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Le compagnonnage à la francaise

Introduction

Mes freres apprentis, cette planche de loge bleue traite bien du compagnonnage et non des compagnons.

Sur plus de 7 sept siècles, le compagnonnage du tour de France a vécu - et survécu.

Les Devoirs, car c’est la leur autre appellation ont résistés aux persécutions du Royaume et de l’Eglise.

Etienne Martin Saint Lion, celui-la mme qui predisait en 1901 dans un ouvrage intitule « Le compagnonnage » la disparation de l’ordre, le réhabilitait 30 ans plus tard, après-guerre, tant son histoire se mêle aux parfums d’excellence professionnelles, à l’emergence d’une conscience ouvrière et dessinent par là les futurs grands mouvements ouvriers.

Les devoirs ont subsistés jusqu’à nos jours grace à une organisation séculaire, tout à la fois rigoureuse, discrète et généreuse, forte du soin qu’ils apportent depuis toujours aux embauches, à l’hébergement, à la solidarite et à l’entraide.

Je vous propose donc un petit voyage en pays et coteries des indiens, chiens, loups, renards, gavots et bons drilles, au coeur d’un ordre professionnel avec lequel nous partageons tant de belles utopies et aussi de nombreuses valeurs telles que la solidarite et le perfectionnement matériel et moral.

Après les lieux communs de ce vaste sujet, j’evoquerai les origines des devoirs, puis je vous presenterai les traits communs avec la franc-maçonnerie, traits qui ne se rejoignent pas tant ils sont paralleles.

Et pour finir, je tenterai de repondre a l’inevitable question compagnonnico-maconnique : Qui de la poule ou de l’oeuf ?

Définitions

La premiere ressemblance porte sur le vocabulaire partage avec des images, des symboles et des outils.

Le vocable de « compagnons du tour de France » est couramment employé mais il est tres recent et date seulement du 19ème siècle. Il faut bien veiller a distinguer l’appellation « compagnons du tour de France », d’avec les grades de compagnons, apprentis et maitres qui refletent l’organisation hierarchique des corporations ouvrières.

Auparavant on parlait des « devoirs » dont l’origine est le mot moyenageux « Deverium » qui designait la réalité juridique et sociale des ouvriers. Par exemple en 1276, dans le baillage de Troyes existe un « deverium » entre le comte de Champagne et les « fabri grossae fabricae » : les ouvriers vivaient rassembles et la quasi-totalité des habitants travaillaient pour le comte à la meme industrie.

Les devoirs sont alors en fait des fraternelles professionnelles - cette appellation qui fait fremir les francs-macons c'est-à-dire des sociétés ouvrières établies pour résister dans la clandestinité au pouvoir des maîtres. En effet nul compagnon, même au sommet de son art, ne pouvait prétendre passer maître s’il n’était pas « fils de » ou bien gendre de maître.

C’est pourquoi les devoirs resteront toujours discrets - sinon secrets - car toujours en lutte contre les pouvoirs établis, et protégeront leurs traditions orales et leurs rites.

Le compagnonnage est aujourd’hui un moyen original relevant de 3 principes fondamentaux :

1. Le métier, car le compagnon reconnu est d'abord un tres grand professionnel,
2. Le voyage, car lors de son tour de France, il rencontre, échange et apprend des autres,
3. La transmission, car elle fait partie intégrante de sa façon de vivre le métier.

Pour entamer son Tour de France, le jeune doit avoir un diplôme professionnel, CAP ou Bac Pro et passer un entretien de motivation qui est aussi destiné à déceler ses capacités de développement professionnel et humain. Cela doit correspondre à un desir suivre la tradition, un moyen de s'accomplir et une occasion de s'ouvrir au monde par le voyage en dehors des frontières physiques et mentales.

L’apprenti réalisera donc un premier travail dit « d'adoption », une maquette, qui sera examiné par la corporation et la communauté pour lui permettre d'accéder au rang intermédiaire d'Aspirant. Son statut de salarié lui permet de gagner sa vie dès la premiere année en percevant un salaire. L’Aspirant entamera un tour de France pour acquérir la technique et le savoir faire nécessaire à la réalisation de son chef d'oeuvre, pièce de réception requise pour devenir Compagnon. Le chef-d'oeuvre se doit d’être un objet complexe de conception et d’exécution pour démontrer sa maîtrise des tours de main. Les plus exceptionnels sont exposés dans les musées compagnonniques.

