Obédience : NC Loge : NC 1730

La maçonnerie disséquée 

Samuel Prichard

Ce texte est un des textes fondateurs, en particulier pour ceux qui pratiquent les rites basés sur les principes des Moderne.  C’est la première divulgation complète avec le grade de Maître. Je pense donc qu’il est de mon devoir de Franc-Maçon, dans la recherche de la vérité, de le mettre gracieusement à la disposition des Sœurs et des Frères. Que le traducteur et les frères qui m’ont aidé soient remerciés.

J’ai inclus le tableau de la Grand Loge de Londres fait par Picart en 1735. On le trouve dans Illustrations de Cérémonies et coutumes religieuses de tous les peuples du monde.  Source : Bibliothèque nationale de France.

Ce document est particulièrement intéressant : il montre bien la forme en équerre de la table autour de laquelle les Frères se réunissaient et l’emplacement des trois chandeliers.

Je vous joins en introduction un petit texte de l’érudit de notre Ordre en ce début du 3éme millénaire: A/ B/

J/C/ V/
Membre de l’académie Internationale du Véme Ordre U.M.U.R.M.


Que nous apprennent
les plus anciens documents Maçonniques écrits en Anglais ?

Tout ce que nous savons des anciennes cérémonies maçonniques en Grande-Bretagne se trouve réuni dans un livre intitulé The Early Masonic Catechisms, publié en 1943 par Douglas Knoop, G. P. Jones et Douglas Hamer. Une seconde édition de cet ouvrage, revue et complétée, fut publiée en 1963, avec une Préface de Harry Carr. Elle comprend notamment la transcription de dix manuscrits (catechisms) et de dix divulgations imprimées.

Les trois plus anciens manuscrits transcrits dans ce livre proviennent d'Écosse et furent écrits dans les années 1700, c'est-à-dire avant qu'aucune Grande Loge au monde n'ait été fondée. Ils sont divisés en deux parties distinctes: l'une comprend les questions et les réponses que l'on posait à un Maçon qui affirmait être en possession du "Mot de Maçon" avant de le reconnaître (comme tel). Ces questions et réponses deviendront ce que nous appelons aujourd'hui instructions ou mémentos (les Anglais les appellent catechisms ou lectures) et donneront naissance au milieu du 18è siècle à l'ouverture et à la clôture rituelle des travaux d'une loge. L'autre partie décrit notamment une cérémonie se rapportant à la communication du "Mot de Maçon" à un Apprenti. Cette cérémonie est l'ancêtre de ce que nous appelons aujourd'hui initiation, passage et élévation, c'est-à-dire la manière de recevoir un profane dans la Franc-Maçonnerie (l'initier comme Apprenti), puis de lui conférer deux autres grades, ceux de Compagnon et de Maître. 

La première divulgation imprimée fut publiée à Londres en avril 1723. La dernière divulgation de cette première période, Masonry Dissected de Samuel Prichard, date d'octobre 1730. Ce texte célèbre est particulièrement intéressant pour deux raisons: il est le premier à reproduire en trois parties séparées les questions et les réponses concernant les grades d'Apprenti, de Compagnon et de Maître; il est également le premier à narrer les circonstances dans lesquelles l'architecte Hiram fut assassiné. Comme la mention de ce meurtre ne se trouve ni dans la Bible ni dans les Old Charges (les anciens manuscrits des maçons opératifs), on peut en conclure que son récit a dû être inventé aux environs de 1730.

Aucun de ces vingt textes ne constitue un "rituel" au sens contemporain du mot, c'est-à-dire le dialogue et la description des actions accomplies pour ouvrir et fermer les travaux d'une loge, ou pour conférer un grade. Mais presque tous comprennent différentes versions du serment que prêtait, comme aujourd'hui, un nouveau Maçon, serment par lequel il s'engageait, sous peine de châtiments graves, à ne révéler d'aucune manière les secrets qui lui avaient été transmis. Les précédentes générations d'historiens maçonniques en tirèrent la conclusion apparemment logique qu'on ne saurait accorder d'authenticité aux textes de ces divulgations puisqu'ils ne pouvaient avoir été écrits que par des parjures... Jusqu'au jour où le hasard fit qu'on s'aperçut que quelques lignes écrites en 1702 dans le Livre d'Architecture d'une loge d'Écosse se retrouvaient presque identiquement dans les anciens manuscrits des années 1700 (cf. Harry Carr, AQC 63, 1950, pp. 259-263). Les historiens anglais comprirent alors qu'il convenait de ne pas confondre les documents manuscrits qui avaient sans doute servi d'aide-mémoire, avec certains textes imprimés, publiés dans le but de ridiculiser la Franc-Maçonnerie ou de lui porter tort. Ils en conclurent que plusieurs de ces textes étaient très vraisemblablement authentiques.

Ils estiment d'autre part qu'aucune autre divulgation de caractère authentique ne fut publiée en  anglais pendant la période comprise entre octobre 1730 et avril 1760.

A/ B/  33ème

La maçonnerie disséquée
Samuel Prichard
Commentaire et traduction nouvelle par Gilles Pasquier

Description générale et véridique de toutes ces parties depuis l'origine jusqu'au moment présent. Telle qu'elle est donnée dans les Loges régulières constituées tant en ville qu'à la campagne, selon les différents grades d'admission. Donnant un récit impartial de leur procédure régulière lors de l'initiation de leurs nouveaux membres à l'ensemble des trois grades de la Maçonnerie, c’est-à-dire 

I. Apprenti Entré.           
II Compagnon du Métier.                             
III Maître.
A cela est ajoutée sa propre défense par 1’auteur.

Troisième édition par Samuel PRICHARD  ancien membre d'une Loge constituée.
LONDRES: Imprimé pour J. Wilford aux Trois Fleurs de Lys* derrière la maison du chapitre près de Saint -Paul - 1730
Prix : 6 pence

Serment
Samuel Prichard a fait le serment que le texte ci-annexé est un texte authentique et véridique dans tous les détails.
(A juré le 13e jour d'octobre 1730 Aérant moi R. Hopkins)
SAM. PRICHARD

Dédicace
A la Très Vénérable et Honorable Fraternité des Maçons France et Acceptés

Frères et compagnons,

Si les feuillets qui suivent, écrits avec impartialité, obtiennent l'approbation unanime d'une si illustre Société, je ne doute pas que leur caractère général ne soit diffusé et estimé parmi le reste de l'humanité cultivée, ce qui, je l'espère, donnera, entière satisfaction à tous les amis de la vérité, et je resterai, avec une très humble soumission, le plus obéissant et le plus humble serviteur de la Fraternité.

Ce « catéchisme » est assurément un grand classique du corpus des textes anciens de la maçonnerie, puisqu’on en connaît plus de trente éditions sans tenir compte des éditions pirates. La première parution est du 20 octobre 1730 et ce fut sans doute un succès de librairie, car un second tirage intervint le 23 octobre suivant et un troisième le 31 octobre. C’est sur cette troisième édition, dont un exemplaire est conservé au British Muséum et dont le texte est reproduit dans Tue Early Masonic Catechisms de Knoop, Joncs et Hamer que nous avons travaillé.

On disposait jusqu’à présent d’une traduction française de Masonry Dissected datée de 1743 (reproduite en 1976 par les éditions du Baucens). Cette dernière traduction était précieuse mais incomplète, voire erronée sur quelques points; il convenait donc d’en présenter une nouvelle aux curieux de la tradition maçonnique.

Les faux frères ou imposteurs

On se posera bien sûr la question de savoir si l’auteur était maçon. D’après Harry Carr (AQC, n° 94, p. 107) Samuel Prichard était en 1728 visiteur de la loge « Le Cygne et la Coupe» et membre de la loge « La Tête d’Henry VIII ».

Samuel Prichard se présente lui-même comme un ancien maçon, mais aussi comme un adversaire résolu de la maçonnerie. C’est du moins ce qui apparaît dans la justification qui suit le texte du catéchisme proprement dit. Pour S. Prichard, la maçonnerie est une escroquerie à laquelle il ne faut pas se laisser prendre. C’est d’ailleurs pour lever ce leurre et le rendre inopérant que S. Prichard dévoile du mieux qu’il peut les « secrets » de la maçonnerie.

Du mieux qu’il peut et c’est déjà très bien: cet adversaire de la maçonnerie est très informé sur le sujet, le contenu du pamphlet en fait foi. C’est justement au vu de cette richesse documentaire que la réaction de S. Prichard à l’égard de la maçonnerie nous étonne. La raison de cet étonnement, c’est que l’on sait qu’une position initiatique implique, pour être soutenue, certaines conditions, nécessaires mais non suffisantes il est vrai. Ces conditions font l’objet de la plus grande attention de la part des maçons du XXè siècle où règne la quantité: pureté des rituels et mise en pratique effective. Nous n’avons pas à dire ici quels effets portent les rituels qui remplissent ces conditions. Seulement, nous devons remarquer qu’en 1730 lesdites conditions étaient indubitablement respectées: le rituel était alors dans sa pureté d’origine et Masonry Dissected nous donne le reflet d’un rituel déjà très complet. Quant à la pratique, elle n’était à coup sûr pas remplacée par une simple lecture. Or, il semble que S. Prichard - s’il a été comme il l’affirme, maçon et donc impétrant dans un rite maçonnique - n’ait rien vécu: il ne lui est rien arrivé. Pour lui les secrets de la maçonnerie se réduisent aux mots, signes et attouchements qu’il dévoile et il a tout à fait l’air d’un profane avec tablier (alors que nous connaissons des maçons sans tablier).

