Obédience : NC Loge : NC Date : NC

Quelques propos sur le silence

Malgré les apparences le silence dans la colonne du septentrion n’impose pas aux Apprentis d’être seulement attentif, yeux et oreilles ouverts, mais doit permettre d’ouvrir son propre esprit, tout son esprit avec le cœur ouvert. Il y a, selon moi, plusieurs manières d’être silencieux.

Nous verrons cela ensuite.

Il est assez difficile d’exprimer l’exactitude de ses propres pensées par la parole, même si un dicton nous dit que « ce qui se pense bien s’exprime aisément » car il y des nuances souvent plus subtiles qu’il n’y parait. Coucher des mots alignés sur une feuille de papier permet de prendre du temps à la réflexion car elle permet de peser chaque mot et chaque idée. Cela nous permet de plonger plus profond afin d’extraire le maximum de clarté de cette vérité que nous voudrions exprimer…et partager.

Non, la vérité ne peut pas être l’exclusive vérité d’une école de pensé seulement même si nous voudrions quelle soit la seule véritable, l’indubitable, l’unique… A mon humble avis la vérité du savoir s’impose d’elle-même au vu de l’expérience et par le constat de son évidence. La pratique du Silence a démontré cela comme s’il s’agissait d’une chose magique, si simple et étonnamment efficace. Il est improbable avec nos limites humaines, d’atteindre les percepts qu’enseignent la table d’émeraude qui dit : « il est vrai, certain (véritable) et sans mensonge », mais chercher à l’approcher en taisant toute influence extérieure me semble la meilleure des démarches à faire. Le silence est donc une clef éprouvée. Oh ! Que oui…si efficace ! Que de bruits en moi, à l’intérieur de mon être à cause de ce simple mot : Silence !

Que vient donc faire le silence dans mes études en Franc-maçonnerie, si ce n’est pas pour agir mystérieusement en moi ? Le silence est-il en opposition avec la parole et les certitudes intimes ? Bien des questions m’apparaissent dès lors que je me plonge sur ce sujet qui est pourtant une des règles premières de la Franc-maçonnerie. Sans équivoque, Je me doute bien que le sujet va au-delà de l’apparence indiquée par mes propres sens pour aboutir ensuite à une prise de conscience bien plus spirituelle que le raisonnement auquel je suis confronté. Il est, assurément une clef, un moyen de me connaitre plus encore moi-même. Le silence est donc un moyen de progression en Maçonnerie et permet de « me changer, de me transformer »…

Le silence m’apprendrait-il aussi de devenir davantage bienveillant envers mes Frères, envers tous les autres ?…

Me taire toujours et même au-delà du grade d’Apprenti ? Le silence imposé est donc beaucoup plus qu’une règle propre au premier degré en Maçonnerie. Le silence me semble être une base si cohérente…un tremplin certain vers la connaissance ! Alors, comme je suis du genre à approfondir jusqu’au bout mon besoin de savoir, je me suis demandé s’il était possible que le silence pouvait avoir plusieurs formes ? Silence tel qu’on le conçoit généralement d’une part et un autre genre de « silence ». Deux silences complémentaires se rejoignant un peu comme la lune et le soleil apparemment contraires mais se réunissant pour réaliser le delta… Quelque chose comme ça.

Dans un exemple bien précis, j’ai imaginé une possibilité que vous devrez considérer comme virtuelle bien sur, je vous la livre ici afin de nous faire nos propres réflexions sur justement une autre forme de silence au cas où cela s’avérait un jour. Je le rappel, dans une situation imaginaire…

J’ai donc imaginé les conséquences pour moi si je faisais fis du silence. Je me suis mis dans la peau d’un personnage exprimant une vanité ahurissante au sein d’un groupe, d’une loge. Croyez-moi, j’ai été horrifié par cette conjecture ! J’aurais montré de moi une belle face qui masquerait l’abject individu que j’aurais pu être... J’en ai frémis ! Mais je me suis mis aussi également dans la peau des autres membres de cette loge imaginaire. Et quelque soit le personnage dont je prenais virtuellement la peau j’en étais troublé.

Je vous donne ci-après cet exemple imaginaire A la manière d’un bref conte : Un soir, lors d’une Tenue ; cette tenue de fin d’année où la loge doit confirmer par vote son consentement unanime pour l’élection du V\ M\ qui est naturellement désigné pour siéger une année supplémentaire habituellement pratiqué à main levée. Un de nos Frères, « cohérent avec lui-même » mais pas forcément avec l’esprit de la Loge et de l’esprit usuel de la F\ M\, se proposa de se porter candidat au poste de Futur Vénérable de la Loge alors que le successeur est déjà naturellement désigné et admis par avance et naturellement selon la tradition. Il en va ainsi pour les deuxièmes années d’exercice sans que ceci pose problème. Il déclara sarcastiquement que « le lait coulait encore des lèvres » du Vénérable en chaire, et qu’il serait bien meilleur Vénérable que lui au cours de l’année à venir. Il qu’il n’avait plus à tenir, selon lui, la chaire de V\ M\ l’année supplémentaire. Cet exemple imaginaire où conçoit la possibilité dévastatrice de l’harmonie fraternelle ne correspondrait pas à la « vraie Maçonnerie ». Une maçonnerie que « lui au moins » saurait porter haut… Quelle sensation étrange, quelle scène !

Je poursuis le conte.

