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Le maître maçon et l'égo

En premier lieu, il serait approprié de se questionner sur ce que signifie le grade de Maître et lui donner un sens en  utilisant la légende d'Hiram que nous connaissons comme base de reflexion dans le Rituel du 3ème Degré, et que je vais rappeler brièvement.

La littérature maçonnique nous conte la vie d'un maître exemplaire, Hiram-Abi, le fils de la veuve. la légende dit que Hiram, le roi de Tyr, avait envoyé Hiram vers le roi Salomon pour diriger la construction du Temple que ce dernier voulait ériger. La conception et la construction du Temple nécessitèrent un grand savoir faire, d'où l'exigence de préserver ce savoir jusqu'à l'achèvement des travaux. La légende poursuit qu'un jour Maître Hiram fut interpellé par trois ouvriers. Ces derniers exigèrent d'être initiés aux secrets de son Art...Hiram refusa.

L'un des ouvriers compagnons mécontent, frappa le Maître à l'épaule droite avec la règle. Le deuxième Compagnon offusqué par le refus frappa le Maître à la nuque avec l'Equerre. Le troisième Compagnon face à l'obstination persistante de Hiram, lui assena le coup fatal sur le milieu du front avec un Maillet.

Les trois Compagnons enterrèrent le Maître sans connaître son secret. Ils plantèrent un rameau d'acacia, arbre de vie, sur l'endroit de la sépulture d'Hiram.

On peut dire que la légende d'Hiram est le drame ritualiste qui marque le plus fortement la symbolique maçonnique. Cette légende d'Hiram est un rituel qui s'adresse à l'âme humaine a travers l'imagination et a travers les symboles. C'est un rituel à caractère dramatique mais ne représente en aucune façon des faits historiques qui se seraient déroulés dans un passé lointain.

Lorsque l'on compare les différents rites de la F\ M\, on s'aperçoit que le déroulement et le contenu des rites d'initiation varient beaucoup d'un système à l'autre. En revanche, malgré certaines similitudes que l'on peut constater avec d'autres rituels, le rite d'élévation est toujours centré sur la mise en scène de la mort et du relèvement d'Hiram, dont le scénario varie peu. Cette constance confère à la légende d'Hiram une place privilégiée et en fait un mythe fondateur de la F\ M\ spéculative. Dans le rituel maçonnique, il peut être défini que le nouveau Maître se substitue au corps d'Hiram et s'ouvre ainsi la porte d'une renaissance.

La légende d'Hiram, lors de sa mise en scène dans le cadre du rite, se superpose au parcours du compagnon en train de vivre la dernière phase de son initiation; pour qu'il prenne enfin la place d'Hiram, d'une manière symbolique, lorsqu'il est étendu au centre du temple et recouvert d'un linceul. A ce moment, lorsqu'il est relevé par les cing points, il se substitue à Hiram pour renaître en « nouveau Maître », phase où, passant d el'horizontale à la verticale, il prend un eimension supérieure. Il passe du plan trerrestre, horizontal, au ciel, par le plan vertical qui sert de trait d'union.

Chaque Maître Maçon fait l'expérience de cet événement pour être élevé. Ainsi cette légende a une profonde signification spirituelle et une extraordinaire importance pour chaque Maître Maçon moderne. Le Maître Maçon fait perpétuer le symbolisme de la construction du temple universel. Le Maître Maçon aide à la construction du temple universel et, en même temps en tant qu'éternel Apprenti, poursuit sa propre construction intérieure.

Par ailleurs, les différentes religions du monde ont pour base la croyance et la foi dans un sauveur ou un « Messie » qui serait venu sur terre pour délivrer les hommes de leurs pêchés et leur montrer le chemin du « salut ». Les chrétiens l'appelle Jésus, les hindous l'appelle Krishna, les égyptiens Osiris. Pour la Franc Maçonnerie ce grand initié est Hiram.

