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Le silence de l’apprenti

Aucun FM\, à quelque grade qu’il appartienne, ne peut s’empêcher de faire le rapprochement entre « l’Ecole du Silence »  et son degré d’initiation. C’est en effet par la rencontre du silence et de l’expérience de notre chemin initiatique que l’éveil se produit à l’intérieur de chacun d’entre nous, provoquant en nous une certaine libération de nos chaînes et métaux à chaque stade de notre évolution infinie.

La définition du Silence Initiatique

Le silence commence par l’étouffement intérieur de nos relations extérieures, qui nous permet d’atteindre le néant à partir duquel nous pouvons agir en notre for intérieur, à commencer par la découverte très difficile de notre intériorité. Il est à noter que ce silence du dedans n’a rien à voir avec le silence du monde extérieur. C’est ainsi qu’il peut y avoir beaucoup de bruit autour de nous sans que cela ne nous empêche de nous retrouver en état de silence ; inversement, en plein désert, nous pouvons nous trouver en faux silence, bavardant avec nous-même par exemple, en nous interrogeant sur notre ravitaillement ou angoissant sur une éventuelle attaque de preneurs d’otage.

Par conséquent, le silence est un état d’esprit, et il devient SECRET si un rituel nous y oblige. Et c’est ce que le REAA\ nous impose sur ce qui est vu et entendu en loge à travers les paroles du V\M\ qui nous demande, à la fin des travaux, ceci : « Dégantez-vous mes FF\, nous ne sommes plus à l’ordre, retirons-nous en paix en jurant de garder la loi du silence », et d’une seule voix, nous lui répondons : « Je le jure ! ».

C’est ce Silence-Secret qui a toujours inquiété les autorités ecclésiastiques du XVIII° siècle jusqu’à faire condamner la FM\ par une bulle du Pape en 1738, y voyant un complot des libres penseurs contre la toute puissance idéologique de l’Eglise qui dirige la pensée des catholiques.

Or, la puissance du FM\ accompli c’est de pouvoir aboutir au secret de son silence par la méditation personnelle. Il s’agit d’une discipline intérieure propre à chacun : elle est incommunicable et indéfinissable. Et c’est ce qui excite nos détracteurs à vouloir à tout prix nous taxer de comploteurs et de maffieux. Ils ne peuvent comprendre que notre expérience individuelle n’existe que dans notre cœur et notre esprit, et qu’elle est propre à chacun d’entre nous.

Ce Silence-Secret maçonnique se caractérise par sa triple composition : il y a d’abord ce que l’on reçoit en silence au cours de la cérémonie d’initiation, puis ce dont il est interdit de parler, et enfin ce dont il est difficile de parler à travers sa propre évolution intérieure sur son chemin initiatique. Et en conservant jalousement ce silence, nous renforçons notre illumination intérieure qui nous mène à plus d’éveil tout en nous donnant une plus grande force intérieure pour atteindre le beau et la sérénité.

En fait, le silence initiatique ne présente aucun enseignement pour autrui. Il a seulement l’avantage d’offrir à l’Initié des conditions d’existence favorisant la découverte de sa nudité intérieure qui se révélera au jeune Initié en vue de lui permettre de se perfectionner et pour pouvoir ensuite mieux agir au Dehors où il a le devoir de participer à l’amélioration de l’humanité.

Cet apprentissage du silence se pratique généralement en 2 étapes : la connaissance de soi et nos relations avec l’extérieur, avec autrui.

La 1ère étape de l’apprentissage du Silence : la connaissance de soi

Le silence exige d’abord un long apprentissage et une grande persévérance. Ce n’est sûrement pas son épreuve durant une année maçonnique entière imposée au jeune Apprenti qui suffirait. En effet, cela relève plutôt de l’accomplissement de l’initiation. Les hommes ne deviennent pas de vrais Initiés du seul fait de porter un Tablier. C’est une véritable ascèse.

Certes, l’Apprenti subit il un stage du Silence en s’interdisant de parler, en s’astreignant à écouter, sous la forme d’une discipline intellectuelle l’aidant à mieux apprendre à réfléchir sa pensée. C’est ainsi que ses idées mûrissent mieux grâce à la méditation intérieure qui est une conversation avec soi même. Certes, l’Apprenti ne vit pas encore l’état de silence puisqu’il entend ce qui se dit autour de lui en loge. Mais lui, au milieu du groupe de ses FF\ en loge, il est celui qui produit le silence pour peu que ses FF\ plus gradés portent attention à sa présence parmi eux. Et dans ce cas positif, il devient émetteur de silence et il apprend alors à en apprécier l’importance et la valeur. Savoir se taire devient alors une force créatrice qui porte une dynamique intérieure invitant l’Apprenti à désencombrer sa mémoire, son mental et son cœur, pour arriver à faire le vide en lui-même. Cette discipline est difficile à réaliser, car elle suppose une loge parfaite où tous les FF\ sont à l’unisson, permettant d’atteindre l’égrégore qui se manifeste aussi à travers ce riche silence de l’Apprenti.