Le jeune ouvrier-étudiant itinérant n’est contraint à aucune durée de parcours et peut interrompre son tour de France à souhait. C’est seulement au cours de sa deuxième année qu’il formulera sa demande d'entrer dans la société compagnonnique, mais il lui faudra encore 3 a 5 années de plus pour acceder au titre de Compagnon. Au-delà du chef-d'oeuvre de réception, il sera aussi juge sur les qualités morales dont il a fait preuve lors de sont tour de France. Admis compagnon, son chef d’oeuvre lui permettra par exemple d'obtenir une partie des unités de valeur nécessaires à l'obtention de la licence Arts et Métiers équivalent à Bac+3.

La transmission des savoirs et tours de main est la principale caractéristique des compagnons. Les anciens apprennent aux jeunes et les itinérants partagent leurs expériences. Chaque soirs des cours de promotion sociale ont lieu dans les meres et cayennes qui les rassemblent. Quand un compagnon a fini son tour de France et qu'il se sedentarise, il remercie sa société et s'en retire muni d'un certificat attestant de sa moralite, mais la plupart du temps il est si imprégné des valeurs d'entraide et de solidarité qu'il participe à son tour à la formation des Aspirants.

Aux origines

On ne dispose de documents que depuis le 18ème siècle, mais l’origine des sociétés compagnonniques remonterait aux croisades et aux temps de l’édification des cathédrales gothiques.

La première évocation de leur existence est le livre des métiers, commané par Louis IX en 1268 au prévôt de Paris Etienne Boileau qui interdira alors à « tout ouvrier de quitter son maître sans son accord ». On peut légitimement comprendre la révolte des ouvriers asservis à un maître sans espoir d’amélioration de leurs conditions de vie.

Si les mythes et légendes participent à rassembler ce qui est épars, alors le compagnonnage n’a pas echappé à la règle. Il a multiplié les références mystiques. On peut en retenir au moins deux :

En premier nous partageons la référence à la construction du premier temple de Jérusalem par Salomon fils de David, tel que mentionnée dans le livre des rois, avec comme personnage maître Hiram, réputé dans l'art de travailler les métaux, mais aussi maître Jacques, menuisier et maçon et Soubise, maître charpentier. L’enseignement compagnonnique étant par tradition orale, la chanson de Paul Calas dit « Languedocien l’ami des filles » est parvenu jusqu’à nous qui dit :

« Quand Salomon, maître Jacques et Soubise
Au temps jadis, battirent au seigneur
En Palestine une éternelle église
Où tout brillait de gloire et de splendeur,
Ces grands travaux acquirent à nos maîtres,
Dans l'univers un immortel renom
Le sanctuaire en ce temps-là vu naître
L'ordre sacré des nobles compagnons ».

Au 10ème siècle avant JC éxistait un ordre hiérarchisé de bâtisseurs ou les maîtres se recrutaient parmi les ouvriers les plus compétents. Lors d’une cérémonie se déroulant dans un souterrain creusé sous le temple, le nouveau maître recevait des signes de reconnaissance lui permettant de prouver son appartenance à l'ordre.

Apres l’achèvement du temple, maître Jacques et Soubise se querellèrent pendant la traversée de retour vers l’occident, Soubise jalousant l’autorité de Jacques. Ils débarquèrent accompagnés de leurs disciples, l’un à Marseille et l’autre à Bordeaux puis maître Jacques voyagea à travers la France trois ans durant pour éviter les attaques des amis de Soubise.

Il finit par se retirer dans le massif de la Sainte Baume pres de Saint Maximin en Provence, là même ou Marie-Madeleine se serait recluse durant 33 ans après avoir été chassée de Palestine. Jacques y péri de 5 coups de poignard après avoir été trahi par l'un de ses fidèles. Avant de s'éteindre il fit jurer à ses disciples de prêter serment de fidelité à dieu puis ils se partagèrent ses vêtements et ses outils, créant ainsi les différents ordres professionnels. En parallèle Marie-Madeleine deviendra la sainte patronne des compagnons du devoir.

On le voit, les emprunts à l’histoire chrétienne sont nombreux, cela faudra à l’ordre de se voir persécuter par l’église catholique jusqu’à la première guerre mondiale.

Une seconde légende date de l’édification de la cathédrale Sainte Croix à Orleans :

Pour les « compagnons du tour de France » nommés ainsi en référence au voyage itinérant de maître Jacques tentant d'échapper aux partisans du père Soubise, le chantier de la construction de la cathédrale Sainte Croix reste la référence historique : En 1401 durant d'édification des tours de la cathédrale, Jacques Moler dit « la flêche d'Orléans » et un autre maître appelé Soubise dit « Parisien le soutien du devoir » sont ensemble confrontés à une grève des ouvriers du fait de leurs pénibles conditions de travail.