Un vote par boule s’imposa selon les règles. Le Frère qui s’insurgeait subit une « défaite cinglante » et sans équivoque. Comble de l’histoire, à l’issue du vote, celui-ci justifia hypocritement qu’en perdant, le Vénérable naturellement désigné avait par ce présent vote, une justification légitimée à la fonction qu’il occupera l’année suivante. L’incident ne fit l’objet d’aucun grief ni de commentaire comme il est usuel dans la Tradition de nos Loges. L’homme sage tait ses passions et laisse passer le flux de la vanité et de l’ambition temporelle !

Lors de l’année suivante, pendant toutes les tenues, d’une manière ou d’une autre, ce frère était pourtant si Fraternel et avenant avec chaque frère individuellement. Il ne résistait pas par la suite, à faire montre d’un comportement plus ou moins agressif en Loge et un malaise grandissant perturbait les Frères attentifs. Le comportement de ce frère amena subtilement chacun des frères à réagir sans lui retirer leur amour, sans le juger. Un amour plus grand lui était prodigué pour l’aider à rectifier ses attitudes. Le pardon sans équivoque lui était constamment octroyé. En revanche, et malgré la bienveillance et le Pardon de ses frères, il s’isola de plus en plus et un jour il ne revint plus en loge. Que fallait-t-il faire ?

J’avais ressenti (il s’agit toujours du conte) beaucoup de frustration et ne savais pas avec certitude si ce frère obéissait à une intention de pur esprit maçonnique. Mes pensées troubles discernaient mal ce qui se déroulait. Je me posais la question de savoir si je devais prendre la parole et contester la folle vanité émanant de ce Frère en question. Quel trouble ! Quelle souffrance ! Je ne croyais pas détenir de solution, mais peu à peu il devint clair à mon esprit que si j’avais pris la parole pour contester l’incohérence de ce comportement, cela aurait eut pour conséquence de donner une idée fausse sur moi-même et ensuite…c’aurait été moi le fou qui a osé parler et aucunement celui qui avait causé cette tempête. Alors j’ai gardé le silence et j’ai décidé que j’aurais une conversation ultérieure avec lui afin de le faire revenir à la raison…je n’eu jamais cette conversation car il devançait toute objection possible comme savent le faire ceux qui ne mirent qu’à leur propre grandeur. Lui seul avait raison avec ses flux interminables de mots et d’idées si belles… Cela fut bien complexe ! Y a t-il des silences condamnables n’ayant rien à voir avec la maxime « qui ne dit mot consent » ? Mais tous savez bien qu’on peut tout imaginer…

En imaginant ce conte je propose une méditation sur ce quotidien et sur ces traditions que l’on cherche à changer par vanité, ambitions et dissimulation d’un mal enfoui en soi comme d’une maladie incontrôlable.

Le silence… Oui, ce silence qui pose problème quelque fois ne me semble plus aujourd’hui une vaine base de notre institution initiatique. J’ai un peu plus compris sur moi-même lors de mon cheminement. Probablement pas encore assez mais j’y travaille ! Quelle richesse que le silence imposé à l’Apprenti !

J’ai compris que le silence n’est pas seulement se taire au sens ésotérique mais permet surtout d’affronter ses propres contradictions, au fond de soi-même. Ce que j’ai ressenti réellement n’était pas fait pour me plaire mais me permettais d’avancer dans la quête de mon moi profond indépendamment de mes sentiments. Les bruits qui grouillent à l’intérieur de mon être silencieux m’enseignent…

Ce que l’ensemble des Frères avait perçu intuitivement, (si je me réfère encore à ce conte) n’était qu’un décalage entre les propos agressifs du frère en question qui déplaçait le débat avec force argumentations sur des notions profanes mais soit disant Maçonniques. (Nous sommes probablement nombreux à avoir observé plus ou moins ces choses à divers degrés). Cela mérite t’il le cachot ? Faut-t’il donner plus de « parole au silence » (cette parole intérieure bien entendu) et mieux se connaitre en taisant ses passions ? Il est tentant de rompre le silence ! Le fil qui nous sépare de la vertu est bien ténu ! Il est bien plus facile de céder aux vices !

Ce que je sais est que je suis toujours cet apprenti qui taille sa pierre toujours en encore afin de trouver une place harmonieuse au sein de la Loge sans rien prétendre des autres ni à moi-même.

Si quelqu’un se trouvait parmi nous avec des attitudes décrite ici, je crois qu’il faudrait l’aider de toutes nos forces afin de ne pas faire germer des malaises inutiles en Loge. Il faudrait l’aider et l’aimer encore plus sous peine de se perdre un peu soi-même. Cherchons plutôt la voie du Bien qui se trouve au cœur de chacun d’entre-nous…

Le silence établit un vrai dialogue introspectif par le rituel.
Le silence nous enseigne que la parole intérieure est connaissance…
Le silence…est un dialogue entre soi-même et les scènes qui se déroulent devant nous. Elles sont un échange invisible.

Œuvrer pour l’harmonie nécessite un travail fait avec cœur, par le cœur… Où trouverons-nous les bienfaits du silence si ce n’est au fond de notre enthousiasme ?

Dans un texte trouvé dans une vieille église de Baltimore, daté de 1692, il est écrit : Passe tranquillement entre le bruit et la précipitation, et rappelles-toi combien de paix il peut y avoir dans le silence.

S\ S\


3232-P L'EDIFICE  -  contact@ledifice.net \