Entrait-on facilement dans une loge en 1730 ? C’était sans doute difficile, mais faisable: les tavernes où se réunissaient les loges étaient des lieux publics. Dans la mesure où l’information sur les individus circulait plus lentement que de nos jours, un « voyageur » pouvait se faire passer pour « visiteur » après avoir prêté l’oreille au bon moment, ou même après avoir lu A Mason’s  Examination. Tout cet arrière-plan donne au maçon S. Prichard une responsabilité qui dut peser lourd dans la décision du député grand maître de proposer dès le 15 décembre 1730 (E.M.C., p. 17), que désormais l’entrée en loge ne soit plus accordée qu’à des visiteurs dont les membres de la loge pourraient se porter garants. Les minutes de la Grande Loge précisent bien que cette proposition faisait suite à la parution de Masonry Dissected. On comprend dès lors l’opinion défendue par B.E. Jones dans Freemason’s  Guide and Compendium, selon laquelle I interversion des mots de reconnaissance avait été rendue nécessaire par les publications de A Mason’s Examination et de Masonry Dissected. Il est vrai que, pas plus dans Masonry Dissected que dans A Mason’s  Examination, on ne discerne entre J. et B. quel mot est spécifique du premier ou du second grade: les deux textes attribuent à la fois J. et B. à l’apprenti. Mais outre qu’ils exposent des détails propres à chacun des deux grades, ces pamphlets permettaient à un patron de taverne de faire ce que l’on vit à l’époque: créer de faux maçons pour quelques shillings. L’interversion des mots allait s’ajouter à la précaution, déjà mentionnée, voulue par le député grand maître et contribuer à protéger les loges des "faux frères ou imposteurs"., selon son expression.

Les cowans

Les imposteurs ont leurs pendants opératifs, les cowans, à propos desquels le catéchisme de 1730 se montre très sévère dès le grade d’apprenti: si un cowan était surpris pendant les tenues on le condamnait à rester sous la gouttière de la loge par temps de pluie! Le malheureux devait y être contraint, sauf bien sûr si cette peine était fictive comme celle de l’obligation. Mais le fait que le rôle de couvreur, chargé de tenir les cowans à l’écart, soit dévolu au plus jeune apprenti est significatif: même le débutant de la loge était supérieur aux cowans, qu’il apprenait très tôt à traiter en ennemis.

Qui étaient donc ces cowans?

En nous référant au regretté Harry Carr (The Free-Mason at Work, p. 86) et à Knoop et Jones (The Genesis of Freemasonry, p. 28) nous pouvons dresser le portrait de ces ouvriers. C’étaient des bâtisseurs non maçons qui, à l’origine, n’avaient le droit de construire que des murs en pierres sèches. En 1636, à Canongate, on autorise les cowans à utiliser de la glaise comme mortier, mais pas du mortier à la chaux. En 1623 à Glasgow, on autorise un cowan, un certain John Shedden, à construire des murs avec un mortier de glaise, mais sans chaux ni sable, et jusqu’à une hauteur d’une aune seulement. Dans ce dernier cas, le cowan était dûment enregistré dans la liste des ouvriers du chantier, mais il s’agit là d’une exception dans tous les autres cas il était interdit à un maçon de donner du travail à un cowan. Les Statuts Schaw de 1598 comportent cette interdiction. Il existe même un document de la célèbre loge « Mary’s Chapel » d’Édimbourg, document daté de 1599, qui rapporte qu’un maçon avait dû reconnaître et confesser avoir offensé le surveillant et les maîtres en donnant du travail à un cowan. Ce maçon dut faire une « humble soumission » et promettre de ne pas recommencer.

Harry Carr remarque encore qu’à Kilwinning, les maçons qui acceptaient des cowans étaient condamnés par la loge à des amendes assez lourdes. Et, à Edimbourg, les cowans n’étaient admis au chantier du château que les semaines où aucun maçon n’y travaillait. C’est l’occasion pour notre historien de constater que le terme de cowan est d’origine écossaise. 11 faut souligner à ce propos que les sources de l’Oxford English Dictionary, à l’article cowan, sont toutes écossaises; et que le Chambers Scots Dictionary, qui est un dictionnaire de langue écossais-anglais, comporte bien un article cowan. La présence de ce mot dans Masonry Dissected serait un signe certain de l’influence de l’Ecosse sur la maçonnerie anglaise.

Le rituel de la Première Grande Loge

On ne possède pas le rituel de la Grande Loge de Londres ou Première Grande Loge, fondée en 1717, mais c’est à ce rituel que se réfère Masonry Dissected comme on va le voir. Il va de soi que nous ne considérons pas que la Première Grande Loge avait unifié le rituel de ses loges en 1730. On sait qu’avant 1717 existaient des différences d’une loge à l’autre puisque les «catéchismes», dont notre revue publie les traductions, ne sont pas semblables les uns aux autres. Cela continua sans doute au sein de la Première Grande Loge. C’est d’ailleurs ce qu’explique B.E. Jones dans son récit sur la querelle des Anciens et des Modernes. Les grades mêmes n’étaient pas unifiés: en 1738 certaines loges de la Première Loge sont signalées comme ayant « aussi » un grade de maître (Constitutions d’Anderson, p. 184-190). Cela prouve au moins qu’en 1738 le système à trois grades n’était pas pratiqué par toutes les loges de l’obédience.

Néanmoins, on peut se faire une idée approximative de ce qu’était, en 1730, le rituel de la Première Grande Loge en lisant Masonry Dissected car c’est bien de cette maçonnerie-là que S. Prichard nous parle.

Les preuves de ce que nous avançons là sont dans le pamphlet même: il s’agit de la liste de loges qui fait suite à la justification de l’auteur. Cette liste est apparue dans la troisième édition de Masonry Dissected, édition faite par Prichard lui-même et non par un éditeur pirate. C’est la liste des loges « constituées » et il faut savoir que ce qu’on appelait « loges constituées » en Angleterre en 1730, c’étaient celles de la Grande Loge et non d’autres. On trouve ce terme de constituted dès 1723 dans les Constitutions d’Anderson (p. 71) où il est dit que les loges doivent être solen­nellement constituées par le grand maître ». L’usage de ce mot est d’ailleurs resté de nos jours pour désigner cette cérémonie spéciale au cours de laquelle le grand maître constitue une loge.

C’est donc bien la liste de loges de la Grande Loge de Londres, année 1730, que S. Prichard donne à la fin de son pamphlet. Au reste, si l’on avait quelque doute, il suffirait de comparer cette liste au tableau publié par Erich Lindner dans L’Art royal illustré (p. 257). Ce tableau donne une série de petites images. Ce sont les enseignes des tavernes où se réunissaient les loges de la Première Grande Loge en 1735, soit cinq ans seulement après la publication de S. Prichard. Les enseignes sont numérotées et accompagnées des noms des rues, des quartiers ou des villes où sont situées les tavernes. Les loges prenaient tout simplement, comme titre distinctif, le nom de la taverne où elles se réunissaient. Par exemple, l’enseigne numéro 23 nous montre un croissant de lune accompagné de la mention « Cheapside ». Cela veut dire qu’en 1735, la loge n°23 se réunissait dans la taverne de la Demi-Lune située dans le quartier lon­donien de Cheapside. Or, que trouvons-nous dans la liste donnée par S. Prichard? Qu’en 1730 une loge portant le numéro 23 s’appelait La Demi-Lune et se réunissait dans Cheapside les premier et troisième mar­dis de chaque mois.

Autre exemple: dans la liste de 1730 nous trouvons, au numéro 11, la loge de « la Tête de Reine » qui se réunissait dans Knaves-acre les premier et troisième mercredis de chaque mois. Et dans le tableau de 1735 on voit, au numéro 11, une enseigne constituée par un portrait de femme couronnée, accompagnée de cette mention de lieu: Knaves-acre ».

On retrouve en tout trente-cinq loges de la liste de 1730 dans le tableau de 1735. Certaines ont entre-temps changé de numéro, mais pas de nom ni de lieu de tenue, comme la loge du « Cerf blanc » qui se réunissait à Bishopsgate et portait les numéros 44 en 1730 et 45 en 1735. Cela ferait vraiment trop de coïncidences: c’est bien de la maçonnerie de la Première Grande Loge dont nous parle S. Prichard. Il faut d’ailleurs noter au passage qu’il y a, en plus des similitudes, des différences entre les deux listes. En 1730 la liste comporte soixante-sept loges alors que le tableau de 1735 en donne cent vingt-neuf, dont plusieurs d’ateliers supérieurs au grade de maître. Par ailleurs, sur les soixante-sept loges de 1730, trente-deux ont disparu (ou changé de nom?) en 1735. Tout cela donne l’impression d’un formidable bouillonnement et l’impression est encore plus forte si l’on continue les comparaisons en utilisant la liste publiée à la fin de l’édition de 1738 des Constitutions d’Anderson.

