Obédience : NC Loge : NC 28/05/2013

 

Pouvons-nous encore tous vivre en conservant notre dignité ?

C’est en abordant l’équinoxe de printemps de l’année 2013 que l’existence de la pierre brute qui se tient face à vous, s’est trouvée ébréchée, lézardée, prête à rompre sous les coups mal contrôlés du maillet sur le ciseau.

Seraient-ce les conséquences des vents glacials et tempétueux sur nos colonnes, ou tout simplement le parcours inévitable d’un être face à ses doutes, face à ses antonymies, entre jour et nuit, entre blanc et noir, entre abjection et dignité, à mi chemin de son existence, à l’instant même où le balancement de l’horloge interne frappe d’un compte à rebours inéluctable et irréversible.

Enveloppé dans un linceul mélancolique et vaporeux, mes insomnies nocturnes m’ont fait dériver et échouer sur les berges de « Dernières Paroles » de Sylvia Plath, telle une coque vide sur un torrent d’amertume.

L’éphémère sorti du centre de la terre, virevolte en silence entre les colonnes et glisse sur les facettes aiguisées des jugements acerbes. Ses ailes manquent de griller à plusieurs reprises, malgré leur Force, leur Sagesse et leur Beauté. Les reflets bienveillants et chaleureux des maillons de purs métaux rencontrés de par les sentiers, sont là pour redonner vie à l’embryon d’enthousiasme, pour perpétuer au dehors la Force et la Vigueur du souffle universel de cet effet papillon.

Perdu au coeur d’une cellule du micro-cosmos, ses ailes s’entrechoquent, malgré un vol régulier et constant ou l’endurance rime avec assiduité. L’éphémère dit, libre et de bonnes moeurs perd de vue son serment et se retrouve englouti par les courants porteurs, comme un vulgaire plancton aérien.

Englué dans ses certitudes, et trépané par le vice, il dérive de son chemin. Seul face à lui-même, il se voit flou dans les reflets du miroir du « non-être ». Il ne distingue plus ses contours et s’éloignent du chemin qu’il s’était tracé.

Il prendra alors conscience de ses actes, mais ce sera trop tard, il aura l’âge, et il sera l’heure. Les 3 coups de maillet retentiront.

Comme le précisait Irène Mainguy, un maître soufi considérait que : « le non-être est un miroir, le monde une image, et l’homme est l’oeil de l’image dans laquelle la personne est cachée ».

Alors suis-je l’oeil de l’image et Lui la lumière de l’oeil ?

Peut-on croire un seul instant que perdu dans cette nuée d’éphémères, il est voué à disparaître. Sa courte vie ne dure que 3 ans, et bientôt il disparaitra par son orgueil et ses faiblesses. Peut être le point de départ d’une fin toute annoncée, seul ceux qui sont à venir pourront le dire.

Epuré par un génocide transgénique et aveugle, instigué par l’Homme avec un grand H, capable du meilleur comme du pire. Lui qui s’est battu pour défendre des valeurs morales et rappeler l’égalité et la liberté entre tous, dès la naissance.

Faut-il y voir un soupçon d’incrédulité ?

Le destin de l’Humanité est-il de disparaître définitivement ? Faut-il attendre que phtalates et autres perturbateurs endocriniens nous rongent de l’intérieur, et que nos sens se désagrègent les uns après les autres, comme le retrace « Perfect Sense » de David MacKenzie, pour enfin agir et
voir : « Qui, comment et où » ? Mais il sera trop tard, il aura l’âge, et il sera l’heure. Dans « Libres Paroles Maçonniques », le frère Henri Caillavet précisait en 2009 : « le Franc-Maçon est toujours un contestataire et parfois un rebelle moral, social et politique. Nous, Francs-Maçons, nous savons que l’utopie deviendra une réalité, que notre recherche par le travail permet de mieux comprendre les évènements, de les mettre en perspectives et de relativiser la hiérarchie des valeurs actuelles. Nous sommes ainsi à l’avant-garde du progrès. En cela, nous sommes des progressistes ».