Les deux maîtres obtinrent des notables locaux les pleins pouvoirs pour réorganiser les corps d’états mais ils en profitèrent pour inclure dans les règles des dogmes inspirés de la religion catholique. Certains protestèrent en souvenir de leur appellation de compagnons « du devoir de liberté », cette liberté comprenant aussi la liberté de confession. En 1568 des huguenots abattirent la flèche du transept de la cathédrale qui endommagea la nef. Un poème de Raoul Vergez dit « béarnais l'ami du tour de France » evoque cette scission légendaire d'Orléans.

Partout ensuite des règlements de villes pris sous la pression des devoirs catholiques interdiront les « libertins » d’exercer leurs professions dans les cités. Désormais et pendant plusieurs décennies les rencontres entre compagnons catholiques et compagnons libres ou protestants se solderont - après topage, c’est à dire reconnaissance -, par des combats à morts à coup de cannes
pour prendre à l’ennemi ses couleurs compagnonniques.

La rage enflera encore avec la revocation de l'édit de Nantes par Louis XIV en 1685. Ces combats dureront jusqu’à la première moitié du 19ème siècle et contribueront à discréditer durablement le compagnonnage aux yeux des pouvoirs établis.

Un autre mythe identifie Jacques comme étant Jacques de Molay, dernier grand maître de l’ordre des Templiers brulé vif par Philippe le bel pour lui dérober le fameux trésor des templiers. Quant au père Soubise il aurait été moine bénédictin lors de la construction de la cathédrale Sainte Croix d'Orléans, d’où sa représentation fréquente en robe de bure tenant à la main un parchemin sur lequel on peut lire : « Pensez, travaillez, progressez toujours, servez votre prochain, soyons modeste ».

Avec ces legendes on peut deja retenir quelques ternaires :

  • Salomon, Jacques et Soubise et le fer, la pierre, le bois,
  • Le biblique, la chevalerie, le monastique,
  • Les traditions orientale, occidentale et chrétienne de l’art royal,

Un devoir de discrétion

Mais avant les « devoirs » existaient deja les « corporations » : organisations soutenues par les pouvoirs religieux puisqu’elles garantissaient une forme d’autorité sur la main d’oeuvre locale et le respect du prix fixé par le maître de l’ouvrage.

Pour s'affranchir du pouvoir des corporations comme de celui des maîtres qui leur refusent la progression dans le grade, les compagnons créent des sociétés et entrent dans la clandestinité en s'organisant en fraternelles de charpentiers, de maçons et de tailleurs de pierre.

Ils sont contraints à voyager de chantiers en chantiers et s’organisent pour se reconnaître entre eux, pour l’embauche des compagnons, pour leurs formations, pour l’hébergement des compagnons passants voyageurs dans des auberges ou relais tenus par des femmes nommées « Mères ». Ils se montrent solidaires : un voyageur partant d’une ville pour une autre aura toujours obtenu un ravitaillement lui permettant de faire le voyage sans encombre, et arrivé à sa destination, il est pris en charge.

Cette clandestinité forcée nécessaire pour faire face aux incessantes tentatives de mettre fin à ce contre-pouvoir ouvriers façonnera pour longtemps le caractère de tous les devoirants.

Hormis par les chansons, les compagnons ont laissés peu de traces écrites, mais les documents de police qui sont parvenus jusqu’à nous font état d’un harcèlement continue et sont en quelques sortes la preuve de leur pouvoir revendicatif.

Ainsi à Lyon plus de 700 ouvriers manifesteront contre la menace de diminuer d’un sou le prix de journée. Partout ils feront dire que si l'un des leur accepte de diminuer son prix, il sera aussitot interdit de métier.