Hiram enfin

Avec le manuscrit Graham (1726) on assistait au premier redressement d’un corps, mais ce n’était pas encore du cadavre d’Hiram qu’il s’agissait. Depuis quand était-il question de cet assassinat dans la franc-maçonnerie? Dans Early masonic Pamphlets (p. 193), Knoop et Jones nous rapportent un texte qui constitue une sorte de prospectus destiné à un public de maçons; « La Maçonnerie antédiluvienne ». Ce document fait allusion au « fils d’une veuve, tué d’un coup de masse». En 1723, le pasteur Anderson mentionnait Hiram dans la première édition des Constitutions, mais ne soufflait mot de la destinée du maître et de sa position de référent dans le rituel d’élévation (11-12, note). Il est vrai qu’en 1723, la Première Grande Loge ne fonctionnait encore qu’avec un système à deux grades, ainsi qu’en témoigne l’article IV des Constitutions de 1723.

Comment la mise au point, ou pour mieux dire la mise en rite, de la légende d’Hiram avait-elle pu s’opérer? Nous devons bien admettre que le processus est encore très mal connu et nous espérons que des documents anciens restent à découvrir qui nous apprendront la vérité sur tout cela. Toutefois il est possible de résumer la situation de la maçonnerie en 1730 de la façon suivante:

La Grande Loge de Londres, ou Première Grande Loge, fondée en 1717, avait débuté avec un système à deux grades: l’apprenti et le compagnon ou maître; le maître en titre étant le maître de la loge, celui qui préside.

Par ailleurs, il existait un système à trois grades. Témoignent de l’existence de ce système les manuscrits Trinity College (1711) et Graham (1726). En témoigne également un document de la loge de Dumbarton Kilwinning, daté de 1726 et que nous rapporte Harry Carr (The Free Mason at Work, p. 274): ce texte dit que le compagnon Gabraël Portefield a été reçu maître « après avoir renouvelé son serment et payé son droit d’entrée».

Si l’on admet que le grade de maître est apparu au terme d’une évolution, on peut considérer que le manuscrit Graham (1726) nous donne un état primitif du grade: pas encore de meurtre, Noé tient la place d’Hiram, mais on relève bien un corps. Dans cette perspective et compte tenu du fait que les deux textes peuvent appartenir à deux «courants »différents, Masonry Dissected donne un état du rite très avancé dans l’évolution du grade. Très avancé, mais pas encore achevé: les trois grades ont encore entre eux des adhérences et la distinction de chaque grade par rapport aux autres n’est pas tout à fait réalisée. Par exemple, l’apprenti reçoit deux mots alors que, quelques années plus tard, un de ces deux mots sera attribué à l’apprenti, l’autre au compagnon. Autre exemple:

Harry Carr (The Free-Masons at Work, p. 104) souligne que d’après S. Prichard, c’est dans la Chambre du Milieu que se trouve la lettre G et que le compagnon reçoit son salaire. Enfin, on verra en lisant Masonry Dissected que les cinq points par lesquels on relève le maître, sont encore les cinq points du « compagnonnage».

Ces quelques réflexions nous rendent évident le fait que les maçons spéculatifs ont intérêt à savoir ce qu’est la maçonnerie opérative, la franc-maçonnerie ayant connu une mutation en passant de l’état opératif à l’état spéculatif. Ce changement de nature qui a pris en tout et pour tout une vingtaine d’années semble s’être accompagné de l’avènement du mythe d’Hiram dans le rituel du troisième grade.

Le judéo-christianisme de la maçonnerie

On verra dans Masonry Dissected que le livre sur lequel se prête l’obligation du maçon est la Bible. La Bible est d’ailleurs la source de plusieurs éléments du catéchisme concernant le Temple de Salomon, sa construction et certaines de ses parties. Le passage de la Bible, dans lequel se trouvent les mots, est cité dès le grade d’apprenti et, bien sûr, le roi Salomon est cité dans le grade de maître. On trouve également au grade d’apprenti la précision suivante: la loge est située dans la vallée de Josaphat, et si elle est orientée c’est parce que toutes les églises et chapelles le sont. Au grade de compagnon la description des colonnes est empruntée à la Bible et accompagnée de la référence biblique. Enfin, toujours au grade de compagnon, il est expliqué que si les loges s’appellent loges de Saint Jean, c’est que celui-ci fut le prédécesseur du Sauveur et qu’il traça la première ligne parallèle à l’Evangile.

Tout cela donne à Masonry Dissected un caractère nettement judéo-chrétien. Cela ne doit pas surprendre les maçons du XXè siècle, même s’ils ont acquis la conviction du contraire. Il nous semble  utile de faire ici la distinction entre ce qui est de l’ordre de la conviction ou de l’opinion, et ce qui est  de l’ordre de l’information. L’étude des textes anciens de la maçonnerie et des versions d’origine des différents rites encore pratiqués à notre époque montre à l’évidence que la franc-maçonnerie est une des formes d’expression de la tradition judéo-chrétienne, indépendamment des différentes convictions  et opinions qui ont pu se former à ce sujet et dont chacun est libre.

Dans les rituels de langue française cela est vrai même pour le plus récent des rites encore actifs de nos jours, le Rite Ecossais Ancien et Accepté, dont la plus ancienne version connue remonte au plus tôt à 1804.

Dans ce rite, c’est sur la Bible qu’est prêtée l’obligation d’apprenti (Guide, p. 22 et 31) de même que celles de compagnon et de maître (p. 62 et 89). L’hypothèse selon laquelle on pourrait remplacer la Bible, non plus pour un impétrant mais en permanence, par divers livres tels que le Coran ou le Zend Avesta est certes intéressante, mais ce serait sortir de son cadre propre le livre qui doit s’y trouver pour y insérer des livres appartenant à d’autres traditions. Bien sûr, il existe une initiation chinoise Ming dans laquelle l’impétrant pose le genou nu sur une équerre, mais cela ne prouve qu’une chose: que l’acte de construire prête partout à sacralisation. Le premier homme qui construisit, fût-ce une cabane, fit sortir l’humanité des cavernes. En cessant de vivre sous terre et dans les abris naturels, en accédant à la surface de l’ordre naturel et en le modifiant par des constructions l’homme savait, comme les alchimistes, qu’il aidait la nature et que la nature l’aidait. Construire c’était toucher à l’Œuvre de Dieu, mais aussi participer à celle-ci. Il est bien normal qu’il ait été saisi de crainte et d’adoration tout à la fois, d’une part, et que ce comportement fondamental n’ait pas été propre  au monde occidental ni à la maçonnerie, d’autre part.

Les maçons du Rite Ecossais Ancien et Accepté des origines n’utilisaient d’ailleurs pas la Bible sans savoir ce qu’ils faisaient. Des signes de cette conscience apparaissent dans le corps du rituel dès le grade d’apprenti: — Pourquoi votre loge est-elle située est et ouest?

— Parce que tous les temples le sont ainsi.
— Pourquoi cela?
— Parce que l’Evangile fut d’abord prêché dans l’est et s’étendit ensuite dans l’ouest. (Guide, p. 33.)
Il en va ainsi jusqu’au grade de maître. On demande au maître:
— Pourquoi étiez-vous sans souliers?
Et le maître de répondre
— Parce que le lieu où je fus reçu était une terre sainte, sur laquelle Dieu dit à Moïse: « Ote tes souliers, car le lieu où tu marches est une terre sainte. »

Ce n’est donc pas â l’étourdie que le Rite Écossais Ancien et Accepté avait un caractère judéo-chrétien: c’était témoigner de ses sources mêmes. C’est également évident pour le Rite Français et encore plus pour le Rite Ecossais Rectifié.    

Ce ne sont pas là des remarques ponctuelles. Le Rite Ecossais Ancien et Accepté plonge ses racines dans la maçonnerie des « Anciens » et c’est même là ce qui lui valut son titre d’Ancien. Cette maçonnerie des « Anciens »a été elle aussi victime d’une divulgation: en 1760 un ouvrage intitulé Trois Coups distincts donnait une description complète de ce qu’était le rite des Anciens.

Cela nous permet de vérifier qu’en 1760, aux trois grades, on prêtait les obligations sur la Bible (Three Distinct Knocks, p. 19, 40 et 54) et que dès le grade d’apprenti, il était fait référence au roi Salomon et â la construction du Temple (ibid., p. 30). Entre autres preuves de l’ancrage judéo-chrétien de ce rite des «Anciens », on trouve, toujours au grade d’Apprenti, ces questions et réponses (p. 32):

— Pourquoi, mon frère, onze font-ils une loge?
—Parce qu’il y avait onze patriarches quand Joseph fut vendu en Egypte et qu’on le crut perdu.
— Quelle est la seconde raison mon frère?
— il n’y avait plus que onze apôtres après que Judas eût trahi le Christ.

Là encore si la maçonnerie décrite dans Trois Coups distincts ne doit rien au hasard quant à ses sources, c’est bien que la maçonnerie britannique de 1760 descendait de celle de 1730 que Prichard nous montre émerger dans un système à trois grades.

Ce qui n’était pas nouveau pour la maçonnerie de 1760 ne l’était pas davantage pour celle d’avant 1730. Il n’est pour le vérifier que de lire les textes anciens publiés en traduction dans ce cahier.

Il est clairement question de Noé, de Salomon et du Christ dans le manuscrit Graham de 1726. Cela n’est d’ailleurs pas spécifique des textes anglais. Dans le manuscrit Dumfries (1710), peut-être d’origine écossaise, les données extraites de l’Ancien et du Nouveau Testament abondent. Nous n’en rappellerons que trois tirées des questions et réponses de ce caté­chisme:

1) David prescrivait que les fondations du Temple fussent posées sur une « aire à blé, comme vous pouvez le lire dans la Sainte Bible, où elle dénomma l’aire d’Oman le Jébuséen ».