Hiram, figure personnelle du Maître

Nulle part le rituel d'élévation au 3ème grade ne nous dit ce qu'est un Maître; la seule définition qu'on puisse en donner est celle-ci : c'est quelqu'un qui est reconnu comme tel par ses fils. Il en va de même pour le Maître Maçon. D'où la formule : « Mes frères me reconnaissent comme tel ».

La mort d'Hiram ouvre aux Maîtres un défi strictement d'ordre individuel. Un travail que chacun aura à faire sur lui-même. Mais pour que ce travail soit possible, il faut que le Maître réel lui-même le permette, c'est-à-dire qu'il ne soit pas simplement rébarbatif, castrateur dans son attitude à l'égard des Compagnons et Apprentis. Le vrai Maître en Maçonnerie doit inspirer l'idéal par son pouvoir de rayonnement. Et tout nous indique que tel était Hiram, dont le rituel nous dit qu'il était estimé, admiré, et même aimé de tous ses ouvriers.

Le Maître Maçon s'inspirera de l'exemple d'Hiram pour vivre sa vie maçonnique. Le plus important, pour ne pas dire le fondamental : il doit s'inspirer de cet exemple pour continuer son initiation. En un mot, il prend la place du Maître, conscient de droits nouveaux, mais aussi des devoirs. Les premiers sont dérisoires au regard du cheminement initiatique, et ne concernent que l'organisation matérielle de la loge. Les seconds sont plus intéressants, car n'ayant rien de momentané : ils engagent la vie du Maçon. Prenant la place, il va risquer sa vie. Symboliquement, ce n'est guère dangereux. Mais, pour sa propre construction, son achèvement – ce qui est, au fond, ne l'oublions pas, le rôle de la franc- maçonnerie.

Il est normal et légitime que certains trouvent dans un riuel des allusions, entraînant confirmation de leur croyance, ou même matière à retrouver et côtoyer de nouveau un divin épuré, éclairé, devenant moins obscur, et leur permettant de trouver dans la maçonnerie justification d'une foi, même si elle fut un moment chancelante. Il faut l'admettre. Mais pour les autres ?

Notre règle est le respect de la liberté absolue de conscience. La conséquence est évidente : tout rituel doit présente rune voie de dépassement, la possibilité d'aller au-delà de tous les au-delà. Tout symbole, tout mythe à un degré moindre et inséparables du discours – doit être inaugurateur et libérateur. Sinon, il enferme le Maçon – l'homme – dans sa pensée ( ce qui après tout ne regarde que lui ), mais exclut, sépare.

Il est temps à présent de se pencher sur les grands thèmes de la légende, dont le choix relève forcément d'une sensibilité personnelle. Mais chacun a sa propre vision.

Au-delà de l'exemplarité du Maître, de la tragédie illustrée par le chantier en péril, le deuil, le discours tenu a pour centre d'intérêt le sens de la vie.

Je retiendrai la Reconnaissance, la Mort, l'Etre.

Désir de reconnaissance, plutôt; le symbolisme maçonnique en est fort chargé. La mort, toujours présente depuis le cabinet de Réflexion jusqu'au meurtre. L'être dans sa construction à partir d'un être- donné, illustré parfaitement par le travail maçonnique.

Je pense sincèrement quele désir est le moteur de l'action humaine. Encore faut-il considérer plusieurs niveaux dans le désir.

Mourir en réalisant seulement le simple désir d'une réalité naturelle, c'est rester dépendant de la nature, de sa propre nature. Désirer le désir de l'autre est déjà plus fort : les nuances de l'amour apparaîtront peut-être un jour dans le discours maçonnique.

Désir de Reconnaissance ! C'est très profane. Mais l'aspect maçonnique est autre : « Mes frères me reconnaissent comme tel ! ». On ne peut être reconnu qu'en reconnaissant les autres ; il faut donc qu'ils soient vivants et surtout nos égaux. Est-ce là une explication de la plénitude des droits maçonniques. Mais la reconnaissance accordée à Hiram relève d'un désir plus humain.

