Obédience : NC Loge : NC 07/01/1999

La Truelle et le Maillet

Vénérable Maître et vous tous mes frères en vos grades et qualité.

En préalable, je dois dire que le sujet de ma planche ne m’est pas apparu comme évident.
Pas de question, donc pas de réponses à apporter. Simplement la juxtaposition de deux outils sans que le lien entre les deux soit exprimé
Quel faire à partir d’un tel sujet, symbolique s’il en est.

« la Truelle et le Maillet » me permet d’approcher ces deux symboles selon deux axes différents.
Le premier sera un axe symbolique et le second l’interpolation des symboles dans la vie du Franc Maçon que je suis devenu.

Ma planche s’articule donc en deux parties.
1 – la Truelle et le Maillet, signification en loge
2 – la Truelle et le Maillet, l’esprit Maçonnique

La principale difficulté à laquelle j’ai été confrontée a été de trouver des points de connexion entre ces deux symboles.
Je vais donc faire un tour d’horizon de la symbolique liée à ces deux outils essentiels pour un maçon que sont la Truelle et le Maillet.

1 – la Truelle et le Maillet, signification en loge

La Truelle

Outil que l’on trouve dans le rituel de l’initiation au grade de Compagnon lors du cinquième voyage, la Truelle est alors maniée par le Vénérable. Les pierres ont formé un édifice et le passage de la truelle le rend lisse, uni et solide. En cimentant les pierres, la truelle dans les mains expertes du Maçon devient l’outil de l’union, de l’unité face aux éléments et à l’adversité.
Symboliquement, elle signifie la fraternité entre les frères, la bienveillance envers tous, la tolérance.
Il est à noter que la truelle n’est l’attribut d’aucun des grades ou des officiers de la loge. C’est un outil qui s’impose à tous par sa portée symbolique même si l’usage en est fait par le vénérable lors de l’initiation au grade de compagnon.
Dans son tableau des classements des outils actifs et passifs, l’actif signifiant l’esprit et le passif, la matière, Jules BOUCHER, inestimable référence, crée une catégorie neutre pour la truelle. Est-ce à dire que le symbole se rapportant à l’un des concepts essentiels de la Franc Maçonnerie est en dehors de l’esprit et de la matière ou qu’elle est les deux à la fois. Pour ma part, je penche pour la deuxième version qui me paraît à la fois plus flatteuse et plus conforme à l’esprit de notre ordre.
Le fait que l’on trouve la truelle au grade de compagnon n’est sûrement pas non plus un hasard. En effet, après une période de découverte est-on en droit d’aspirer au grade de Maître si l’on n’a pas intégré ces principes fondamentaux de fraternité et de bienveillance. 

Enfin, si l’on en croit toujours Jules BOUCHER, il est une expression « passer la truelle » qui signifie oublier les injures et les injustices. En deux mots, arrondir les angles. Mais arrondit-on les angles avec une truelle ? Ma connaissance en maçonnerie opérative étant plus que limitée, je ne répondrais pas à cette question.

Le Maillet

Le maillet est un outil que l’on trouve à deux stades dans les symboles de la loge. Tout d’abord, le maillet emblème de la logique ne peut se passer du ciseau qui représente la parole, les arguments. On les retrouve dans le premier voyage de l’initiation au grade de compagnon, lorsque la pierre brute a encore besoin d’être dégrossie. Outil actif par excellence et à l’opposé du ciseau qui lui est passif, le maillet donne la direction, l’impulsion, le rythme à la taille de la pierre par le ciseau. Le maillet signifie la détermination et le ciseau les résolutions prises. C’est un symbole très fort de l’apprenti qui manifeste sa volonté de travail.
Le maillet est également le symbole du vénérable Maître avec lequel aidé par ses deux surveillants, il rythme la tenue en loge. Le maillet sert à marquer le tempo dans la loge, il crée une ambiance par les coups portés par le Vénérable est les deux surveillants. Les travaux en loges s’ouvrent sur le coup de maillet de vénérable suivi par ceux des surveillants.
Ainsi le maillet du Vénérable marque la détermination de la loge, sa volonté que relaient les frères qui jouent peut-être ainsi le rôle du ciseau pour reprendre le symbole tel qui est exprimé de base.
Il est intéressant à constater que les maillets sont souvent en buis qui est également le symbole de la fermeté et de la persévérance.