2)- Combien d’échelons y avait-il dans l’échelle de Jacob?
                                            Trois.
                                             Lesquels?
Le Père, le Fils et le Saint-Esprit.

3) Le Christ est le marbre blanc sans tache, la pierre que les bâtisseurs ont rejetée, mais que Dieu a choisie d’entre les autres pour que le Temple puisse être construit.

Il n’est pas jusqu’aux textes écossais de 1696 et 1700 qui ne précisent que c’est sur la Bible que l’on prête l’obligation du maçon. Ces deux manuscrits, Edimbourg (1696) et Chetwode Crawley (1700), donnent même, en dépit de leur brièveté et de leur dépouillement, deux références bibliques pour les mots J et B: I Rois, 7-21, et II Chroniques 3, dernier verset.

Nous ne citons même pas ici tous les textes anciens. Qu’on y aille voir: le manuscrit Sloane (1700) et le manuscrit du Trinity College (1710) n’infirment pas notre thèse, bien au contraire. A Mason’s  Confession (1727) ou le manuscrit Wilkinson (1727). Une telle constance de la part des maçons, de 1696 à 1804, n’a d’autre explication que celle que nous avancions au début de notre propos: la maçonnerie est une des formes d’expression de la tradition judéo-chrétienne.

Ceci nous amène à une double réflexion.

Bien des maçons pensent que puisqu’il est interdit par les Constitutions d’Anderson (1723) d’être un athée stupide, il suffit d’être un athée intelligent pour faire un maçon régulier. Nous n’avons pas la prétention d’être nous-mêmes un très fort angliciste mais enfin, il faut être vraiment très faible en langue anglaise pour donner dans le panneau. Relisons Anderson: « ... If lie rightly understands the Art, lie will never be a stupid Atheist, nor an irreligious Libertine. »Si d’après cette phrase il est possible, selon certains traducteurs d’Anderson, d’être un athée intelligent, il sera tout autant possible d’être un libertin religieux. Voilà ce qu’on gagne à philosopher prématurément: la position de l’adjectif devant le substantif ne doit pas faire illusion, en anglais c’est la règle - ça s’appelle de la syntaxe - et pour le pasteur Anderson et ses lecteurs anglophones, un athée est stupide tout comme un libertin est irréligieux. Par suite, ni l’un ni l’autre ne pouvaient être maçons en 1723. La seconde réflexion découle de la première. Il n’entre aucune part d’interprétation dans notre traduction de la phrase d’Anderson citée plus haut, en voici la preuve. On s’est beaucoup servi de cette phrase pour le plus grand profit des athées intelligents, mais aussi pour promouvoir une sorte de « religion maçonnique »: la religion naturelle ou déisme. Cette religion naturelle serait sans révélation, une religion d’avant les opinions particulières que sont par exemple le judaïsme et le christianisme. Ce dernier point est exact, et c’est bien à la religion de Noé que pensait Anderson; il le dit nettement dans ses Constitutions de 1738. Mais il faut être aussi ignorant de la Bible que les athées intelligents le sont de la syntaxe anglaise pour croire que le pasteur Anderson proposait une religion naturelle en 1723 et 1738 aux maçons de la Première Grande Loge. Il eût été étonnant en effet qu’un pasteur ne connaisse pas la Bible et en l’occurrence les passages desquels il ressort que Noé, tout au long de son histoire, a bénéficié de nombreuses révélations sur lesquelles il réglait ses actes. Noé ne marchait dans les voies du Seigneur que parce que celles-ci lui étaient tracées d’en haut. Voici trois citations parmi bien d’autres qui confirment ce que nous disons:                 

1)  Alors Dieu dit à Noé: la fin de toute chair est arrêtée par-devers moi; car ils ont rempli la terre de violence; voici, je vais les détruire avec la terre. Fais-toi une arche de bois de gopher; tu disposeras cette arche en cellules, et tu l’enduiras de poix en dedans et en dehors (Genèse, 6-13, 14).        

2) L’Eternel dit à Noé: entre dans l’arche, toi et toute ta maison; car je t’ai vu juste, devant moi parmi cette génération (Genèse, 7-1).                                                             

3)  Dieu parla encore à Noé et à ses fils avec lui, en disant: voici, j’établis mon alliance avec vous et avec votre postérité après vous (Genèse, 9-8, 9).   Ainsi Noé, après avoir été sauvé grâce à l’avertissement de Dieu, devint l’ouvrier de Dieu en servant à la création selon Ses directives. Si l’on admet que le pasteur Anderson avait lu la Bible, on admettra aussi que la religion noachide dont il parlait en 1738 n’était pas le déisme. Cela méritait d’être précisé avant que le lecteur n’entre, par la lecture de Samuel Prichard, dans les secrets et mystères de la Maçonnerie du pasteur Anderson.

INTRODUCTION

L’institution primitive de la Maçonnerie repose sur le fondement des sciences et Arts Libéraux, mais plus spécialement sur le cinquième, C’est-à-dire la Géométrie. Car c’est lors de la construction de la Tour de Babel  que l’Art et le Mystère de la Maçonnerie furent en premier introduits, et de là transmis par Euclide, digne et excellent mathématicien des Egyptiens, et il les communiqua à Hiram, le Maître-Maçon qui s’occupa de la construction du Temple de Salomon à Jérusalem, où il y eut un excellent et singulier Maçon qui commandait sous les ordres de leur Grand-Maître Hiram; son nom était Xannon Grecus, il enseigna I’ Art de la Maçonnerie à un certain Carolos Marcil en France, qui fut élu plus tard Roi de France. Et de là ensuite il fut introduit en Angleterre à l’époque du Roi Athelstone, qui ordonna qu’une assemblée fût tenue une fois chaque année à York, ce qui fut sa première introduction en Angleterre. Et les Maçons étaient faits de la manière suivante.

“Tune unus ex Senioribus teneat Librum, ut illi vel ille ponant vel ponat Manus supra Librum ; tum Praecepta debeant legi”. C’est-à-dire:  Tandis que l’un des Anciens tient le Livre, qu’il (ou ils) mette(nt) leurs mains sur le Livre pendant que le Maître devra lire les Lois ou Devoirs,

Lesquels Devoirs étaient: qu’ils soient sincères les uns envers les autres sans exception, et s’engagent à secourir les Frères et les Compagnons dans la nécessité, ou bien leur donnent du travail et les rétribuent en conséquence,

Mais durant ces derniers temps, la Maçonnerie n’est plus composée d’artisans, comme elle l’était dans son état primitif, lorsqu’un petit nombre de questions par demandes et réponses était suffisant pour déclarer un homme suffisamment qualifié comme Maçon opératif.

Les termes de Maçonnerie Franche et Acceptée n’ont pas été entendus (tels qu’ils le sont maintenant), jusqu’à ces dernières années. Il n’a été question d’aucune Loge Constituée ni de communications trimestrielles jusqu’en 1691 lorsque des Lords et des Ducs, des Hommes de Loi et des Commerçants, et autres négociants plus modestes; les portiers, n’étant pas exceptés, furent admis dans ce Mystère ou dans cette absence de Mystère. La première catégorie fut reçue en versant une très grosse somme, la seconde à un taux moyen, la dernière pour la somme de six ou sept shillings, en échange de quoi ils reçurent l’insigne honneur qui est (comme ils disent) plus ancien et plus honorable que l’Etoile et la Jarretière ; son ancienneté repose d’après les Règles de la Maçonnerie, sur le fait qu’il aurait été transmis par leur tradition sans interruption depuis Adam, ce que je laisse au lecteur Impartial le soin d’examiner

Des Maçons Acceptés proviennent les Vrais Maçons et des deux proviennent les Gorgomons, dont le Grand-Maître, le Volgl, tire son origine des Chinois, dont les écrits, si on peut les croire, soutiennent l’hypothèse des Pré-Adamites, et par conséquent doivent être plus anciens que la Maçonnerie.

La société la plus libre et la plus ouverte est celle du Grand Kaihebar, qui consiste en une compagnie choisie de gens compétents, dont le principal, sujet de conversation concerne le Commerce et les Affaires, et développe une amitié mutuelle sans contrainte ni restriction.

Mais si, après son admission dans les secrets de la Maçonnerie, quelque nouveau frère n’aime pas leurs façons et se met à réfléchir en voyant qu’on lui a soutiré aussi aisément son argent, se retire de la fraternité ou  bien se tient éloigné à cause des dépenses trimestrielles de la. Loge et des Communications trimestrielles, bien qu’il ait été légitimement admis dans une Loge Régulière et Constituée, il lui sera refusé le Privilège (en tant quo Frère Visiteur) de connaître le Mystère pour lequel il a déjà payé, ce qui est en contradiction manifeste avec l’Institution do la Maçonnerie elle-même, ainsi qu’il apparaîtra de toute évidence dans le  traité qui suit.



Gravure de Bernard Picart Grande Loge de Londres 1735
Illustrations de Cérémonies et coutumes religieuses de tous les peuples du monde
Source : Bibliothèque nationale de France
vue 105

Le Grade de l’Apprenti Entré

1

D.

D’où venez-vous?

R.

De la Sainte Loge de Saint Jean

2

D.

Quelles recommandations en avez-vous apportées ?

R.

