GLMF Loge : NC 17/05/2011

 

Le Partage

Comment est-ce que je le conçois ?

En introduction je commencerai par une petite « mise à nu » personnelle.  Il y a quelques années, j’ai connu dans ma vie profane une période difficile durant laquelle j’ai connu le vide affectif qui suit le deuil d’un conjoint : Ne plus partager un lit, un repas, des idées, des souvenirs et même une dispute !, le silence était devenu mon compagnon dans ma solitude.

J’avais le sentiment d’être morte socialement et spirituellement alors, entrer en maçonnerie, a été pour moi un réel retour à la vie. J’avais enfin retrouvé une nouvelle famille avec laquelle je pouvais partager mes joies et mes peines, j’existais à nouveau.

 Cette confession a pour objectif d’illustrer ce que représente  pour moi, partager, et bien  c’est exister !

Alors, ce partage, comment le définir autrement ?

Quand on s’arrête sur la définition grammaticale du mot partage, on constate qu’elle est double :

Premièrement, elle signifie division, fractionnement, séparation, répartition etc. des mots dont le sens est très dur, signifiant l’éclatement d’un tout. C’est tout ce qui touche, entre autre, au  domaine matériel et qui est souvent source de conflits familiaux et sociaux.

La seconde partie de la définition du partage, contrairement, signifie, avoir en commun, partager un avis, des valeurs, une tradition, un savoir-faire etc.

 D’un point de vue idéologique, c’est le partage des biens et des ressources intellectuelles de tout un chacun, pour un vrai développement et que l’on retrouve dans divers groupes « communautaires ». C’est l’entraide morale et sociale.

On peut dire que c’est pour cela que les humains se regroupent, parce que chacun a besoin des autres, pour satisfaire ses besoins fondamentaux aussi, en paraphrasant modestement Descartes,   je dirai

« J’échange, donc je suis ! ».

J’estime que toute situation de détresse sociale doit être traitée avec méthode, respect et dignité, avec la puissance de l’amour qui abat le mal par le bien.

Cette détresse peut être aussi bien morale que sociale, et touche une partie des membres de notre société aussi, aller à leur rencontre et partager en donnant un peu de son temps libre, c’est développer un lien social  grâce aux associations qu’elles soient caritatives, sociales ou culturelles.

Et là, je profite de cette tribune,  pour mettre un peu de lumière sur certaines  d’entre elles, qui ne sont jamais médiatisées mais sont tout aussi honorables dans le partage comme, entre autres:

Tous les bénévoles des associations qui travaillent à l’alphabétisation des illettrés, aux peintres qui pratiquent l’art- thérapie, aux artistes amateurs et bénévoles qui se produisent dans les maisons de retraites, à SOS amitiés…

A l’Armée du Salut connue notamment pour ses structures de soutien aux  enfants et adolescents en difficultés et à l’accueil des femmes  battues.

 A la Fondation de France, dont le but est d’aider les personnes vulnérables mais aussi de favoriser le développement de la connaissance et les recherches pour la protection de  l’environnement en mettant la « personne » au centre de leurs actions. Etc.

ALORS  COMMENT PARTAGER ?

Je ne veux pas traiter uniquement du partage caritatif des biens car c’est un grand combat que l’on ne peut pas aborder en quelques phrases, mais pour en dire quelques mots, je pense qu’il faut aider les personnes défavorisées à se prendre en charge socialement et culturellement mais pas uniquement grâce à l’Etat providence. Principalement en les aidant  grâce au partage de nos connaissances, à s’insérer dans le monde du travail.

  C’est dans ce sens, à mon avis, que les associations ont un rôle primordial à tenir, car celui-ci favorisera leur retour à l’indépendance pécuniaire et vitale car, malheureusement un repas ne suffit pas et, pour sortir durablement de l’exclusion, il faut trouver un toit et un emploi.  Et pour tous ceux qui souffrent dans leur corps et leur cœur leur apporter soutien et compassion.

Enfin, pour avancer dans ma réflexion, je me pose la question :

Et nous, Francs- maçons, comment  pouvons nous faire avancer les choses ?