Cette observation du silence par l’Apprenti est le plus grand instrument initiatique du REAA\. Il doit, en effet, avoir mené chacun d’entre nous à la connaissance de soi, ce qui est la base de toute connaissance des autres et de l’Univers, comme l’affirmait Socrate, père fondateur de la Philosophie. Par ce moyen, consistant en une perpétuelle recherche intérieure, le Silence conduit le FM\ à la découverte de son fond, de son ego véritable. Et en poussant plus loin son action sur lui-même face à ses propres exigences de soi, le FM\ aboutit à une maîtrise de soi tout en continuant à se perfectionner à travers sa propre formule « V.I.T.R.I.O.L. », qui se traduit concrètement par ceci : « Renonce au bruit du monde, descends en toi-même, c’est là que se trouve le trésor caché de ta spiritualité ». Or, ce trésor caché c’est notre lumière intérieure qui devrait nous guider à partir de la fouille de notre moi profond. Pour y réussir, faut il encore, constamment et quels que soient nos grades et qualités, en éternels apprentis, « écouter, méditer, persévérer, et nous montrer fraternels en toute circonstance », permettant à chacun d’entre nous de se transcender.

Mais il faut reconnaître que, pour l’Apprenti, cette ascèse est particulièrement difficile à suivre au début de son chemin initiatique, car il lui faut se déstructurer pour se restructurer. Cela exige beaucoup de courage et de force de caractère, et surtout une grande humilité, cette vertu des Saints, et que je qualifie de vertu mère des 3 grandes vertus théologales : Amour, Espérance et Charité.

Cette ascèse de comportement de l’Apprenti l’amènera alors à devenir un véritable esprit libre, en se purifiant des aspérités de sa Pierre Brute. Il lui arrivera de devoir garder le silence en écoutant certains de ses FF\ plus gradés émettre des thèses heurtant ses connaissances bien fondées et justes. Sa discipline à se taire le mènera à mieux réfléchir encore, entouré de sagesse, pour le jour où, ayant enfin droit à la parole, il puisse développer sa pensée dans le calme, l’exprimant au moment opportun, enrichissant ses FF\ de sa propre lumière intérieure, si chèrement acquise par sa laborieuse ascèse.

Grâce à cette ascèse du Silence, le FM\ ne cherchera pas son salut par une récompense ultérieure, comme chez les religieux. Son chemin initiatique le mène d’abord à sa libération intérieure. Il ne cherchera pas à se retirer du monde, mais plutôt à vaincre ses passions et à combattre ses défauts pour pouvoir mieux vivre avec l’humanité environnante qui l’appelle à son secours.

La 2ème étape de l’apprentissage du Silence : les relations avec autrui

Ayant acquis la faculté de se connaître grâce à sa discipline intérieure du Silence, le jeune FM\ va pouvoir s’adresser à son imagination pour l’épanouir dans la solitude et la communication avec autrui. Le Silence va offrir à l’Apprenti la faculté de décrypter son voisin sans devoir bavarder avec lui, mais tout simplement par sa nouvelle force de mieux connaître les autres.

En effet, grâce à la loi du Silence, il aura appris à respecter la différence de l’autre, avec ses propres croyances et habitudes de vie, qu’il va devoir accepter tel qu’il est, par amour fraternel. C’est ce que l’on appelle la Tolérance du Silence, qui fait admettre que les êtres sont différents et se complètent comme les notes différentes d’une mélodie ou comme les doigts d’une main. Et c’est encore le Silence qui permet à l’Apprenti de reconnaître l’harmonie qui règne dans ces différences, de discerner l’unité dans la diversité ou de réaliser l’union des contraires, ce qui caractérise l’esprit maçonnique.

Et lorsque l’Apprenti, que nous sommes tous ici en loge, aura réussi à comprendre tout cela, c’est que l’apprentissage de son silence s’est déjà accompli.

Voilà pourquoi tous nos rituels nous disent que nous ne nous initions que par nous-même, dans la réflexion et dans le silence de notre travail sur nous même. Par cet effort constant sur nous même et dans le silence de notre réflexion, la voie initiatique nous aide à faire surgir tout ce qui est latent et noble en nous-même, libérant notre pensée. C’est le secret de notre propre construction morale et spirituelle, assimilée à l’édification de notre cathédrale intérieure, faisant de nous de vrais bâtisseurs.

C’est ce que nous confère l’enseignement du rite écossais ancien et accepté.

NMK\


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