Obédience : NC Loge : NC Date : NC

Nous ne sommes plus dans le Monde Profane


Nous ne sommes plus dans le monde profane, laissons nos métaux à la porte du temple, élevons nos coeurs en fraternité, que nos regards se tournent vers la lumière.

Les 12 coups de MIDI ont sonné, les portables éteints (eh oui la vie profane nous envahit), la magie opère un acte blanc, les voiles d'Isis s'entrouvrent pour laisser émerger notre regard intérieur. Nous choisissons, en toute conscience, d'abattre nos murs de Jéricho (en référence pour ceux et celles qui connaissent la bible) en attendant les 12 coups de minuit.

Nous ne sommes plus dans le monde profane. Que de préparations sont nécessaires pour être seulement, là. Ainsi, trois gouvernent l'ouverture de notre entrée en apprentissage de ce que nous sommes, cinq l'éclairent et sept la rendent juste et parfaite. La beauté, la force et la sagesse brillent, sans ombre et encadrent notre tapis de Loge.
Nous redevenons enfants de lumière et en nos gémissements les plus profonds nous espérons devenir piliers.

Mais qu'est ce donc que ce monde profane que nous quittons ?
Rappelons-nous notre premier voyage en tant qu'apprentie. Il est fait de bruit, d'agitation, de montée et de descente en aveugle. Nous quittons un monde aveugle, un monde d'apparence, un monde d'artifice, un monde de vitesse où le temps présent se liquéfie dans le passé et dans le meilleur des mondes, dans le futur. Un monde où l'aveugle est roi. Notre bandeau retiré, nous abandonnons le monde profane. Nous venons apprendre à mieux voir, à mieux entendre, à mieux écouter, à déciller nos fenêtres collées par tant de fausses passions. Nous
allons vivre nos paroles, notre gestuelle, nos attouchements, sans oeillères. C'est un autre monde qui s'ouvre, une autre conscience qui émerge en filigrane.

Nous avons juste appris que pour rentrer dans cet autre monde "sans nom" il nous faut, à chaque fois, repasser par la porte basse. La première fois nous y avons été, plus ou moins fortement, obligées volontairement. Ensuite, à chaque tenue, l'ouverture, nous invite, au cas où nous l'aurions oublié, à réaliser en nous cet accouchement de l'humilité comme les fameux trois petits singes "je ne sais rien, je ne dis rien, je ne vois rien". C'est en intégrant cet état d'humilité que nous recréons notre tenue. C'est toujours la première fois. C'est dans la rencontre de nos humilités qu'une tenue va se construire.

C'est bien là, aujourd'hui, pour moi, la première pierre de la tenue d'où le bâtiment peut émerger quels que soient les grades et les qualités. Une tenue ne naît que de l'humilité partagée.

Lorsque nous découvrons, nous réalisons, nous intégrons, cette première pierre qu'est l'humilité alors nous laissons nos métaux à la porte du Temple.

Ces métaux, ces fameux métaux, les laissons-nous vraiment à la porte du Temple ?

Le rituel de l'initiation nous apprend que ces métaux sont retirés à la profane. Elle est invitée à se débarrasser de tout ce qui constitue ses avoirs profanes. Ils lui seront restitués après qu'elle sera devenue maçonne initiée.

Les métaux, que sont-ils dans leur sens symbolique ? des avoirs matériels, des statuts sociaux, des certitudes, les dépendances quand elles sont inconscientes ou refusées, les attitudes de fuite, de peur, masquées par de pseudo-raisonnements, des émotions déguisées.

Du jour au lendemain, dès que nous pénétrons dans le Temple, nos métaux sont-ils évacuées ? Existe-t-il une poubelle à la porte du Temple dans laquelle nous les déposons pour les récupérer à la sortie ?

Je n'ai jamais cru à l'angélisme maçonnique. Je ne serai jamais un ange.

Ne sommes-nous pas là pour apprendre à nommer, connaître, reconnaître et utiliser nos métaux et les transmuer de façon consciente ?

Les métaux du monde profane ne peuvent être dans le Temple mais nous sommes aussi des humains ; n'est ce pas tomber dans un angélisme béat et naïf que de croire qu'ils se volatilisent rien que par notre force ?

Ce sont certainement d'autres métaux que nous allons travailler, mais ceux-ci dans le cadre maçonnique. Nous recréons avec nos métaux, une nouvelle espèce : les métaux maçonniques. Ils sont obédientiels, interobédientiels, de Loges, rituels, idéologiques, affectifs, instinctifs.