Et bien je pense que tout d’abord qu’on doit répandre nos idées à chaque occasion. Ne pas hésiter à prendre parti publiquement, à donner notre avis.

Normalement, notre travail sur les questions à l’étude des loges, sert à véhiculer nos idées aussi, je veux croire qu’un jour, on trouvera la solution du problème de la précarité morale et sociale et que ceux qui souffrent connaîtront des jours meilleurs.

A ce stade de ma réflexion, je  vais m’attacher à définir ma notion du partage en franc-maçonnerie

Je  dirai tout d’abord que c’est en analysant l’origine du mot « Compagnon », pour une de mes anciennes planches, que j’avais rencontré cette définition qui colle bien au sujet. 

*Il est au sens latin populaire du terme « cum  panem »,  celui qui mange son pain avec les autres donc, celui qui partage. *

Je suis C\ et à ce titre je pense que je peux partager mon expérience comme le faisaient  les anciens compagnons voyageurs,  précurseurs en grande partie de la F Maçonnerie.

Ces Compagnons, qui devaient effectuer leur tour de France, (« l’expression dit exactement «  voyager la France » )  étaient assurés d’une solidarité, d’un partage des connaissances dans le monde du travail,  grâce à l’expérience des « anciens » qu’ils  rencontraient dans les diverses maisons de compagnonnage (quelquefois appelées Cayenne) où ils  étaient accueillis  par un prévôt et par une « mère »   A ce sujet, je m’accorde  en passant une petite réflexion « féministe » en regrettant que, encore actuellement, les femmes ne soient pas intégrées au compagnonnage mais reléguées uniquement aux tâches ménagères avec le statut de « Mère » uniquement. !

Ceci dit, je continuerai en évoquant le partage des sentiments en Franc- Maçonnerie, que j’ai découvert en étant initiée

Je pense tout d’abord, qu’il est évident pour nous, que les Francs –Maçons partagent en priorité, la fraternité universelle qu’ils exercent dans le temple, lieu sacré où se réunissent nos loges, comme les membres d’une même famille partagent leur maison.

Ensuite, vient la solidarité. Nous sommes tous solidaires, bien que personne ne nous l’impose. C’est naturellement, que nous combattons l’égoïsme et l’individualité grâce au partage de notre expérience et au soutient moral et financier en toutes circonstances.

Nous suivons tous le même chemin et partageons également les mêmes secrets, le même rituel, la même compréhension mutuelle.

 Nous pratiquons l’entraide et le don de nous-mêmes. Même modestement, nous contribuons à la bonne marche de notre Atelier.

A ce stade de ma planche, je vous dirais qu’il m’est très difficile de parler du partage sans effleurer la notion de transmission par les « anciens éclairés » mais je peux dire que, dès mon initiation, je l’ai perçue comme un partage. C’était m’enrichir de leur savoir tout en leur donnant la possibilité de l’exprimer. Après tout, à quoi servirait leur expérience s’il n’y avait personne pour la partager ????? Elle serait égoïste.

Ainsi, je peux dire que cette période d’observation a été fructueuse car j’ai assimilé des valeurs maçonniques qui m’ont aidé à tailler ma pierre brute et à devenir Compagnon. J’ai reçu ma part du partage de leur savoir.

Ensuite, devenue C\, lorsque j’ai quitté le cocon protecteur de la loge pour partir m’instruire dans d’autres ateliers, j’ai communiqué, j’ai partagé leurs discours  grâce à la parole qui circule et qui est médiatrice de la communication. Tout ce qui vient de moi communique quelque chose. Le partage est partout, dans mes mots, mes gestes, mes silences.

J’ai partagé également dans les autres ateliers, l’enseignement des rituels différents du mien. Je me suis « socialisée » et en voyageant, j’ai appris à bâtir avec solidité et en beauté, tout en  découvrant le savoir humain dans tous les domaines.  (A ce stade de mon cheminement de pensée, je considère que le travail en commun, donc partagé, garantit la solidité du chantier entrepris car, tout seul, le compagnon est encore faible.)

