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LOGE: NC
09/2022


Maçonnerie : métamorphose ou extinction ?



Considérations générales :

La présence intellectuelle de ce questionnement est quasi permanente chez moi de par la pénétration du Forum dans le temple , de la base au sommet ; j’en constate cette tare du 1er degré où je suis régulièrement présent jusqu’au « conseil suprême » Francis Viaud. Il y a une similitude avec l’homme lui-même , si j’en fais référence à mes lectures.

« Les intermittences de la mort »  José Saramago  au Seuil .

« Une nouvelle histoire de l’humanité »  David Graeber David wagrow a LLL

«Une brève histoire du futur » Yuval Noal Harari   Albin Michel

« Sapiens métamorphose ou extinction »  Yves Le Floc’h Soye   Humens sciences

« Le Kybalion » étude sur la philosophie de l’ancienne Égypte et de l’ancienne Grèce Librairie du Magnétisme.

« Je ne sais qu’épeler » F. Joannis Corneloup d’où j’extrais ce passage « : Frère si tu veux que brille la flamme, médite dans le temple, agis sur le forum, MAIS garde-toi de faire du temple un forum » 

Comment et sous quelles formes peut-on imaginer une telle ressemblance, un tel délabrement entre ces deux sociétés ; l’une civile l’autre symbolique et spirituelle ?

Quelque questionnement nous vient à l’esprit : la verticalité du pouvoir, l’endogamie, le népotisme, l’oligarchie, la propension de l’ego, l’individualisme ?? L’entendement du monde par homo sapiens et sa relation avec son environnement sont de plus en plus difficiles pour les deux ; l’accès à de nouvelles connaissances nous amène à changer de point de vue, à ouvrir de nouvelles perspectives. Anticiper devient un impératif et le défaut de vigilance une faute impardonnable. Dans l’ensemble des pays développés, la démocratie représentative a dégénéré en une forme beaucoup plus proche de l’oligarchie pure ; les citoyens demandent une gouvernance plus ouverte, privilégiant les valeurs de transparence à l’égard des citoyens ainsi que la participation et la collaboration avec eux ; un déficit de perception de la réalité peut altérer non seulement la conscience des situations mais aussi de soi-même, des autres et du rapport aux autres. Homo sapiens est un animal socio-culturel inventif, mais pas toujours clairvoyant ; la maçonnerie apparentée à la « conquête du bonheur » est comme la société civile : à un goulot d’étranglement ; où allons-nous ? Il faut savoir anticiper ; l’anticipation est une propriété fondamentale du vivant, peut-être la plus importante.

Prédiction et anticipation ne sont pas synonymes. L’anticipation prépare et programme l’action fondée sur une anticipation explicite et implicite. Il convient de changer de point de vue pour en acquérir un plus global ; il faut tenir compte de l’expérience du vécu pour un nouveau voyage mental ; nous devons tenir compte de la mémoire sémantique, autobiographique pour faciliter la réflexion propective ; à quoi sert la mémoire si ce n’est à mieux planifier l’avenir en se méfiant des émotions ; nos mythes, nos légendes ne sont pas éternelles, ils ont vocation à évoluer, et surtout ils n’ont rien d’universel !

Yuri Berezkin : « Les mythes émergent et disparaissent, les récits se divisent, fusionnent, se superposent : c’est tout ce processus qui donne la complexité de l’histoire culturelle humaine »

(et aussi maçonnique) « il faut comprendre que les peuples n’inventent pas leurs histoires ; ils les copient » . La mort fut l’un des premiers thèmes à intéresser les humains. La phytobiologie a reconstruit l’histoire et a permis d’établir un arbre généalogique des mythes ; les origines des mythes sont dits théogoniques car ils expliquent l’apparition des dieux ; l’idée que le monde aille vers sa fin n’est pas universelle : (les dogmes de l’hindouisme sont cycliques ) sous terre, sur terre, au ciel, ou bien en soi, le mythe du paradis s’est construit peu à peu variant avec le temps et les cultures : jardin des délices ou état de félicité il nourrit toujours l’espérance des croyants . Le mythe d’Hiram est la notion de « valeurs » dans les civilisations ; c’est une couture sous forme de rapetassage dans la grande notion d’internationalisme ou d’universalisme. Les mythes sont par définition des récits imaginaires, que ce soit dans la société civile ou en maçonnerie : il convient de sacraliser le pouvoir, de réécrire le mythe pour mieux régner !  Les peuples anciens, surtout les Amérindiens avaient devancé l’esprit des « lumières » 