Tout cela ne peut se faire facilement. Le Maître est incontestablement reconnu, certes, mais à quel prix ! Le Compagnon, en assistant à cette consécration, en la vivant dans sa chair, doit comprendre et accepter les conditions d'une telle opération : il ne sera Maître qu'à ce prix, ici et maintenant; puis immédiatement reconnu par la loge.

La prise de conscience de soi commence dans le cabinet de réflexion, le meurtre d'Hiram illustre à la fois les risques de la vie et les choix qu'ils entraînent. Mais tout est constructif pour l'homme. La mort est la « manifestation » dernière et authentique de sa liberté. Il échappe ainsi à toute emprise imposée par l'extérieur et affirme son autonomie. Celui qui mesure qu'il n'appartient qu'à lui de décider vraiment ce que signifie être. L'individu collectif qui atteint l'universel en devenant   singulier.

Le Maître a accédé à la liberté, au prix de l'abandon des adhésions irréfléchies et précipitées des croyances, des illusions. Véritable travail de deuil, provoqué par l'épreuve de la terre. C'est un travail difficile à faire seul. La loge le permet cependant par la compréhension fraternelle mais ferme de tous les frères et soeurs, s'aidant mutuellement, et parfois sans le savoir, dans cette tâche difficile.

La transmission de connaissances est une des responsabilités primaires de tout Maître Maçon qui doit s'assurer que les Apprentis et les Compagnons sont instruits à l'art de la construction. Les jeunes frères et soeurs, encore vulnérables, doivent être surveillés et aidés d'une façon constante à acquérir les connaissances nécessaires pour leur perfectionnement. Le Maître Maçon accompli se distinguera par son plaisir et sa soif pour la recherche et le partage de la connaissance. Le Maître Maçon est quelqu'un qui connaît les mauvais compagnons (représentant ses propres faiblesses) qui représentent un danger pour l'initié recherchant son idéal et la vérité. La mise en garde est surtout contre lui-même.

Le Maître Hiram fut assassiné par les mêmes outils qu'il utilisait pour la construction du temple. Ceci nous apprend que le savoir peut être altéré pour servir à la destruction plutôt qu'à la construction. Le Maître Maçon se verra souvent face à cette dualité. Il aura le savoir dans ses mains et en fera toujours bon usage. Le pavé Mosaïque caractérise cette dualité. La vie n'est ni blanc ni noir et le Maître Maçon se verra toujours emprunter cette fine ligne qui sépare le blanc du noir. Le travail sur soi-même, permet au Maître Maçon de gravir les échelons de l'Ordre Maçonnique et aussi de devenir Maître de soi-même. Il s'entraîne à se contrôler. Etant Apprenti, on lui avait ôté la parole. Siégeant sur la colonne du Nord et faisant taire ses émotions dans le silence, il s'exerce à dompter son égo. Devenu Maître, il travaille toujours à se contrôler. L'Apprenti s'est vu imposé au silence mais le Maître Maçon s'impose lui-même le silence. Les devoirs de l'apprenti et aussi du Compagnon restent  toujours les siens.

J'insisterai tout particulièrement sur la maitrise de l'égo. L'homme sous son emprise ne pense qu'à lui et à ses convictions, mais veut aussi que tout le monde pense à lui. Il a tendance à penser qu'il est le centre de l'univers, les autres n'existant que pour servir ses intérêts. L'égo, souvent surdimensionné mais parfois aussi sous-dimensionné, est un frein essentiel au développement de la personnalité et empêche le Maçon d'accéder une vraie connaissance de soi. Les fausses perceptions que nous avons de nous-mêmes, l'image disproportionnée de nos capacités, de notre personne sont autant de facteurs de dévoiement.

Afin que l'idéal maçonnique ne soit pas entravé, le Maçon devrait impérativement abandonner son égo, partie intégrante de ses métaux, à la porte du Temple et penser davantage aux autres, en privilégiant l'intérêt collectif en fusionnant les énergies individuelles.

