GLNF Loge : Nicolas Dalayrac – Orient de La Réunion 20/07/2006

Les Devoirs du Compagnon

 
Compagnon … c’a y est, je suis Compagnon … j’ai franchi une étape … je ne suis peut-être plus apprenti mais je reste apprenant et je le resterai toute mon existence. Dans mon chemin initiatique, je suis monté sur la deuxième marche du parvis. La route est encore très longue – je ne crois d’ailleurs pas qu’elle aura une fin - et je suis sûr qu’elle sera jonchée d’embûches et d’obstacles qu’il me faudra franchir. L’essentiel étant moins le but à atteindre que la route à faire, j’ai du travail « sur la planche » !

Quels étaient mes devoirs d’apprenti-maçon ? Si l’apprentissage fut pour moi une période d’observation et de tentative de mimétisme, j’y ai appris que j’ai à fuir le vice et pratiquer la vertu. Ces devoirs me resteront toute ma vie. Par l’Equerre, le niveau et la Perpendiculaire, je me dois de montrer de l'équité, de niveler les inégalités arbitraires et de contribuer à élever sans cesse l'état moral et matériel des individus et de la Société tout entière. La encore, c’est un devoir qui m’accompagnera tout le long du chemin. Mes signes, mots et attouchements doivent dénoter ma façon d'agir, toujours équitable et franche ; mon langage loyal et sincère montre la sollicitude fraternelle que je me dois de manifester pour tous ceux à qui je suis rattaché par les liens de la solidarité. Tout cela bien sûr, je devrai continuer de le faire jusqu’au moment de la suprême initiation.

Sur mon chemin de Compagnon, dans cette discipline supplémentaire que je me suis auto-imposée, et malgré ou peut-être à cause des vicissitudes de ma vie profane, l’assiduité au tenues est la première des contraintes à laquelle je m’astreins. Je ne peux concilier un discours d’attachement à la F\ M\, forger l’amour que je porte ou que je suis sensé porter à mes semblables et à mes frères si je ne les rencontre pas dans une communion de partage. Il est de ma responsabilité de concilier tant que faire ce peux ma vie professionnelle, ma vie familiale avec mes obligations de compagnon-maçon même si cela me fait lever plus tôt et coucher plus tard ! C’est l’un des devoirs les plus difficiles lorsque l’on est encore comme moi dans une vie active extrêmement exigeante. En effet, il est tentant d’évoquer « des raisons professionnelles » ou encore plus vaguement « des raisons profanes » pour expliquer que je ne pourrai assister à une tenue alors que la vraie raison est que je n’ai tout simplement pas envie d’y aller ! Je me mens à moi-même et pire, je mens à mes frères en F\ M\  Dans mon esprit, assiduité rime avec fidélité car j’ai fait serment d’adhérer au règlement de l’ordre avec la règle numéro 8 … » Les francs-maçons s'assemblent dans des Loges, pour y travailler selon le rite, avec zèle et assiduité ».

Et pourtant … j’avais à peine pris cet engagement que je le reniais déjà. La première tenue de l’année, celle qui voit s’asseoir un nouveau V\ M\ sur le trône de Salomon, je n’y ai pas participé … pis encore, la deuxième non plus … Qu’il est dur de tenir ses engagements !

Etre à l’heure … pourquoi la ponctualité est-elle si difficile à certaines personnes ? Pourquoi ais-je rencontré dans ma vie profane des gens qui paraissent génétiquement incapables d’arriver à l’heure à un rendez-vous ? Ce n’est pas de l’absence de considération de leur part car la plupart d’entre eux sont par ailleurs charmants et courtois en d’autres circonstances. Pour être franc, je n’ai pas la réponse à cette question. La ponctualité est pour moi indissociable de l’assiduité. Il est pourtant simple de constater qu’un travail collectif n’a d’efficacité que si tous les participants y collaborent et l’absence de ponctualité est de ce point de vue contre-productif. En tant que Compagnon, je ne peux travailler seul. Un Compagnon partage son sort avec les autres et si la Loge doit être une entité psychique collective, un précurseur de cet Oméga si cher à Teilhard de Chardin, mon travail de compagnon pourrait être, quant à lui, le premier balbutiement de la noogénèse dans laquelle je me fonderai.