Le kybalium : « il existe, au-dessus de toute les autres , une philosophie éternelle , dont l’origine se perd dans la nuit des temps » « c’est de ce principe immuable que traite le kybalium, c’est lui la source même de toute la philosophie hermétique »

En voici quelques extraits :

« En général le privilège de voir plus avant que les autres se paye cher sur cette terre »

« C’est la science ancienne seule qui, synthétique de sa nature, de son essence, de sa substance même, nous offre la possibilité de nous arracher aux griffes du Sphinx » « c’est-à-dire Science de Dieu et le dire Art sacré »

« Ces doctrines, dans leur ensemble, embrassaient tous les rapports de l’homme avec la nature, et leur pratique rendait l’initié roi de l’univers matériel d’où royal ».

« Toutes les calamités que nous subissons ne sont pas sans remède : elles sont le résultat direct de nos contraventions insouciantes aux lois de la nature » !!!

« Les lèvres de la sagesse sont closes excepté aux oreilles de la raison »

« Le tout est esprit ; l’univers est mental » « rien ne repose, tout remue, tout vibre »

« Derrière l’univers du temps et de l’espace se cache toujours la réalité substantielle la vérité fondamentale »  « L’univers est mental ; il est contenu dans l’âme du tout »

« S’il est vrai que tout est dans le tout, il est également vrai que le tout est dans le tout. Celui qui comprend parfaitement cette vérité possède  déjà un grand savoir »   « Rien ne repose ; tout remue ; tout vibre »  «  Tout est double, toute chose possède des pôles ; tout a deux extrêmes ; semblable et dissemblable ont la même signification ; les pôles opposés ont une nature identique , mais des degrés différents ; les extrêmes se touchent, toutes les vérités ne sont pas des demi-vérités ; tous les paradoxes peuvent être conciliés »  « IL y a un genre en toutes choses ; tout a ses principes Masculin et Féminin ; le genre se manifeste sur tous les plans ».  « Le rythme peut être neutralisé par une application correcte de l’art de la polarisation » « La vraie transmutation hermétique est un art mental » « Le tout est esprit, l’univers est mental ».

Les notions et les enseignements du mythe d’Hiram sont le juste pendant du mythe biblique, hébraïque et chrétien , du jardin d’éden par ses valeurs bafouées ,nécessitant la repentance et la réparation pour accéder au bonheur ou au paradis .

Prévoir et comprendre :

Souvent la prédiction est tardive et purement rétrospective : ex = mythe du patriarcat. L’archéologie a prouvé le contraire ; se cantonner à la vision de Rousseau pour penser l’humanité nous tourne vers le passé ; la question du mythe dans la bible est une longue et douloureuse histoire elle est une des multiples formes d’expression le quel nous livre au mal par le péché originel, il se lit par la gématrie ; 
Le mythe maçonnique en découle mais a évolué grâce au G.O. avec la « liberté absolue de conscience » mais est-il évolutif marquant une avancée sociale ?

Qu’entend-t-on par tradition ? Dans le mythe comme ailleurs, peut-on envisager une forme de rupture ou d’évolution ? Ne convient-il pas de s’inspirer des autres cultures, surtout les plus anciennes ou celles de civilisations différentes ? L’occident n’est pas le centre du monde universaliste ; selon Johann Chapoutot « la fin des mythes du XXème siècle est une bonne nouvelle » les grands récits politiques du siècle passé, véritables religions séculaires ont dépéris, mais le besoin du religieux survit à travers de nouveaux mythes comme le complotisme ; il en est de même pour les idéologies qui deviennent des forces obscures sans dieux et sans diable.  Que proposent les maçons ?

Toujours des références aux anciens temps avec des mythologies de l’occident, pour ne pas dire Judéo-chrétiennes ; machistes ne faisant jamais référence à la féminité, non universaliste ; comment servir de référence aux temps de la mondialisation, de la culture généralisée, des techniques envahissantes et mercantiles ? Nous devons créer un autre « évangile » y inclure nos « valeurs » s’en tenir à l’humain, peut-être savoir qu’ici, il y aura une fin (le soleil n’est pas éternel) …. ce qui conditionne et modèle le mode de vie ; l’humain lui-même et la société ; si nous voulons être universalistes, y inclure les mythes prédominants des autres civilisations ; car, la terre rétrécit les distances diminuent et les communications augmentent ; comment avec ces conditions rester une référence, un exemple ? Il serait peut-être temps d’y penser, et de repenser l’humain et l’humanisme républicain.