Enfin, en présentant mes planches dans la loge,  j’ai pu confronter  mes connaissances et partager mes points de vue. Participer aux décisions de l’atelier en votant, est également l’occasion de ressentir le sens communautaire de l’atelier. 

Egalement, un des symboles maçonniques du partage est« matériel », c’est le « tronc de la veuve ». Il est l’emblème de la solidarité matérielle.  Nos dons, à chaque tenue, viennent grossir le pécule dont peut disposer l’hospitalier qui, en le redistribuant, lui permettra d’aider une S\ ou un F\ en difficultés. 

Je souligne toutefois, que le rôle de l’hospitalier  ne s’arrête pas qu’à ces considérations « bassement matérialistes ». En effet, l’hospitalier doit normalement nous faire partager également les joies et les peines de nos S\ et F\ concernés, en mettant en œuvre la solidarité fraternelle.

« Partager nos peines pour qu’elles soient moins lourdes et nos bonheurs pour qu’ils soient plus grands »

Nous partageons également  tous les signes de reconnaissance discrets, des liens qui nous unissent et nous relient dans une seule et même famille universelle à savoir :

* la poignée de main avec l’attouchement, qui se veut franche et cordiale, correspondant à la demande du mot sacré et qui permet de nous reconnaître de jour comme de nuit à l’extérieur du temple, 

* l’accolade fraternelle ou les trois baisers, avec lesquels nous partageons  chaleureusement la joie des retrouvailles, dans un climat de confiance propice à des échanges sincères.

* le tutoiement, que l’on pratique dans nos loges mais également au dehors.  Il est le symbole très important à mes yeux, de l’égalité de tous les francs-maçons, quelle que soit sa position sociale, de notoriété ou  de fortune.

 Il est à noter qu’à l’extérieur de la loge, nous devons l’utiliser entre nous avec discrétion, par respect des convenances sociales, hiérarchiques et professionnelles afin de ne pas mettre dans l’embarras une S\ ou un F\

Que dire également du mot de semestre ? Et bien, c’est un mot partagé, un secret,  que nous nous chuchotons à l’oreille pour qu’il ne soit pas entendu par notre voisin.

Et la chaine d’union que nous formons à la fin de chaque tenue, tous unis mains dans la main ? 

« que nos cœurs se rapprochent en même temps que nos mains » nous dit le vénérable.

 Nous partageons alors notre amour qui va circuler entre nous sans oublier bien sûr l’égrégore de la loge. Et là Je m’arrête un moment sur la notion d’égrégore car à mes yeux, il est primordial en effet, il représente notre force, car chacun met en commun le meilleur de lui-même,  pour créer l’alchimie dans la loge et donner le sentiment d’une intense communication entre nous.

 Je pense que c’est notre devoir de partager notre joie d’être franc-maçon, notre bonne humeur, notre plaisir de travailler ensemble,  pour que l’égrégore soit positif et nous recharge de bonnes ondes, pour affronter les difficultés de la vie profane.

Enfin, parlons des agapes, autres moments d’échanges

Nous retrouvons là, un temps de convivialité fraternelle et quelquefois spirituelle, dans le partage du pain et du vin. Pareillement, partager quelquefois un fou-rire ou simplement l’évocation de souvenirs, devient un moment de pur plaisir.

 Pour terminer mon travail d’aujourd’hui, je vous dirai qu’arrivant à la fin de mon pèlerinage de C\, je n’aspire pas au repos.

Au contraire, j’ai maintenant le désir profond de partager et transmettre tout ce que j’ai reçu, vu et entendu. Tout ce que j’ai acquis par mon travail et mes voyages et mes recherches personnelles, car c’est mon devoir de  franc-maçon. 

Parce que respect, solidarité, fraternité,  liberté, citoyenneté, dignité, ne sont pas de vains mots pour moi, je veux être un exemple dans mon comportement, afin de perpétuer ces valeurs maçonniques, qui m’ont permis de me perfectionner et d’être enfin en accord avec moi-même.

J’ai dis vénérable maître.                                           

Chantal L\

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