Pour conclure cette partie, je tenterai de répondre à la question que je me suis posé au début de cette planche : quels sont les points communs entre ces deux outils ? J’en ai découvert un : la Vénérable Maître qui manie aussi bien la truelle que le maillet mais j’en soupçonne un second qui est que ces deux outils symbolisent des valeurs essentielles qui sont véhiculées par notre institution et qui doivent être présentes chez chacun d’entre nous.

2 – la Truelle et le Maillet, l’esprit Maçonnique

En ayant travaillé sur ces deux symboles, j’ai cherché des points de connexion, des zones de recouvrement, il ne m’est apparu que ceux que j’ai évoqués à l’instant. Mais quels autres rapports peut-on trouver entre ces deux outils ? En effet, ce sont des outils que l’on utilise avec la même main, il est donc nécessaire d’en lâcher un pour travailler avec l’autre. Sont-ils antinomiques pour autant, je ne le pense pas car ils symbolisent l’esprit maçonnique tel que je le ressens. La volonté d’agir, la détermination, les idéaux et le besoin de tolérance, de fraternité.
Rappelons-nous que la tolérance mutuelle est un des principes de notre institution, que le travail et donc la volonté d’agir est considéré comme un des devoirs essentiels de l’homme. La Franc Maçonnerie est une institution active, agissante qui doit diffuser ses valeurs dans la société. Comme le maillet agit sur le ciseau pour façonner la pierre brute. Comme la truelle égalise les aspérités et assemble les pierres disjointes, notre fraternité doit être réelle et pas seulement un beau principe.
La Franc Maçonnerie façonne les frères, insensiblement, à petit feu, mais sûrement ; oh bien sûr il faut avoir des prédispositions. On a rarement vu jaillir d’un vulgaire caillou une sculpture de Rodin mais d’un bloc de marbre, oui. Mais après tout, pourquoi ne pas essayer avec un caillou. Le travail s’il est plus long n’en n’aura pas moins d’éclat.

La fraternité que l’on découvre en loge n’est pas un vain mot, et pourtant que de disparités, d’origines diverses, d’opinions divergentes mais pourtant un élan d’amitié un courant de solidarité nous anime.

Que dire de ce sentiment profond qui s’est révélé avec mes jumeaux ?
Que dire également du désarroi d’un frère qui se retrouve « orphelin »  lorsque ses jumeaux pour diverses raisons quittent le temple ?
Dans notre société déshumanisée, ou les contraintes personnelles et professionnelles ont parfois pesantes, quelle oasis de se retrouver entre frères, que ce soit en loge ou de façon informelle autour d’une table.
En dehors du temple, je passe aussi la truelle, car si indulgence ne veut pas dire béatitude, si tolérance n’est pas abandon, il faut bien avouer que l’enseignement maçonnique apporte un certain recul sur les événements.

Le maillet qui rythme nos travaux en loge doit être ferme, rigoureux. L’appel au travail qu’il émet doit être sans équivoque. La volonté émise est claire : faire partager les principes fondamentaux de notre ordre et améliorer l’humanité. Le Vénérable Maître qui pour notre loge est le représentant de cette détermination et de cette volonté de progrès doit appliquer sans faillir cette tâche dans un souci de développement.
Nous-même, qui sommes les artisans de notre évolution, devons avoir en permanence à l’esprit cette volonté de progrès. Le maillet qui conduit notre développement personnel est en nous, il rythme notre travail, notre volonté de travail sur soi doit être inaltérable. Diriger ne veut pas dire opprimer, volonté n’est pas obsession, l’enseignement Maçonnique avec son apprentissage de l’humilité nous imprègne de ses notions essentielles. Quel que soit l’engagement profane que nous ayons, les symboles, le rituel, l’ouverture d’esprit Maçonnique nous servent. Il n’est pas rare que je surprenne à demander la parole lors d’une réunion comme je le ferais en loge ; que la conduite d’un débat soit inspirée de la discipline que nous utilisons. Enfin et même, si ce n’est pas le propos, quel plaisir de gérer le silence afin de réfléchir et d’apporter des éléments constructifs et dépassionnés à un débat.

Au quotidien, truelle et maillet font bon ménage. Lorsque l’on a une activité profane intense, la détermination, la volonté se combine sans problème avec tolérance et fraternité. Le maillet pour le diriger n’écrase par la tête du ciseau mais lui donne la force qui lui permet de tailler la pierre. La truelle qui lisse les joints permet de relier et de finaliser un ouvrage sans altérer celui-ci.

Voilà de quoi méditer mes frères…

J’ai dit Vénérable Maître

P\ D\

6008-2 L'EDIFICE  -  contact@ledifice.net \