L’activité : du point de vue strictement administratif, je suis un M\ « actif » pour autant que je sois en règle de ma capitation mais être membre actif d’une organisation est pour moi bien autre chose. Dans « activité » il y a « animation » et « ardeur », mais aussi « effort » et « labeur », « travail » et tout simplement « vie ». Je dois participer à la construction du temple, au Grand Œuvre qui, par le perfectionnement de ses membres, vise au perfectionnement de l'humanité toute entière. Le travail d’un M\ ne s’arrête pas en Loge et ce que j’entends et vois durant les tenues me laisse matière à réfléchir, à travailler dans ma vie profane. La soif d’apprendre, la curiosité intellectuelle n’ont d’intérêt que si les découvertes et enseignements qu’elles apportent sont mis à contribution pour l’édification de quelque chose. Je ne sais quel sera mon chef d’œuvre, si tant est que j’en fasse un jour un, mais ce que je sais, c’est que j’y travaillerai sans relâche. Je garde aussi à l’esprit qu’en Loge, le travail silencieux à souvent beaucoup plus de valeur qu’un brillant discours.

Le chemin de la gnose est semé de chausse-trappes et de sources d’erreurs. L’activité ne serait rien sans la lumière, la clairvoyance. Lors de mon initiation, le bandeau qui me recouvrait les yeux est tombé et j’ai reçu la lumière, mais celle-ci était vive, éblouissante. Avec le temps et les premiers pas que j’ai pu faire sur la voie initiatique que j’ai choisie, ma compréhension personnelle s’est affinée, dégrossie. La pierre brute a commencé de prendre forme. Cette lumière est maintenant faite de plus de nuances, de contrastes et de réflexions qui aident à mon discernement. Elle m’aide dans mon travail de pénétration dans la compréhension des symboles que je rencontre, construit et renforce la sagacité que j’ai à l’état natif. Elle me vient du soutien de mes frères et je n’aurai cesse de la leur demander.

J’aurai par ailleurs à faire preuve de fermeté et ténacité dans la dans la décision et l'exécution, d’une énergie morale plus grande, bref de volonté. Mais celle-ci, toute individuelle qu’elle soit à ce stade peut-elle se transformer, se fondre dans un ensemble plus vaste ? Puis-je, par une communion de pensée, une compréhension mutuellement partagée avec mes frères compagnons des mystères du chemin que j’emprunte, ajouter l’énergie que je contrôle avec la leur pour atteindre ensemble la parfaite forme de la pierre cubique ? Si oui, alors j’aurai réussi à utiliser l’énergie rayonnée par l’ensemble de mes frères et celle plus mystérieuse que je pressens à d’autre niveaux pour les mettre humblement et modestement au service de l’Humanité.

Cette lumière qui m’entoure devra faire de moi un homme éclairé. La détermination que je mettrai dans l’exécution par le maillet des résolutions que je prends n’aura de sens que domptée et focalisée. Le signe d’ordre des compagnons montre que je capte les énergies qui m’entourent mais aussi que je domine mes passions. La domination de moi est le gage que j’arriverai à contenir mes émotions et sentiments qui ne seraient pas purs et généreux. Sur le chemin de la maitrise, j’aurai à démontrer d’abord que je me maitrise moi-même. Si je ne désire rien pour moi-même, cela libérera un maximum d’énergie vers le but extérieur que je me suis fixé. Si je peux me dominer et faire que mon esprit soit en toutes choses libéré de ses contraintes négatives autocentriques, mon action vers l’extérieur et ma contribution au Grand Œuvre n’en seront que plus grandes et toute la volonté que je pourrai y mettre en sera magnifiée. Ce faisant, j’aurai travaillé à me perfectionner moi-même selon les règles de l’Ordre.

Mes Frères, je vous suis très reconnaissant de m’accepter comme l’un des vôtres dans cette tâche et je sollicite votre indulgence pour cette planche bien imparfaite. Merci de m’avoir écouté.

J’ai dit, Très Vénérable.

J\M\ C\

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