Et nous assistons, parfois, ou participons aussi, à la renaissance de certitudes, de bon droit, des attitudes de sexisme, les attitudes dites de cordonnite aiguë, l'esprit clanique. Cet esprit clanique qui voile les relations authentiques, les relations de pouvoir, les attitudes de soumission (qui ne sont pas des attitudes d'humilité), de pseudo-confiance, basées sur des critères profanes qui prennent le pas, justifiés par un raisonnement maçonnique, sur les raisons qui font que nos travaux existent. Les métaux appellent la Tolérance, d'abord par rapport à soi-même, puis par rapport aux autres. La tolérance n'étant pas le laisser-aller. Le plus difficile à accepter, finalement, ce sont les métaux des autres, pas les siens.

Accepter ces métaux et les transmuer pour être plus présente dans le Temple, c'est être là, dans l'instantanéité, réceptive et disponible pour ce qui va advenir.

Laisser ses métaux à la porte du Temple c'est vivre une tenue, comme l'enfant de 3 ans, sans certitudes, sans savoirs, sans savoir-faire ; c'est laisser parler, en nous, le rituel, le laisser résonner sans a-priori, sans idées préconçues pour qu'hier, un jour, demain, dans une situation profane, telle phrase, tel acte, resurgisse et dévoile sa signification, son sens. Ce n'est peut-être que cela le rituel !!!
Carpe diem. Et... se libérer de l'emprise des émotions.

Dans le rituel d'initiation, lorsque la S\ hospitalière se retrouve devant l'initiée, il est dit à la nouvelle initiée, qu'une fois dépouillée de ses métaux, elle se retrouve incapable de venir en aide aux autres. Les métaux sont donc utiles, à condition de toujours savoir et être dans l'état d'esprit que ce ne sont que des métaux.

Nous accueillons ce rituel parce que nous avons laissé nos métaux à la porte du Temple, parce que nous sommes dans un autre état de conscience et que nous pratiquons l'humilité, alors seulement nous allons élever nos coeurs en fraternité.

Elevons nos cours en fraternité, pardonnez cette allusion aux lieux communs que je ne peux m'empêcher de faire, C'est la substantifique moelle, l'essence même de la force d'une Tenue. De l'amour Eros et Philia profane, nous passons à l'amour Agapê (Evagre le Pontique IV°), une dimension qui ouvre le chemin vers la connaissance profonde. Nous sommes conduits par le rituel d'ouverture vers le coeur. En parlant de ce passage, je me rappelle ce que dit le Petit Prince "on ne voit bien qu'avec le coeur, l'essentiel est invisible pour les yeux". Nous ne
sommes pas obligées de nous aimer et même de nous apprécier, mais nous avons fait serment de nous découvrir, de nous respecter, de respecter nos voix et nos voies, d'aimer nos humanités.

Elevons nos coeurs en fraternité d'une même voix, c'est aussi, profondément accepter les expressions diverses parce que chaque loge est un athanor. Ce sont les seuls lieux où le musulman et le juif, le pauvre et le riche, la droite et la gauche, se retrouvent côte à côte.
Tant que ces lieux existent et se vivent ainsi, l'espoir vit.

Elevons nos coeurs en fraternité, c'est d'une même voix se reconnaître
au-delà de nous-mêmes. C'est accepter de ne pas substituer son mode de raisonnement, son mode de réaction, son verbiage à celui de l'autre, de chacun des autres. C'est prendre le risque de faire accoucher ceux-ci, dans leurs différences et dans le respect de leur parcours.
Cet amour-là commence le jour de l'initiation lorsque nous sommes appelés Frères et Soeurs. C'est une adoption de l'être humain universelle. Cette adoption nous la réiinitialisons lors de chaque tenue.

Elevons nos coeurs en fraternité passe par le respect de nos différences, par le respect des chemins de chacun.

Et tournons nos regards vers la lumière. Qu'apercevons-nous à l'Orient le jour de l'initiation ? Le Maître de la Loge debout et, au-dessus, un triangle avec un oeil dedans, appelé "Delta Lumineux". Nous passons des ténèbres à la lumière. L'invitation est faite de porter nos regards en nous et ensemble. Une action réalisée, ensemble, en même temps, crée une union et une force. Les résonances de ces regards, nous martèlerons jusqu'au jour où l'aspérité d'un fragment de pierre se façonne. Un jet de lumière vient éclairer une partie de notre humanité alors que nous en avions fait notre deuil.

Nous ne sommes plus dans le monde profane, nous sommes ensemble pour vivre une aventure collective intérieure : celle de groupes dont les individus ont choisi de progresser les uns avec les autres, les uns par les autres.

Nous allons apprendre à être libres, égaux et fraternels, de midi à minuit, et que la Lumière nous porte afin que nous puissions devenir des porteurs de lumière, des regards de lumière.

J'ai dit,

M\ L\

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