Ma S\ et mes FF\, sommes-nous des progressistes ? Qu’attendons-nous pour agir au dehors, pour changer le futur, pour changer le devenir de nos enfants et de nos petits enfants. « No Future » disait la génération Punk des années 70. Avait-elle appréhendé un quelconque effluve de lucidité sur le devenir de l’Humanité, entre indignation et vulgarité d’une jeunesse désoeuvrée ?

Que faut-il attendre pour agir ? Que la terre mère soit devenue stérile et irradiée, que les relans acides et nauséabonds infiltrent leur poison au coeur des jeunes pousses prêtent à éclore, que le souffle d’air soit devenu un soupir, notre dernier. Mais il sera trop tard, nous auront l’âge, et il sera l’heure.

Qu’à t’il fallu en 1871 pour que nos frères, plantent leurs bannières sur les fortifications de la Porte Maillot, et montent au combat pour défendre les principes de la République, la liberté politique et associative, la justice sociale, la laïcité, l’éducation…

Ne scandaient-ils pas haut et fort ces valeurs, ainsi dévoilés au monde profane, à leurs risques et périls ?

L’institution maçonnique n’a telle pas fait d’eux des hommes dont la fraternité était devenue leur vertu et l’humilité leur règle ?

Serait-ce un paradoxe ?

« Humilité » trouve son origine dans le mot latin « humus » qui signifie « terre ».

Cette humilité n’est pas une qualité innée chez l’Homme, il est communément considéré qu’elle s’acquiert avec le temps, le vécu et qu’elle va de pair avec une maturité affective et spirituelle. Elle s’apparente à une prise de conscience de sa condition et de sa place au milieu des autres et de l’univers. D’une autocritique de sa dignité face aux regards des autres.

Ne soyons pas des antagonistes, assumons nos actes et nos pensées.
Alors avons-nous pris conscience de notre place sur cette terre nourricière, ne la voyons-nous pas qui se dérobe sous nos pieds, par nos attaques répétées et inconsidérées ?
Faut-il être rationaliste et athée pour avoir les yeux grands ouverts sur le monde ?
Avons-nous pris conscience de la lâcheté de notre société ?
Dois-je recevoir pour donner, et culpabiliser pour plaider ?
Suis-je totalement aveugle ou irrémédiablement désinvolte envers moi-même ?
Dois-je attendre d’être décharné de mes sens pour transmettre LA vie ?
L’éphémère que je suis ne peut-il pas agir maintenant et pour toujours ?
Alors élevons des temples à la vertu, creusons des cachots pour les vices.
Frappons et on nous ouvrira, demandons et nous recevrons, cherchons et nous trouverons.
Quittons les ténèbres, cherchons la lumière dans l’entrebâillement de nos certitudes.
Faut-il avoir des idées pour mourir de mort lente comme le disait Brassens ?
Que faut-il craindre ? Avoir des idées, ou mourir ?
Nous avons tous peur de la mort, alors qu’elle est l’expression absolue de l’égalité.
Sénèque disait « penser la mort, c’est penser la liberté ».

Cette conception philosophique stoïcienne s’inscrit soit dans une éthique immanente : la vie m’appartient, j’en dispose librement, soit dans une éthique transcendantale auquel cas la vie m’a été donnée par Dieu, et je dois la respecter jusqu’à ce que la sanction divine intervienne. Chacun se fera son propre jugement, mais nous ne pouvons écarter ce sujet qui pose des problèmes tout à la fois épistémologiques, philosophiques, sociaux et juridiques.

Notre fraternité est la preuve de l’attachement à l’idéal humain de responsabilité et de dignité. Notre morale doit être ouverte aux vents de la raison, et notre action au dehors doit se matérialiser avec dignité, ou jamais.

C’est pourquoi, je vous le demande V\ M\ et vous tous, ma S\ et mes FF\ en vos degrés et qualités, manifestons ensemble et pour toujours notre dignité de Francs-Maçons par l’unisson des maillets, et que nos coeurs se lèvent vers la lumière éternelle : Houzze, Houzze, Houzze.

Liberté, Egalité, Fraternité, Dignité.

J’ai dit.

P\ B\ O\


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