Le surnom qu’ils portent a d’ailleurs aussi pour vocation de se dérober aux poursuites des autorités civiles et ecclésiastiques. L’ordre a dû faire face par exemple :

  • En mars 1419, à une ordonnance de Charles VI, qui vise les cordonniers de la ville de Troyes : « plusieurs compaignons et ouvriers du dit mestier, de plusieurs langues et nations, alloient et venoient en ville ouvrer pour apprendre, congnoistre et savoir les uns des autres ».
  • En 1480 le tableau du siège de Rhodes dévoile les secrets d’une réception rituelle de compagnons charpentiers et compagnons tailleurs, par les hospitaliers de Saint jean de Jérusalem.
  • En 1539 François 1er interdit les confréries de gens de métier.
  • En 1571 Charles IX condamne les confréries, serments, monopoles, cotisations, capitaines, bannières.
  • En 1745 à Anger, le parlement ordonne que les charpentiers du devoir soient jugés pour avoir perturbé l'ordre public et la cité.
  • En 1779 une ordonnance de police de bois interdit aux compagnons « de s’assembler, de quitter les maîtres et de s’embaucher eux-mêmes ». Des villes expérimentent les bureaux de placement afin d'éviter que les nouveaux arrivants ne soient recrutés par les devoirs.
  • En 1791 soit après la disparition des corporations, la loi d’Allarde est promulguée instaurant la liberté d'exercer une profession ou métier après avoir acquitté le prix d’une patente, mais 2 mois après, la loi Le Chapelier interdit nommément le compagnonnage.
  • Pour contrôler les compagnons, Napoléon s’ingéniera à mettre en place le livret d'ouvriers, outil de contrôle de leurs déplacements. Il interdit également les amendes, défenses, interdictions et damnations prononcés par l’ordre.

Les coteries

Parmi les nombreuses familles compagnonniques il n’est pas aisé de se repérer, mais toutes les sociétés se rattachaient autrefois à l’une ou l’autre des deux grandes fédérations :

  • Le Devoir, ou Saint-Devoir de Dieu, qui comprenait les enfants de Maître Jacques et ceux du Père Soubise.
  • Le Devoir de Liberté, avec les enfants de Salomon.

Parmi les compagnons du Devoir on trouve donc maître Jacques et Soubise : Tout d’abord les enfants de Maître Jacques :

  • Les compagnons passants - ou loups-garous – > sont des tailleurs de pierre.
  • Les dévorants ou dévoirants > sont les menuisiers.
  • Les verrouillards > sont les serruriers.

Tous portent de longues cannes et des rubans fleuris de couleurs variées, attachés autour du chapeau, ou à la boutonnière.

Les enfants du Père Soubise sont notamment :

  • Les Bons Drilles - ou aussi chiens, (ou renard pour les aspirants), c'est-à-dire compagnons passants charpentiers.

Les compagnons du Devoir de Liberté comptent les enfants de Salomon :

  • Les loups - ou compagnons libertins ou étrangers -> sont tailleurs de pierre
  • Les indiens-ou renards de liberté ou compagnons de liberté -> sont charpentiers
  • Les gavots y sont menuisiers ou serruriers.

Charpentiers indiens et Bons Drilles ont fusionnés en « chiens-loups » en 1945 pour former la fédération du bâtiment.

Entre eux les compagnons s’appellent Coterie ou Pays, beaucoup de corps d’état pratiquent les hurlements (les chants) et le topage (signe de reconnaissance donné à 20 pas de distance).

Un mouvement de réunification

Un célébre compagnon, Agricol Perdiguier dit « Avignonnais la vertu » à oeuvré de 1839 à 1875 pour rassembler les devoirs et les compagnons de toutes professions, rites ou confessions en dénoncant l'absurdité des querelles persistantes.

Lors d’un mouvement de fond politique chez les compagnons, Perdiguier deviendra lui aussi député. Il décédera en laissant une oeuvre inachevée et sans même avoir assisté à la création du premier syndicat en 1884. La création des syndicats s’effectuera d’ailleurs en discréditant l’ordre et ses batailles absurdes afin de mieux rallier les ouvriers au mouvement prolétaire.

Poursuivant l’oeuvre de réunification, Lucien Blanc dit « Provencal le résolu » un bourrelier-harnacheur franc-maçon réussira en septembre 1889 à unifier les rites de Salomon, de maître Jacques et de Soubise en créant l'Union compagnonnique. L'union réunira jusqu’à 3000 compagnons et possèdera 40 sièges de tour de France en 1909. Mais les compagnons restant profondément attachés aux traditions, beaucoup refuseront de s’en éloigner. Ils refuseront de se voir imposer un rite de réception unique pour tous les corps d'état. D’autres compagnons
catholiques quitteront l’Union compagnonnique qu’ils jugent passée sous influence maçonnique.

En 1941 durant la seconde guerre mondiale, Jean Bernard dit la fidélité d'Argenteuil s’attelle à la réunification des devoirs et s'adresse au maréchal Pétain qui acceptera de lui signer une charte créant « l'association ouvrière des compagnons du devoir du tour de France ».