Les recommandations que j’ai apportées des Très vénérables Frères et Compagnons de la Très Vénérable et Sainte Loge de Saint Jean d’où je viens, et vous salue trois fois de tout cœur.

3

D.

Que venez-vous faire ici ?

R.

Non pas faire ma propre volonté.

Mais soumettre mes passions: prendre en mains les Règles de la Maçonnerie. Et ainsi  faire des progrès quotidiens.

4

D.

Etes-vous Maçon ?

R.

Je suis reconnu et accepté comme tel parmi les Frères et Compagnons.

5

D.

Comment connaîtrai-je  que vous êtes Maçon ?

R.

Par les Signes et les Attouchements et les points parfaits de mon Entrée.

6

D.

Que sont les signes?

R.

Toutes équerres, angles et perpendiculaires

7

D.

Quels sont les attouchements?

R.

Certaines poignées de main régulières et fraternelles

8

Examinateur:

Donnez-moi les Points de votre Entrée.

Répondant:

Donnez-moi le premier et je vous donnerai le second.

9

Examinateur:

Je le garde.

Répondant:

Je le cache.

10

Examinateur:

Que cachez-vous ?

Répondant:

Tous secrets et mystères des Maçons et de la Maçonnerie, sauf à un Frère véritable et légitime après un examen en due forme, ou dans une Loge juste et vénérable de Frères et de Compagnons régu1ièrement assemb1és.

11

D.

Où avez-vous été fait Maçon?

R.

Dans une Loge juste et parfaite.

12

D.

Qu’est-ce qui fait une Loge juste et parfaite ?

R.

Sept ou plus.

13

D.

De quoi se composent-ils ?

R.

D’un Maître, de deux Surveillants, de deux Compagnons du Métier et de deux Apprentis Entrés.

14

D.

Qu’est-ce qui fait une Loge ?

R.

Cinq

15

D.

De quoi se compose-t-ils ?

R.

D’un Maître, de deux survei1lants, d’un Compagnon du Métier, d’un Apprenti Entré.

16

D.

Qui vous a amené en Loge ?

R.

Un Apprenti Entré.

17

D.

Comment vous y a-t-il amené ?

R.

Ni nu ni vêtu, ni pied nu ni chaussé, dépouillé de tous métaux et avançant dans une attitude droite.

18

D.

Comment avez-vous été admis ?

R.

Par trois grands coups.

19

D.

Qui vous a reçu ?

R.

Un Deuxième Surveillant.

20

D.

Qu’a-t--il fait de vous ?

R.

Il. m’a conduit à la partie Nord-Est de la Loge et m’a ramené ensuite à l’ouest  et m’a remis entre les mains du Premier Surveillant.

21

D.

Qu’a fait de vous le Premier Surveillant?

R.

Il m’a présenté et m’a montré comment marcher (par trois pas) vers le Maître.

22

D.

Qu’a fait de vous le Maître ?

R.

Il m’a fait Maçon.

23

D.

Comment vous a-t-il fait Magon?

R.

Avec le genou nu fléchi et le corps dans l’Equerre, le Compas ouvert sur le sein gauche nu, la main droite nue sur la Sainte Bible. Dans cette posture, j’ai prêté l’Obligation (ou serment) du Maçon.

24

D.

Pouvez-vous répéter cette Obligation?

R.

Je vais m’y efforcer,

(Ce qui est comme suit).

25

Moi, par ceci, solennellement je fais vœu et jure en Présence de Dieu Tout-Puissant et de cette Très Vénérable Assemblée, que je garderai et cacherai et jamais ne révélerai les Secrets ou Mystères des Maçons ou de la Maçonnerie qui me seront révélés, sauf à un Frère véritable et légitime, après un examen en due forme, ou dans une Loge juste et vénérable de Frères et de Compagnons régulièrement assemblés.

Je promets et fais vœu en outre que je nie les écrirai, ni ne les imprimerai, ni ne les marquerai, ni ne les taillerai ni ne les graverai, ou les ferai écrire, imprimer, marquer, tailler ou graver sur le bois ou la pierre, en sorte que le caractère ou l’impression visible d’une lettre puisse apparaître, par quoi on pourrait l’obtenir illicitement.

Tout ceci sous un châtiment qui ne saurait être moindre que d’avoir la gorge coupée, la langue ôtée du palais(1) de la bouche le cœur arraché la bouche, le cœur arraché d’en dessous le sein gauche, et qu’ils soient enterrés dans les sables do la mer, à une encablure du rivage, là où la marée monte et descend deux fois en 24 heures, mon corps étant réduit en cendres, mes cendres dispersées sur la surface de la terre en sorte qu’il ne subsiste plus aucun souvenir de moi parmi les Maçons.

Ainsi que Dieu me soit en aide.

1 Le texte anglais porte roof, mais il faut vraisemblablement lire root.

26

D.

Quelle est la forme de la loge?

R.

Une équerre.

27

D.

Quelle longueur?

R.

De l’Est à l’Ouest.

28

D.

Quelle largeur?

R.

Du Nord au Sud.

29

D.

Quelle hauteur?

R.

Des pouces, des pieds et des toises innombrables, aussi haut que les cieux.

30

D.

Quelle profondeur?

R.

Jusqu’au centre de la terre.

31

D.

Où se tient la Loge ?

R.

Sur une terre sainte, ou sur la plus haute colline ou la plus profonde vallée, ou dans la vallée de Josaphat, ou en tout autre lieu secret.

32

D.

Comment est-elle située ?

R.

Plein Est et Ouest.

33

D.

Pourquoi ainsi?

R.

Parce que toutes Eglises et Chapelles le sont ou devraient l’être ainsi.

34

D.

Qu’est-ce qui soutient une Loge ?

R.

Trois grandes colonnes.

35

D.

Comment les nomme-t-on?

R.

Sagesse, Force et Beauté.

36

D.

Pourquoi ainsi?

R.

Sagesse pour créer, Force pour soutenir et Beauté pour orner.

37

D.

De quoi votre Loge est-elle couverte?

R.

D’un dais nuageux de couleurs variées (ou des nuages).

38

D.

Avez-vous des meubles dans votre Loge ?

R.

Oui.

39

D.

Quels sont-ils ?

R.

Le pavé mosaïque, l’étoile flamboyante et la houppe dentelée. Quel est leur usage?

40

D.

Quel est leur usage?   

R.

Le pavé mosaïque est le sol de la Loge, l’Etoile Flamboyante, le Centre, et La houppe dentelée la bordure tout autour.

41

D.

Quels sont les autres meubles d’une loge ?

R.

La Bible, le Compas et 1’Equerre.

42

D.

A qui appartiennent-ils en propre?

R.

La Bible à Dieu, le Compas an Maître et 1’Equerre au Compagnon du Métier.

43

D.

Avez-vous des bijoux dans votre Loge ?

R.

Oui.

44

D.

Combien ?

R.

Six. Trois Mobiles et trois immobiles.

45

D.

Quels sont les bijoux mobiles ?

R.

L’équerre, le niveau et la perpendiculaire.

46

D.

Quel est leur usage ?

R.

L’équerre sert à tracer des lignes exactement à angle droit, le niveau à vérifier toutes les horizontales et la perpendiculaire à vérifier toutes les verticales.

47

D.

Quels sont les bijoux immobiles ?

R.

La planche à tracer, la pierre brute et la pierre ouvrée.

48

D.

Quel est leur usage ?

R.

La planche à tracer sert au Maître pour y dessiner ses projets, la pierre brute sert aux compagnons du Métier pour y essayer leurs bijoux et la pierre ouvrée à l’Apprenti Entré pour y apprendre à travailler.

49

D.

Avez-vous des Lumières dans votre Loge?

R.

Oui, trois.

50

D.

Que représentent-elles?

R.

Le Soleil, la Lune et le Maître Maçon.

Ces lumières sont trios grandes chandelles placées sur de hauts chandeliers.

51

D.

Pourquoi cela ?

R.

Le Soleil pour gouverner le Jour, La Lune, la Nuit et le Maître Maçon sa Loge.

52

D.

Avez-vous des lumières fixes dans votre Loge ?

R.

Oui.

53

D.

Combien?

R.

Trois.

N.B. Ces lumières fixes sont trois fenêtres, Qu’on suppose (mais ce n’est pas le toujours le cas) se trouver dans toute salle où une Loge est tenue, mais plus exactement les quatre points cardinaux conformément aux antiques règles de la Maçonnerie.

54

D.

Comment sont-elles disposées ?

R.

L’Est, au Sud et à l’Ouest.

55

D.

Quel est leur usage ?

R.

Eclairer les hommes lorsqu’ils vont au travail, lorsqu’ils y sont, et lorsqu’ils en reviennent.

56

D.

Pourquoi n’y a-t-il pas de lumière au Nord?

R.

Parce que le Soleil n’envoie aucun rayon à partir de cette région.

57

D.

Où se tient votre Maître ?

R.

A l’Est.

58

D.

Pourquoi cela?

R.

Comme le Soleil se lève à l’est pour ouvrir le jour, de même le Maître se tient à l’Est (avec la main droite sur le sein gauche, ce qui est un signe et l’équerre au cou) pour ouvrir la Loge et mettre ses hommes au travail.

59

D.

Où se tiennent vos Surveil1ants ?

R.

A l’Ouest.

60

D.

Quel est leur devoir?

R.