Il doit rester humble.L'humilité pour lui, c'est revenir toujours au stade d'Apprenti quel que soit son parcours Maçonnique. Elle lui dicte sa façon d'être, la façon de se comporter. En cultivant l'humilité, le Maître Maçon crée un rampart contre son égo. L'humilité le force à écouter ses frères et soeurs, les comprendre sans vouloir absolument imposer son point de vue. C'est aussi tenir compte d'idées différentes des siennes et de réflechir à leurs sens.

C'est aussi l'épreuve du silence, une des épreuves primordiales de l'initiation, qui permet la possibilité de se libérer des scories de l'égo afin qu'un être nouveau parraisse en loge, véritablement équilibré et libre d'agir au mieux de l'intérêt de l'atelier, non par fatuité mais par amour fraternel.

J'ai beaucoup insisté sur l'égo car j'ai été très souvent confrontée à diverses manifestations de l'égo démesuré de certains Maîtres et même de certains Apprentis et cela depuis le tout début de mon  engagement maçonnique, de mon Apprentissage à mon Compagnonnage et tout au long de mon cheminement jusqu'à la Maîtrise : (course au pouvoir par l'accession au Vénéralat, à certains postes d'officiers... espérant retrouver le statut perdu dans la vie profane, Apprentis qui n'acceptaient pas les règles et devoirs incombant à leur statut...faisant référence à leur statut social profane...les métaux entrant à profusion dans le temple, jalousies), bref, tous les métaux étaient encore présents
Ce qui m'a un peu déroutée au départ car je retrouvais là tous les comportements humains vécus dans la vie profane. Alors, je me suis quand même posée la question : « Quel est l'intérêt d'être en Franc-Maçonnerie, si je retrouve les mêmes attitudes négatives que dans la vie profane ? ». Avais-je peut-être trop idéalisé la Franc-Maçonnerie ?

Mais, malgré mon jeune âge et les premières épreuves qui jalonnaient déjà ma route, j'ai persévéré sur ce chemin chaotique et je ne le regrette pas aujourd'hui. Au départ, esclave de mes idées et de mon éducation, j'ai mis à l'épreuve la valeur et la solidité de mes idées. Je me suis efforcée à regarder et écouter sans juger à priori. Graduellement, j'ai commencé à mieux connaître mes frères et soeurs, les estimer et les apprécier avec leurs différences. Tout cela m'a rendu plus perspicace quant à mes propres qualités et beaucoup plus modérée dans ma perception des choses et mes jugements.

Je me rends bien compte que cette évolution n'a pu se réaliser qu'en Atelier, grâce au rituel et à l'utilisation des symboles pour communiquer, grâce à notre méthode de travail. J'ai aussi beaucoup appris de tous les frères et soeurs de ma loge et aussi par les rencontres avec d'autres Maçons lors de visites dans différentes loges et obédiences pratiquant divers rituels. J'ai rencontré des hommes et des femmes d'honneur et intègres croyant en des choses comme l'honnêteté, la compassion, la confiance et la connaissance, qui m'ont permis de « grandir », rappelant la nécessité de cette croissance continue.

Pour conclure, je dirai que l'on ne devient pas d'un coup initié, mais que l'on s'engage sur un cheminement initiatique aspirant à une progression vers une élévation morale et spirituelle, et que l'élévation à la Maîtrise est le début d'un nouveau cycle, d'une nouvelle vie dans la connaissance, qui est un long chemin sans fin. La Maîtrise est un état qui est à reconquérir tous les jours en vivant dans le réel, toujours mouvant, toujours renouvelé. Et surtout, que ce nouvel état rayonne au dehors du Temple. Faire la liaison entre ce que j'ai appris jusqu'à présent, grâce aux outils et au travail et ce que j'en fais aussi dans le monde profane En qualité de jeune Maître, je persévère à croire que c'est par le cheminement maçonnique que je continuerais à progresser en n'oubliant pas que « seul, on ne peut rien, ensemble on peut tout », tout en m'efforcant d'avancer résolument vers l'avenir sans avoir à me retourner craintivement vers le passé, portant désormais en moi-même l'étoile flamboyante que j'ai choisi comme guide.

V\ M\, Mes S\ S\ et F\ F\

J’ai dit.

C\ T\


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