L'association regroupe essentiellement des sociétés au rite de maître Jacques et dispose d'un vaste réseau de maisons des compagnons, en France comme en Europe.

Avec la fusion le 25 novembre 1945 des charpentiers indiens et chiens une troisième organisation naquit à Paris en 1953 avec la Fédération Compagnonnique des Métiers du Bâtiment.

Alors que l'Union compagnonnique s'est organisée en quatre familles, la fédération comporte 4 sociétés :

1. La société des compagnons charpentiers des devoirs du tour de France,
2. la société des compagnons maçons tailleur de pierre des devoirs du tour de France,
3. la société des compagnons passants bons drilles, couvreur-zingueur plombier plâtrier,
4. la société des compagnons menuisiers et serruriers du devoir de liberté, enfant de Salomon avec le surnom de gavots.

A la federation chaque société organise son tour de France et vit selon son rite, tout en participant à la communauté de la fédération.

Une tradition modernisée

L’apogée des devoirs sera atteint au cours du 19ème siècle et l’on parle alors de chiffres dépassant les 200000 compagnons. Le compagnonnage connaîtra ensuite un fort déclin avec la révolution industrielle qui remplace le travail manuel par la mécanisation.

Aujourd'hui ces sociétés acceptent les jeunes avec ou sans sélection à l’entrée, avec ou sans diplôme. Les débouchés vont du CAP, BEP, BP au Diplôme Universitaire tel le DU « Compagnon bâtiment durable ».

Le compagnonnage est un moyen original basé sur 3 principes essentiels :

4. Le métier, car le compagnon reconnu est d'abord un grand professionnel,
5. Le voyage, car lors de son tour de France, il rencontre, échange et apprend,
6. La transmission, car elle fait partie intégrante de sa façon de vivre son métier.

Pour entamer son Tour de France, le jeune doit avoir un diplôme professionnel, CAP ou Bac Pro et passé un entretien de motivation qui est aussi destiné à déceler ses capacités de développement professionnel et humain. Cela doit correspondre à un desir suivre la tradition, reste un moyen de s'accomplir et une occasion de s'ouvrir au monde par le voyage en dehors des frontières.

Aujourd’hui, L'Union Compagnonnique des Devoirs Unis comporte 100 métiers soit beaucoup plus que les deux autres compagnonnages réunis. Elle a admis de nouveaux métiers (relieur, cuisinier, sculpteur, bijoutier, prothésiste-dentaire, etc.) -mais pas encore les femmes.

Les Compagnons de l’Union peuvent porter un anneau d’or à chaque oreille. Porter les joints n’est pas obligatoire, mais c’est un signe visible d’appartenance et qui désire les porter s’engage à adopter un comportement représentatif du compagnonnage.

L'Association ouvriere des compagnons du devoir fait voyager é l’étranger durant au moins 3 semaines, dispose de 52 maisons de prévôts et offre des formations du CAP au BTS et à une licence en partenariat avec le CNAM, les mène à être compagnons du tour en 6 ou 7ans.

L'association qui comprend une vingtaine de métiers s'est organisée en 4 familles différentes pour représenter le batiment, les métaux, les cuirs et plastiques et l'alimentation.

La Fédération Compagnonnique des Métiers du Bâtiment accueille des milliers de compagnons et de jeunes « ouvriers-étudiants itinérants » qui effectuent leur Tour de France. Elle forme aussi chaque année plusieurs milliers de jeunes et d’adultes qui ne se destinent pas au compagnonnage. Elle dispose de 40 maisons d'accueil des compagnons, 20 ateliers de formation continue, une université, 6 centres d'apprentissage avec hébergement et un institut européen de formation.

La Fédération compagnonnique des métiers du bâtiment ainsi que les compagnons du devoir ont leurs propres Centre de Formation d’Apprentis.

Ces Compagnons aujourd'hui participent aux réalisations les plus modernes, aux restaurations d'ouvrages prestigieux et aux grands chantiers contemporains.

Compagnons du devoir et compagnons franc-macon

Il ne faut pas s'y tromper, le but premier du compagnonnage est bien la formation de l’homme au travers d'un métier par lequel il va se perfectionner manuellement mais aussi intellectuellement.

Selon les compagnons : il faut donc expérimenter physiquement avant d’évoluer vers l’abstraction. D'après Auguste Rodin.

« Les mains sont l’instrument de la création, mais d’abord l’organe de la connaissance ».

