. Nous nous trouvons sous le fils à plomb, dans la verticalité, en relation avec l’unité, le divin.

Je finirais par l’évocation d’un concert, tout commence par le chaos, le 1er violon donne le la et chacun cherche l’accord juste et parfait. Cette dissonance est bien désagréable. Etape pourtant indispensable à l’accomplissement du chef d’œuvre.

Lorsque le silence se fait le chef d’orchestre apparaît. Il lève sa baguette et l’harmonie commence.

Aucune place pour les métaux sur cette scène. Les musiciens sont plongés dans le silence le plus parfait et semblent ne former qu’un seul être. Le lien qui les uni est presque visible. Et il nous dit, homme, vieil homme tais toi. Nulle place ici pour autre chose que pour le silence et la lumière. L’orchestre en pleine communion, unissant en somme la sagesse, la force et la beauté crée de la lumière.

Le silence a fait place à la lumière et la lumière a imposé le silence.

J’ai dit.

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