Comme le soleil se couche à l’ouest pour fermer le jour, de même les Surveillants se tiennent à l’ouest (avec la main droite sur le sein gauche, ce qui est un signe et le niveau et l’équerre au cou) pour fermier la Loge et renvoyer les hommes du travail en leur payant leur salaire.

61

D.

Où se tient le plus ancien Apprenti Entré?

R.

Au Sud.

62

D.

Quel est son office?

R.

Entendre et recevoir les instructions et accueillir les Frères étrangers.

63

D.

Où se tient le dernier Apprenti entré ?

R.

Au Nord.

64

D.

Quel est son devoir?

R.

Ecarter les manœuvres et les indiscrets.

65

D.

Si un manœuvre (ou un écouteur aux portes) est attrapé, comment doit-on le punir?

R.

En le plaçant sous les gouttières des Maisons (lorsqu’il pleut) jusqu'à’ à ce que 1’ eau lui entrant par les épaules ressorte par les souliers

66

D.

Quels sont les secrets d’un Maçon?

R.

Des signes, des attouchements et de nombreux mots.

67

D.

Où conservez-vous ces secrets ?

R.

Sous mon sein gauche.

68

D.

Avez-vous une clé pour ces secrets ?

R.

Oui.

69

D.

Où la gardez-vous ?

R.

Dans une boîte en os qui ne peut être ouverte ou fermée qu’avec des clés d’ivoire.

70

D.

Pend-elle ou gît-elle ?

R.

Elle pend.

71

D.

A quoi pend-elle ?

R.

A un câble de 9 pouces ou un empan.

72

D.

De quel métal est-elle ?

R.

D’aucun métal ; mais c’est une langue du bon renom aussi bonne dans le dos d’un Frère qu’en face de lui.

N.B. La clé est la langue, la boîte en os les dents, le câble la racine de la bouche(1).             

 (1)Le texte anglais porte également ici roof. II faut vraisemblablement lire encore root.

73

D.

Combien y a-t-il de principes en Maçonnerie?

R.

Quatre.

74

D.

Quels sont-ils?

R.

Le point, la ligne, la surface et le volume.

75

D.

Expliquez-les.

R.

Le point est le centre  (à partir duquel le Maître ne peut s’égarer) la ligne est la longueur sans largeur, la surface la longueur et la largeur, le volume englobe le tout.

76

D.

Combien de signes principaux ?

R.

Quatre.

77

D.

Quels sont-ils?

R.

Le Guttural, le pectoral, le manuel et le pédestre.

78

D.

Expliquez-les.

R.

Le Guttural, la gorge; le pectoral, la poitrine; le manuel, la main; le pédestre, le pied.

79

D.

Qu’apprenez-vous comme gentilhomme Maçon?

R.

La discrétion, la moralité et la bonne amitié.

80

D.

Qu’apprenez-vous comme Maçon opératif ?

R.

A tailler, à équarrir, à façonner la pierre, à poser un niveau et à dresser une perpendiculaire.

81

D.

Avez-vous vu votre Maître aujourd’hui ?

R.

Oui.

82

D.

Comment était-il vêtu ?

R.

D’une veste jaune et d’une culotte bleue.

N.B. La veste jaune est le compas et la culotte bleue les pointes d’acier.

83

D.

Pendant combien de temps servez-vous votre Maître ?

R.

Du lundi matin au samedi soir.

84

D.

Comment le servez-vous ?

R.

Avec la craie, le charbon de bois et la terrine.

85

D.

Que désignent-i1 ?

R.

Liberté, Ferveur et Zèle.

86

Examinateur:

Dormez-moi le signe d‘Apprenti Entré

Répondant:

Etendre les quatre de la main droite et les retirer en travers de la gorge, o’ est le signe, et il demande l’attouchement,

N.B. L’attouchement se fait en pressant l’extrémité du pouce de_1a main droite sur la première articulation de1’index de 1a main droite du Frère. Il demande un mot.

87

D.

Donnez-moi le mot,

R.

Je l’épellerai avec vous.

88

Examinateur:

BOAZ

R.

(N, B.    L’Examinateur dit B, le Répondant O, l’Ex. A, le Rép. Z, c’est-à-dire BOAZ).

89

D.

Donnez-moi un autre.

R.

JACHIN

(N.B. Boaz et Jachin étaient deux colonnes dans le porche de Salomon.    I Rois chap. VII, vers. 21)

90

D.

Quel âge avez-vous ?

R.

Moins de sept (signifiant qu’il n’est  passé-Maître).

91

D.

A quoi sert le jour?

R.

A voir.

92

D.

A quoi sert la nuit ?

R.

A entendre.

93

D.

Comment souffle le vent?

R.

Plein est et ouest.

94

D.

Quelle heure est-il?

R.

Midi plein

Fin de la partie de l’Apprenti Entré



Le Grade du Compagnon du Métier

95

D.

Etes-vous Compagnon du Métier ?

R.

Je le suis.

96

D.

Pourquoi avez-vous été fait Compagnon du Métier ?

R.

Pour connaître la lettre G.

97

D.

Que signifie ce G?

R.

Géométrie, ou la cinquième science.

98

D.

Avez-vous jamais voyagé?

R.

Oui. A l’est et à l’ouest.

99

D.

Avez-vous jamais travaillé ?

R.

Oui, à la construction du Temple.

100

D.

Où avez-vous reçu votre salaire ?

R.

Dans la chambre du milieu.

101

D.

Comment êtes-vous parvenu  dans la chambre du milieu ?

R.

Par le porche.

102

D.

Lorsque voua êtes passé par le porche, qu’avez-vous vu?

R.

Deux grandes colonnes.

103

D.

Comment les appelle-t-on?

R.

J. B., c’est-à-dire Jachin et Boaz.

104

D.

Quelle est leur hauteur?

R.

Dix-huit coudées.

105

D.

Quelle est leur circonférence ?

R.

Douze coudées.

106

D.

De quoi étaient-elles ornées ?

R.

De deux chapiteaux.

107

D.

Quelle était le, hauteur des chapiteaux ?

R.

Cinq coudées.

108

D.

De quoi sont-ils ornés ?

R.

D’un réseau et de grenades.

109

D.

Comment êtes-vous parvenu dans la chambre du milieu?

R.

Par un escalier double en forme de vis.

110

D.

De combien ?

R.

Sept ou plus.

111

D.

Pourquoi sept ou plus ?

R.

Parce que sept ou plus font une Loge Juste et parfaite.

112

D.

Lorsque vous êtes parvenu à la porte de la chambra du milieu, qui avez-vous vu ?

R.

Un surveillant.

113

D.

Que vous a-t-il demandé ?

R.

Trois choses,

114

D.

Lesquelles ?

R.

Un signe, un attouchement et un mot.

N.B. Le signe se fait en plaçant la main droite sur le sein gauche, l’attouchement se fait en joignant votre main droite à celle de la Personne qui le demande, et en pressant avec 1’extrémité du pouce sur la première articulation du médium, et  le mot est Jachin.

115

D.

Quelle hauteur avait la porte de la chambre du milieu?

R.

Elle était si grande qu’un manœuvre ne pouvait l’atteindre pour y piquer une épingle. (gros clou, cheville, broche, axe d’une clé)

116

D.

Lorsque vous êtes arrivé dans la chambre du milieu, qu’avez-vous vu?

R.

La ressemblance de la lettre G.

117

D.

Que signifie ce G?

R.

Quelqu’un qui est plus grand que vous.

118

D.

Qui est plus grand que moi, qui suis un Maçon Franc et accepté, le Maître d’une Loge?

R.

Le Grand Architecte et Créateur de l’univers, ou Celui qui fut porté sur le sommet du pinacle du saint Temple.

119

D.

Pouvez-vous répéter la  lettre G?        

R.

Je vais m’y efforcer

            La répétition de la lettre G.

Répondant:

Au milieu du Temple de Salomon il y a un G,
Lettre pour tous belle à lire et à voir.
Mais seul un petit nombre comprend
Ce que signifie cette lettre G.

Examinateur:

Mon ami, ai vous prétendez être
De cette Fraternité
Vous pouvez dire exactement et sur-le-champ
Ce que signifie cette lettre G.

Répondant:

Par les sciences sont amenés à la lumière
Des corps de diverses sortes,
Qui apparaissent parfaitement à la vue ?
Mais personne sinon des mâles ne connaîtra ma pensée.

Examinateur:

Le Très le fera.

Répondant:

Si Vénérable.

Examinateur:

A la fois Très et Vénérable je suis De vous saluer j’ai ordre,
Afin que voue me fassiez savoir sur-le-champ, comment j e puis vous comprendre.

Répondant:

Par Lettres quatre et Science cinq
Ce G se tient exactement
En juste art et proportion,
Voua avez votre réponse, Ami.

N.B. Les quatre lettres sont BOAZ. La cinquième Science Géométrie

Examinateur:

Mon Ami, vous répondez bien,
Si les droits et libres principes vous découvrez
Je changerai votre nom d’Ami
Et désormais tous appelleront frère.

Répondant:

Les sciences sont bien composées
De vers d’une noble venue,
Un point, une ligne et un extérieur ;
Mais un solide est le dernier.

Examinateur:

Que le bon salut de Dieu soit dans notre heureuse rencontre.

Répondant:

Et tous les Très Vénérables Frères et Compagnons.

Examinateur:

De la Très Vénérable et Sainte Loge de St Jean.

Répondant:

D’où je viens.