Le tailleur de pierre qui tient dans sa main une pierre perçoit ses lignes et ses fractures, son potentiel et ses faiblesses, il en perçoit le poids, l’invisible pesanteur et toutes les lois de l’univers, il embrasse alors le monde tout entier et affirme sa conscience, il vit là, lui aussi, sa vérité cosmique.

Pour le compagnon, le travail de la matière devient un révélateur de sa propre condition humaine.

L’outil du compagnon est devenu symbole pour le franc-maçon mais les outils matériels et les symboles spirituels relevent en fait du meme processus d’humanisation. En manipulant l’outil, l’apprenti intègre la notion de temps nécessaire à l’apprentissage du parfait savoir faire, il
apprend la patience, c’est cette même nécessaire patience qui est transposée dans le silence de l’apprenti maçon.

Les difficultés à se reconnaître entre compagnons et francs-maçons proviennent pour une part de l'ancrage historique des compagnons au Saint devoir de Dieu qui ne pouvait pas accepter la liberté de confession revendiquée par certains francs-maçons.

Nous francs-maçons revendiquons la continuité organique des loges médiévales des tailleurs de pierre, mais à défaut de preuves parfaitement avérées, l’on peut supposer que :

  • soit le compagnonnage s’est ouvert puis transformée d’opératif en franc-maçonnerie spéculative,
  • soit les maçons se sont approprié les rites compagnonniques comme support de leur dimension spéculative.

A priori la vérité ne se trouve pas en France mais en Angleterre et daterait d’après l’incendie de Londres avec la participation de la Compagnie des maçons de Londres aux reconstructions.

Ainsi, après la longue période des chantiers de construction des églises et cathédrales, les effectifs des devoirs auraient fondus par manque de commandes. Avec un moindre pouvoir économique et pour continuer à se protéger des pouvoirs persécuteurs, les compagnons auraient pu initier dans leurs loges des notables bienveillants - bien que manuels malhabiles - qu'il convenait de séduire notamment par des rites cérémoniels. De là le passage des opératifs aux spéculatifs. De là aussi le fait que les Devoirs perçoivent encore la franc-maçonnerie comme l'intellectualisation de leur ordre professionnel avec le risque du déni de l’oeuvre manuelle.

Une autre hypothèse trouve sa crédibilité dans le fait que le compagnonnage contemporain a un temps dû recruter pour regarnir ses effectifs. Il s’est alors rendu attractif par une épreuve d’initiation, empruntant aux rites maçonniques pour soutenir ses principes de solidarité et d'entraide.

Dans tous les cas de figure, les francs-maçons ont une grande responsabilité envers les compagnons auxquels ils ont au moins empruntés leurs outils.

Nous Franc-maçons devont faire en sorte que jamais ces hommes de métier ne puissent être déconsidérés au profit des machines, au nom de la sacro-sainte rentabilité économique.

Les compagnons ont luttés pour leurs libertés à leurs époques, à nous d’en faire autant aujourd’hui, pour tous.

C’est seulement en les respectant ainsi que nous pourrons encore dignement continuer à utiliser les outils symboliques pour tailler notre pierre.

Et pour finir, une petite histoire, à peine modifiée :

Un roi réalise de grands travaux et choisit de se rendre sur le chantier.
Sur place il apercoit quatre travailleurs et s'adresse au premier d’entre eux :
« Que faites-vous, mon brave ? »
« ben, je taille une pierre », répondit l'homme bourru.
Le roi s’adresse alors au deuxième tailleur de pierre :
« Et vous, pouvez-vous me dire ce que vous faites ? »
« Moi, Monseigneur, je travaille ici pour nourrir toute ma famille ».
A ce moment, le roi observe un troisième tailleur de pierre resté concentré sur son travail de la pierre.
Prudemment, le roi s'avance et lui demande :
« Et vous, qu'est-ce que vous faites ? »
Arrêtant de frapper la pierre, le tailleur se redresse et regarde fièrement le roi : « Moi, Monseigneur, je bâtis une cathédrale qui s’élèvera vers les cieux ! »

Enfin le roi s'avance vers le dernier, qui n’a fait qu’observer les 3 autres travailleurs et lui demande :

« Et vous, vous ne travaillez pas ? »

Alors l’homme assis sur sa pierre cubique se lève et réponds : « Monseigneur, moi vous savez, je ne sais deja pas ni lire ni ecrire alors… ».

Mes frères, è votre avis, lesquels sont compagnons ?

J’ai dit V\ M\

D\ M\

Le compagnonnage à la francaise6016-8-1


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