Mais, faisons-nous confiance à Pascal : « le vrai universalisme se moque de l’universalisme » certes Pascal ne vivait pas à l’époque de la science-fiction ! Laquelle est aujourd’hui partout, et ses images s’imposent à tous les esprits. Que penser des algo rythmes nouveau chant des sirènes et de la liberté de penser, ainsi que du transhumanisme qui souhaite tuer la mort ou reconstituer le génome humain ; il n’y aurait plus d’humanité ni de responsabilité ni d’identité. Méfions-nous d’une mythologie revisitée qui cherche à partir des dieux et des héros anciens à créer une pop-culture ; si nous voulons sauver notre espèce, nous serons obligés de nous lier de par notre fragilité ; de tous les êtres vivants nous sommes les seuls à savoir que nous sommes nés et que nous allons mourir : c’est pourquoi nous « mythologisons » le passé ; reste à  créer une mythologie commune du passé , et, à rester humains.

Relations sociales et maçonniques :

Il ne me paraît pas contestable que la maçonnerie s’inscrit dans une relation intime avec la société.

Homo sapiens n’est pas toujours clairvoyant, on arrive au goulot d’une société civilisée. 

Carpe diem (cueille le jour présent sans te soucier du lendemain) NON ! = carpe minutam !

Le futur n’est ni prévisible ni prédestiné.  Nous vivons des siècles après nos statuts, l’univers matériel dans lequel nous vivons nous fait entrevoir un nouvel humanisme détaché du vieux temps mythifié …...mais, rien ne se produit de différent du temps que nous vivons, de l’espace psycho étique où nous sommes.Nous devons faire preuve d’humilité face au système dans lequel nous vivons. Le présentisme exacerbé crée un mal de vivre. L’accès à de nouvelles connaissances nous amène à changer de point de vue ; l’anticipation devient une nécessité, un impératif ; son défaut, un manque de vigilance, une faute ; la démocratie participative a dégénéré en oligarchie pure ; il y a altération de la conscience de soi-même et des autres. Nous ne sommes sûrs de rien ; sauf que les croyances, mythes, légendes des autres civilisations sont distincts : l’humanisme défini n’est plus valable ! Nous ne devons pas confondre identité et appartenance : qui sommes-nous ??   Des théologiens ; des métaphysiques ; des scientifiques ? Prenons distance avec nos émotions. Nos conceptions ne sont pas les mêmes en Europe, en Asie, en Afrique, en Amérique ou ailleurs ; d’où la question : qui suis-je ? Nous avons été formatés par les légendes, les dieux, les fées, les démons, les mythes imaginaires, nous évoluons ; notre « réalité » est en lien avec le réel de la société et de la nature. L’ecclésiaste : 

« il y a un temps pour » … comprendre l’humain , il n’est pas légitime de se limiter à l’histoire humaine ; doit-on y inclure la nature ?  La malléabilité cérébrale permet qu’existent des types de cerveaux différents ; notre cerveau ne travaille pas seulement avec notre sensibilité, nos émotions, mais, avec ce qu’est le monde extérieur existant ou virtuel ; c’est normal, la « norme » vient du latin « norma » = équerre. Alain Bertoz : « l’anticipation est une fonction fondamentale du vivant ; peut-être la plus importante » Souvent la prédiction est bien tardive et purement rétrospective »

 

Homo sapiens a dû se construire pour exister dans sa vie, donc évoluer…. Où l’entropie nous conduit-elle ? Car tout aura une fin ; mais, sous quelle forme ? Peut-on stabiliser notre état ? Le robotiser ? « « Le dataïser ? » La civilisation est le produit de l’évolution culturelle, en quoi la maçonnerie peut-elle l’y aider ? Redonner au mot sagesse et connaissance une valeur face à technologie ; on parle beaucoup d’homéostasie sociétale ; la maçonnerie doit-elle devenir une nouvelle religion sociale ??                     

En conclusion je citerai Raymond Aron et Spinoza ; l’un avait écrit : « la vie des nations (et des hommes) demeure semblable à l’état de nature, elles restent marquées par les rapports de forces » Et l’autre : « les gros poissons estiment avoir le droit de manger les petits »   

V.M. j’ai dit


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