Examinateur:

Vous saluent, vous saluent, vous saluent trois fois, de tout cœur, vous priant de faire connaître votre nom.

Répondant:

Timothy Ridicule.

Examinateur:

Bienvenue, Frère, par la Grâce de Dieu.

N.B. La raison pour laquelle ils se disent de la Saintes Loge de Saint Jean est qu’il fut le précurseur de Notre Sauveur, et qu’il trace la première ligne parallèle à l’Evangile (d’autres assurent que notre Sauveur lui même fut accepté Franc-Maçon lors de son incarnation) mais combien cela semble ridicule et profane. Je le laisse à la réflexion du lecteur sensé.

Fin de la partie de Compagnon du Métier.

 Le Grade de Maître 

D.

Etes-vous Maître Maçon?

R.

Je le suis ; examinez-moi, éprouvez-moi, désapprouvez-moi si vous pouvez.

D.

Où avez-vous été passé Maître ?

R.

Dans une Loge parfaite de Maître.

 

D.

Qu’est-ce qui fait une Loge parfaite de Maîtres ?

R.

Trois.

D.

Comment êtes-vous parvenu à être passé Maître ?

R.

Avec le secours de Dieu, l’Equerre et mon propre travail.

D.

Comment avez-vous été passé Maître?

R.

De l’Equerre au Compas.

D.

Je présume que vous avez été Apprenti Entré ?

R.

Jachin et Boaz j’ai vu; Un très bon Maître-Maçon j’ai été fait, Avec le losange, la Pierre taillée et l’Equerre.

D.

Si un Maître-Maçon vous voulez être  Vous devez comprendre parfaitement la Règle de Trois. Et M.B. (Machbenah) vous rendra libre : Et ce que vous désirez en Maçonnerie Te sera montré dans cette Loge.

R.

Je comprends la bonne Maçonnerie Les clés de toutes les Loges sont à ma disposition.

D.

Vous êtes un Compagnon héroïque ; d’où venez-vous ?

R.

De l’Est.

D.

Où allez-vous ?

R.

A l’Ouest.

Examinateur:

Qu’allez-vous faire dans cette direction ?

R.

Chercher ce qui a été perdu et est maintenant retrouvé.

Examinateur

Qu’est-ce qui a été perdu et est maintenant retrouvé ?

R.

Le mot de Maître-Maçon.

Examinateur:

Comment a-t-il été perdu?

R.

Par Trois Grands Coups, ou la Mort de notre Maître Hiram.

Examinateur:

Comment trouva-t-il la mort?

R.

Il était Maître Maçon lors de la construction du temple de Salomon, et à 12 heures de midi plein, tandis que les hommes étaient partis se reposer, il vint inspecter les travaux comme il en avait l’habitude. Lorsqu’il fut entré dans le Temple, trois scélérats, supposés être trois Compagnons du Métier, se postèrent aux trois entrées du Temple. Lorsqu’il sortit, l’un lui demanda le Mot de Maître ; et il lui répondit qu’il ne l’avait pas reçu de cette manière mais que le temps et un peu de patience le lui ferait obtenir. Mécontent de cette réponse, le scélérat lui porta un coup qui le fit chanceler. Il alla à l’autre porte où, accosté de la même manière et donnant la même réponse, il reçut un coup plus fort, et au troisième son coup de grâce.

Examinateur

Avec quoi les scélérats la tuèrent-ils?

R.

Un maillet, un levier et une masse.

Examinateur

Comment se débarrassèrent-ils de son corps?

R.

Ils le transportèrent hors du Temple par la porte Ouest et le cachèrent sous des décombres jusqu’à 12 heures pleines à nouveau.

Examinateur

Quelle heure était-ce ?   

R.

12 heures pleines de la nuit, tandis que les hommes étaient au repos.

Examinateur

Comment se débarrassèrent-ils de son corps ensuite?

R.

Ils le transportèrent jusqu’en haut d’une colline où ils firent une tombe décente et l’ensevelirent.

Examinateur

Quand s’aperçut-on de son absence?

R.

Le même jour.

Examinateur

Quand fut-il retrouvé?

R.

Quinze jours plus tard.

Examinateur

Qui le retrouva?

R.

Quinze Frères dévoués, sur l’ordre du Roi Salomon, sortirent par la porte ouest du Temple et se dispersèrent de droite à gauche, à portée de voix l’un de l’autre. Ils convinrent que, s’ils ne trouvaient pas le Mot sur lui ou près de lui, le premier Mot serait le Mot de Maître. Un des Frères, plus las que les autres, s’assit pour se reposer et, saisissant un arbuste, qui céda aussitôt, et s’apercevant que le sol avait été défoncé, il appela ses Frères. En poursuivant leurs recherches, ils le trouvèrent décemment enseveli dans une belle tombe de 6 pieds à l’est, 6 pieds à l’ouest et 6 pieds perpendiculaires; elle était couverte de mousse et de gazon verts, ce qui les surprit. Sur quoi, ils s’écrièrent : Nuscus Domus Dei Gratia, ce qui, selon La Maçonnerie, veut dire Rendons grâce à dieu, notre Maître a une maison moussue, Aussi la recouvrirent-ils avec soins, et, comme autre ornement, placèrent une branche de Cassia à la tête de sa tombe. Puis ils revinrent avertir le Roi Salomon.

Examinateur

Que dit le Roi Salomon de tout cela ?

R.

Il ordonne de le relever et de l’ensevelir décemment et que 15 compagnons du métier en gants et tabliers blancs assistent à ses obsèques ( qui doivent être célébrées parmi les Maçons jusqu’à ce jour ).

Examinateur

Comment Hiram fut-il élevé ?

R.

Comme le sont tous les autres Maçons, lorsqu’ils reçoivent le Mot de Maître.

Examinateur

Comment cela ?

R.

Par les cinq points du Compagnonnage.

Examinateur

Quels sont-ils?

R.

Main à Main, Pied à Pied, Joue à Joue, Genou à Genou, Main dans le dos.

N.B.  Lorsque Hiram fut relevé, ils le prirent par les index et la peau se détacha, ce qu’on appelle le glissement. Etendre la main droite et placer le médium sur le poignet, en serrant l’index et l’annulaire sur les côtés du poignet, cela s’appelle la poignée de main. Le signe se fait en plaçant le pouce de la main droite sur le sein gauche et en étendant les doigts.

Examinateur

Quel est le nom d’un Maître Maçon ?

R.

Cassia est son nom, et je viens d’une Loge juste et parfaite.

Examinateur

Hiram fut-il enterré ?

R.

Dans le sanotum Sanatorum. (1)

(1) Le Saint des Saints.

Examinateur

Par Où fut-il amené?

R.

Par la porte ouest du Temple.

Examinateur

Quels sont les bijoux du Maître ?

R.

L’arcade, le dormant et le pavé d’équerre

D.

Expliquez-les.

R.

L’Arcade est l’entrée du sanctum sanctorum, le dormant les fenêtres ou les lumières à l’intérieur, le pavé d’équerre le sol.

Examinateur

Donnez-moi le Mot de Maître.

R.

Il le murmure à l’oreille, et, dans la posture des Cinq Points du Compagnonnage ci-dessus indiqués, dit Machbenah, ce qui signifie L’Architecte est  frappé.

N.B. Si des Maçons sont au travail sur un chantier, et si vous désirez reconnaître les Maçons Acceptés des autres, prenez un morceau de pierre, et demandez-lui ce qu’il sent : il répondra immédiatement: ni le cuivre, ni le fer, ni l’acier, mais le Maçon. Ensuite, si vous lui demandez son  âge, il répondra «au-dessus de sept», ce qui signifie qu’il est passé Maître. 

Fin de la Partie de Maître

L'Auteur se justifie lui-même
en raisons des préjugés
d'une partie de l'Humanité

De tous les abus qui sont apparus dans l’humanité, aucun n’est aussi ridicule que le Mystère de la Maçonnerie, qui a diverti le monde et suscité diverses interprétations. Ces soi-disant secrets, (qui sont) sans valeur, ont été, quoique incomplètement, révélés, et l’Article essentiel, c’est-à-dire l’Obligation, a été plusieurs fois imprimée dans les journaux publics, mais il est entièrement authentique dans le Daily  Journal du Samedi 22 août 1730 qui s‘accorde par sa véracité avec ce qui est donné dans cet opuscule. En conséquences, lorsque l’obligation du secret est abrogée, le susdit Secret devient sans effet et doit être entièrement aboli. Car quelques Maçons Opératifs (mais selon la manière polie de s’exprimer, des Maçons Acceptés) rendirent visite, venant de la première et  plus ancienne Loge constituée (selon le Livre des Loges de Londres), dans une Loge réputée de cette ville, où l’entrée leur fut refusée sous le motif que leur vieille Loge s’était transférée dans une autre maison, ce qui, bien qu’en contradiction avec ce grand Mystère, exige une autre constitution, à un prix qui n’est pas inférieur à douze guinées, avec un divertissement élégant, sous le prétexte de servir à des fins charitables, ce qui, si c’est exact, mériterait de grands éloges à une si digne entreprise. Mais on peut en douter et il est plus raisonnable de penser que cela sera dépensé en vue de constituer un autre système de Maçonnerie, l’ancienne structure étant si délabrée que, à moins d’être renforcée par quelque Mystère occulte, elle sera bientôt réduite à néant.

J’ai été amené à publier ce puissant Secret pour le Bien public, à la demande de plusieurs Maçons,  et cela donnera, j’espère, entière satisfaction, et cela aura son effet souhaité en empêchant un si grand nombre de personnes crédules d’être attirées dans une Société aussi pernicieuse.

FINIS

LISTE DES LOGES RÉGULIÈRES
PAR ORDRE D’ANCIENNETÉ ET DE CONSTITUTION

1.    Les Armes du Roi, dans Saint Paul’s Church Yard. 1er et 3e lundis de chaque mois. Constituée en 1691.
2.    La Rose et le Taureau, contre l’auberge Furnival, Holborn. 1er mercredi. 1712.
3.    La Taverne de la Corne, à Westminster. 3e vendredi.
4.    Le Cygne, Hampstead. 1er et 3e samedis. 17 janv. 1722.
5.    Les Trois Cygnes, dans Poultry. 2ème vendredi. 11 juillet 1721.
6.    Le Café de Tom, dans Clare Street près Clare Market. 2e et 4e mardis. 19 janv. 1722.
7.    La Coupe, dans Queen Street, Cheapside. 2e et 4e jeudis. 28 janv. 1722.
8.    La Taverne du Diable, à Temple Bar. 2e mardi. 25 avril 1722.
9.    Le Tonneau, dans Noble Street. 1er et 3e mercredis. Mai 1722.
10.  Le Lion et le Bouclier, dans Brewer Street. Dernier jeudi. 25 nov. 1722.
11.  La Tête de Reine, dans Knaves Acre. 1er et 3e mercredis. 27 février 1722-3.
12.  Les Trois Tonneaux, dans Swithin’s Alley. Vè mardi. 27 mars 1723.
13.  L’Ancre, dans Dutchy Lane. 2e vendredi et dernier lundi. 28 mars 1723.
14.  La Tête de Reine, dans Great Queenstreet. 1er et 3e lundis. 30 mars 1723.
16.  Le Lion Rouge, dans Tottenham Court Road. 3e lundi. 3 avril 1723.
17.  Le Taureau et la Jarretière, dans Bloomsbury. ler et 3e jeudis. 1723.
18.  La Couronne et le Coussin, à Ludgate Hill. ler mercredi. 5 mai 1723.
19.  Le Dragon vert, à Snow Hill. let et 3e lundis. 1723.
20.  Le Dauphin, dans Tower Street. 3e mercredi. 12juin 1723.
21.  La Tête de Baudet, dans Prince’s Street, Drury Lane. 2e et dernier jeudis.
22.  Le Navire, à Fish Street Hill. 1er vendredi. 11 septembre 1724.
23.  La Demi-Lune, dans Cheapside.1er et 3e mardis. 11 septembre 1723.
24.  La Couronne, hors les murs à Cripplegate. 2e et 4e vendredis.
25.  La Mitre, à Greenwich. Dernier samedi. 24 décembre 1723.
26.  Les Armes du Roi, dans le Strand. 4e mardi. 25 mars 1724.
27.  La Couronne et le Sceptre, dans St Martin’s Lane. 2e et dernier lundis. 27 mars 1734.
28.  La Tête de Reine, dans la ville de Bath. Dernier jeudi.
29.  La Tête de Reine, dans la ville de Norwich.
30.  Le Cygne, dans la ville de Chichester. 3e vendredi.
31.  Le Taureau Fie, dans Northgate Street, Ville de Chester.
32.  Le Château et le Faucon, dans Watergate Street, ville de Chester,
33.  La Tête de Baudet, dans Carmarthen, Galles du Sud.
34.  Les Armes de l’East India, à Gosport dans le Hampshire. 2e jeudi à 3 heures.
35.  L’Ange, à Congleton dans le Cheshire.
36.  Les Trois Tonneaux, dans Wood Street. 1er et 3e jeudis. Juillet 1724.
37.  Le Cygne, à Tottenham High Cross. 2e et 4e samedis. 22janvier 1725.
38.  Le Cygne et la Coupe, dans Finch Lane. 2e et dernier mercredis. Février 1725.
39.  La Tête de St-Paul, dans Ludgate Street. 2e et 4e lundis. Avril 1725.
40.  Le Sarment de Vigne, dans Flolborn. W lundi. 10 mai 1725.
41.  La Têté d’Henry VIII, dans St Andrew Street, près des sept cadrans. 4è lundi.
42.  La Rose, à Mary-la-Bone. W lundi l’hiver et 3e lundi l’été. 25 mai 1725.
43.  Le Cygne, dans Grafton Street, Ste Anne, Soho. W et dernier mercredis. Septembre 1725.
44.  Le Cerf Blanc, hors les murs à Bishopsgate. 1~ mardi. 19janvier 1726.
45.  Le Café Mount, dans Grosvenor Street, près de Hanover Square. 1er mercredi. 12janvier 1727.
46.  Les Trois Couronnes, à Stoke Newington. 1er samedi. 9 août 1727.
47.  La Tête de Roi, à Salford, près de Manchester. 1er lundi.
48.  Le Château, dans Holborn. 2e et dernier mercredis. 31 janvier 1727-8.
49.  Les Trois Fleurs de Lys, dans St Bernard Street, à Marid. ler dimanche.
50.  Le Sac de Coton, dans Warwick. 1er et 3e vendredis. 22 avril 1728.
51.  Le Café de Bishopsgate. 1er et 3e mercredis. 1728.
52.  La Rose et la Couronne, dans Greek Street, à Soho. 1er et 3e vendredis. 1728.
53.  Le Lion Blanc, à Richmond. 1er et 3e samedis à midi.
54.  La Couronne et l’Ancre, dans Shorts Gardens.
55.  La Tête de la Reine Elizabeth, dans Pittfield Street à Hoxton. W 1er et 3è lundis.
56.  La Couronne, dans la Halle aux blés, à Oxford. Chaque jeudi. 8 août 1729.
57.  Les Trois Tonneaux, à Scarsborough. 1er mercredi. 7 août 1729.
58.  Les Trois Tonneaux, à Billingsgate. 2e et 4e jeudis. 22janvier 1730.
59.  Les Armes du Roi, dans Cateton Street. 1er et 3e vendredis. 24janvier 1730.
60.  Ceorge, à Northampton. W samedi. 16janvier 1730.
61.  Prince William, à Charing Cross. 2e et 4e lundis. 26 février 1730.
62.  L’Ours, dans Butcher Row. W et 3e vendredis. 6 mars 1730.
63.  La Colline St Roch, près de Chichester dans le Sussex.
       Une fois l’an, c’est-à-dire le mardi de la semaine de Pâques. Sous le règne de Jules César.
64.  Le Lion Rouge, dans la ville de Canterbury. 1er et 3e mardis. 3 avril 1730.
65.  Le Café de Dick, dans Gravel Street à Hatton garden. Dernier jeudi. 16 avril 1730.
66.  Les Clous Dorés, à Hamstead. 2e et 4e samedis, 28 avril 1730.
67.  La Tête de Roi, dans Fleet Street. 2e et 4e vendredis. 22 mai 1730.

NOTES

1.      Catechetical: de catéchèse. Nous nous sommes risqué à traduire par catéchisme car les problèmes de catéchèse sont le fait de clercs, alors que les questions que l’on peut poser ~ un candidat maçon ne peuvent être de catéchèse, mais de catéchisme.

2.         On comprendra que le terme furnitures ne pouvait mieux se traduire que par s meubles ». Étant donné ce que sont ici les meubles, il n’était pas sans intérêt de noua en tenir à ce terme qui possède, entre autres, un sens héraldique.

3.         Rough ashler. Ashler désigne une pierre taillée utilisée pour la face extérieure du mur, ou pierre cubique. (Early Masonic Catechisms p. 241.) Le terme rough suggère qu’il s’agit d’une pierre dure, propre à l’appareil du mur.

4.         Broach’d thurnel. C’est une corruption de broached ornel: une pierre assez tendre travaillée au ciseau ou à la laie (E.M.C., p. 241). Le travail à la laie ne donne pas une pierre polie, c’est pourquoi nous traduisons par le terme de pierre dégrossie

5.         On remarquera les nombreuses erreurs que comportent le signe, l’attouchement et les mots.

6.         Notre traduction est de nature à ne pas dérouter les maçons de langue française. Il convient toutefois de noter qu’en anglais la phrase est: « For the sake of the letter  G. . Cela pourrait se traduire par: Pour l’amour de la lettre G.»  C’est là une traduction extrême mais le caractère polémique de sake devait laisser ce sens présent à l’esprit du maçon de 1730.

7.         Combien? Juste après la question des escaliers, constituait un coq-à-l’âne incompréhensible. C’est pourquoi nous avons ajouté entre crochets un complément explicatif autorisé par la suite du texte.

8.         Where was you pass’d Master? dit le texte anglais. Il ne s’agit pas pour autant de devenir passé maître » mais simplement d’être reçu maître. L’expression est cependant ~ retenir car les ~‘ passed masters » apparaîtront quelques années plus tard dans la Franc-Maçonnerie.

9.         Nous soumettons bien volontiers cette réplique à la discussion des anglicistes: « A Setting Maul, Setting Tool and Setting Beadle.» Beadle est sans doute une altération de beetle (masse). Quant à setting tool, « outil de pose », nous avons cru pouvoir le traduire par « niveau ». On pourrait aussi le traduire par « levier », dans la mesure où le verbe to set signifie « poser» mais aussi « mettre en place».


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